Les hasards de la vie nous font parfois perdre notre chemin, nous engageant sur une voie qui n'était initialement pas la nôtre mais qui l'est devenue par la force des choses. C'est sur ce constat que
Benedict Wells, écrivain allemand, construit le récit de son quatrième roman «
La fin de la solitude » publié en 2016. C'est en effet ce qui arrive à Jules, le narrateur, lorsque ses parents sont tués dans un accident de voiture. À partir de là, sa vie devient une succession de ratés, tous plus ou moins liés à cet évènement fondateur, pierre d'angle de sa nouvelle existence.
Le roman s'ouvre sur le réveil de Jules Moreau à l'hôpital à la suite d'un terrible accident de moto. Avoir côtoyé la mort de près lui fait revenir en mémoire un événement tragique de son enfance : à l'âge de onze ans, il perd ses parents dans un accident de voiture dans le sud de la France. Devenus orphelins, sa soeur Liz, son frère Marty et lui-même se retrouvent à vivre en pensionnat. Privés de leurs parents et séparés dans l'institut, ils tentent tant bien que mal de faire face à la solitude. Comment grandit-on en ayant perdu ses repères ? Chacun des trois jeunes fait face comme il peut, à sa façon. Liz devient une jeune femme qui fuit sans cesse et surtout elle-même, Marty se lance à corps perdu dans une vie bien rangée et Jules se cherche. Une personne va cependant donner un élan à la vie de Jules : elle s'appelle Alva. Pensionnaire comme lui, ils passent leur temps ensemble mais finissent par se séparer, se retrouver, s'éloigner à nouveau et bis repetita.
Ce roman est ainsi à la fois un récit initiatique sur le deuil, la résilience et l'importance des liens familiaux mais surtout une histoire d'amour entre deux solitudes qui tentent de s'apprivoiser mais prennent la fuite par peur. le sujet est intéressant et peut être bouleversant à plein d'égard mais force est de constater que le fond dramatique et des destins brisés ne suffisent pas à faire un grand livre. En l'espèce, il est difficile de saisir la personnalité des trois frères et soeurs y compris le héros narrateur. On peine à s'attacher à eux car ils n'ont jamais pris forme. Tout au long du livre, ils restaient tous assez abstraits, sans épaisseur.
Finalement, on referme le livre avec le sentiment d'avoir assisté à des drames familiaux et des moments de vie forts sans avoir été touché une seule fois. le style d'écriture – sans être désagréable – est d'une froideur clinique (le fait que l'auteur soit allemand n'y est peut-être pas étranger…).
Pire, ces relations qui oscillent au gré des séparations, études, travail, échecs, succès, mariages, séparations, retrouvailles, maladies, décès et autres incidents de la vie, paraissent toxiques à bien des égards. Cela vire carrément au malsain à plusieurs moments notamment du long passage sur la cohabitation à trois, dans un chalet suisse, entre Jules, Alva et son mari. Cette situation semble artificielle, peu vraisemblable et dérangeante.
Enfin, il est important de prévenir que le lecteur est malmené entre plusieurs aller-retours temporels. Chaque chapitre est défini par une date importante pour le narrateur, Jules. le rapport au temps de
Benedict Wells est très particulier, on a le sentiment que ce sont les passages qu'il omet, les événements de la vie de ses personnages qu'il ne raconte pas, qui sont les importants.
Au final, si tout semblait réuni pour que ce livre séduise, la magie littéraire ne fonctionne pas. de bien minces trouvailles qui ne risquent pas de nous laisser un souvenir impérissable de cette lecture dans la durée.
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