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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le petit village africain de Kosawa se meurt, ses terres polluées et ses enfants empoisonnés par les activités d'extraction pétrolière d'une multinationale américaine. Lasse des promesses de réparation non tenues, la jeune génération entreprend de se défendre, par tous les moyens s'il le faut. A leur tête, Thula est prête à y consacrer sa vie.


Lutte du pot de terre contre le pot de fer, le combat à l'origine plein d'espoirs d'une poignée de villageois tenus pour quantité négligeable va s'avérer une partie épineuse, désespérante et usante. Malgré leur détermination d'autant plus ferme qu'elle s'assortit d'une confiance ingénue en leur bon droit et en la justice, rien ne se déroulera selon les attentes de Thula et des siens, les contraignant à user tour à tour de toutes les armes à leur disposition. Intervention des media et d'organisations humanitaires, action en justice auprès des instances internationales, voie pacifique ou violente : leur adversaire est au coeur de bien trop d'intérêts croisés pour se sentir ne serait-ce qu'un instant ébranlé. Surtout lorsqu'à la longue, les habitants de Kosawa eux-mêmes ont toutes les chances de succomber à leur tour aux sirènes de la compromission et de l'enrichissement…


Plus fable politique que roman, le récit rassemble, en une histoire unique et symbolique, tout ce qu'ont pu vivre différents peuples, envahis, assujettis et exploités par des puissances étrangères, motivées par leurs seuls intérêts. Confrontées à l'esclavagisme, puis à la colonisation, et enfin au pillage de leurs ressources avec parfois la complicité de dictatures locales sanglantes et corrompues, bien des populations d'Afrique n'ont eu d'autre choix que de finir par abandonner toute résistance, troquant leurs modes de vie ancestraux contre une conformité dont ils espèrent tant bien que mal tirer leur part du profit.


Malgré sa formidable portée et la justesse de son observation historique et géo-politique, ce texte s'est révélé pour moi d'une lecture difficile et pénible. Lent, long et désespérément répétitif au fur et à mesure de l'alternance des points de vue des différents protagonistes, le récit nous plonge dans un combat aux multiples rounds, tous condamnés à l'échec, où Thula, l'héroïne principale, fait plus figure d'allégorie qu'elle ne s'incarne en personnage réel. L'ensemble en acquiert parfois un côté presque abstrait, qui perturbe l'immersion du lecteur dans le fil narratif.


A défaut de vrai plaisir de lecture, restent une démonstration puissante et une vision d'une sombre lucidité, propres à ouvrir bien des réflexions. le combat de Thula m'a notamment souvent fait penser à celui, bien réel, des Chagossiens, raconté récemment dans Rivages de la colère de Caroline Laurent.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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C'est l'histoire d'un village doté de richesses (pétrole, hévéa, ...). Celles-ci avaient le malheur d'intéresser des envahisseurs. Ainsi débute la tragédie des habitants de cette contrée ouest africaine, si similaire à d'autres sur le continent. Voilà qui explique peut-être pourquoi tant de protagonistes ont des prénoms qui invoquent des villes africaines.
Mais à Kosawa, des villageois pas dupes tentent d'affronter en vain, le rouleau compresseur de l'exploitation des terres et qui malgré le départ "des maîtres" en Europe continuent, différemment. Plus les générations passent, plus le constat est amer : les acquis (électricité, alphabétisation...) ne soldent pas l'époque où la nature avait le temps de se régénérer.

"Puissions-nous vivre longtemps" est une fresque fouillée semblable à de précédents ouvrages abordant la colonisation et les indépendances aux promesses trahies. Si l'histoire est prenante, le style teinté de mysticisme et par endroits faussement naïf m'a déroutée.

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«  Nous aurions dû savoir que la fin était proche. Comment se fait-il que nous ne l'ayons pas su ? Lorsqu'il s'est mis à pleuvoir de l'acide et que l'eau des rivières est devenue verte, nous aurions dû savoir que, bientôt, notre terre serait morte. En même temps, comment l'aurions-nous su alors qu'ils ne voulaient pas que nous le sachions ? [...] Ils nous ont dit que nous devions leur faire confiance. »


Dès les premières lignes du roman, le cadre est donné : « Nous » , ce sont les habitants du petit village (fictif) de Kosawa, en Afrique de l'Ouest. « Ils », ce sont les dirigeants du groupe pétrolier américain Pexton qui exploite depuis trois décennies les terres jouxtant le village, polluant allègrement l'air, le sol, le fleuve et l'eau du puits. Pexton a promis « civilisation et prospérité » , elle n'a apporté que désolation, empoisonnement et morts à petit feu.

Dans ce pays qui n'est jamais nommé , où « son Excellence », le Président du pays (un homme portant un « chapeau en peau de léopard incliné sur la droite » ) a bradé les terres et s'est rempli les poches, un village meurt dans l'indifférence générale ou presque.


Fausses négociations et fausses promesses pour endormir la révolte qui gronde.... Confiants en leurs droits et en la justice, les habitants tentent de sauver leurs terres et leurs enfants . Mais peut-on combattre le capitalisme allié à un état corrompu sans avoir recours à la violence ?


Thula qui a grandi dans ce village, a vu mourir certains de ses camarades et vu son père puis son oncle porter en vain les revendications, a eu l'opportunité de partir étudier aux États-Unis. Elle y forge son expérience militante auprès des différents mouvements de contestation sociale puis revient au pays mener le combat contre l'injustice et la corruption car «  je serai toujours l'une d'entre nous » écrit-elle à ses amis d'enfance.
Elle est l'une des voix de ce roman polyphonique , à côté de sa grand-mère Yaya , mémoire de son peuple, et de son jeune frère Juba tiraillé entre ses idéaux et son pragmatisme. Et puis il y a « Les enfants », comme le choeur d'une tragédie antique fait avancer le récit et le conclue.


Fable politique tout autant que roman, c'est la triste histoire de pays qui ont successivement subi la traite et l'esclavage , puis la colonisation et ses abus et qui souffrent aujourd'hui de la corruption de ses gouvernants et d'une forme de colonialisme économique dans laquelle le profit et la rentabilité passent bien avant le bien-être des populations.

On oscille entre révolte devant tant d'hypocrisie et de malheurs, et admiration devant la pudeur et la dignité de ces familles qui puisent dans leurs croyances et valeurs ancestrales la force de résister.


Un livre puissant sur ceux que Frantz Fanon appelait «  les Damnés de la terre » , qui rappelle en passant que les problèmes de ces pays viennent aussi de leur découpage arbitraire post colonial :
« Nous formons un agrégat de tribus sans rêve commun . Notre pays a été construit de force sur des sables mouvants qui, aujourd'hui, s'effondrent de l'intérieur. »


Même si je l'aurais aimé un peu plus resserré, ce 2ème roman de l'auteure americano-camerounaise Imbolo Mbue ne peut laisser indifférent.


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C'est David contre Goliath, le pétrole contre la terre, le capitalisme contre la culture, c'est l'écrasement de l'un au profit de l'autre.
J'ai beaucoup aimé ce dernier roman d'Imbolo Mbue. Beaucoup de personnages, de voix différentes pour nous conter cette histoire. Mais aussi des histoires différentes, des us et coutumes autre qui donne un autre sens au temps, aux choses.
C'est aussi la question de la transmission car que reste-t-il à transmettre quand tout disparaît ou meurt.
L'auteure nous dit le passé, le présent pour se demander quel avenir.
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Dans les années 1980, Thula, fillette d'une dizaine d'années, se souvient de la mort de nombreux enfants de son village de Kosawa, au Cameroun. Des morts probablement dues à l'empoisonnement de l'eau (et des terres environnantes) par une société pétrolière américaine sans scrupules (Pexton) installée sur des sites d'Afrique de l'Ouest depuis quelques années … Thula se souvient de leur duperie auprès des anciens, qui ont (plus ou moins volontairement …) fermé les yeux sur ces agissements destructeurs. de la trahison du chef du village, Woja Beki. de l'attente angoissée de toute la famille, après le départ du père (Malabo) vers Bézam (avec deux autres villageois) afin d'obtenir réparation. de leur inquiétante disparition. de son besoin de découvrir la vérité. de son immense désir de vengeance, enfin …

Un récit tragique qui dénonce un acte criminel. Semblable à tous ceux régulièrement accomplis par de grands industriels occidentaux (pour qui l'argent prévaut nettement sur la sauvegarde de la planète et de ses habitants les plus vulnérables …) Un incisif pamphlet également, contre l'abjecte corruption des gouvernements concernés, qui n'hésitent pas à envoyer l'armée afin d'intimider – et de neutraliser si nécessaire – les plus récalcitrants …

Sujet brûlant et toujours d'actualité : voir par exemple le méga-projet de Total en Ouganda (qui ne ferait qu'appauvrir un peu plus les paysans … ) Un roman chorale magistral, traité avec une grande intelligence, doublé d'une écriture magnifique et non moins percutante ! L'auteure donne la parole aux différents membres de la famille de Thula (tels que : Bongo l'oncle, Yaya la grand-mère, Sahel la mère, Juba le petit frère …) ainsi qu'à ses camarades de classe. Un émouvant moment de lecture !
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République du Cameroun, une petite ville : Bézam. Une grande multinationale pétrolière américaine : Pexton. Un grand nombre d'habitants spoliés de leur terre par cette société ! Non seulement pratiquement aucun subside en retour de extractions de pétrole, si ce n'est la pollution générée par les pipelines rouillés, les torchères avec leurs norias de fumées, les fuites de pétroles ; et en conséquence, les exactions qui touchent les habitants...

Les membres du petit village de Kosawa résistent, et malgré des pourparlers, n'obtiennent rien. le maître mot des responsables locaux de la société, devient un leitmotiv impertinent : patience, toujours une indéfectible patience.

Une jeune femme, Thula, sera l'égérie d'une révolte ; pour faire restituer les terres, les dépolluer ainsi que l'air et l'eau ; et enfin, dédommager les habitants du petit village. Son coeur ne tergiversera pas et toujours son regard et ses actes iront vers la justice, pour combattre l'impérialisme et le népotisme...

Un combat inégal, qui met en exergue, la liste sans fin des pays subissant le colonialisme, au détriment des bienfaits que pourraient leur apporter les richesses de leur pays. Mais souvent l'intervention des puissances occidentales usent sans états d'âme à piller celles-ci ; avec bien sûr la complicité des membres de l'intelligentsia locale.

Il est vrai que pour Thula, la faiblesse ainsi que l'absence de connaissance se trouvent être l'incapacité majeure de son pays ; mais elle veut cependant continuer à lutter pour Kosawa, il s'agit de son droit imprescriptible ; et finalement faire sortir son pays des ténèbres et accéder derechef à la lumière.

Imbolo Mbue, avec sa fougue et sa verve nous transporte aisément dans ce beau pays, avec ses lois et ses moeurs qui différent pour beaucoup des nôtres. Un pays où la parole des anciens, l'entraide et la fraternité ne sont pas des vains mots. Une rédemption pour cette auteure peut-être ? En somme une immersion dans un grand voyage et un bon moment de lecture.

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Je le dis d'entrée de jeu, j'ai eu du mal à lire ce livre, j'ai eu du mal à aller au bout de ce livre. Ce qu'il raconte est en effet dur, tragique, parfois insoutenable, d'autant plus insoutenable que l'histoire est cruellement possible.
A chaque chapitre son ou ses narrateurs. Ils alterneront tout au long du récit, parce que certains faits ne pourront être racontés par n'importe qui. le narrateur peut être un, comme Thula ou Bongo, son oncle, ou Sahel, sa tante. Il peut être choral, comme ce groupe d'enfants qui a le même âge que Thula, ce groupe de survivants, à la maladie, au massacre.
C'est l'histoire d'une multinationale américaine qui s'est installée dans ce village – dans d'autres villages aussi – avec la bénédiction de Son Excellence, qui dirige ce pays d'Afrique de l'Ouest. C'est l'histoire d'une multinationale qui engrange de grands bénéfices, et néglige tout ce qui peut assurer la sécurité des habitants du village. Les terres deviennent stériles, l'eau polluée. Les enfants tombent malades, et parfois, trop souvent même, ne guérissent pas. le petit frère de Thula aura la chance de revenir à la vie. Un parmi tant d'autres qui seront mis en terre avant leurs parents et leurs grands-parents.
C'est l'histoire d'années qui se transforment en décennies de lutte. Ce sont des tentatives pour faire bouger les choses, pour que réparations soient faites, dans tous les sens du terme. C'est l'histoire de choix, aussi, partir, rester, accepter l'argent, accepter le travail. C'est constater aussi que les employés de la compagnie, s'ils ont accepté de travailler pour la compagnie, ne sont pas forcément mieux lotis.
C'est l'histoire de traditions que les grands-parents, les parents essaient de transmettre. C'est l'histoire du capitalisme qui s'implante tranquillement en terre africaine, c'est l'histoire aussi du colonialisme, de l'esclavage, qui ont laissé des traces sur la terre et dans les mémoires.
Ce n'est pas un livre facile, je l'ai déjà dit, mais c'est un livre important, à lire et à partager.
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(...) Imbolo Mbue (1982) revient aujourd'hui avec Puissions-nous vivre longtemps (2021), un roman engagé et nécessaire sur les ravages du capitalisme à outrance que je ne peux que très vivement vous conseiller de lire.

Dans son deuxième roman, l'autrice camerouno-américaine dénonce les nombreux abus des sociétés transnationales et les graves conséquences qui en résultent pour l'environnement et les êtres humains. A travers la lutte acharnée d'un petit village africain contre un géant du pétrole américain, Imbolo Mbue livre un réquisitoire vibrant contre le capitalisme sauvage et l'impunité crasse dont bénéficient quasi systématiquement les transnationales qui polluent et tuent sans scrupules.
(...)
Le petit village de Kosawa se meurt depuis qu'une multinationale du pétrole s'est implantée dans le pays et a commencé à exploiter les champs pétrolifères situés à proximité immédiate du village. La terre et les rivières, irrémédiablement souillées, empoisonnent et tuent à petit feu des villageois de plus en plus désespérés. Suite à une énième fausse couche de sa mère, la jeune Thula jure de faire payer aux différents responsables ce qu'ils ont infligé à sa famille et son village. Prête à tout pour survivre, elle ne reculera devant rien, quitte à prendre les armes et user de la violence. Mais que peuvent réellement de simples villageois contre une entreprise toute puissante?

Si elle brosse un très beau portrait d'une femme forte, déterminée à se battre et se sacrifier pour que justice soit rendue, Imbolo Mbue choisit le roman choral pour élargir les thématiques (les ravages de la colonisation par exemple) et mettre en exergue les nombreuses tensions prévalant au sein du village de Kosawa qui est loin d'être unanime sur la stratégie à adopter.

Si je connaissais déjà le sujet et la problématique pour avoir travaillé dans une ONG engagée en faveur de la mise en oeuvre de normes internationales contraignantes sur les sociétés transnationales, je ne peux que me réjouir et acclamer la parution de ce roman qui aborde de façon simple des réalités complexes dont il est plus que jamais nécessaire de parler.

A lire absolument!

Lien : https://livrescapades.com
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Le pot de terre contre le pot de fer. C'est à cette fable De La Fontaine que me fait penser ce roman qui relate la lutte entre un petit village au bord d'un fleuve dans un pays d'Afrique de l'oues où sévit depuis plusieurs années un dictateur sanguinaire et une compagnie pétrolière du nom de Pexton qui exploite un gisement sur les terrains proches du village. L'histoire commence avec la prise de conscience que les nombreux décès d'enfants qui surviennent depuis quelques années sont dus à la pollution engendrée par l'exploitation du pétrole : air vicié, eau empoisonné, sols toxiques sont les maux subis par les villageois impuissants. La narration est confiée à plusieurs protagonistes, multipliant ainsi les points de vue, ce qui permet de rendre compte de la complexité d'une situation emblématique : l'affrontement d'un groupe de villageois contre les intérêts tout puissants d'une entreprise pétrolière profitant d'un régime corrompu. le constat est amer, ni l'appel au dialogue, ni la voie juridique ou politique ni le recours à la violence n'aboutiront.
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Ce roman est très bien écrit. Je l'ai commencé un soir, après avoir tenté d'en commencer un autre et convaincue que la fatigue me ferait abandonner tout aussi vite celui-ci. Et bien non, pas du tout ! J' ai immédiatement été happée par la plume !!
Il y a des passages merveilleux, une histoire révoltante. Et surtout cette plume.
Heureusement car l'intrigue s'essouffle un peu par moment, à force d'alterner les points de vue, il y a quelques redites. J' ai eu quelques lassitudes et pourtant, c'est tellement beau !
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