« Monsieur Yann » sollicite d'un membre de la délégation de Corée du Nord en France l'obtention d'une autorisation pour se rendre dans ce pays. C'est l'occasion d'un vif échange entre les deux hommes. ● Il s'agit d'un texte uniquement dialogué, sans aucune partie narrative, ni même proposition incise (mais on comprend toujours qui parle). ● On sait que
Yann Moix s'est rendu en 2018 en Corée du Nord avec
Gérard Depardieu, qu'il a filmé à cette occasion, l'acteur tenant des propos qui lui ont été vivement reprochés. On sait aussi qu'il est fasciné par les deux Corée. Peut-être le présent texte est-il inspiré de sa véritable demande de
visa. ● le livre est très réussi, rythmé, sautillant, il est souvent très drôle, avec beaucoup de subtilité. Les deux hommes ont du mal à se comprendre ; le Coréen est pétri d'idéologie, aveuglé par sa soumission totale aux Kim, et le Français s'exprime avec trop de circonvolutions et donc d'hypocrisie (d'après le Coréen). ● Cela donne lieu à des quiproquos, à des phrases prises au sens littéral alors qu'elles ne devraient pas (comme un simple « je vous en prie » dit par « Monsieur Yann » qui est interprété par son interlocuteur comme une vraie prière ; il exprime alors son rejet de toute religion). ● Il y a bien sûr une critique sous-jacente du régime nord-coréen, mais surtout une mise en évidence de l'abîme qui existe entre les deux univers. ● « Chez nous, il ne faut pas chercher à être plus malin que les autres. Il faut être malin comme les autres, comme n'importe quel autre, mais pas plus. Pas moins, pas plus. Si un camarade est plus malin qu'un autre camarade, et qu'en plus il le montre, nous considérons que cela peut créer des problèmes. Si vous cherchez à jouer au plus fin avec moi, c'est que vous n'êtes pas dans un bon état d'esprit pour partir. Notre nation ne recherche pas la finesse. » ● Il y a aussi tout un jeu sur des proverbes prétendument coréens : « Qui pêche le saumon l'hiver doit savoir nager dans le fleuve en été. […] La mangouste ne craint que le vent du soir, le rhinocéros, le soleil du midi. […] le loup suit le loup ! Et réciproquement. » ●
Yann Moix profite de ce texte sur la Corée pour dire des choses sur la France par exemple dans ces quelques lignes polémiques : « Les Français se servent de la France mais ne la servent pas […] Chez vous, il n'y a plus de patrie. Et il n'y a plus de nation. Les musulmans le savent. Ils vous l'ont exprimé de toutes les manières possibles. Votre lumineux lendemain, c'est de devenir tous des Arabes. L'islam ne serait pas possible chez nous, je vous le garantis. L'islam est incompatible avec nos paysages, nos fleurs, notre mer, notre ciel et nos montagnes. Vous souhaitez la bienvenue à trop de monde. Vous êtes heureux à l'idée d'accueillir chez vous n'importe qui. Vous faites naître sur votre sol le premier venu. Votre pays est une poubelle. Vous trouvez tout le monde merveilleux. Et c'est ainsi que tous les gens merveilleux veulent votre mort. » ● Il ne s'épargne pas lui-même en écrivant avec humour et autodérision : « Votre existence semble le seul domaine dans lequel vous faites carrière. […] L'humilité […] n'a pas l'air d'être votre fort. » ● L'auteur écrit en exergue que « ce petit livre […] prendrait avantageusement vie sur la scène », et en effet sa dimension théâtrale est évidente. ● Je remercie beaucoup #NetGalleyFrance et les éditions #Grasset de m'avoir permis de lire #
Visa de #YannMoix.