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EAN : 9782021554281
192 pages
Seuil (05/04/2024)
4/5   6 notes
Résumé :
Dans les zones périurbaines autour de Bruxelles, la narratrice et son ami Alix passent leurs nuits sur des chantiers, à siphonner du gazole dans les réservoirs des machines pour gagner de quoi survivre. Cette combine clandestine les met au contact de toute une économie parallèle, avec ce qu’elle a de ludique, mais aussi d’inquiétant et de dangereux.

Un jour, Alix découvre un pipeline qui relie une raffinerie à un dépôt de stockage : ils vont pouvoir s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Pour quelques euros de contrebande, un jeune couple trompe la précarité de sa banlieue bruxelloise en siphonnant des réservoirs. Entre les flics qui les coursent, les concurrents qu'il faut prendre de vitesse et les victimes violemment revanchardes, ce qui n'était qu'un acte de survie, en même temps qu'il prend les proportions d'un gagne-pain régulier, devient aussi une addiction à l'adrénaline, une manière de battre en brèche l'immobilité morne et grise des marges sans perspectives. Lorsque Alix, le compagnon de la narratrice, a l'idée de fixer un robinet directement sur un pipeline, leur trafic prend une ampleur qui les dépasse bientôt, les menant droit à la catastrophe.


Ces deux-là ne sont pas de méchants bougres, juste deux âmes perdues dans un présent sans avenir auquel ils essaient tant bien que mal de subvenir au jour le jour, avec pour principal atout l'art de la débrouille. La débrouille et l'économie parallèle, c'est tout ce qu'il reste dans leur quartier, de la mère de famille désargentée au chauffeur Uber, en passant par les petits commerces et le garage du coin, pour espérer maintenir la tête hors de l'eau. Pour oublier l'absence de perspectives, il y a l'alcool et la défonce, et puis la flambe quand l'occasion s'en présente, pour la sensation de se sentir vivant au moins un moment.


Alors, quand leur petit commerce prospère, personne autour d'eux ne crachant sur quelques litres de carburant à pas cher, la transformation du liquide rouge et puant en un autre type de liquide sale mais trébuchant commence par leur brûler les doigts, puis, dans ce monde sans issue de la périphérie, finit par les enfermer dans une course mortifère. Il faut constamment accélérer pour ne pas se faire attraper, pour que les bidons ne stagnent pas comme autant de preuves. « Quand c'est immobile ça s'entasse. Quand c'est immobile ça panique et ça parle, et ça crée un autre flux bien plus connu : celui de la rumeur. » Loin des premières transactions discrètes entre voisins, les voilà qui alimentent des camions, puis bientôt des péniches. Avec désormais face à eux la criminalité organisée, ils vont apprendre que l'on n'échappe pas plus par le bas que par le haut à son destin de laissé-pour-compte.


N'hésitant pas à bousculer la syntaxe au gré d'une inventivité qui fascine autant qu'elle déconcerte, l'écriture nerveuse, aux brutalités poétiques, bouillonne, déborde, ruisselle à la manière d'un liquide sous pression, ses tourbillons tumultueux comme les soubresauts de vitalité piégés au laminoir des bas quartiers. Depuis ces lisières paupérisées frappées plus encore qu'ailleurs par les crises, elle dessine la métaphore d'une société contemporaine violente, qui préfère continuer de se griser de ses excès en se contentant d'expédients face à l'urgence énergétique et climatique, incapable qu'elle est de s'extraire d'un présent débouchant pourtant sur un avenir en forme d'impasse.


Un premier roman audacieusement incandescent, qui pointe notre obstination égoïstement court-termiste à danser malgré tout sur l'agonie de la planète : peu importe l'avenir, pourvu que l'on en profite encore un peu !

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Alors que le prix du gazole s'envole, celui-ci devient un produit de contrebande de plus en plus prisé. La narratrice, accompagnée d'Alix, tête brûlée ambitieuse, Tunis, compagnon taiseux, Fetnat, garagiste communautariste, F.K. dévoré par l'ennui, ou encore Roy qui dirige un chantier naval, va se retrouver embarquée dans l'économie parallèle du gasoil, où les véhicules sont siphonnés, le flux des pipelines dévié et les bidons d'essence trimbalés comme des sacs de cocaïne.

Porté par une langue aussi rêche que poétique, Pipeline gratte la corne du capitalisme, et en expose les extensions illégales, où chaque marché peut posséder sa face sombre, à savoir son propre marché noir. le roman démontre combien oeuvrer dans le marché noir constitue un travail au sein d'un marché standard, requérant main-d'oeuvre, logistique et partenaires commerciaux, pour des gains similaires à un job en CDI, faisant des personnes qui y officient moins des criminels, que les dindons de la farce du capitalisme, contraints de faire le même job que leurs homologues ancrés dans la légalité, avec la sérénité de l'emploi en moins, et la peur au ventre en plus.

Pour son premier roman Rachel M. Cholz fait preuve d'une personnalité hors norme, à la fois dans la forme et dans le propos. Ça illumine, ça pétille et ça crisse. Pipeline fait brûler ce qui jaillit des pages, tout en faisant jaillir ce qui brûle à l'intérieur des corps.
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critiques presse (4)
LaCroix
25 juin 2024
Dans une langue abrupte et follement inventive, Rachel M. Cholz met en scène de petits trafiquants de gazole opérant dans les marges du capitalisme contemporain. Un premier roman époustouflant.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LePoint
12 juin 2024
L'autrice belge raconte l'ascension de deux petits delinquants attachants, dansant sur les ruines d'un monde ou chacun est pret a tout pour sa dose d'essence.
Lire la critique sur le site : LePoint
LePoint
12 juin 2024
L'autrice belge raconte l'ascension de deux petits délinquants attachants, dansant sur les ruines d'un monde ou chacun est prêt a tout pour sa dose d'essence.
Lire la critique sur le site : LePoint
LeMonde
11 juin 2024
A l'heure de l'essence hors de prix, un couple de siphonneurs de réservoirs imagine de remonter à la source. Un premier roman inflammable venu de Belgique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Pour Alix, tout peut devenir un sujet de conflit. Il a une violence en lui, une violence sans mère. Y aller de force. Comme il est sorti. Comme il en partira. La meilleure façon de tuer Alix c’est d’être d’accord avec lui finalement.
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Quand elle danse, Rouge, elle balade un cerceau invisible autour de ses cuisses, puis de ses hanches. Chez elle, le cercle remonte, quand il tombe chez les autres. Et de plus en plus vite. Quand tu vois double ou triple tu peux presque le voir, le cerceau ; tu visualises le circuit de ses hanches bombées
dans le latex, puis les circuits du vide de sa peau qui la transforme en Saturne. Rouge c’est notre lumière à nous, quand elle te prend la tête par les cheveux et qu’elle sourit même si t’as le visage avalanche. Faut pas lui en vouloir à Rouge, si c’est la plus belle et que c’est notre vie. Rouge c’est notre Spectrum à nous, et elle en a passé, au spéculum, des teintes à demi vides pour mériter son prénom.
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L’huile donne une sensation de satiété sur le corps et
sur le palais. Sur le palais glisse la langue comme le
corps glisse dans une baignoire pleine d’eau chaude.
Le gras anéantit la langue qui ne se lie plus à rien.
Langue dehors, l’air est chaud. L’huile protège du froid
la langue et la fait glisser du menton jusqu’au nez.
La langue n’a plus conscience de sa contenance. Le
gras s’évapore comme elle glisse. Le carburant nour‑
rit comme il coupe la faim. Le carburant réchauffe en
brûlant le corps à l’intérieur.
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Ses sens se précisent tellement qu’il en finit irritable, mais c’est peut‑être ça qui transforme un chien en loup, quand son nez a oublié l’odeur de l’habitacle.
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