Coup de théâtre à Westeros, ! le roi Joffrey Baratheon a trouvé la mort au cours de ses noces avec Margaery Tyrell, son -présumé-assassin Tyrion Lannister a pris la fuite tout comme son épouse Sansa Stark... autant dire que l'instabilité risque d'être au retour dans le continent alors que la guerre des Cinq Rois vient à peine de s'achever dans la douleur. En attendant, c'est son frère Tommen qui est en charge, avec sa mère la reine douairière Cersei qui compte garder le pouvoir auprès d'elle... signe que le chaos va recommencer, dans le Nord, le roi Stannis Baratheon s'est installé auprès de la Garde de Nuit pour y retrouver ses forces auprès du Lord Commandement Jon Snow et dans le Sud, la famille royale de Dorne les Martell réclament vengeance pour le valeureux Oberyn massacré précédemment par Gregor Clegane. Et comme si cela ne suffisait pas, dans les Iles de Fer, le roi Balon Greyjoy a aussi trépassé et les Fer-nés ont choisi comme successeur du trône son frère qu'on pensait disparu depuis longtemps et qui vient tout juste de revenir pile à ce moment-là, un type réputé épouvantable et démoniaque au souhait, le borgne Euron Greyjoy ou Oeil-de-Choucas qui veut envahir les côtes du Bief... autant dire que la pagaille est encore une fois de mise et que le royaume aura du mal à panser les plaies du conflit avec tous ces changements en cours dans la situation actuelle. Un cafouillage général que vont ressentir plus ou moins des personnages sur la route comme Brienne qui tente d'honorer sa promesse malgré la mort de Caitlyn en traversant tout le Conflans ou Arya qui s'entraîne à devenir assassin dans Braavos..
Nous revoilà plongé de nouveau dans les Sept Royaumes dans ce quatrième volet de G.R.
R Martin, un tome bien singulier puisque la plupart des personnages iconiques sont absents ou n'ont pas leur point de vue ici comme Daenerys, Jon Snow où encore Tyrion. A la place on se concentre sur certains énergumènes dont on n'avait jamais eu leur avis jusque-là dans le récit voire même de nouveaux dont on entendait vaguement parler comme les Martell ou encore les Greyjoy à l'exception de Theon. Cela donne une nouvelle saveur à l'histoire qui nous fait explorer ainsi d'autres recoins.
Ainsi on découvre surtout l'exotique Dorne tant évoqué dans les précédents tomes, le septième royaume le plus rétif et indépendant du continent, une contrée brûlante et haute en couleur dirigé par les bouillonnants Martell, une maison tempétueuse ayant dans le sang la rébellion et l'insoumission au passé bien chargé (ayant été pendant longtemps le seul clan à ne pas reconnaître la suprématie des Targaryens) qui ne compte pas être délaissée dans les affaires de Westeros. On retourne aussi vers les Iles de Fer bien agitées par le décès d'un souverain et l'élection d'un nouveau dans un bel fracas au milieu des vagues salées de la mer, nous invitant au plus prés des coutumes politiques de ces vikings qui veulent eux aussi leur autonomie et ne plus se soumettre aux lois des Terres de la Couronnes, et revenir au temps des pillages et de la domination des Sept Couronnes. Voyage aussi garanti à la cité d'Essos la plus fascinante qu'il soit, Braavos, qui se distingue d'office par son colossal Titan protégeant les portes de la ville, Braavos ce mélange de Venise et de Rhodes au commerce florissant d'où la Banque de Fer menace par ses dettes et règlements de compte le continent de l'ouest et d'où la secte inquiétante des Sans-Visages affûte ses lames pour la moindre victime. Les Eyrié sont aussi au programme, nous revenons au coeur du château aérien des Arryn mais qui baignent dans l'atmosphère délétère des manipulations. Et toujours le Conflans et ses terres fluviales qui se remettent mal des désastres de la guerre.
Les petits et les grands du royaume nous donnent leurs voix qui détonnent parfois de ce qu'on a pu voir précédemment : ainsi on entre enfin dans l'intimité de la détestable Cersei Lannister, une garce rongée par la paranoïa générale et dont on observe lentement mais sûrement une chute implacable avec sourire, mais aussi une mère attentive sur son fils restant et endeuillée par la perte de Joffrey. Brienne a droit à ses chapitres, la courageuse chevalière déterminée à retrouver les filles de sa défunte maîtresse et observant malgré elle la reconstruction pénible du Conflans, prenant à sa charge le jeune Podrick qu'elle initie en chevalier. Arya nous impressionne, n'ayant point perdu ses roublardises et son dynamisme se mêlant facilement aux moeurs braavien mais que dévore peu à peu la culpabilité d'avoir abandonné sa famille et qui se salit les mains. Sansa devenue Alayne Stone quant à elle s'immerge dans la froideur des Eyrié, perdant peu à peu son innocent sous l'influence du machiavélique Littlefinger et apprenant à la dure d'être une adroite arriviste. Mais lumière faite surtout concernant les protagonistes des Iles de Fer et de Dorne : pour le premier, Asha Greyjoy se distingue par son caractère fort une guerrière qui veut se faire reconnaître en reine malgré son sexe qui la disgracie dans une société masculine, Aeron son oncle est le prêtre à la foi inébranlable tout porté par la spiritualité du Dieu Noyé mais s'inquiétant des enjeux en cours dans et Victarion l'autre oncle un vrai combattant aimant voguer et piller tout mais traumatisé par un deuil profond dont il est l'instigateur. du côté de Dorne, on rencontre les membres de la famille Martell, le souverain handicapé Doran qui derrière son image de vieux sage cache une habilité aux intrigues, sa fille la charmante et piquante Arianne Martell. Samwell et Jaime sont aussi de la partie, le premier ayant des responsabilités à assumer, ayant des ordres confié par son Lord commandement et ami et devant faire face aux déconvenues mais voyant aussi son amour envers Gère se renforcer et bien sûr Jaime qui s'humanise davantage à nos yeux, voyant le vrai visage de son amante de soeur et tentant de retrouver les honneurs qu'il a perdu.
Dans cette galerie on assiste aux modifications importantes, liés surtout aux morts car ce n'est pas pour rien que ce tome se nomme
Le Festin des Corbeaux : comme beaucoup de gens importants viennent de clamser, les charognards sont de sortie pour grappiller les restes. Avec le décès tragique d'une partie des Stark et des Tully, les cartes sont redistribués dans le Nord et le Conflans avec de nouveaux dirigeants qui comptent effacer leurs prestiges. Avec le trépas d'Oberyn tout Dorne se lève, voulant laver dans le sang des rancunes passées. Mais c'est sans conteste dans les Iles de Fer que le feu aux poudres s'enclenche avec l'élection d'un turbulent démon à visage humain qui rejoint la cour des affreux, j'ai nommé Euron Greyjoy, un pirate féroce qui amène plus de questions que de réponse sur son retour, doté d'objets et d'atouts pouvant radicalement basculer Westeros à ses griffes, à suivre de très près assurément. En contraste, Port-Réal s'envenime davantage et les Lannister pourraient bien perdre leurs crocs, avec l'avènement des Tyrell et la montée en puissance de la Foi Militante qui compte moraliser une société décadente par la force.
Comme toujours, qui dit chaos dit forcément des cataclysmes à foison et qu'on assiste avec effroi. En suivant Brienne, nous découvrons les terres saccagées par la guerre et porteurs de lourds traumatises, avec notamment les lieux détruits et l'errance d'orphelins : il n'y a qu'à lire le poignant sermon du septon Meribald sur le sort des hommes recruté dans l'armée et qui finissent en briguant après avoir tout perdu suite aux horreurs de la guerre. Euron couronné, nous découvrons l'ampleur des pillages avec une mise à sac terrible des iles Bouclier et de la maltraitance de la maison Houett aux mains de leurs agresseurs. Les conflits de religion sont aussi de mise, avec l'influence de plus en plus terrifiant de Melisandre sur les affaires de la Garde de Nuit où encore la renaissance d'un culte fanatique sous le nom de la Foi Militante que tente d'allier Cersei à ses plans mais qui risquent de l'entraîner plus bas que terre. le surnaturel ici est bien rare sinon inexistant, pas d'Autres entre autres.
La vengeance et le ressentiment dominent le récit mais aussi le courage et la survie, chacun tentant de faire ce qu'il peut dans les bouleversements qui se préparent. Un quatrième tome toujours aussi réussi, qu'on peut critiquer par de grandes longueurs (notamment ceux de Brienne qui sont effectivement interminables) mais toujours palpitant à suivre.