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De la canicule de 1976 à la tempête de 1999, Serge Joncour nous replonge dans les années qui ont façonné notre présent. Tout ce qui préfigure les terribles moments que nous traversons en cette année cataclysmique qu'est 2020 est contenu dans cette prospection.
C'est à la fois terrible, tendre, nostalgique, plein d'espoir en le Dieu progrès, réaliste et triste…
C'est par le regard d'Alexandre, jeune agriculteur du sud-ouest, pétri de doutes, soumis aux pressions de sa famille, les Fabrier, attachés à la glaise du Lot, de ses ami(e)s, de sa difficile et contraignante profession, qu'on verra défiler les décennies, les occasions manquées, le choix des voies sans issue et des deux fois deux voies, et les espoirs déçus.

Joncour a réussi à me faire revivre mes 20 ans, il a réveillé les souvenirs enfouis de ma jeunesse militante, le Larzac, le super réacteur de Creys- Malville abandonné en 1997, l'immense joie de mai 81 et les espoirs déçus… les premières grandes surfaces, le veau aux hormones, la vache folle, Tchernobyl, les autoroutes, l'emploi à grande échelle des engrais et des pesticides, la transformation des villes, les périphéries bétonnées émaillées de ronds-points qui donnent le tournis…. Par un catalogue presque exhaustif et sans concessions de ces trente dernières années et de notre entrée dans une mondialisation mortifère, Serge Joncour nous dépeint avec réalisme un monde agricole en pleine mutation et nous donne à réfléchir regretter, ressasser dans un constat sans appel.


J'ai lu quelques beaux livres aux cours des interminables heures de confinement qui resteront la triste marque de l'année 2020, mais celui-ci, dont la construction particulière maintient le suspense jusqu'au bout, est d'une grande force et me hante depuis que je l'ai fermé.
C'est vraiment une réussite qui vient s'ajouter aux très réussis: l'écrivain national, l'amour sans le faire, Chien-loup...
Je m'en tiendrai à ces quelques lignes bien insuffisantes pour décrire ce très beau texte mais de brillants billets de babeliotes très doués détaillent le récit mieux que je ne pourrais le faire sur cette page.
J'ajouterai que Nature humaine entre dans mon top six Babelio 2020, une distinction beaucoup moins prestigieuse que le Fémina, je le concède mais tout aussi précieuse à mes yeux....
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C'est la prestation de Serge Joncour lors d'une récente table ronde au Livre sur la Place à Nancy qui m'a décidé à acheter (et faire dédicacer) "Nature humaine". J'avais bien apprécié la personnalité de l'auteur, son originalité, son discours, son humour pince sans rire ...

Voici donc la chronique d'une France qui change lors du dernier quart du vingtième siècle. Un récit qui s'effectue au travers de la vie d'une famille, les Fabrier, propriétaires d'une ferme aux Bertranges, dans le Lot. Plusieurs générations vivent sur place, grands-parents, parents, les trois filles, et le fils, Alexandre. Quand les soeurs ne pensent qu'à partir, Alexandre, lui, a une voie toute tracée : il devra perpétuer la tradition et reprendre l'exploitation familiale...

Il y a un vrai talent de conteur chez Joncour, beaucoup de bienveillance et de mesure dans son écriture. Ce récit est empreint de nostalgie pour des lecteurs comme moi, une balade très agréable de la fin des années 70 aux dernières heures du précédent millénaire. Avec le développement du téléphone fixe, des grandes surfaces, l'accession au pouvoir de Miterrand, l'émergence du nucléaire (et des défis que cette énergie pose)... et l'arrivée du minitel !

Mais cette histoire pose surtout la question du rapport de l'homme à la nature. le progrès, la quête du toujours plus, certes, c'est dans la nature humaine. Mais ce n'est pas sans danger, l'homme peut finir par ne plus rien maîtriser. Perdre le contact avec la nature dans une quête du profit. Alexandre en fera l'amère expérience, lui qui se voit imposer des choix dont il ne veut pas, le conduisant à envisager des solutions radicales. Mais la nature peut encore s'exprimer...

Cette histoire nous rappelle la nécessité de demeurer humble face à la nature (souvenons nous des derniers jours de 1999...). Ce fut mon premier roman de Joncour... mais ce ne sera certainement pas le dernier.

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Dans "Nature humaine", nous suivons la jeunesse d'Alexandre, entre 1976 et 1999, aux Bertranges, ferme familiale depuis 4 générations dans le Lot. Seul garçon de la fratrie, Alexandre a sa destinée toute tracée, il reprendra la ferme. Ses deux soeurs, attirées, par la ville, auront un autre destin : professeur pour l'aînée, photographe pour la cadette. le parcours d'Alexandre sera lié de près à l'actualité politique et aux changements climatiques: de la sécheresse de 1976 à la tempête de 1999, de la crise du Larzac à l'élection de Mitterrand et à la catastrophe de Tchernobyl.
J'ai beaucoup aimé ce roman, d'une part parce qu'il m'a fait revivre tous les événements importants de ma jeunesse, d'autre part parce l'auteur nous interroge sur notre rapport avec la nature. A travers le personnage d'Alexandre, nous voyons les conséquences de la désertion des campagnes, de l'expansion de la grande distribution et de l'agriculture intensive. Nous partageons les doutes d'Alexandre, tiraillé entre l'envie de s'agrandir et de se moderniser et l'envie de perpétuer les traditions familiales.L'auteur aborde également la notion d'engagement politique, avec les personnages de d'Anton et de Xabi, militants activistes anti-nucléaire ou encore le personnage de Crayssac, voisin d'Alexandre qui gardera jusqu'au bout son secret pour éviter le futur tracé de l'autoroute...
Roman à conseiller à tous les quinquagénaires actuels qui sauront apprécier ce bain de nostalgie, ainsi qu'aux plus jeunes qui apprendront beaucoup de cette radiographie du XXième siècle.
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Je suis entrée dans ce livre avec l'impression de pousser la porte d'un univers connu, un peu comme si je rentrais chez moi, comme si j'avais toujours connu la ferme des Bertranges et la famille Fabrier. Serge Joncour met en scène des personnages qui puisent leur épaisseur dans les tempêtes du temps qui passe. Les vies, les propos, s'emboitent dans la grande histoire, celle qui avance au gré de la mondialisation, d'une course effrénée à la productivité.
Ainsi, les faits déroulent leur vérité à travers le vécu de chacun, les vies se fondent dans le contexte, et la forme narrative que l'auteur adopte est celle des grands récits qui savent parler en même temps des hommes et de leur époque.
le rythme du temps donne au livre sa fluidité autant que sa force, il est construit à l'unisson des tensions : il y a la succession des journées torrides de l'été 1976, du 04 au 19 juillet, dans un air lourd et pesant, qui rend la respiration difficile avec cette impression d'étouffement comme une prophétie de l'enfer de la modernisation, promis aux petits exploitants agricoles, à l'image du papillon pris dans les filets d'Agathe.
Il y a aussi ces journées brossées « en sur- place », parce que les personnages y vivent des temps forts, déterminants, le temps y est suspendu, il ne passe plus, il s'arrête presque : la première journée avec Constanze le 24 avril 86, jour de Meeting à Toulouse du candidat Mitterrand. Puis, comme un révélateur, l'explosion de la centrale de Tchernobyl, son nuage et le coup de fil de Constanze, cinq ans après.
La visite des parisiens le 23 juin 86, dialogue de sourd entre deux mondes qui n'ont pas la même logique, les mêmes intérêts, pour qui l'enjeu d'une autoroute à construire n'est pas le même, et qui ne définissent pas les choses simples de la même façon…

« le père était bien placé pour savoir que les choses simples en matière d'élevage, ça devenait de plus en plus compliqué, déjà parce que les petites boucheries fermaient les unes après les autres depuis que les Mammouth et les Euromarché poussaient u peu partout, et ensuite parce que les gens n'achetaient plus que de la viande préemballée en regardant le prix, sans jamais se poser la question de son origine »

Il y a en boucle, en préambule, en épilogue, ces journées de décembre 1999, journées de tempête comme en écho à la sécheresse de 76, dans un écroulement qui interpelle le modèle qu'Alexandre a fini par choisir, jusqu'à le réveiller en sursaut dans un ultime refus.
Le temps qui passe, avec ses menaces, lourd de changements qui ne font pas le bonheur des hommes, Joncour l'évoque avec légèreté avec poésie, il s'en dégage une impression de fulgurance qui dépasse la nature humaine, qui la condamne à se défendre, à résister.
Il choisit de camper cette injonction invisible sous les traits d'Alexandre, et Alexandre au départ, n'est pas programmé pour la résistance, il ne sait pas très bien se situer, il se contente de suivre le mouvement parce que la seule chose qui lui importe, c'est de suivre Constanze, un Fabrice des temps modernes en quelque sorte.
La force du roman repose aussi sur ce personnage, complexe, tout en contradictions, en hésitations, en fragilité, à l'image de son époque de fractures et d'injustices. Progressivement ces injustices le touchent et le récit retrace son parcours, avec justesse et sensibilité, dans ce lent éveil à la conscience. le langage de Serge Joncour atteint là, l'universel.
Un prix littéraire largement justifié.
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En situant son roman sur les 30 dernières années du XXème siècle, Serge Joncour donne à voir la fin d'une époque (le monde d'avant, celui d'une certaine ruralité) et le commencement d'une nouvelle ère (le monde moderne, celui de l'urbanisation).
Cela donne matière à réflexion : en croyant améliorer son confort quotidien, l'homme n'est-il pas en train de se détruire ?
Méfions-nous, la nature nous envoie des avertissements : Tchernobyl, Érika, la crise de la vache folle, tempête de 1999, les canicules à répétition. Ce livre nous les rappelle - c'était hier - comme un condensé d'Histoire moderne.
A lire pour comprendre que notre Nature humaine a des répercussions sur la nature, sur notre monde (moderne ?). A nous d'ouvrir les yeux sur notre nature avant qu'il ne soit trop tard !
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En s'appuyant sur quelques années bien choisies, Serge Joncour nous fait revivre près d'un quart de siècle dans les pas d'Alexandre, paysan lotois tiraillé entre monde moderne et monde ancien. L'auteur laisse s'opposer l'attrait des villes et celui de la campagne, la soif de racines et l'envie de découverte du monde, les bienfaits et les risques de la modernité, le couple ou la soif de liberté, la puissance de l'homme et celle de la nature. En ouvrant ce roman on pourrait craindre l'ennui à suivre à travers le Lot et les autres départements voisins cet agriculteur amoureux confronté à de multiples questions qui le dépassent. Il n'en est rien et le chemin proposé par Serge Joncour est passionnant (mais avoir connu les années et les lieux décrits fait peut-être grandir l'intérêt).
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Première lecture de Serge Joncour, et vraiment une belle découverte ! Cette histoire évolue sur plusieurs décennies, et fait des allers-retours entre le passé et le présent. Elle évoque notre rapport aux progrès, à la nature, à l'industrialisation, aux relations humaines, bref à la vie et malheureusement à notre humanité en péril.
L'écriture est simple mais puissante.

J'ai dans ma bibliothèque un autre roman de Serge Joncour "Chien-Loup" et j'ai hâte de le lire !
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Fin décembre 1999. Souvenez-vous, la France était frappée par une tempête soulevant tout sur son passage : toits, arbres, voitures… Dans sa ferme du Lot, Alexandre vit l'évènement. Avec ses pensées et ses souvenirs, qu'il va dérouler par flash-backs depuis son enfance dans les années 70 jusqu'à ce fameux soir de tempête.

Alexandre descend d'une famille d'agriculteurs. Ses grands-parents habitent maintenant en contrebas, dans un pavillon moderne et confortable, tandis que lui, ses soeurs et ses parents vivent à la ferme, entourés de champs et d'animaux. Leur créneau, c'est l'élevage. Produire de la bonne viande, de bêtes nourries avec de la bonne herbe. L'agriculture à l'ancienne, sans normes mais avec respect et bon sens.

Si ses soeurs se détournent de leur milieu social et rêvent d'autre chose (études, photographie, mode), Alexandre compte bien reprendre la ferme. Il travaille dur et se donne du mal, sacrifiant une vie plus libre à une autre plus sédentaire, plus seule. Une vie qui lui convient malgré Constanze, cette Allemande étudiante qu'il a connu par Caroline, sa soeur, dont il est tombé amoureux en sachant bien qu'il se rendait dans une impasse. Constanze a la bougeotte, elle ne pourra jamais s'installer à la ferme, malgré la beauté des lieux et le bien-être qu'elle y ressent.

Au cours des années, son amour empêché pour Constanze restera un fil rouge auquel il s'accrochera dès que l'occasion lui en sera donnée. Mais ceci n'est qu'une partie de l'histoire. Car en se rendant à Toulouse pour voir sa soeur, Alexandre va être mêlé sans le vouloir aux agissements d'activistes anti-nucléaires. Notre éleveur n'épousera pas leur cause mais il les côtoiera de près, nous permettant ainsi d'en apprendre davantage sur ces groupes complexes, entre motivations écologistes ou politiques, réactions pacifistes ou guerrières.

Je passe maintenant à ce qui pour moi est le clou de ce roman, ce qui fait que je l'ai lu avec un plaisir grandissant à mesure que j'avalais les pages : l'évolution de l'agriculture et de la ruralité. Entre les normes européennes insensées, la construction d'une autoroute pour permettre aux citadins d'aller plus vite d'une grande ville à une autre sans se soucier des gens de la campagne qu'on déloge de leurs terres, les décisions prises sans demander aux premiers concernés… Serge Joncour a su dresser le portrait d'une ruralité acculée, piétinée par les directives européennes, méprisée par les politiques. Je ne sais pas comment l'auteur a travaillé le sujet, mais on pourrait le croire né les champs tant il empoigne le sujet avec force, savoir et intelligence.

Ce roman m'a passionnée car il entremêle avec talent la vie personnelle d'Alexandre, l'activisme écologiste, le point de vue rural qui n'est pas toujours écolo, loin s'en faut, l'amour, le besoin de la jeunesse de tourner le dos à la campagne qui n'offre que peu de perspectives pour le futur. Les ingrédients sont bien choisis, bien dosés. Ajoutez à cela le style envoûtant de Serge Joncour et une construction oscillant entre passé et présent pour nous amener vers un dénouement qui jette un éclairage dramatique sur tout ce que vous venez de lire, et vous obtenez un grand roman.
Lien : https://lejardindenatiora.wo..
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Avec Nature humaine, revivez 30 ans de l'histoire de France et décryptez le vécu de paysans pris dans l'ère du progrès et de la mondialisation… Serge Joncour a vraiment le chic pour saisir les atmosphères et décrire les mentalités d'un milieu rural plongé au coeur de problématiques qui résonnent étonnamment de nos jours…posant un regard éclairé et éclairant sur les dérives de notre société contemporaine.
Le récit commence pendant la canicule de 1976. Dans la ferme des Bertranges vit la famille Fabrier : Alexandre et ses trois soeurs, entourés de leurs parents et même des grands-parents, qui ont migré pour leur retraite dans un pavillon neuf à proximité. Leur voisin Crayssac, un vieux chevrier est très réfractaire au progrès : il s'oppose aux lignes téléphoniques puis au projet d'autoroute qui défigureront à coup sûr ce paysage authentique. Avec Alexandre, le successeur presque désigné des parents, le lecteur découvre un paysan ancré dans ses terres et tourmenté par son attirance pour Constanze, cette belle Allemande militante d'un groupe activiste anti-nucléaire.
En suivant le destin de cette famille de 1976 à la tempête de 1999, l'histoire nationale semble renaître sous nos yeux : l'élection de F. Mitterrand, le nuage de Tchernobyl, la vache folle, le naufrage de l'Ericka mais elle raconte aussi l'histoire d'une famille de paysans confrontés au progrès. Eblouis pas la facilité et le clinquant de la modernité, certains s'éloignent des valeurs qui ont soudé des générations d'agriculteurs…Ce roman m'a véritablement touchée !

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J'ai terminé ce livre avec un sentiment très mitigé et en décalage avec la Babelio sphère.
Le sujet est beau et important : l'évolution de nos campagnes depuis les années 80, la mutation d'une agriculture de proximité à une industrialisation anonyme, le rapport à la terre, à la famille, les liens entre écologie et culture. Bref, des sujets qui me touchent et me passionnent même.
Le personnage d'Alexandre est touchant. J'ai apprécié le traitement toute en finesse de ce personnage, ses paradoxes, le lien à sa famille. L'homme est brave et vit dans le rêve de poursuivre la voie tracée par ses aïeux sans se méfier de ces nouveaux progrès, de ces nouvelles demandes... La mutation du paysage et des pratiques est bien saisie. L'arrivée des grandes enseignes, des infrastructures autoroutières et le clivage que cela entraîne entre les générations.
Néanmoins, j'ai été gênée par de nombreuses situations qui me semblent assez invraisemblables . Tout d'abord, le traitement des personnages féminins très (trop) progressistes dans un milieu qui ne l'est pas du tout. . La littérature est-elle là pour faire vraisemblance ? Doit-elle créer une jolie carte postale pour mieux servir des idées ? C'est un vaste sujet dont je n'ai pas la réponse. Mais il y a, à mes yeux, une idéalisation de la campagne et de la ruralité dans ce roman dans lequel je ne me reconnais pas.
Mais ce n'est que mon avis ...
Bonne lecture
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