« Russe à l'intérieur, français à l'extérieur » ..
« Un prénom pour la vie » .
« Je passe de Polina à Pauline. J'adopte un « e » en feuille de vigne. Polina à la maison. Poline à l'école .
Dedans , dehors , dedans , dehors » .
On a envie de citer de nombreux passages de ce récit joyeux à l'insolence salvatrice .
« Oui , un prénom c'est pour la vie » assène t- on aux tourmentés de la parentalité…..
« Ce que je veux moi, c'est porter le prénom reçu à la naissance » .
Eh ,bien non, on va voir ce qu'on va voir : ainsi s'exprime la petite Poliina, née à Moscou en 1989 , qui a quitté définitivement son pays après la chute de l'URSSS.
Elle devient Pauline à Saint - Étienne en 1991.
L'administration française est retorse , obtuse , intolérante .
Devenue adulte , Polina lui tient tête .
Aujourd'hui elle veut rayer Pauline des registres : la procureure de Bobigny le lui refuse ,au prétexte que ce truc de voyelles compromettrait peut - être sa bonne intégration. républicaine .
Risible , ce début du récit …
Face à tant d'absurdité la jeune femme « tient » sa langue une première fois en s'empêchant d'agonir d'insultes une magistrate dans les deux langues : russe et français .
Le récit qu'elle nous offre de son combat , intelligent , drôle qu'elle a dû longtemps, très longtemps Re
tenir sa-langue. .
: Silence sur le russe. À oublier , n'est ce pas ?
Silence sur le français , à perfectionner absolument .
Que devient une langue que l' on contient ? .
Mais pourquoi les prénoms génèrent - ils tant d'ennuis , d'incompréhension ? Tant de crispations ? .
Elle nous conte les souvenirs de son transfuge linguistique avec fantaisie et allégresse ,tendresse et dignité, inventivité , : renoncements petits et grands , échanges entre les cultures.
Premier MC DO en Russie , bêchage de la datcha, puis première « raklete » en France ,entrée en « materltchik » dans un esprit qui sent « le parapluie mal sèché et la peau de lait bouilli »
Des mots qu'il faut conquérir ! .
Comment se construit l'identité d'une petite fille exilée ? .
La France Terre d'accueil ? .
Une vie tiraillée entre deux langues et deux pays.
« Avec des maux de gorge , la langue qui la gratte pendant la nuit : « Je tousse un peu, je grogne , je pousse quelques sons aspirés ,gutturaux. Quelque chose se passe . Ça fait du bien , c'est un trop plein de Russe resté coincé pendant la materltchik ou bien c'est le français qui s'installe et se met à l'expulser ? » .
Des mots et des pages pétries de pudeur et d'amour à propos de sa famille , sa soeur , ses parents , ses grands - parents .
Sa mère : « Ma mère aussi veille sur mon russe comme sur le dernier oeuf du coucou migrateur . Ma langue. Son nid. Ma bouche , la cavité qui l'abrite : elle surveille l'équilibre de la population globale , le flux migratoire, les entrées et sorties des mots russes et français » .
Un premier ouvrage joyeux , tendre et frondeur ,créateur, chaleureux , original, agréable, pétri d'humour et de dérision , de fantaisie, ponctué de renoncements et de pertes , de douleurs , de deuils petits et grands , avec visite inopinée de sons , de « son accent » revenu lui demander des comptes comme « de la soie qui plie ici et là et qui pourrait plisser ailleurs » ….
Ah, le prénom des gens ! Un vrai sujet très peu traité !