Respire...

Tu sens la tension du cœur de ton mari. Son cœur solide, durable, plein d’espoir. Son désir de vivre, de persévérer dans son être. Tu dois le tenir étroitement ! Pour la durée de sa vie et au-delà.
Transfert en soins palliatifs. Un tournant de la route menant à un cul-de-sac que vous n’aviez prévu ni l’un ni l’autre.

Ce n’est pas une respiration régulière, une respiration de métronome, automatique, facile, mais plutôt une respiration entrecoupée, et dans les interstices de cette respiration il y a des pauses, des césures, comme ces faux pas dans les rêves qui vous font tituber, trébucher, tomber d’une marche ou d’un coin de trottoir et vous réveillent dans un sursaut.

Tu implores avec désespoir. Avec un espoir enfantin, avec déraison. Tu supplies ton mari Respire ! Ne cesse pas de respirer !
Tu supplies comme tu n’aurais jamais imaginé supplier un jour au chevet d’un homme malade, étreignant ses mains qui (tu le notes, tu te rappelleras longtemps l’avoir noté dans un transport d’espoir naïf) sont aussi chaudes que les tiennes et qui (crois-tu) ont une réaction imperceptible – quand tu presses ses doigts, il semble répondre, faiblement, comme quelqu’un qui aurait l’esprit ailleurs.

Oui bien sur je prefererais de loin etre morte, mais il se trouve que je ne le suis pas. (Page 207)

Pourtant, tu ne l aurais pas imagine : ton mari ne porterait plus jamais ses propres vetements.
Pourtant, tu ne l aurais pas imagine : ton mari ne t appelerait plus jamais de son portable. (Page 56)