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Citations de Édouard Jousselin (22)


Le café est une étrange lubie américaine. C’est comme si toute une nation s’était convertie à la pire version de cette boisson et, non satisfaite d’en consommer des litres trop dilués, avait décidé d’inonder le monde de son jus de chaussette, que seuls le lait et le sucre sont en mesure de sauver.
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Ça ne fait pas de bruit. Du moins ça n’en fait plus. Le fracas bref, puissant, s’est éteint aussitôt après le formidable craquement de tôle, éphémère comme un lacis de foudre. Sur la route, on ne perçoit pas la moindre trace d’un freinage. Rien. Pas de bandes de caoutchouc en lignes parallèles sur l’asphalte brûlant. Seulement le silence des débris.
(Incipit)
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Tu vois l'histoire, c'est comme une falaise énorme. On ne peut pas grimper tout en haut tant elle est riche et massive. Le travail des écrivains, c'est d'installer des prises dans les failles pour aider les lecteurs à grimper quelques segments.
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À chaque nouvelle attaque, les victimes passées du terrorisme se voient remettre le nez en plein dans la merde qu'ils ont vécue, et dont la majorité d’entre eux n'est jamais sortie. Le 11 septembre 2001 se vit en mondovision comme une finale olympique. L'excitation des téléspectateurs est au moins aussi intense. Un savant allemand a qualifié cette journée de premier événement mondial historique au sens strict.
Ben Crawford à Los Angeles, Jessica Dahlgren à Paris, Cándido Rincón dans sa loge de gardien de l’Arroyo Blanco, Isabelle et Dominique Richard à Quarré-les-Tombes, Lucien Michot sur son canapé, William et Lucy Smith dans le matin de l’'Oklahoma, Bruno Landisier quelque part sur la route d’un festival du film ou sur un plateau de tournage, tous reçoivent un flux d'ondes décrivant la trajectoire d'hommes se jetant d’une tour en flamme pour s’écraser à une vitesse folle sur la dalle new-yorkaise. Aucun ne peut détourner le regard ni éteindre son émetteur radio. Aucun ne comprend complètement ce qui se déroule. Aucun n'ose y croire. p. p. 261
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Regarde-moi. Tu vois, ça c'est être vieille. Mais c'est pas le problème, ça. Je vais t'expliquer pourquoi ça ne m'affecte pas. Je vis avec Patrick depuis trente-huit ans. Il m'a connue, ma taille était plus fine qu'aujourd'hui, et lui, ce bon gros bonhomme, à l'époque, il courait des marathons. Je n'ai jamais voulu autre chose que de l'avoir près de moi, élever nos enfants dans notre maison à la campagne, recevoir des amis, ouvrir une bouteille de bon vin, de temps en temps. Je suis une femme simple avec des désirs simples.

C'est ma chance, je ne suis jamais bien loin du bonheur. Patrick et moi avons vécu, avons vieilli, sans y penser. Nous nous sommes déformés ensemble. Le corps et l'esprit. Surtout l'esprit. Cest ce que font les couples. Ils se déforment ensemble. Chacun sculpte patiemment l'autre. Les couples heureux aussi bien que les couples malheureux.

Isabelle, ... tu es un don du ciel, à un point que tu ne réalises pas. Ne l'oublie jamais, je t'en prie. Quand tu seras déformée comme moi, il y a intérêt que ce soit par une vie de bonheur !
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"Il existe une hygiène du mensonge. Il suffit de répéter les phrases, comme une récitation de cours élémentaire. Après un certain temps, mentir ne coûte plus rien. Cela devient aussi facile que de dire la vérité. Plus tard encore, le vrai et le faux se dissolvent l'un dans l'autre, comme deux solubles dans un même vase. Ce n'est pas qu'ils sont indissociables, non, ils disparaissent tout simplement, et laissent place à quelque chose de bien plus beau : une histoire."
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Elle préfère, de son coté, nourrir sa curiosité au contact des autres. Ceux qui savent, ceux qui ne savent pas, ceux qui doutent et surtout ceux qui ont tout à apprendre. Elle deviendra prof, au collège ou au lycée. Elle enseignera le français ou l’anglais à des gamins qui un jour, grâce à elle, partirons rencontrer le monde.
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- Vous êtes professeur ?

- Si on veut, je donne un cours de cybercriminologie. Vous voyez, les crimes en ligne.

- je vois très bien. La cyber-criminalité, je connais. Un ordinateur a volé mon précédent job. Il faudra songer à le coffret à l'occasion. Cette affaire ma causé un sacré tort.
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Elle regarde les murs blancs, sans photos ni cadres. Elle juge cela un peu triste, d'autant qu'à travers la lucarne ne pénètre aujourd'hui qu'une lumière grise et automnale. Elle se demande ce que Max peut bien faire de ses journées, sans cours, sans connaissance dans la ville. Est-ce qu'il s'ennuie ? Est-ce qu'il passe vraiment tout son temps sur son PC?

Ses parents regardaient un reportage, la semaine dernière, diffusé à l'occasion de la rentrée universitaire, à propos des étudiants qui quittent le foyer familial et qui ne se rendent jamais en classe. Beaucoup s'enferment dans une réalité virtuelle. Apparemnment, certains se masturbent jusqu'à douze fois par jour, d'autres visionnent des vidéos de djihadistes, d'animaux en souffrance ou de gangs new- yorkais ; tous finissent sans repère, sans but, sans perspective, broyés par la honte et le dégoût d'eux-mêmes.

Certains se suicident ou commettent des violences.
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Elle s’en fout d’être une experte, elle pense même qu’en matière de littérature, l’expertise abîme la passion, la magie des mots et de la langue. L’expertise assèche. Elle n’était pas faite pour se lancer dans l’exégèse des œuvres d’un obscur auteur que, soi-disant, tous les écrivains qu’elle aime constituent des sujets « archi défrichés ». Sa vie ne consistera pas à réanimer les lettres de morts oubliés.
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Le brouillard s’installa progressivement, comme une maladie infectieuse. Par bandes de ciel d’abord, striant un quartier, une île, un littoral, coiffant les pinacles des églises, les faîtes en fer forgé des auberges. Il entra par les fenêtres, engouffra ses filaments par le trou des serrures et sous les chanlattes des toits. Il s’accrocha aux épines des buissons, aux branches de bois jeune, aux mâts des bateaux, au fil pour sécher le linge. Puis il arriva par nuages entiers, des masses célestes humides et stagnantes, comme des monceaux de coton blottis au flanc des collines. Il revint sans cesse, deux, trois fois par semaine, un peu plus, chaque jour.
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C'est troublant, chaque forme de handicap est définie par un groupe nominal, comme s'il fallait une périphrase pour ne pas dire les choses d'un bloc et que l'agencement des mots adoucissait quelque chose ... Comment dirait-il aujourd'hui d'ailleurs ? Je suis un type qui a perdu la main ? Je suis un homme dont la main a été hachée lors d'un attentat ?

" je suis un manchot ... Voilà ce qu'il faut dire".
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(Les premières pages du livre)
Ça ne fait pas de bruit. Du moins ça n’en fait plus. Le fracas bref, puissant, s’est éteint aussitôt après le formidable craquement de tôle, éphémère comme un lacis de foudre. Sur la route, on ne perçoit pas la moindre trace d’un freinage. Rien. Pas de bandes de caoutchouc en lignes parallèles sur l’asphalte brûlant. Seulement le silence des débris.
La Maserati Quattroporte couleur Bronzo Montecarlo est pliée. Elle gît à moitié sur la bande d’arrêt d’urgence, éventrée sur son flanc gauche. Le capot expectore une fumée grisâtre et malodorante. Ses longerons sont si déformés que la bagnole semble se courber sur elle-même, arquée tels les arbres qui poussent aux vents et les enfants dans le ventre de leur mère. Sous le plancher coule un mélange d’huile de moteur, de liquide de refroidissement et de sang. Il coagule au contact de la chaussée, devenant brun et poreux.
Ça ne ressemble pas à un véritable accident. On dirait du cinéma. Ça donne l’impression d’une reconstitution bas budget. Une modeste production récupère une épave à la casse, la repeint grossièrement avant de la déposer au bord d’une route. L’acteur a le front sur le volant, il gémit quand la caméra s’approche, puis bave pitoyablement, jusqu’à la mort. L’ironie, c’est que jamais il n’aurait autorisé qu’on tournât une scène pareille dans un de ses films. Jamais. Il était, au contraire, des plus attentifs à ce genre de détails. Dès le scénario, il aurait demandé qu’on lui expliquât d’où provenaient les véhicules, et lequel était responsable de la collision. Il aurait juré que cela ne collait pas. La Honda Accord couleur Tiger Eye Pearl devrait être plus proche, peut-être encore encastrée dans la Maserati, plutôt que de ronfler quinze mètres plus avant. Il faudrait qu’il y ait davantage de verre sur le sol, que les pare-chocs branlent, qu’un panneau de custode repose, déformé, sur le macadam. Le mort pourrait geindre encore un peu, ou non, mieux, n’être que blessé. Il taperait à la vitre pour qu’on le sorte de là. Gueulerait. Finirait par perdre un morceau de jambe comme la belle blonde dans Amours chiennes d’Iñárritu.
La 101 est déserte, un comble à Los Angeles. Au loin, une sirène hurle. La police, peut-être une ambulance. Il est trop tard, le corps ne se réveillera pas. Le conducteur de la Honda essaie de prendre la fuite au volant de sa ruine. Elle produit un son de roulis métallique et de désespoir. Finalement, il se carapate à pied, tenant son avant-bras gauche contre sa poitrine.
Autour, la chaussée s’évapore. La nuit est douce, un vent océanique caresse le ventre chaud de la ville et charrie des monceaux de poussière. Une odeur de bitume flotte dans l’air et rejoint les notes de sucre, de gras, de café, de friture brûlante, le parfum des beignets à la banane, celui des gazons coupés ras, des fleurs de jardins municipaux et de la pisse des vagabonds.

PARTIE I
LA QUADRATURE DES PÈRES
FÉVRIER 2012
Au cœur de la France, comme une marque de charbon, sombre et imposante, le Morvan se dessine dans la brume. C’est un parc de Bourgogne aux charmes austères, semé de vallons, de rivières et de bois. La ligne à grande vitesse lui ampute l’oreille gauche, l’A6 prend soin de contourner par le Nord ses forêts de chênes pédonculés, de bouleaux verruqueux, d’érables, de sapins et d’épicéas. D’où qu’on l’aborde, le Morvan donne cette impression de bouche noire et avide, cette impression de gouffre. Les anciens en racontent bien des choses à son propos, vantent le magnétisme de sa dalle granitique qui combat leurs rhumatismes et les garde en longue santé, narrent ses récits d’antan qu’ils mêlent aux contes de sorcellerie, chuchotent des pans d’Histoire oubliés, ne manquent jamais d’évoquer le souvenir d’un père qui croisa le fer jadis avec l’occupant, dans une vallée encaissée.

Les anciens, ils sont là, une petite quinzaine, les bras croisés dans le dos, certains les mains dans les poches. On croirait des empereurs piétinant la banquise. Le froid de l’est a gagné la plaine. La terre gelée s’évapore lentement, exhalant une timide odeur d’herbe grasse et de pierres mouillées. Une vieille, sous son châle, essuie une larme avec un mouchoir beige brodé de ses initiales. Ils attendent sur le pas de l’église de Quarré-les-Tombes, serrés à l’abri du porche, tandis que le vent baffe le cercueil. Ils se reconnaissent, se saluent, patientent sagement.
Ils ont l’habitude des enterrements, enfin ils s’y sont habitués avec l’âge qui avance, s’y rendent habillés des vêtements du dimanche, résignés à voir partir les partenaires de clubs, celle-là qui était si bavarde, le vieux coureur de jupons qui avait été bel homme, cette malheureuse dont le mari était mort bien jeune, celui-ci qui en avait une sacrée santé pour avoir vécu si longtemps avec les murges qu’il se mettait, l’autre encore dont on disait qu’il ferait un vigoureux centenaire et qui claqua pourtant deux ans à peine après avoir pris sa retraite.
Aujourd’hui, c’est le tour de Lucien Michot de rejoindre la longue liste des amis d’outre-tombe. Pas n’importe qui, le Lucien. Un résistant. Quelques anciens en ont accroché des breloques, au revers de leur veste, que le soleil d’hiver fait scintiller. Le maire fera un discours pendant l’office, il évoquera le maquis, dit-on. Cela fait toujours plaisir, ces vieilles histoires d’héroïsme. Elles sont le sel de cette terre.

En attendant, le froid glace leurs os. Surtout à ce gros type qui s’affaire autour du cercueil, va et vient avec des gerbes, les dispose tantôt sur le sol, tantôt sur le pin de la bière, remet sa cravate droite, puis son col et de nouveau sa cravate, s’éclaircit la voix pour discourir mais ne dit finalement rien, ou juste une chuchoterie à l’oreille de son supérieur resté tranquillement au chaud, sur le siège passager du corbillard, et qui écoute une émission sportive de Radio Monte-Carlo.
La famille arrive, à petits pas depuis la place du village. Enfin, la famille… ce qu’il en reste. Dominique Richard, qui avait été son gendre, Maxime, le petit-fils, et puis Marine, bien sûr, la Parisienne, celle qui fait de grandes études et fera de grandes choses, qui est d’ailleurs assez grande et a l’allure d’une femme puissante dans sa belle robe noire, une femme du grand monde. À tous, elle rappelle sa mère, sa mère absente, absente de l’enterrement de son propre père, voilà qui donnera un sujet de discussion aux anciens, lesquels n’en demandent pas tant, eux qui entrent tête baissée dans l’église.
Et se signent.

Quelques minutes plus tard, tout le monde est assis. Le maire est finalement excusé, un empêchement de dernière minute l’oblige. Le préfet organise une réunion téléphonique relative à l’épisode neigeux, attendu la nuit prochaine. L’édile ne pouvait pas la manquer. Une jeune conseillère prononcera le discours sur le maquis à sa place. Elle est née dans les années 1970, mais évoque les Allemands de son enfance, les combats glorieux des résistants, le souvenir d’en avoir caché un à la maison. Elle lit un texte qui n’est pas le sien. Au dépourvu, elle endosse aussi une certaine Histoire de France.
Un moustachu s’amuse : « Elle nous fait une Hervé Morin. » Son voisin hoche la tête, il n’écoute pas vraiment le discours, ne saisit pas non plus la référence, lui dont pourtant le téléviseur est allumé du matin au soir, et qui a forcément entendu le candidat centriste élucubrer sur ses réminiscences du 6 juin 1944, lui qui ne vit le jour qu’en août 1961. À tous, ici, les croix blanches font partie de leur ADN, personne n’en tiendra rigueur à la conseillère, personne n’en tiendra rigueur non plus à Hervé Morin, lequel se rangera d’ici quelques jours derrière la candidature de Nicolas Sarkozy.
Marine prend la parole, elle parle de son grand-père, l’appelle Papi Lucien, elle parle d’elle, elle parle beaucoup d’elle. Puis au nom de son petit frère, au premier rang, de son père et – plus étonnamment – de sa mère, elle remercie l’assistance.
Vient le tour de l’éloge du prêtre. Il articule toujours les mêmes paroles, implore le pardon, appelle au recueillement, convoque les souvenirs et promet la vie éternelle. Il perd lui aussi un ami, s’en émeut. Il distribue l’hostie et s’autorise une rasade de vin de messe.
Les cloches sonnent.

Le croque-mort est devant l’entrée quand les portes de l’église Saint-Georges sont rouvertes et qu’une bourrasque chasse la prière et les feuilles mortes sur les sarcophages qui cernent l’édifice. Il se tient droit, arbore l’air triste et sérieux de circonstance. Ses cheveux sont désormais totalement plaqués sur son crâne. Une pluie fine et cinglante a verglacé la place pendant les trente-cinq minutes qu’a duré la cérémonie. Il serre la main du Dominique, de la Marine et du Maxime. Il dirige le cercueil jusque dans le corbillard, fourrage dans les gerbes pour leur redonner un peu de tenue, aide quelques anciens à grimper dans les voitures. Il monte enfin dans son fourgon, souffle à pleines joues dans ses paumes. Son chef démarre, prend la rue du Grand-Puits, puis, à gauche, voilà le cimetière de Quarré-les-Tombes. Il se gare devant.
Au niveau du portail, une rafale, chargée de gel et d’aiguilles, s’abat sur l’assemblée, mord les pommettes des femmes, givre la moustache des hommes, vient éteindre en chacun les derniers sentiments, la mélancolie et la tristesse.

Max se les caille. Rentre ses avant-bras sous son manteau et les place sous ses aisselles. Il est au premier rang. Il se penche. Contemple le trou. C’est une cavité sommaire, difficile d’en évaluer la profondeur avec cette brume. Le crachin s’est calmé mais tout reste froid et humide. Il se demande comment on a bien pu fouir un terrain si dur, regarde autour de lui, observe la pelle mécanique stationnée plus haut. Se gratte le menton. Tout s’explique.
Sur la pierre tombale sont déjà inscrits les deux années 1924 – 2012 et le nom du défunt en belles lettres capitales. Tout est prêt, l’au-delà n’a pas attendu. Ce n’est pas son gen
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Des familles de conquistadors, à défaut de trouver l'Eldorado, franchirent les Andes et rejoignirent les rives du Pacifique pour s'y implanter. Elles engendrèrent des générations de pêcheurs pauvres. Brûlées par le soleil, martelées par les vents, accrochées aux rivages. Dans leur fuite du bout du monde, quelques téméraires, las de barboter au pied des montagnes, prirent à nouveau la mer et s'installèrent, par-delà l'horizon, sur le grand amas rocheux du sud de l'archipel, celui dont l'isthme faisait comme une fragile liaison ligamenteuse entre deux os pierreux.
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Chacun sculpe patiemment l'autre. Les couples heureux aussi bien que les couples malheureux. Isabelle, ma fille, tu as un don du ciel, à un point que tu ne réalises pas. ne l'oublie jamais, je t'en prie. Quand tu seras déformée comme moi il y a intérêt que ce soit par une vie de bonheur !
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mpossible de faire comme s’il n’y avait pas eu de colonisation. Certaines puissance tiennent à laisser une trace là où, un jour, elles plantèrent leurs drapeaux. Les possessions britanniques avait été étudiées une à une. Les terres des colons anglais resteraient aux colons anglais, qui deviendraient citoyens à part entière du territoire. Ils garderaient leur langue, leur portrait du souverain sur la cheminée et toutes les coutumes qu’on appelait pour se moquer « le droit au thé ».
Les bâtiments officiels passeraient sans délai sous la coupe de la nouvelle administration. La couronne avait négocié ensuite quelques terres australes abandonnées, pour conserver une présence maritime et permettre à quelques scientifiques d’observer on ne sait quel phénomène climato-géographique. Elle avait été exaucée. On lui avait cédé des îlots vides, sans homme, richesse, ni guano.
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Vois-tu, quand on reste accroché comme une huître à un caillou mouillé, on est si heureux de la visite d’un navigateur. Toi, forcément, cela te passe au-dessus de la tête, tu n’es jamais confronté à l’attente. Tu dois savoir, Ernesto, il y a deux types d’hommes, ceux qui se meuvent et ceux qui attendent. Les premiers négligent presque toujours les seconds.
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Seul marin familier de ces archipels calcaire, unique capitaine à affronter le brouillard, la commercialisation du guano reposait sur son oncle stature. Cela faisait de lui, en cette année 1897, un des êtres les plus importants de la région. Assis sur une rente pour l’éternité, il disposait d’une épouse qui ne l’attendait plus, d’enfants éloignés goûtant une jeunesse confortable, d’une maison en dur sur le littoral au sud d’Arequipa, ainsi que de nombreuses maîtresses parsemées au gré de ses voyages.
Capitaine :car il était le seul à bord et qu’il n’y avait personne pour lui disputer le titre. Moustache : une trace de suie épaisse sous le nez pour couvrir l’odeur de la fiente.
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Vald pensa ce que lui avait murmuré sa mère, il y avait des années, quand son petit frère Igor, cet enfant maladif, s’en était allé :« Tu sais, mon fils, si tu n’accepte pas les épreuves, si tu souffres trop, alors ce monde n’est pas pour toi. »
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Aux prémices d’une nuit, la réaction des hommes s’avère toujours ambivalente. Certains pensent que le monde doit être lavé de ses péchés et réclament une purge. Tant pis s’il faisait pourrir les arbres et menaçaient les cultures. Tant pis s’il réduisait le commerce, s’il rendait la pêche plus dangereuse, si les enfants avaient le teint livide, si le tonnage de guano s’amenuisait, si le pain avait le goût de l’eau. La vie étant cyclique, et le présent guère enviable, glisser un bon coup dans les abysses promettait des lendemains meilleurs. Le brouillard eut ses prédicateurs, ses adorateurs, sa secte.
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