Quelle claque et quel talent ! En moins de 30 pages Malte nous donne à lire un texte noir, très noir. En fermant ce petit livre j'aurai aimé m'y plonger encore un instant pour retrouver l'écriture éblouissante d'un écrivain qui n'a pas besoin d'un pavé pour toucher ses lecteurs.
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D’abord, elle les a obligés à se déshabiller. C’était le soir, en plein hiver. Dehors, la terre gelait et dedans ce n’était guère mieux. Le hangar n’était pas chauffé. Ils se sont retrouvés nus, les deux, complètement nus, debout devant elle, à essayer de se cacher derrière leurs mains. Pudiques, tout à coup. Comme si elle ne les avait jamais vus. Ils tremblaient comme des moineaux. Comme des kikiwis, elle disait. Mais c’était autant la peur que le froid. Ensuite elle les a forcés à se fixer les chaînes aux pieds. Peut-être qu’ils ont commencé à se douter de ce qu’elle avait en tête parce qu’ils se sont mis à la supplier, à lui demander pardon. On ne les reconnaissait plus. On n’aurait pas dit que c’étaient eux. Elle, ça ne lui faisait même pas du bien de les voir comme ça. On aurait pu croire qu’elle en aurait tiré un certain plaisir, mais non.
A ma connaissance les indigènes n’ont supplié personne de venir les coloniser. A ma connaissance il n’existe pas encore d’instrument pour mesurer le degré d’appartenance à la nation. Une sorte d’échelle, établie en fonction de certains critères et selon laquelle on serait un peu français, beaucoup français, français pur jus. AOC. Gloire à qui obtiendra le fameux label. » p 10 a 12
Elle n’avait jamais réussi à les différencier. Il y a des jumeaux plus ou moins ressemblants mais ceux-là étaient comme le diable t son reflet. Inséparables. Indissociables. A ses yeux ils n’étaient qu’une seule et même créature, un monstre à deux têtes et deux sexes et huit pattes, huit énormes tentacules velus. C’est ainsi qu’ils entraient dans ses cauchemars. » p 6 a 11
Respect pour l’animal. N’oublie jamais qu’il meurt pour que toi tu puisses vivre. N’oublie jamais ce que tu lui dois. Si tu ne respectes pas celui qui donne sa propre chair pour te nourrir, c’est que tu ne te respectes pas toi-même. Alors va bouffer des racines. Va bouffer des cailloux. La vraie boucherie n’est pas celle qu’on croit. » p 11 a 13
Il ne suffit pas d’être français pour ne pas être étranger. C’est ça que Tamara n’a pas compris. Ce qu’elle n’a pas bien mesuré. Celui qui vient du village d’à côté, c’est un étranger. Celui dont le père, le grand-père et l’arrière-grand-père n’ont pas pataugé dans la même boue que vos ancêtres, c’est un étranger Celui qui n’a pas la peau rose, c’est un étranger. Tout ce qui est différent est étranger. Et quand en plus l’étranger est une étrangère, alors ça fait beaucoup. Ça fait trop. On ne parle plus de handicap, dans ces cas-là, on parle d’une vraie croix. Dès le départ elle courait droit au calvaire, Tamara. » p 14 a 4
Cet épisode a été enregistré avec des patients hospitalisés au Centre d'Activité Thérapeutique et d'Eveil à l'hôpital San Salvadour de l'AP-HP situé à Hyères à l'automne 2023.
Le livre lu dans cet épisode est « Ne le dis à personne » d'Harlan Coben paru aux éditions Pocket. Avec la participation de Baptiste Montaigne, champion du grand concours national de lecture « Si on lisait à voix haute » 2023 pour le générique, Benoit Artaud à la prise de son et montage.
Remerciements à Marie-Thérèse Poppe, éducatrice spécialisée au Centre d'Activité Thérapeutique et d'Eveil à l'hôpital San Salvadour, Paul Grégoire, éducateur spécialisé au Centre d'Activité Thérapeutique et d'Eveil à l'hôpital San Salvadour et Isabelle Michel, cadre socio-éducatif de l'hôpital San Salvadour à Hyères, ainsi qu'à Marcus Malte, écrivain.
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Le Centre national du livre lance un programme en direction des hôpitaux, Mots parleurs, en partenariat avec l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Cette action s'inscrit dans la continuité des actions menées pour transmettre le goût de la lecture à tous et notamment aux publics éloignés du livre.Définitivement tournée vers la jeunesse, cette action vise à conjuguer lecture, écriture et mise en voix. Les adolescents et les jeunes adultes, en collaboration avec le personnel hospitalier, sont ainsi inviter à choisir un livre parmi une sélection, en lien avec la thématique de l'édition 2023 des Nuits de la lecture : la peur.
Pour cette première édition 2023, six établissements de l'AP-HP participent. Quatre établissements sont situés en Île-de-France et deux en région (Provence-Alpes-Côte d'Azur et Nouvelle-Aquitaine). le projet se déroule de fin septembre 2023 à début janvier 2024. A partir d'un ouvrage sélectionné avec le personnel hospitalier, les adolescents et jeunes adultes sont amenés à choisir des extraits de textes pour les lire et les commenter. Sur la base du volontariat, Mots parleurs propose ainsi à des groupes de cinq à dix patients accompagnés de personnel soignant d'écrire et d'enregistrer leur production, au cours de six ateliers répartis dans différents hôpitaux. Ils débattent pour élire l'ouvrage qui constituera la matière de leur travail.
Afin de les guider dans la sélection des extraits, dans la rédaction et dans l'enregistrement du podcast, ils sont accompagnés par un écrivain ou un comédien, ainsi qu'un technicien du spectacle. Ce podcast, d'une trentaine de minute, sera ensuite mis à disposition de tous les patients et personnels soignants de l'AP-HP.
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