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La Culture tome 4 sur 12

Hélène Collon (Traducteur)Gérard Klein (Préfacier, etc.)
EAN : 9782253071891
539 pages
Le Livre de Poche (30/11/-1)
3.97/5   272 notes
Résumé :
Cheradenine Zakalwe - ou du moins l'homme qui se fait appeler ainsi - est l'un des agents les plus efficaces de la Culture. Et Diziet Sma, éminente figure de la Culture, l'utilise à des fins mystérieuses, quelquefois paradoxales. Dans le cadre de Circonstances spéciales, une branche de Contact.

Qu'est-ce que la Culture ? Une immense société galactique, pacifiste en son principe mais redoutable si on l'attaque, multiforme, anarchiste, tolérante, éthiqu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
3,97

sur 272 notes
Ou il s'agit d'une chaise
et la question subsidiaire est de savoir
qui l'a faite.

Le tout premier roman d'Iain M Banks, écrit alors qu'il était encore étudiant en fac de Lettres. Un début fort prometteur, que ses livre ultérieurs confirmèrent

Comme la plupart de ses romans de science-fiction ( écrits en tant qu'Iain M. alors que ses romans politiques sont signés Iain tout court), celui-ci appartient au genre Space Opera et se situe dans l'univers de la Culture. Imaginez une civilisation occupant une partie de notre galaxie, où les problèmes qui affligent notre monde semblent tous avoir été vaincus. Plus de mort, de maladie, d'handicap. Finies la pauvreté et l'inégalité, les abus de toutes sortes. Une utopie intersidérale. Un monde où n'est pas né Cheradenine Zakalwe. Lui a vu le jour dans une société féodale, technologiquement au niveau de nos années 1940 européennes. Mais dans une famille princière. Nous découvrons peu à peu les péripéties qui ont amené cet homme à être secouru, moribond, de la surface d'un iceberg tabulaire par Sma, sorte de diplomate, espionne et agent action, au service de la Culture au sein de “Circonstances Spéciales”. C'est ainsi que l'on nomme le bras armé des services diplomatiques, autrement si éclairés, de la Culture. Car celle-ci - vous l'avez deviné - est une exception dans notre galaxie, et s'est découvert un élan missionnaire. Influencer, persuader, mener les autres civilisations à des modes de vie plus éclairés: voilà le mandat que CS exerce au nom de la Culture au-delà de ses frontières. C'est la mission que Sma propose à Zakalwe.

Si les motifs de la Culture semblent clairs - ils s'assombriront aux romans suivants de la série - ceux de Zakalwe le sont moins. Homme d'action, soit. Flamboyant, maniant l'humour aussi bien que le fusil à plasma, cela va de soi. Charmant, séducteur et baroudeur : tout cela est bien entendu. Mais que cherche-t-il ? le sait-il seulement ? Sma en a-t-elle la moindre idée ? Faut-il vraiment attendre la toute dernière page du livre pour voir le roman se retourner comme un gant ?

C'est donc une joyeuse escapade dans le domaine de l'utopie que je vous propose. Technologies bizarres, humour noir, aventures et exploits, et tout cela au nom du progrès et de l”humanisme. le tout assaisonné d'un brin de cynisme, mêlé de contre-utopies abominables, de tensions habilement exploitées et d'un retournement final à vous couper le souffle. Bon appétit !




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L'usage des armes , tout un programme ….
Un texte que l'on pourrais qualifier de : « de l'usage des armes « ou encore : du Bien et du Mal ….

D'abord , c'est rare , mais soulignons que sur la forme il est tout à fait remarquable. En effet vous avez principalement dans ce texte deux fils narratifs qui alternent .
L'un se dirige vers le futur , l'autre remonte le temps depuis le passé vers le futur .
Les deux trames se font échos et s'éclairent en ricochet sur de nombreux aspects de fond du texte ou même simplement de la forme du texte ou encore informent sur le personnage principal en premier lieu .

J'ai peu de temps pour des relectures , alors c'est avec gourmandise que j'ai réalisé une petite envie qui me taraude depuis longtemps .
J'ai relu ce roman , mais cette fois-ci , j'ai commencé par la fin … oui ….
Sachez que c'est un texte tel que vous pouvez le lire dans les deux sens , c'est étonnant ! ( et cela a du sens quelque soit le point de départ de la lecture ) , et cela souligne le caractère très travaillé de ce roman .

La Culture , est une vaste société intergalactique , centrée sur l'hédonisme de ses ressortissants . Ses citoyens sont humains , extraterrestres ( quelques-uns ) et aussi il y a les artificiels , des intelligences artificielles logées dans des machines variées ( du vaisseau au couteau à couper le pain quasiment ) .
La culture affiche notamment deux tendances comportementales claires :

- Elle souhaite se conserver . Elle est donc très vigilante à se défendre et à connaitre ses voisins , le plus souvent moins développés qu'elle-même . Souvent aussi les exigences éthiques en vigueur dans son voisinage , sont moins élevées que les valeurs éthiques de cette société vigilante et réflexive .
- Elle estime avoir vocation à s'étendre par inclusion constante des sociétés sises dans son environnement immédiat , si ces dernières sont homologables : « Culture compatible « .

Ces deux tendances de cette civilisation , débouchent sur des interventions (« légitimes ») dans les sociétés voisines . Des interventions réputées morales et justifiées ainsi que très calculées , souvent chirurgicales , mais des fois de plus grandes envergures .
La culture veut donc le bien de ses voisins … Cela débouche en pratique sur ces intervention dont la connotation éthique va donc plutôt largement de blanche à grise , voir à noire …

La fin justifie les moyens ? Sur quoi se fonde une légitimité à intervenir dans le destin d'une civilisation voisine ? et comment le faire le plus éthiquement possible ?
Plus généralement au travers de ce cycle comme de ce roman , c'est la responsabilité comportementale des vastes corps politiques qui est étudiée .

On dit des états qu'ils sont : des monstres froids . La culture est une contreproposition éthique à cet énoncé , créée dans but d'examiner la question du comment est-ce possible que les états soit par nécessité des monstres froids et calculateurs ?
Une autre façon d'envisager le problème est de savoir si ce fait est contextuel et environnemental , ou bien s'il est d'origine psychosociale et propre à l'éthologie même de l'espèce humaine .

Dans ce texte l'agent de la culture intervient sur un monde qui se nuit à lui-même violement . Cet agent , véritable variable de correction d'éthique politique , agira pour le meilleur et pour le pire .
Est-ce que cultiver la justice nourrie nécessairement l'éthique ? A vous de voir …

Je ne sais si ce cycle apporte au lecteur beaucoup de réponses même s'il en propose certaines par l'exemple .
Mais je suis certains qu'il apporte en revanche , beaucoup de questions . Ce qui n'est pas si mal et même peut-être suffisant , car finalement c'est l'essentiel non ?
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Un roman de SF un peu atypique. Tout d'abord parce qu'il y a deux narrations différentes. Que l'on remarque aisément par la numérotation des chapitres.. un qui est chronologique et l'autre qui va a rebours.

Cheradenine Zakalwe est un mercenaire qui intervient pour la Culture. Cette dernière est une communauté anarchique et pacifique mais pas a n'importe quel prix... quand on ne va pas dans son sens elle intervient.

L'auteur ne fait pas de cadeau au lecteur .. il faut être attentif et ne pas se perdre dans les méandres de sa narration.;. mais le final est explosif et tellement inattendu que ce livre en vaut le détour... et franchement j'ai adoré
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L'usage des armes est un livre très singulier. La proposition initiale semble pourtant assez simple : suivre la vie d'un guerrier-mercenaire, Cheradenine Zawalke, qui est employé par une vaste civilisation intergalactique appelée la Culture. En échange d'une rémunération mais aussi d'une vie prolongée, de rajeunissements et autres « petits bénéfices », Zawalke se met au service de cette société et l'aide dans ses démêlés avec ses voisins. Nous suivrons donc divers conflits, en observant les aspects politiques mais aussi militaires, très bien décrits d'ailleurs. En apparence c'est simple et de facture assez classique… sauf que non, pour différentes raisons.
*
La Culture, pour commencer est une société de l'abondance, très avancée technologiquement et très ancienne. L'homme y côtoie pacifiquement diverses intelligences, dont des machines devenues intellectuellement égales voire supérieures à lui. Cette société est, en son sein, pacifique, multiforme, anarchiste, éthique et parfois cynique. La tolérance y est la règle. Or la Culture est en contact avec d'autres civilisations ayant des comportements en apparence plus agressifs et elle vise à défendre sa sécurité et son mode de vie. Elle a donc un service appelé « Contact » qui, en son sein, intègre « Circonstances spéciales » (tout un programme !) qui est l'employeur de Zawalke. Nous sommes donc à la fois en périphérie de la Culture et au coeur de ses contradictions puisque ce que nous pourrions appeler dans le monde réel des « barbouzes » emploient, pour faire prévaloir les intérêts de la Culture, à peu près tous les moyens possibles : violences, manipulations, réification d'autrui. L'objectif final est de transformer ces autres sociétés pour qu'elles ne nuisent pas à la Culture, à minima, mais, plus généralement, pour les intégrer à terme après les avoir transformées de fond en comble. D'une certaine façon c'est un génocide culturel et une assimilation au sens sociologique que nous constatons, dans la lignée de ce que l'Empire britannique pouvait faire en tant que colonisateur supposé bienveillant et animé des « meilleures intentions », comme d'une supériorité technologique mais qui se voulait aussi morale.
Banks nous propose donc une réflexion assez poussée, même si largement implicite, sur les limites du pouvoir, sur l'écart entre la fin et les moyens, sur les vies individuelles broyées au nom de la raison d'État, sur les risques de l'interventionnisme, sur l'éthique. Sans que le livre soit triste à proprement parler les conclusions sont assez pessimistes. Sur ce plan, après l'Irak ou l'Afghanistan, entre autre, comment considérer qu'il a tort ?
*
La réflexion porte aussi sur l'individu lui-même, à commencer par le « héros ». En apparence il lutte pour une cause juste à savoir ici éviter qu'une faction radicalisée d'une société tierce pratique des terraformations en supprimant toute forme de vie qui la dérange… mais il n'a pas grande illusion sur la supériorité morale de la Culture et n'a pas tort vu les conséquences de ses actes. La réflexion porte donc sur le sens moral de ses actions mais aussi sur ce que peut être la vie d'un mercenaire, qui au final emploie souvent des moyens violents et donne la mort, manipule autrui, que ce soit des groupes d'individus ou ses amis, pour défendre des buts qu'il maîtrise assez peu voire dont il ignore les finalités. Banks nous invite aussi à réfléchir sur le sens que chacun peut donner à son existence, à la part que peuvent représenter les remords, le poids du passé et de ses diverses blessures au fil d'une existence, ici par ailleurs prolongée. Il y a une part de Zawalke en chacun de nous et une lecture attentive ne peut que nous pousser à une introspection pouvant s'avérer inconfortable parfois.
*
Enfin la forme de ce roman de longueur moyenne (450 pages) est très inhabituelle. En effet Banks nous « propose » de suivre deux trames narratives. Certains chapitres, numérotés 1,2,3… , suivent un récit allant du passé au futur alors que d'autres, numérotés VIII, VII, VI… remontent de plus en plus loin vers le passé de Zawalke. Ces deux fils entrecroisés permettent une mise en abyme habile et se complètent judicieusement. Ils contribuent grandement à mieux comprendre la complexité du « mercenaire » comme de ses proches. le livre peut être relu en inversant complétement le sens de lecture (partir de la fin), ou en reclassant tous les chapitres dans un ordre chronologique strict, dans les deux cas il garde toute sa cohérence, ce qui est une assez jolie performance, un bel exercice de virtuosité. Dans le même esprit Banks réserve une surprise finale à son lecteur qui fait qu'il peut, une fois le livre terminé, le relire complétement, avec un point de vue assez radicalement différent. Ce n'est pas si courant et donne à méditer, ce qui est le but réel sans doute, plus qu'un effet de surprise qui serait sinon un peu facile.
**
Alors, est-ce un chef d'oeuvre absolu selon moi ? Je dirais que non, sans être strictement affirmatif pour autant. Ce livre est sans conteste très intéressant et stimulant mais sa lecture n'en est pas moins parfois déroutante voire un peu fastidieuse. Je trouve que cela tient à la multiplicité des buts poursuivis et des registres simultanés. Banks semble parfois aussi vouloir prouver son talent et a un humour qui n'évite pas certaines facilités. Si l'objectif premier est de proposer un ouvrage de réflexions profondes le genre s'y prête mal, de même que le fait de vouloir l'associer à une sorte de space opéra. le produit final est notablement plus lourd mais aussi plus superficiel qu'un essai et, dans ce cadre, les combats peuvent sembler incongrus. Inversement un space opéra classique vise une grande simplicité afin de séduire un lectorat avide de scènes de combats et d'héroïsmes, d'amours tumultueuses… Ici il sera dérouté par une forme bien plus complexe et ce qu'il vivra comme d'inutiles longueurs. Si ce livre recherche la performance littéraire il échoue partiellement. C'est certes un montage intéressant mais autant lire Perec, par exemple. Enfin, comme dans L'homme des jeux, il me semble difficile de s'identifier pleinement aux personnages, de vibrer pour eux. Cette distanciation a son intérêt mais peut compliquer l'entrée dans le roman tant le lecteur est habitué à cette facilité pour ressentir des émotions fortes.
**
Je conseille cette lecture à qui aime la science-fiction, à qui aussi est prêt à s'investir dans une lecture bien moins facile qu'habituellement pour ce type d'ouvrages. Il me semble par ailleurs que qui aime une lecture dite d'idées sera plus à l'aise que qui recherche des personnages attachants. Au final il est plus facile selon moi d'apprécier ce livre et d'y trouver des stimulations que de l'aimer. Pour autant il mérite d'être lu et compris et apporte une voie et une voix originale à un genre qui peinait à se renouveler après son âge d'or.
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Quand l'Utopie prend les armes…
La Culture est une vaste utopie intergalactique dont les ressortissants sont humains, extra-terrestres et des intelligences artificielles. Elle a pour but l'hédonisme complet pour ses ressortissants. Mais comment conserver la liberté si on n'a pas d'armes pour la défendre ?
C'est le rôle de Circonstances Spéciales, la branche musclée de Contact.
La Culture ou l'esthétique du bien-être, l'hédonisme suprême, l'utopie et l'anarchie pure, est, dans ce récit, étudiée sous l'angle de ses agissements controversés par rapport à sa morale.
Contact est chargé par la Culture d'observer et d'évaluer les sociétés qu'elle rencontre dans son expansion. Et parfois… Il faut intervenir.
Il le faut car il est intolérable pour la Culture que souffrent des populations, y compris celles en-dehors de sa juridiction.
C'est discutable bien entendu et c'est là tout le propos du récit et toute l'ambiguïté de Culture.
Le récit va développer le rôle de Circonstances Spéciales et de Zakalwe, un de ses agents, qui ne rechigne pas à la basse besogne, y compris l'assassinat, moyennant une généreuse contrepartie de la part de Contact.
La Culture tolère, quoique très discrètement, ses agissements car de tout ce mal doit sortir ultérieurement un plus grand bien.
Voici donc la chronique d'un assassin pour le compte de la Culture, cette société bienveillante mais étudiée ici dans toute son ambiguïté.

Ma foi, ce fut une lecture assez rude.
D'une part, j'ai eu du mal à m'intéresser à l'histoire de cet agent même si elle se révèle au final très surprenante et d'autre part, la prouesse narrative réalisée par l'auteur, à savoir que le récit peut se lire dans les deux sens, oui vous avez bien lu : à l'aller et au retour, m'a un peu perdue dans l'histoire.
J'ai eu du mal à suivre et à comprendre.
Bref, j'en sors déçue mais un peu plus éclairée sur le fonctionnement de la Culture.
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Tout était métaphore ; toute chose était aussi autre chose qu’elle-même. La douleur, par exemple, était un océan sur la surface duquel il allait à la dérive. Son corps était une cité, son esprit une citadelle. Entre les deux, toutes les communications étaient coupées, mais dans le donjon qu’était sa pensée il avait encore de l’énergie. La facette de sa conscience qui lui affirmait que la douleur ne faisait pas mal était comme… comme… Aucune comparaison ne lui venait. Comme un miroir magique, peut-être.
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"Oui" dit le jeune homme. " Ca doit être une drôle d'expérience,
croire que vous êtes sur le point de mourir."
" Pas l'expérience la plus agréable" convint l'Ethnarque, passant d'abord une jambe, puis l'autre, dans son pantalon.
"Mais quel soulagement, quand on recoit un sursis."
"Mmmh" L'Ethnarque produisit un petit rire.
"Un peu comme être arrêté dans un village et croire qu'on va vous fusiller..." s'étonna le jeune homme, faisant face à l'Ethnarque " ... et s'entendre dire que rien de pire qu'un déménagement n'est prévu." Il sourit. L'Ethnarque hésitait.
"Relocalisation par train" dit l'homme, en sortant un petit pistolet noir de sa poche. "Un train qui contient votre famille, votre rue, votre village..."
Le jeune homme ajusta quelque chose sur le petit pistolet.
"...Et qui à la fin,ne contient que des fumées diesel, et plein de morts." Il fit un petit sourire jaune. " Qu'est-ce que vous en pensez, Ethnarque Kerian? Quelque chose dans ce genre ?"
L'Ethnarque ne bougeait plus, fixant les yeux grands ouverts le petit pistolet noir.
"Les gentils s'appellent La Culture," expliqua le jeune homme,"et j'ai toujours cru qu'ils étaient trop mous." Il allongea le bras qui tenait le pistolet. "Je ne travaille plus pour eux. Je me suis mis à mon compte."
L'Ethnarque regardait, muet, les yeux noirs et vieux au-dessus du canon du pistolet noir.
"Je m'appelle", dit l'homme, "Cheradanine Zakalwe". Il aligna le pistolet sur le nez de l'Ethnarque. "Vous, vous êtes mort."
Il fit feu.

(pp.37-38)

"Vous ne gagnerez pas" lança la femme en postillonnant."Vous ne pouvez pas gagner contre nous." Elle agita la petite chaise.
"Quoi?" fit-il, s'éveillant de sa rêverie.
"Nous gagnerons" dit-elle, secouant la chaise si violemment que les barreaux grattaient le sol de pierre.
Pourquoi est-ce que j'ai attaché cette idiote sur une chaise, pensa-t-il.
"Vous avez peut-être bien raison" fit-il, fatigué."Les choses n'ont pas l'air brillantes, pour le moment. Ca vous fait sentir mieux?"
"Tu vas mourir" lança la femme, le fixant du regard.
"Aucun doute là-dessus" fut son commentaire, en regardant le plafond qui avait une fuite d'eau.
"Nous sommes invincibles. Nous n'abandonnerons jamais."
"Oh, mais on vous a vaincu deux ou trois fois par le passé...". Il soupira, se souvenant de l'histoire de cet endroit.
"Nous avons été trahis! " cria la femme. "Nos armées n'ont jamais été vaincues; nous..."
"Poignardés dans le dos, je sais."
"Oui ! Mais notre esprit ne mourra jamais ! Nous..."
"Oh, la ferme !" (...) "J'ai déjà entendu ces conneries. 'On nous a volé'.'Les politiciens nous ont abandonné.' 'Les médias étaient contre nous.' Merde."
(...) "Et je ne crois pas que Dieu soit de votre côté."
"Hérétique !"
"Merci."
"J'espère que tes enfants mourront. Lentement."
"Merde, ils doivent vous laver le cerveau jeune; c'est une chose horrible à dire, surtout pour une femme."
"Nos femmes sont plus viriles que vos hommes !"
" Et pourtant vous vous reproduisez. Je suppose que le choix est limité."
" Que tes enfants souffrent atrocement et meurent !" hurla-t-elle.
"Si c'est vraiment ce que vous pensez, je ne peux rien vous souhaiter de pire que d'être la conne que vous êtes."
"Barbare! Infidèle!"
" Vous allez tomber à court d'insultes. Je suggère d'en garder un peu pour plus tard. Enfin, garder des réserves n'a jamais été votre point fort, hein? "
"Nous vous écraserons !"

(P.154-155)

Le téléphone sonna.
"Allo?"
"Monsieur...Staberinde?"
"Oui."
"Ah, oui, bonjour. Mon nom est Kiaplor, de ..."
"Ah, les avocats."
"Oui.Merci de votre message. J'ai ici un telex confirmant la mise à votre disposition de tous les revenus et actifs de la Fondation Vanguard."
"Je sais. Etes-vous satisfait, mr.Kiaplor?"
"Mmmh...Je...oui... le telex est très clair...même si le degré d'autonomie conféré est sans précédent, pour un compte de cette taille. Non que la Fondation Vanguard ait jamais été conventionnelle."
"Bien. D'abord, j'aimerais disposer de fonds suffisants pour couvrir la location de deux étages de l'Excelsior, immédiatement. Ensuite, je voudrais acheter deux ou trois choses."
"Ah...oui. Des choses de quel genre?"
Il s'épongea les lèvres avec une serviette. "Et bien, pour commencer, une rue."
"Une rue?"
"Oui.Rien de trop ostentatoire, et elle ne doit pas être très longue, mais je veux une rue complète, près du centre ville. Pensez-vous pouvoir m'en chercher une, immédiatement ?"
"Euh...Oui...Nous pouvons certainement commencer les recherches..."
"Bien. Je passerai vous voir dans deux heures; j'aimerais être en mesure de prendre une décision à ce moment."
"Deux...? Euh, et bien...ah..."
""L'urgence, monsieur Kiaplor, est vitale. Mettez-y vos meilleurs juristes."
"Bien. Très bien."

(P.174)

Sma fronca les sourcils en fixant le visage de la femme."Quoi? Alors..."
Retournes, retournes-y. Qu'est-ce que je devais faire? Retournes-y.
Il s'agit de gagner. Retournes-y. Tout doit céder devant cette vérité.
"Cheradanine Zakalwe, mon frère" dit Livuetta Zakalwe " est mort il y a près de deux cents ans. Il est mort peu après avoir reçu les ossements de notre soeur, façonnés dans la forme d'une chaise."

(P.394)
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'Bon après-midi, monsieur.Comment puis-je vous être utile?'
'J'aimerais vos deux étages supérieurs, s'il vous plait.'
L'employé de la réception eut un regard vide, puis il se pencha en avant.
'Pardon, monsieur?'
'Les deux étages supérieurs de l'hotel; j'aimerais les avoir. ' Zakalwe sourit.
'Je n'ai pas fait de réservation. Désolé.'
'Aaah..' fit l'employé. Il semblait un peu ennuyé en regardant son image
dans les verres sombres de Zakalwe. ' Les deux...?'
'Ni une chambre, ni une suite, ni un étage mais deux étages, et pas n'importe lesquels mais les deux étages supérieurs. Si certaines chambres sont occupées, je suggère que vous proposiez poliment aux occupants d'accepter une chambre à un autre étage; je paierai leurs notes.'
'Je vois...' fit le réceptionniste. Il ne semblait pas avoir décidé s'il fallait prendre Zakalwe au sérieux. 'Et... pour quelle durée monsieur souhaite-t-il occuper ces étages?'
'Indéfiniment. Je payerai un mois d'avance.Mes avocats auront transféré le montant d'ici à demain midi. Il ouvrit sa valise et sortit un paquet de billets, qu'il placa sur le bureau de la réception. 'Je payerai une nuit cash, si vous voulez.'
'je vois', fit l'employé, les yeux fixés sur l'argent." Et bien si monsieur voulait bien remplir ce formulaire...'
'Merci. J'aimerais aussi un ascenseur pour mon usage exclusif, et acces au toit. Je pense qu'une clef serait la meilleure solution.'
'Aah.Effectivement. Je vois. Excusez-moi un moment, monsieur.' L'employé alla voir son chef.
Il négocia une remise pour les deux étages, puis accepta de payer une indemnité pour l'ascenseur et l'accès au toit, qui ramena le total à la somme initiale. Il aimait marchander.
'Et le nom de monsieur?'
' Je m'appelle Staberinde'.

(pp.167-168)
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Sma, se détournant de la fenêtre, entendit un bruit de bottes dans l'escalier. Skaffen-Amtiskaw était près de la porte et la regarda paisiblement. Des cris jaillirent de la place, en bas, et des étages inférieurs de l'auberge. Quelqu'un cogna sur la porte de la chambre, faisant s'envoler la poussière et trembler le plancher. Sma n'avait plus de tours dans son sac.

Elle fixa le drone et cria " fais quelque chose !"
"Avec plaisir" murmura Skaffen-Amtiskaw.

Le porte fut projetée contre le mur. Deux hommes drapés de noir étaient dans l'ouverture. Sma pouvait les sentir. L'un s'avanca vers elle, l'épée dans une main, une corde dans l'autre, ne voyant pas le drone sur le côté.

"Je vous demande pardon" fit Skaffen-Amtiskaw.
Sans ralentir, l'homme jeta un regard à la machine.
Puis il disparut, et l'air de la chambre était plein de poussière. Les oreilles de Sma bourdonnaient , de la boue et des morceaux de papier tombaient du plafond, et il y avait un grand trou dans le mur. Une femme hurla de l'autre pièce, ou ce qui restait du bonhomme était encastré dans le mur au-dessus du lit,son sang recouvrant le plafond, le plancher, les murs, le lit et elle-même.

Le second homme fonça dans la pièce, déchargeant un gros calibre à bout portant sur le drone; la balle devint une mince pièce un centimètre devant ses senseurs , et tomba à terre en claquant sur le plancher. L'homme sortit un sabre et essaya de lacérer le drone à travers les nuages de poussière et de fumée. La lame se casse nette sur un champ énergétique rouge juste au-dessus du corps du drone, puis l'homme fut projeté en l'air. Il s'agita comme un dingue pendant quelques instants, puis devint comme une tâche confuse dans l'air au-dessus de Sma, il y eut un autre bruit effarant, et une ouverture apparut dans le plafond au-dessus de sa tête, à côté de la fenêtre donnant sur la place. (...)

Le corps du second bonhomme s'étalait comme un sac rougeâtre au beau milieu des cavaliers. Pendant qu'ils fixaient des yeux cette chose (...) un objet passa à côté de l'épaule de Sma et déscendit vers la place.
Un des guerriers tonna, brandit son épée et se rua sur la porte de l'auberge.
Il réussit à faire deux pas. Il était encore en train de tonner quand le nanomissile le dépassa, champs ouverts. Ils séparèrent le cou des épaules (...) Plus rapide que n'importe quel oiseau ou insecte, le nanomissile fit une révolution autour du gros de la troupe, émettant comme un bruit intermittent. Sept cavaliers tombèrent dans la poussière, en quatorze quartiers. Sma se mit à crier au drone d'arrêter le nanomissile, mais elle n'avait plus de souffle, et se mit à tousser. Le drone lui fit des petites tapes sur l'épaule:" allons, allons". (...) Un type jeta son épée et se mit à courir. Le nanomissile le traversa de part en part. Il fit un virage serré et passa à travers les cous des deux derniers cavaliers. (...) Le nanomissile tourna lentement sur son axe, comme pour inspecter le travail de ces quelques secondes, puis remonta tranquillement vers la fenêtre.
(...)
"Salaud!" Sma essaya de frapper le drone, puis de lui mettre des coups de pied. enfin lui cassa une petite chaise sur le corps."Salaud ! Espèce de foutu assassin !".
"Sma" fit le drone calmement, sans bouger dans la tornade de poussière, et continuant à soutenir le plafond, " tu m'as dit : 'fais quelque chose' ".

(pp.45-46)
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Un des membres du groupe portait, au creux de son épaule, un peu comme un bébé, une petite boule de fourrure brune et jaune. " Tiens" dit l'homme en présentant la petite créature à Sma. Elle la prit, non sans hésitation. La boule de fourrure était chaude, avait quatre membres, une odeur agréable, mais n'était pas un animal qu'elle ait jamais vu avant; les oreilles et la tête étaient grandes, et, quand elle toucha la chose, elle ouvrit ses grands yeux et la regarda. "C'est le vaisseau" dit l'homme qui la lui avait donné.
-"Bonjour" fit la petite chose.
Sma la regarda " Tu es le Xénophobe ?"
"Son représentant. La partie à laquelle on peut parler. Tu peux m'appeller Xeny". Le petit animal sourit, il avait de petites dents rondes.
"Je sais que la plupart des vaisseaux ont un drone comme représentant, mais" la petite chose regarda Skaffen-Amtiskaw " ils peuvent être ennuyeux, vous ne trouvez pas?"
Sma sourit et sentit l'aura de Skaffen-Amtiskaw clignoter. "Parfois" conceda-t-elle.
"Oh Oui", dit la petite bête, "je suis beaucoup plus mignonne."
(...)
" Votre cabine est la première porte à gauche" dit-elle à un carrefour, " au fait, nous venons de quitter l'orbite".
"Bien" dit Sma.
" Est-ce que je peux vous faire un calin ?"
Sma s'arrêta, détacha la petite créature de son épaule d'une main et la regarda en face.
"Quoi ?!"
"Juste par amitié" dit la petite chose, baillant et clignotant des yeux " Je ne donne pas offense, c'est une bonne procédure relationnelle".
Sma était certaine que, derrière elle, Skaffen-Amtiskaw était rouge d'hilarité contenue . Elle porta la petite chose jaune et brune plus près de son visage.
""Ecoute, Xénophobe..."
" Xény, s'il te plait"
"Xény, tu es un vaisseau interstellaire d'un million de tonnes, une unite offensive rapide de la classe Tortionnaire. Même..."
"Mais j'ai été démilitarisé !"
"Je parie que même sans ton armement principal tu pourrais bousiller une planète."
"Et alors ! Même les tocquards savent faire ca !"

(P.61-62)
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Video de Iain M. Banks (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Iain M. Banks
Hélène Collon, c'est LA traductrice de Philippe K.Dick, qui vient d'achever la nouvelle traduction d'Ubik paru aux Éditions J'ai Lu dans la collection « Nouveaux Millénaires ».
Hélène Collon est avant tout une grande lectrice qui porte haut les couleurs de la science-fiction avec l'imagination comme horizon.Embarquement immédiat pour un cours magistral de SF !
NB : Hélène Collon a reçu le grand prix de l'imaginaire de la meilleure traduction en 1994 pour L'Homme des jeux de Iain Banks.Elle a également été lectrice à de nombreuses reprises pour le Centre national du livre, qui se fie à son regard acéré.
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