Que voilà un titre qui ferait les beaux jours de la fondation
Stéphane Bern pour le Patrimoine !
Victor Hugo développe dans ce petit format (100 par 140 mm), élégant et soigné, deux textes polémiques de défense du patrimoine ancien, notamment celui du Moyen Âge.
Le premier texte est une Note sur la destruction des monuments en France, écrit en 1825 : il y recense un certain nombre de destructions ou d'abandon pur et simple de monuments constituant un riche héritage, expliquant que souvent les matériaux sont prélevés pour d'autres constructions, et les institutions restent négligentes.
L'état des choses n'a pas dû s'arranger en 1832, car
Victor Hugo enfourche de nouveau son cheval de bataille, sabre au clair, pour crier "
Guerre aux démolisseurs !" Autant nous connaissons Hugo comme démocrate progressiste, autant nous le découvrons pourfendeur de la bêtise crasse qui ne suit que de petits intérêts immédiats et se donnent de fausses raisons patriotiques pour mettre à bas donjons et églises, qui sont les restes de la féodalité. Il donne de nombreux exemples, suite à un voyage effectué pour se rendre compte de la situation, exemples tous plus aberrants les uns que les autres. La moquerie va bon train, teintée d'amertume et d'incrédulité face à ces dommages irréparables. Deux ans plus tard,
Prosper Mérimée devenu Inspecteur général des monuments historiques, dépensera également une grande énergie pour sauver le patrimoine menacé de destruction.
Victor Hugo ne se contente pas de dénoncer, même si le ton est clairement pamphlétaire : il argumente, et ses paroles sont résolument modernes. Par exemple : les monuments sont un capital, en ce qu'ils attirent des visiteurs, ce qui rentabilise l'argent qu'on doit employer à les entretenir. En outre, la conservation des monuments historiques est de la responsabilité des collectivités, pour l'avenir de notre société, le rayonnement de sa culture. Bien sûr, il ne va pas sans vanter la révolution culturelle romantique, en exaltant l'architecture du Moyen Âge plutôt que les vestiges romains. À vrai dire, il sauverait ceux-ci également, mais il se passe très bien des bâtiments modernes.
Ce court opus ne manque pas de profondeur ni d'actualité, il donne envie de connaître les monuments cités, de s'interroger sur les politiques actuelles de sauvegarde du patrimoine. C'est de plus un bel objet, d'un format insolite, très facile à emporter avec soi.