L'Histoire du Fou est avant tout une fresque, ce roman décrit les troubles socio-politiques auxquels est sujette l'Afrique dans les années quatre vingt dix.
La contestation est, fort naturellement, au centre de cette oeuvre de MONGO BETI publiée en 1994. En effet, le romancier rejette, ne cautionne pas l'ordre social, les institutions et l'idéologie dominante dans un continent qui sécrète le pessimisme et peine à s'arrimer à la modernité.
MONGO BETI tire à boulets rouges sur la classe dirigeante. celle-ci constitue le "public cible" dans " L'Histoire du Fou" dont la visée pragmatique est établie. Cette critique sans complaisance à laquelle se livre l'écrivain est sous-tendue par une idéologie progressiste, réformatrice qui confirme que MONGO BETI est un empêcheur de tourner en rond.
Par ailleurs, ce refus de l'ordre social se cristallise dans une écriture virulente et agressive. Refusant donc d'être à la remorque du silence,de pratiquer la politique de la bouche cousue, MONGO BETI se pose en "porte-parole des opprimés et défenseur de la justice sociale [qui ] revendique seulement le droit de parler et d'être entendu
"LHistoire du fou" force l'admiration de tout lecteur épris de justice et d'équité, la République a encore du chemin à faire en matière de démocratie
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- Va pour ce nouveau témoignage, gronda le chef de l’Etat ramassé sur lui-même comme un bouledogue, mais que ce soit la dernière séance de cette mascarade, est-ce que c’est bien clair ? Je veux entendre une réponse de chacun : est-ce que c’est bien clair, cette fois ?
- Très clair, Excellence, dit le premier conseiller intime en s’inclinant.
- Très clair, Excellence, dit le deuxième conseiller intime en s’inclinant.
- Très clair, Excellence, dit troisième le conseiller intime en s’inclinant.
- Très clair, Excellence, dit le quatrième conseiller intime en s’inclinant.
- Très clair, Excellence, dit le cinquième conseiller intime en s’inclinant.
- Très clair, Excellence, dit le sixième conseiller intime en s’inclinant.
Dans cette ville où, bien que les fous y fourmillent, il n'y a pas d'asile de fous, ni d'hôpital acceptant de les accueillir, on voit un jeune homme, trente ans au maximum, nu comme le fut, dit-on , le premier homme au jardin de l'Eden, déambuler le jour dans les rues populeuses du grand port, ou s'absorber dans un soliloque zébré de sourires sporadiques et incohérents, tandis qu'il fourrage mécaniquement et en gloussant dans les ordures où il se nourrit.
On montra ensuite un défilé de soldats en treillis, sans casque, débraillés eux aussi et pieds nus, la tête baissée et hirsutes comme le colonel. Sur l’ordre d’un gradé qui se tenait en serre-file, ils s’accroupirent les mains nouées au-dessus de la tête, puis, d’un seul mouvement, s’étendirent de tout leur long, face contre l’asphalte
Il - Zoaétéleu- fut précipité dans une cellule obscure qui empestait la pisse et les matières fécales. Ses vingt occupants, serrés les uns contre les autres, toujours assis jambes repliées, n'avaient en effet pour se soulager qu'une tinette submergée depuis longtemps
Par la suite, les hommes du Ministre d’Etat n’auraient qu’à faire comparaître le Président déchu devant un tribunal militaire qui le condamnerait à mort : c’est ainsi qu’on avait pris l’habitude de procéder. Cela faisait partie des traditions culturelles en quelque sorte
Mongo Beti, Une vie, une oeuvre partie 1
Le portrait radiophonique d’un homme d’exception.
Émission réalisée par Catherine Pont-Humbert et diffusée sur France culture le 26/12/2004.