«Tout ce qu'il faut pour que le mal triomphe, c'est que les braves gens ne fassent rien.» (
Edmund Burke)
Histoire vraie : « Les Naufragés du Batavia » est plus que le simple récit d'une aventure maritime qui tourne à la catastrophe. C'est le compte-rendu de la folie d'hommes livrés à leurs pulsions les plus sanguinaires, à leur soif de pouvoir illimité. En 1629, le Batavia armé par la Compagnie néerlandaise des Indes orientales fait naufrage dans l'archipel des Abrolhos, au large de la côte occidentale de l'Australie. C'est l'une des naufrages les plus effroyables de l'histoire nautique européenne. L'histoire complète a été écrite par
Mike Dash en 2002.
Le livre de Leys est un petit chef-d'oeuvre de concision. Il expose un enchaînement de considérations mêlant l'histoire de la marine, des religions et de l'art, mais aussi la psychologie, tout ceci dans un style où la sobriété va de pair avec une grande finesse.
En une soixantaine de pages, il analyse tous les éléments qui ont permis le drame : la personnalité des différents acteurs, les conflits qui ont précédé le naufrage, les inégalités sociales sur le bateau.
Sans prétendre livrer une explication définitive à ce grand mystère que constitue l'attitude du protagoniste principal, on a souvent le sentiment de voir le mal lui-même à l'oeuvre, dans sa plus effroyable expression.
Au terme de cette interrogation,
Simon Leys évoque un bref séjour dans ces iles. Son constat est bouleversant : l'archipel où des centaines d'êtres humains ont connu l'enfer lui est apparu comme un paradis.
Du second texte, je ne dirai presque rien. Car trop d'émotion, souvenir d'un mien vieux pays, de mer, de marins, d'alcool. Sans concession à la vérité comme toujours avec
Simon Leys qui révèle ses qualités d'écrivain et son amour de la mer.
Il n'est pas inutile de rappeler qui est
Simon Leys : qui, avec "
Les Habits neufs du président Mao" et "
Ombres chinoises", fut le premier à faire voler en éclats le mythe maoïste, au début des années 70. Il démonta les rouages de la Révolution culturelle et exposa, à son détriment, les réalités du régime communiste chinois et devint objet de haine après avoir montré la nudité du roi.