Dans
Confessions d'un gang de filles JCO tel un caméléon devient Maddy, alias Monkey. La mémoire du groupe, celle qui fait les comptes rendus. Et l'écriture s'en ressent c'est ce qui m'a frappé en premier. JCO a complètement adapté son style qui n'est en rien comparable aux autres livres que j'ai pu lire d'elle. C'est différent mais toujours d'un aussi bon niveau. Bluffant.
Tantôt Maddy emploie la première personne du singulier, tantôt elle emploie la troisième personne du singulier, comme si ce qu'elle avait vécu il y a des années lui semblait maintenant relever d'une autre vie, d'un rêve. Comme si celle qu'elle avait été n'était désormais plus.
Maddy (Monkey ou Killer) Rita (Red ou Fire), Goldie (Boom-Boom), Lana, et surtout Margaret (Legs), cinq gamines sans intérêt, dont tout le monde se fout. le système éducatif, la société, leurs parents. Personne ne s'intéresse à elles.Elles sont pauvres et se sont des filles, c'est la double peine. Personne ne voit aucun atout chez ces paumées, sauf Legs qui elle voit autre chose. Elle voit leurs qualités et leurs défauts, elle voit leurs peines, leurs douleurs, leurs forces, leurs faiblesses, leurs âmes.
On parle toujours de fraternité, le mot sororité est bien moins connu. Pour cause, la société a tendance à cantonner les femmes aux espaces clos. Aux hommes la camaraderie, les bars, les cercles, les clubs, aux femmes la maison et la famille. Legs va faire voler tout ça en éclats et mettre la sororité au centre de son monde et de celui de ses soeurs. Las de voir celles-ci malmenées par une société patriarcale faite par et pour les riches elle va créer son gang : FOXFIRE. Une pour toutes et toutes pour une. Leur monde, leurs règles et après elles le déluge !
L'idée est belle pétrie d'idéalisme, de soif de justice, d'une soif inextinguible d'amour et de solidarité. le gang compense tout ce que la vie leur a refusé et que la société n'entend pas leur laisser une chance de posséder. Ce qu'on ne leur donne pas elles l'arrache. Elles punissent, se vengent, rendent justice, aident les faibles. Legs a une idéologie, un idéal d'une société égalitaire. Un communisme qui n'est pas nommé, qui lui a été transmis par un prêtre défroqué. Un vagabond céleste.
Ces filles ont le coeur pur et la rage de celles qui n'en peuvent plus de se faire dicter leur conduite. Elles en ont assez d'être des proies sexuelles ; de la chair que les hommes convoitent. Marre qu'on leur demande de se faire oublier, qu'on leur impose de ressentir de la honte pour ce qu'elles sont, pour qui elles sont. Marre de s'excuser d'exister. Tout ça c'est fini ! Elles vont relever la tête, regarder le monde droit dans les yeux faire entendre leurs voix. Une rébellion, une nécessité, pour enfin exister sans se trahir. Elles protègent les autres et sont protégées. le monde ne peut plus leur faire de mal. Si seulement...
Mais voilà la vie est cruelle et aussi louable soit l'idée de départ, l'idéalisme va se heurter à la dure réalité du monde. Elles ne lâcheront rien, leur idéal d'une communauté de femmes basée sur l'entraide c'est tout ce qu'elles ont. Ce combat est cruellement beau. Autant de passion ça bouleverse le coeur mais ça mène irrémédiablement au drame.
Ce livre est une ode à la liberté. Une critique de la société américaine des années 50 avec son racisme à peine dissimulé et son mépris des classes sociales ouvrières et des pauvres. JCO ose mettre en avant une vision idéalisée du communisme et critiquer ouvertement le capitalisme exacerbé des États-Unis. Culottée la dame !
J'ai souri avec FOXFIRE, j'ai eu le coeur brisé avec FOXFIRE, je me suis indignée avec FOXFIRE, j'ai enragé avec FOXFIRE, j'étais avec elles, j'étais l'une d'elles et elles m'ont émue par la sincérité de leur combat face à l'injustice du monde.
Quoi qu'il se passe, quoi qu'il advienne personne ne pourra leur enlever ce que FOXFIRE a révélé d'elles, en elles.
Dans ma tête j'entendais
Lily Allen chantant gentiment mais avec conviction Fuck You. J'ai pensé à Telma et Louise, à Nous rêvions juste de liberté et je me suis dit que non vraiment ces gamines ne sont pas des personnages. Je veux croire que cette histoire était vraie et que le cri de rage poussé par Legs et ses soeurs résonne encore dans les mémoires des habitants de ce bled paumé qui accueilli jadis FOXFIRE.
FOXFIRE BRÛLE ET BRÛLE !
Merci Nico de m'avoir accompagné dans l'aventure, je sens que bientôt on aura toutes nos copines de LC dans le gang !