Après les lectures passionnantes de "
Réparer les vivants " et de "
Tangente vers l'est ", ce petit opuscule de 72 pages que nous propose
Maylis de Kerangal cet automne prend une allure de friandise surprise avant un ouvrage plus consistant. Bien sûr le sordide naufrage de ce bateau de migrants à Lampedusa n'augurait pas une lecture joyeuse mais promettait le regard éclairé d'une de nos plus talentueuses romancières de la décennie. Je me suis donc réservé une petite plage de tranquillité confortable pour déguster comme il se doit "
A ce stade de la nuit " (toujours des jolis titres !)... Et, je ne sais pas, une mauvaise posture ? Un mauvais moment malgré, coussins, ambiance douce et belle lumière ? La friandise est passée de travers. J'ai retrouvé dans ces quelques pages un concentré de ce qui pointait parfois le nez dans ces précédents romans, ce léger voile de préciosité et cette pose intello, qui empêchait déjà, pour ma part, un enthousiasme total pour ses écrits,
Maylis a une insomnie. Elle est dans sa cuisine, seule. Elle écoute la radio qui annonce le naufrage au large de Lampedusa d'un de ces rafiots bourré de clandestins qui ont dépensé toute leur fortune auprès de passeurs sans scrupules. Maylis écoute, veut savoir, se laisser pénétrer par le nombre des victimes et son cerveau se met en route. Surgissent alors les images du "Guépard" de Visconti, la lente dérive du personne de Burt Lancaster. Et soudain, ça lui saute aux yeux, le film décrit un naufrage ! Mais n'est-il pas tiré d'un roman de
Giuseppe Tomasi di Lampedusa ?! C'est totalement hâââllucinant ces confrontations des mots, des arts et du hasard ! Elle en est toute ébaubie Maylis. Elle se revoit dans le cinéma
Champollion redécouvrant la copie restaurée de ce chef d'oeuvre du 7 ème art. Puis, ne s'arrêtant plus de penser à ce terrible naufrage, elle convoque
Bruce Chatwin et son roman "
Le chant des pistes" lu dans le transsibérien (so chic!), les souvenirs de son voyage à Stromboli, la leçon inaugurale sur les paysages de
Gilles Clément au
Collège de France et d'autres tout aussi chics ou pointus.
Maylis n'arrête pas d'étaler sa culture alors que d'autres étalent des corps sur les plages italiennes.
La fin sur le blog
Lien :
http://sansconnivence.blogsp..