Cela faisait un moment que ce livre traînait dans ma bibliothèque, après une lointaine acquisition au hasard d'une librairie, motivée je m'en souviens je me connais par la volonté de remplir mon devoir d'honnête homme cumulée à un certain souci d'efficacité - acquérir une culture philosophique aussi vaste que synthétique, (re)découvrir les grands mages de la métaphysique en un peu plus de 300 pages (*).
Hmm, immédiatement ça vous paraît petit, superficiel, mettre à terre mes sages velléités.
Figurez vous que ça n'est pas si contradictoire que ça en a l'air : trop en savoir risquerait de nuire à la nécessaire vision d'ensemble que je souhaite en dégager, ne rentrons pas trop dans le détail de ces esprits chantournés, voilà.
Hélas, ces grands moments sont chez moi d'une déplorable fugacité. Ici s'arrête mon ambition, ici revient ma paresseuse nature. Balayée par ma pusillanimité présente, ma noblesse future vient s'échouer, dans le silence et oubli, sur un étage inférieur de table basse autour de la page 30.
Au cours des années suivantes (comme le temps passe vite, comme mes ambitions de jeunesse sont loin, désormais. Comment ont-elles pu capoter à ce point...) j'avais entrepris quelques velléitaires tentatives. Nouveaux plongeons dans l'océan de la philosophie. Au débotté, sans bonnet de bain.
Hélas encore, on a beau y entrer avec vigueur, les eaux de ces mers sont si définitivement froides (quoi qu'en disent les « ellestbonnistes », vulgaires snobs).
Direction la petite échelle, je ressors rapidement du bassin avec une discrétion proportionnelle au panache de mon plongeon.
J'y reviens ces jours-ci, ayant remisé ma flamboyance frustrée au vestiaire (j'essaie de grandir, de toute façon j'ai échoué partout, ça calme). Parlons du livre, il le faut. J'en avais gardé un vague souvenir un peu terne, qui venait sans doute de ce que l'étonnement promis par le titre avait fait naître en moi.
Un souci de retrouver l'éveil et la joie que peuvent faire naître la réflexion philosophique, une volonté de ne pas faire dans le sérieux académique, projet attirant (ou simple promesse de la quatrième de couv ? Sont forts et manipulateurs ces éditeurs) ... mais légèrement démenti par l'écriture de l'ouvrage.
(Re)découvrons.
(Enfin soyons honnêtes. Si redécouverte il y a, très peu de "re" et beaucoup de "découverte" : pas de fiévreuse retrouvaille avec René sous la nouvelle lumière de ma maturité. le peu que j'ai pu savoir de
Descartes, je l'ai oublié. Je suis un mini
Christophe Colomb amnésique qui redécouvrant l'Amérique, aurait un vague souvenir d'avoir un jour pris le bateau, peut-être à la limite jeté l'ancre, puis un grand vide)
Saint Thomas me paraît un mec droit et sain mais je ne sais pas si je pourrais vraiment sympathiser avec lui et ses idées. Trop de perfection et de charité chrétienne sans doute. Pas besoin d'aller jusque là dans son application à mon sens.
Leibniz me fait l'effet d'un bonhomme très sérieux et austère, obsédé par l'idée de système, la mécanique et la volonté d'intégrer Dieu à celui-ci. J'aime bien son idée des petites perceptions. Son système me paraît comporter un certains nombre de contradictions, mais n'étant pas philosophe je m'arrêterais à cette remarque d'une naïveté sans doute touchante. Je ne peux pas prétendre non plus avoir tout compris, loin de là.
Nietzsche : c'est dangereux mais j'adore.
Les Anciens : il faut que je passe plus de temps avec eux.
Karl Jaspers : je n'ai pas encore lu ce chapitre. Sa pensée ne m'évoque strictement rien, mais j'imagine que sa germanité doit bien ressortir quelque part. Enfin simple préjugé sur lequel il ne vaut mieux pas s'étendre.
Bref, je ne veux pas risquer une énumération fastidieuse pour vous lecteurs. Je vais continuer la lecture de ce bouquin qui me paraît révéler encore pas mal de promesses, tout compte fait. Peut-être même que je finirais par trouver du charme à ce style morne et taciturne.
*plus de 450 pages en fait (un peu trop pour mon objectif d'efficacité), j'avais jugé un peu vite à l'épaisseur du poche, mais il faut croire que les pages sont fines.