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Citations de Georges Gusdorf (82)


Le corps et l'esprit, quelles que soient leurs qualités ou leurs déficiences, ne sont pas imposés à l'homme comme un destin, mais plutôt comme un cahier des charges dont il appartient à chacun de tirer le meilleur parti pour son affirmation personnelle. L'individu conserve un droit de reprise, en seconde lecture, sur les éléments constitutifs de son être ; loin de se trouver soumis passivement aux automatismes de son corps ou aux lois de son esprit, il conserve une sorte de marge par rapport à ces dispositions, dont il peut remettre en question le caractère favorable ou défavorable. En ce sens, il appartient à chacun de faire sa santé ou sa maladie, c'est-à-dire de mettre au point une formule d'équilibre qui lui soit propre. Certes l'anatomie et la physiologie res-tent valables comme aussi la psychologie et la sociologie, avec leurs diverses exigences. Mais la santé ou la maladie de chacun est une variation sur le thème général de la maladie ou de la santé de tous. En dernière instance, c'est la personne elle-même qui garde le dernier mot, et le droit, ou plutôt le devoir, de créer la figure de sa situation en face du monde. Même si, en fin de compte, tel ou tel déterminisme naturel s'impose, comme une maladie mortelle, il appartient à l'homme de transfigurer ce qui paraissait une impasse, par son refus ou son consentement. S'il n'est pas maître de l'événement, il reste maître du sens.
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J'ai passé sept ans de ma vie dans l'École Normale de la rue d'Ulm ; j'ai enseigné une quinzaine d'années à la Faculté des Lettres de Strasbourg, sans qu'on m'ait jamais posé, sans que se soit jamais imposée à moi la question du sens de l'Université. Tel un enfant élevé dans le respect absolu d'une religion traditionnelle, revêtue à ses yeux d'une autorité de fait, j'avais foi dans cette Université non définie, à laquelle je me sentais lié par vocation autant que par raison administrative. Il ne me serait pas venu à l'idée de me demander si le vocable désignait par exemple le corps enseignant dans son ensemble, ou une circonscription géographique, ou encore un édifice de style médiocre, telle la bâtisse en forme de gare de la rue des Écoles, ou le palais bis-marcko-munichois de Strasbourg. Sans doute le mot Université trouvait-il l'un de ses épicentres de signification dans l'idée d'enseigne-ment supérieur ; mais ce n'était là qu'une acception parmi les autres, et non la plus évidente, car un terme qui désigne l'enseignement dans son ensemble ne saurait sans risque de malentendu s'appliquer à l'un des ordres de l'enseignement, à l'exclusion des autres.
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Le XVIIIe siècle, où se donnèrent libre cours l'esprit de critique et de contestation, demeure lui-même une question contestée. La vérité de ce temps apparaît de toute évidence comme une recherche de la vérité. L'historien qui s'imaginerait pouvoir en dégager un sens unitaire et définitif attesterait par là même une incompréhension assez naïve.
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Or, comme le disait Lucien Febvre, « l'histoire des mots modernes, même si l'on se restreint à, une seule langue (et comment s'y résoudre ? car quoi de plus voyageur, quoi de plus sensible aux influences qu'un mot ?), l'histoire des mots même les plus gorgés de valeur historique et humaine, est proprement impossible à connaître et à reconstituer, sinon au prix d'efforts disproportionnés avec le résultat » . Febvre donnait en exemple la langue de l'économie, langue récente pourtant, dont certains termes essentiels sont d'origine et de signification mal connues, sinon inconnues : tels les mots prolétaire, capitaliste, ingénieur...
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Un exemple frappant de l'ingérence des présupposés doctrinaux, conscients ou non, dans l'histoire culturelle, pourrait être tiré du cas particulier du socinianisme, l'une des idéologies les plus actives du XVIIe siècle. Ce protestantisme libéral, pour parler en termes modernes, est caractérisé par une attitude antitrinitaire, renouvelée de l'arianisme, qui met en question la divinité du Christ.
Ces déviationnistes figurent dans les marges de toutes les histoires religieuses.
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Or le catholicisme n'est pas tout le christianisme, et la France seule n'est pas toute l'Europe. La Révocation de l'Édit de Nantes ne prend sa pleine signification que dans le contexte global de l'histoire de l'Europe et du monde, dans le contexte aussi de l'histoire des églises réformées ; il intervient comme une péripétie dramatique dans une histoire interconfessionnelle de la conscience occidentale. Aux clameurs de triomphe de Versailles et de Rome, il faut ajouter les protestations qui s'élèvent de Genève à Berlin et d'Amsterdam à Londres devant ce péché contre l'esprit, dont les prolongements à long terme apparaissent incalculables. Une théorie des ensembles de la culture ne peut se contenter d'une opposition sans nuance entre un catholicisme, considéré comme une orthodoxie intégriste, et un non-catholicisme, qui engloberait tout le reste, en vertu d'un manichéisme naïf.
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La force véritable n'exclut pas la fragilité. Tout homme est vulnérable, tout homme a ses points faibles.
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Chaque vie humaine connaît ses moments de faiblesse, chacune, plus ou moins, abrite au-dedans de soi la gamme entière des possibilités de défection dont nous venons d'énumérer quelques-unes. La force, en effet, n'est pas l'absence de faiblesse, comme une qualité naturelle une fois donnée, mais bien plutôt le dépassement de la faiblesse toujours offerte comme l'autre possibilité, et la plus facile.
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On ne s'est pourtant pas battu toujours et partout pour la liberté. Pendant la majeure partie de l'histoire de l'humanité les guerres empruntaient à l'idéologie d'autres justifications, non moins nobles et désintéressées d'ailleurs. La liberté ne correspondait pas à une exigence fondamentale de l'être humain. On peut même dire que, jusqu'à une date très récente, la plupart des peuples de la terre restaient insensibles aux charmes de cette revendication, qui définissait seulement l'un des aspects de la civilisation occidentale.
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C'est seulement lorsque l'homme contemporain sera redevenu maître de soi qu'il pourra se croire vraiment maître et possesseur de l'univers. Pour le moment, vaincu par ses conquêtes, il ne peut que douter du monde et de soi-même, et compenser ce doute par le désespoir, ou les frénésies du fanatisme. La vertu de force, condition préalable d'un retour à l'ordre, est le fondement de toute sagesse possible comme affirmation résolue de l'homme dans le monde.
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L'émigration américaine réalise une sélection des meilleurs, des âmes fortes, qui choisissent de sauver leur intégrité spirituelle au prix des plus dures épreuves. Un grand nombre des nouveaux arrivants mourront à la peine. Pour la plupart de nos contemporains, toute les émigrations se valent ; leur motivation commune est la recherche d'un mieux-être, d'une nouvelle chance de vie matérielle. Ce n'était pas le cas des fondateurs. Le peuplement des colonies de Nouvelle- Angleterre est à cet égard tout à fait différent de celui de l'Amérique latine.
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Ce qu'on est convenu d'appeler les Lumières constitue un conglomérat de thèmes, d'idées et de valeurs qui se forme en Occident au cours des dernières années du XVIIe siècle, en réaction contre l'ontologie dominante de la métaphysique classique.
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L'histoire est toujours « à suivre », en attente du cours des temps qui achèvera de lui donner un sens, dans un report toujours recommencé du passé au futur. Elle est donc à refaire, au fur et à mesure de la procession des âges, révélatrice de significations imprévues.
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L'histoire est à la nation ce que la mémoire est à l'individu : ce qui demeure présent et vivant des souvenirs du passé. À ceci près que mon passé n'appartient qu'à moi seul ; j'en suis seul le dépositaire et le conservateur, seul je suis responsable des altérations et des oublis au sein d'un patrimoine qui ne cesse de se corrompre et finalement disparaîtra dans l'anéantissement de ma mort. Le passé national, lui, est un bien commun, déposé dans des archives publiques et confié à la garde d'un personnel spécialisé. Les historiens ont pour tâche d'entretenir la flamme du souvenir ; ils doivent empêcher que se perdent les traces des anciens jours et veiller à l'exactitude dans la version du passé transmise de génération en génération. Responsables de la tradition qu'ils doivent perpétuer, les historiens sont aussi tenus à un devoir d'objectivité scientifique, susceptible d'entrer en conflit avec l'appartenance nationale.
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Le matérialisme présente un caractère aussi ambigu que le concept de matière sur lequel il s'appuie. Au départ, il se propose comme une philosophie de la nature, réaction contre les philosophies de l'esprit, qui se contentent d'articuler des concepts sans rapport avec les réalités concrètes du devenir des êtres et des choses.
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La vie donne à la conscience romantique sa profondeur existentielle ; elle ouvre à l'identité romantique sa perspective d'insertion dans l'espace et le temps du monde. Son indivision originaire propose le fondement de toute prise d'être, référence des références et justification des justifications, au mépris des systèmes et axiomatiques proposés par l'autorité de la raison.
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Un aphorisme de l'époque prononce : « Est artiste qui a son centre en soi-même. Celui à qui cela fait défaut doit se choisir hors de lui un certain guide et médiateur, naturellement pas pour toujours, mais pour commencer. Car sans un centre vivant, l'homme ne peut pas être, et s'il ne l'a pas encore en lui, il ne doit le chercher que dans un homme, et seul un homme pourvu d'un centre peut attirer et éveiller le sien ».
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Ce faisant, à force de formules et d'arguments, les docteurs ont tout embrouillé. Ils ont perdu le contact avec le Dieu de l’Évangile et le monde de l'expérience. Si l'on veut retrouver le chemin de la piété, de la sagesse, de la vérité, il faut repartir à zéro, c'est-à-dire créer une nouvelle langue.
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Parler, c'est sortir du sommeil, faire mouvement vers le monde et vers l'autre.
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L'essence du romantisme évoque une théologie négative. En vertu de l'analogie fondamentale entre l'homme et Dieu, la théologie négative est corrélative d'une anthropologie négative. La théologie apophatique enseigne que Dieu échappe aux prises du discours et défie les figures humaines dont on voudrait le faire prisonnier. crée à l'image de Dieu, l'homme, dans sa vocation à l'infini, se dérobe à l'analyse linguistique. l'homme, disait Pascal, passe infiniment l'homme. La réalité humaine, en sa plus haute actualité, s'ouvre en abîme insondable.
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