Citations sur Respire... (95)
Dans le cadre universitaire, il n'y a pas de physicalité. Le principe est - des esprits, pas des corps. (p.327)
Ce n'est pas notre souffrance, mais la souffrance des autres qui nous détruit. Pas notre mort que nous redoutons, mais la mort de ceux à qui nous ne souhaitons pas survivre. (p.293)
Pour être une bonne veuve, comme pour être une bonne épouse, il faut apprendre à mentir de façon convaincante. (p.273)
Elle avait douté tout en étant pleine d'espoir. Car douter, c'est espérer. En l'absence de doute, il ne peut y avoir d'espoir. L'espoir est ce qui nous fait le plus souffrir, sa veille à l’hôpital lui en avait laissé le souvenir cruel. (p.248)
Un peu contrariée d'avoir perçu un tremblement de vantardise dans ta voix. Comme si vanter les qualités d'un mari (défunt) pouvait rendre la perte moins horrible? (p.186)
Quand "soins palliatifs" est prononcé, on reconnaît - il n'y a pas d'espoir.
Pas d'espoir. Les mots sont obscène, indicibles. Être sans espoir, c'est être sans futur. Pire encore, pour reconnaître être sans futur - il faut avoir "abandonné". (p.137)
S'il n'y a personne pour nous admirer, existons-nous?
Et le corollaire: S'il n'y a personne pour nous aimer, méritons-nous d'exister? (p.61)
Sapez la fierté d'un homme, vous risquez de blesser sa vanité. Et un homme est sa vanité. (p.50)
Sommes-nous des enfants au plus profond de nous-mêmes, dans nos souvenirs les plus profonds, unis par notre terreur de la perte absolue? (p.15)
Tu reconnais immédiatement le dieu charognard Ishtikini avec son crâne grotesquement disproportionné, ses yeux fixes, son ventre gonflé et son pénis filiforme en érection. La plus grande représentation de ce dieu-démon est une statue, haute d'une trentaine de centimètres, curieusement accroupie genoux pliés; la plus menaçante est plus petite, faite de métal de récupération et d'éclats de verre, dotée de petits yeux de fouine qui semblent bouger dans leurs orbites et fixer l'observateur. Un autre Ishtikini, taillé dans du bois de bouleau, a la même expression malveillante que la sculpture que tu as dissimulée sous le lavabo de la salle de bains.
Tu ne peux t'arrêter de grelotter, de trembler. Dans une description d'Ishtikini tu apprends ce que tu ne savais pas jusque-là- que le dieu-démon « insatiable» a le pouvoir de s'enfouir dans des corps vivants à la façon des chacals, dévorant cerveaux, cœurs, entrailles, parties génitales.
Ishtikini (dieu charognard, dieu Crâne des Indiens pueblos zuni) est à la fois dieu et démon : appétit vorace jamais satisfait. Skli est représentée par plusieurs figures lubriques, dessins et sculptures, plus grotesques les unes que les autres. On se dit que seul un homme a pu créer ces visions obscènes de la « femme » - une bouche hurlante en O, des seins pareils aux mamelles d'une truie, un vagin grossièrement sanglant. Il est donc étonnant de découvrir une BD d'une artiste navajo féministe contemporaine qui présente la déesse-démon comme une sorte de Wonder Woman, une héroïne affublée d'énormes lunettes noires de marque, aux lèvres rouge vif, aux seins comme des obus, nue, exception faite de cuis- sardes de cuir aux talons de huit centimètres qui montent presque jusqu'à l'entaille sanglante de l'entrejambe - un spectacle audacieux !