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EAN : 9782253936251
416 pages
Le Livre de Poche (15/02/2023)
3.44/5   32 notes
Résumé :
Djalli mourut le premier d’une méningite, Ingimar fut emporté au fond de l’eau par un filet de pêche, on retrouva le corps de Staffan dans la commune libre de Christiania à Copenhague, Fríðrikur fut lâchement assassiné, Olaf mourut d’une maladie interdite et Kári fit leur éloge funèbre. Sur plus de quarante années, de l’éducation religieuse à la révolution sexuelle, en passant par les luttes pour la culture féroïenne à l’exil sur le continent européen, le roman suit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Les Iles Féroé sont rarement mises à l'honneur en termes de tourisme, de littérature ou encore d'actualités. C'est pourquoi j'ai lu cet ouvrage essentiellement par curiosité, pour découvrir cet environnement quasi arctique et la population qui le peuple. L'archipel des Iles Féroé fait partie du royaume Danemark. L'auteur situe le récit dans les 1950-1960. Joanes NIelsen, prend un angle original pour ce faire. Dlalli, Ingimar, Staffan, Fridikur et Olaf, anciens amis d'enfance constituent le support de la rude vie que mènent les habitants des Iles Féroé. le récit est brut et sans concession. La vie n'est pas facile entre climat capricieux et froid, économie réduite à la pêche et aux activités maritimes. le statut politique de l'archipel est un autre sujet abordé par l'auteur induisant l'affirmation des identités dans l'emploi des langues : la langue officielle est le Danois mais bon nombre de Féroiens ont longtemps revendiqué leur langue régionale comme langue officielle. C'est chose faite à présent. Les Iles Féroé ne me semblent pas un endroit accueillant.
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« Djalli cessa de collectionner des images en troisième année. Tout le monde arrêta en même temps. »
« Les collectionneurs d'images » est solaire, un classique à l'aube née. Ce grand livre « nord atlantique » est l'image la plus sincère des Îles Féroé. Six enfants tous des garçons sont le microcosme de ce livre multitude et beau. Un film à ciel ouvert, une page d'un journal que l'on retient pour demain. Ce récit est à l'instar d'un témoignage crucial. C'est un éloge funèbre (ne prenez pas peur). Kári conte la mémoire d'Olaf Lydersen, le cinquième disparu le 7 février 1996. « Les collectionneurs d'images » prend vigueur. On écoute le battement des Îles Féroé, on pénètre subrepticement l'orphelinat en 1952, on reste en assise dans l'école Saint-François de Tórshavn. Pas de pathos, nous sommes dans une autre dimension. Les images sont pour ces jeunes enfants, une corde à noeuds, le symbole de l'attachement, la reconnaissance suprême, un lien de camaraderie inestimable.
« Les meilleurs élèves recevaient la belle carte verte, et Djalli était de ceux-là. La plupart recevaient la carte jaune moyenne. Et les chenapans en chaussettes trouées recevaient la honteuse carte rouge… »
« Par beau temps, les collectionneurs d'images avaient l'habitude de se retrouver près du poulailler des nonnes. Environ sept à huit enfants. Ils s'asseyaient sur l'herbe avec leurs albums et leurs boîtes, et ils se montraient leurs images. »
L'histoire est mappemonde. Ces six garçons sont le symbole d'une micro-société qui se bat contre vents et marées. Chacun arrime une image sociologique, politique, philosophique. La toile de fond des Îles Féroé aux coutumes vives, aux aprioris sévères. Les couleurs sont apaisantes, profondes et exaltent les cheminements qui s'entrecroisent et perdurent dans le temps jusqu'à la finitude.
« Les Féroïens sont un peuple faible, dit le père en tendant la bière à Staffan. Pourquoi les Féroïens ne connaissent-ils pas l'art de penser plus rationnellement de façon plus moderne, je l'ignore. »
La libre-pensée, les religiosités, les orientations sexuelles, le Sida, la bête honteuse des Îles Féroé. Ce livre est bien plus qu'une épopée, mais le lever de rideau sur les habitus, l'idiosyncrasie, les diktats, l'authenticité d'une époque et son histoire qui est ressac et résistance. le canevas des Îles Féroé qui sont perfectibles à l'instar des insulaires eux-mêmes. Cette « fresque » est le passage obligé pour toucher les couleurs du vrai monde. La profondeur intrinsèque, les conjugaisons d'enfances sont des éloges souveraines et vitales. Lire ce livre, approuver les signaux, les interpellations, ces vies lianes, le mystique entrelac d'une écriture poétique, le regard altier de l'intégrité. Ce livre bleu-nuit, sérieux car cadré à l'ultime est un hymne à l'endurance et à la constance des sentiments. C'est une cartographie fabuleuse d'enfants, d'hommes devenus, dans un cercle où la vie même prend tout son sens. Un hommage aux Îles Féroé. Jóanes Nielsen est digne d'un génie évident : « Rien que des mots anciens, répondit Kári en souriant. Ils sont seulement changé de propriétaire. ». Traduit du danois (Danemark) par Inès Jorgensen. Postface et validation linguistique à partir du texte original féroïen par Malan Marnersdóttir. Magistral, culte, incontournable. Publié par les majeures Éditions La Peuplade.



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Cinquante ans d'îles Féroé contemporaines dans les vies de six enfants devenant adultes (ou non). Cruel et drôle, politique et poétique, un grand roman.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/05/27/note-de-lecture-les-collectionneurs-dimages-joanes-nielsen/

Il n'est pas si fréquent qu'un roman démarre ses premières lignes en nous annonçant, même à grands traits, les circonstances de la mort de cinq de ses six protagonistes. Djalli, Ingimar, Steffan, Fríðrikur, Olaf et Kári : six gamins des Îles Féroé, ayant eu sept ans en 1952, partageant les bancs de la même école privée catholique (dans un environnement notoirement protestant – cette particularité sociale sera élucidée en temps utile) à Tórshavn, la capitale de ce territoire danois, écartelé entre sa métropole à 1 000 kilomètres, les écossaises Îles Shetland, à 280 kilomètres seulement mais généralement superbement ignorées, en tout cas à l'époque, et l'Islande, à 430 kilomètres, voisine d'insularité, de désir d'indépendance, et souvent de coeur, six gamins un peu à part de leurs camarades car passionnés entre leurs 7 et leurs 10 ans par un loisir particulier qui leur vaut le surnom collectif de collectionneurs d'images, six gamins dont les vies individuelles, qu'elles soient finalement fort brèves ou plus longues, vont incarner, parmi de nombreux paradoxes et dans un tourbillon de résonances souvent étonnantes, la vie collective de l'archipel de l'Atlantique Nord, entre 1952 et 2005.

Avec ce roman de 2005, son deuxième, traduit en français en 2021 à La Peuplade (dont la collection Fictions du Nord, soutenue par le Laboratoire international de recherche sur l'imaginaire du Nord, de l'hiver et de l'Arctique de l'Université du Québec à Montréal, s'affirme désormais d'une redoutable ampleur) par Inès Jorgensen à partir du danois (Malan Manersdóttir assurant à la fois une postface plutôt documentaire et une validation linguistique à partir du texte original féroïen), le poète et dramaturge Jóanes Nielsen s'affirme sans doute, même sans attendre le succès international de son troisième roman, « Brahmadellarnir » (non encore traduit en français) en 2011, le plus à même de transmettre au monde une âme féringienne contemporaine, s'il en est, sans jamais effleurer la tentation du roman national.

Digne successeur assurément du grand William Heinesen (1900-1991), l'auteur de « Aube venteuse » et de « La marmite noire » faisant d'ailleurs quelques savoureuses appariitions en caméo dans ces « Collectionneurs d'images », Jóanes Nielsen réussit la prouesse relativement peu fréquente d'écrire un véritable roman réaliste, social et politique, cru et même parfois brutal (ni les violences domestiques, ni les ravages de l'alcool, ni l'exploitation capitaliste, ni le somnifère religieux, ni la répression sexuelle, ni les conflits nationaux et coloniaux, ni la dureté banale de la pêche hauturière ne sont ici masquées, alors même que le récit commence à hauteur d'enfant), tout en le subvertissant de l'intérieur, en permanence, par une écriture rusée qui associe d'une manière difficile à définir, pourtant, humour et poésie (l'auteur en a produit neuf recueils entre 1978 et 2016 – on peut d'ailleurs l'écouter ici, par exemple), pour percer quelques trous prometteurs dans une réalité autrement implacable, faire vaciller les certitudes du récit officiel, et ouvrir de curieux espaces à l'amour, à l'amitié et à la ferveur.

On pourrait songer, peut-être, à la manière dont un Claro transformait une banale intoxication collective en tout autre chose dans son « Tous les diamants du ciel », ou bien à la façon dont un canevas lointain héritier d'un Émile Zola, pour simplifier, au lieu d'être entraîné dans un mouvement glissant de transformation littéraire par un William Heinesen, justement, aurait été directement plongé dans un bain d'étrangeté malicieuse où flotteraient les épices du Andreï Platonov de « Tchevengour » et celles du Mircea Cǎrtǎrescu de « Solénoïde ». Et c'est sans doute bien ainsi que naissent les grands romans capables de réellement transformer nos regards.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Ils sont six garçons et cinq d'entre eux mourront, quatre assez jeune, le cinquième beaucoup plus tard. le sixième reste en vie et est le témoin de la disparition de ses amis. Connaitre les raisons de leurs morts n'est pas primordiale, ce qui l'est en revanche c'est de découvrir leurs vies, celles de leurs parents et les liens qui les unissent.

Ces garçons, collectionneurs d'images pendant leur temps libre, se sont rencontrés dans une école dirigée par des nonnes où la sévérité et l'autorité étaient deux principes cruciaux. Avec le premier de ces gamins, Djalli, on découvre l'atmosphère de l'école, les chamailleries, les punitions corporelles et l'amitié naissante. Avec les autres, c'est l'adolescence et les premières expériences amoureuses et sexuelles, c'est la vie d'adulte qui s'offre à eux, sur l'île ou sur le continent, ce sont les rapports familiaux tendus et les secrets de familles connus par les insulaires et non par les personnes concernées.

Pendant la lecture de ce beau pavé, j'ai eu cette impression de bien-être. Non que ce soit un roman léger et joyeux mais cette sensation venait de cette faculté à entrer dans la vie de ces personnages, de pouvoir les connecter facilement les uns aux autres et de découvrir leurs familles.
Jóanes Nielsen rapporte sur plus de quarante ans la destinée de ces six garçons originaires des îles Féroé en mettant l'accent sur leurs vies intimes, leur relation avec la masculinité, entre des images de pères à la limite de la misogynie et de l'homophobie et la volonté pour ces garçons de se défaire de ces carcans. L'auteur exploite aussi les envies d'indépendance et de liberté, entre tradition féroïenne et domination danoise.

Lire Les collectionneurs d'images c'est vivre pendant 440 pages sur cette île lointaine et découvrir un pan historique de cet archipel indépendant, grâce aux mots de Joanes Nielsen.
Lien : https://pagesversicolores.wo..
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L'archipel des îles Féroé n'est pas très connu, sans doute parce qu'il se trouve tout au nord de l'Europe, entre l'Écosse et l'Islande. La vie est rude dans ces contrées humides et froides et Jóannes Nielsen parvient à nous le faire ressentir dans ce roman.
Tout démarre dans les années 1950, dans une classe d'école primaire, où des enfants se montrent et s'échangent des images. L'auteur va suivre la vie de quelques-uns de ces garçons, souvent tragique. Et par ce moyen, le lecteur comprend les difficultés que rencontrent les habitants de ces îles.
C'est très agréable à lire, même si relativement noir, permettant de se rendre compte combien il est difficile de trouver du travail sur une île, de s'émanciper dans un monde encore très rural et conservateur où tout le monde se connaît. Difficile aussi de défendre son particularisme.
Je le recommande à tous ceux qui veulent en apprendre plus sur la vie dans cet archipel car c'est un témoignage de vies encore plus parlant qu'un guide touristique.
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critiques presse (1)
LeMonde
17 mai 2021
Dans un roman subtil, l’écrivain féroïen tresse le destin après-guerre d’un pays aux confins septentrionaux de l’Europe.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
La fille secoua la tête, et le sourire qui s'étendit sur son visage devint un tournesol rayonnant.Telle est l'image précise qui vint à Fríðrikur.Un tournesol.Près d'un couvent franciscain Danois du Jutland, il avait vu un champ entier de tournesols, et lorsqu'il s'était rendu avec le prêtre Heggen à Assise, il avait remarqué cette haute fleur jaune dont la corolle suivait, énamourée, la marche du soleil.

( La Peuplade, 2021, p.287)
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Qu'un roman de Dostoievski soit à présent le mince fil qui relie père et fils, ce n'était pas seulement inattendu, non, Staffan trouvait que c'était presque suspect.Ils n'avaient pas l'habitude de parler ensemble, et pas du tout de littérature ou de politique.Sans doute son père pensait-il que le conflit linguistique était une sorte de nihilisme féroïen.(*** les Danois se mettait à interdire aux féroïens de parler leur langue)

.Et peut-être aussi avait-il raison sur ce point.Mais son projet à présent était-il par hasard de lui mettre la pression ? Mettre la pression.Son père lui a jamais mis la pression.Et avec quoi pourrait-t-il éventuellement le faire ? Le style de son père était sans doute d'émousser la colère de son opposant par la gentillesse.

( La Peuplade, 2021, p.176)
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Il ne pleura pas non plus quand sa grand-mère lui donna une photographie de sa mère. Qu'en réalité son absence de pleurs dévoilait à quel point il était émotionnellement atrophié, cela ne lui apparut clairement que bien des années plus tard.

( La Peuplade, 2021, p.245)
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Mais les placards à livres fascinaient Kári.Que l'on construise des maisons pour les étourneaux, ça se comprenait, tout comme une cabane pour le bateau et peut-être aussi pour la voiture.Mais une maison pour les livres ?


( La Peuplade, 2021, p.153)
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- Nous parlons de socialisme, pas de nationalisme, dit le censeur.
- Nous parlons de révolte, répondit Staffan.Vous m'avez demandé ce que la Révolution a à voir avec la morale.Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'il y ait une morale nationale particulière,ou une morale socialiste particulière, ni même capitaliste ou chrétienne .La morale naît de l'indignation.
Et les gens qui ne contiennent pas d'indignation ne peuvent pas non plus être porteurs d'une morale élevée.

( La Peuplade, 2021, p.193)
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