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Critiques de Yannick Haenel (365)
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Jan Karski

Un récit à lire absolument!



Articulé en trois grands chapitres, on découvre d'abord le témoignage de Jan Karski face à la caméra de Claude Lanzmann dans son film Shoah. Quel est l'intérêt de lire ce chapitre plutôt que de voir le documentaire?

Le talent de Yannick Haenel : il est un excellent spectateur. En effet il découpe, décrypte, sous-titre les paroles de Jan Karski. La valeur d'un silence, le sens d'un mot utilisé plutôt que de faire une phrase, la nuance entre les temps des verbes utilisés. C'est très instructif et tellement révélateur de la douleur et de la psyché de Jan Karski.



On passe ensuite à un petit condensé du livre qu'il a publié dès 1944, Histoire d'un Etat secret (réédité en 2004 sous le titre Mon témoignage devant le monde), dans lequel il a retranscrit tous ses efforts pour révéler au monde ce qu'il avait déjà confié aux "puissants" pendant la guerre.



Enfin, dans la troisième partie, Yannick Haenel se transforme en romancier et donne la parole, certes fictive, à Jan Karski, retrace son itinéraire de courrier de l'Armée de l'intérieur polonaise, son parcours dans le résistance polonaise et son combat pour faire entendre sa voix auprès des grands de ce monde pour sauver les Juifs.



On y trouve toute la difficulté de comprendre l'absence de réaction des puissances militaires, qui savaient, auraient pu intervenir et ont délibérément choisi de rien faire. Est-ce choquant de dire qu'elles ont été complices? Pas vraiment pour moi, puisque il s'agit bien de non assistance à personnes en danger. Le pourquoi est plus dérangeant, l'hypothèse de l'auteur soulignant un antisémitisme bien plus présent que les pays ne voudraient le reconnaitre.



Une lecture très dure, brutale parfois, mais qui a le mérite de montrer que tout n'a pas encore été dit sur la seconde guerre.
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Le Trésorier-payeur

Ecrit avec méticulosité et parfois, malheureusement, avec une certaine préciosité, le Trésorier-payeur est la mise en scène romanesque des thèses économiques que défendait Georges Bataille dans "La Part maudite", sur le thème de la dépense. L'ambition est grande - d'ailleurs elle s'appuie régulièrement sur la pensée de Hegel, le plus ambitieux des philosophes - et surprenante, puisqu'elle semble partir à contre-courant d'une pensée critique très répandue, qui tend à dénoncer - à juste titre - les ravages planétaires du capitalisme financier. Le problème, c'est que l'auteur se croit investi d'une mission pédagogique vis-à-vis de son lecteur : il ne peut s'empêcher d'expliquer et d'expliciter ce que le lecteur de ce roman exigeant, bourré de références savantes, n'a pas besoin qu'on lui dise, sans quoi il aurait abandonné depuis longtemps sa lecture (voir par ex p.107 les indications de type Wikipédia à propos d'Alan Greenspan). Le point de vue omniscient peut être parfois trop omniscient, au point d'encombrer la narration et de ne plus laisser au lecteur l'espace nécessaire au développement de ses propres réflexions. Et, en particulier dans ce roman, à mesure qu'il avance, son degré d'irritation ne peut manquer d'augmenter, me semble-t-il. Les personnages - y compris le "héros" - restent inconsistants, tout en étant pris en charge de manière surdéterminée par le narrateur, qui prétend les sonder jusqu'au fond de l'âme. C'est que l'intrigue elle-même ne tient pas debout, ou du moins dégage une impression d'artificialité qui rend la lecture laborieuse, d'autant plus qu'il s'agit de traverser les nombreux passages justificatifs et les interventions du narrateur qui cherche à appuyer par d'assez fumeuses envolées lyriques les états d'âme de ses personnages. Ce qui frappe aussi, c'est le rôle assigné à la sexualité dans l'économie de ce récit aux accents mystiques. Les femmes sont très vite à la merci des coups de foudre du personnage central, qui lui-même ne cesse d'être transfiguré jusqu'à l'extase par ses rencontres. C'est proche du fantasme et loin du vécu. Nous devinons, à travers les frasques innombrables et toujours prodigieuses du Trésorier, un auteur qui ne s'embarrasse à aucun moment de problématiser la relation sexuelle et le rapport amoureux. L'amour, mis en scène comme une dimension cosmique de l'existence humaine, donne lieu à des développements risibles et agaçants. Non seulement nous ne sommes pas du tout convaincus par ces flambées passionnelles et sacrées, mais en fin de compte, le souterrain qui relie la maison du Trésorier-Payeur à la Banque de France, et qui est censé figurer, sous le couvert de la notion de "dépense", le renversement de la logique financière du capitalisme globalisé, ressemble plutôt à un élément de décor emprunté à un roman de cape et d'épée.

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Jan Karski



Jan Karski est un grand résistant polonais de la seconde guerre mondiale.

Il a risqué sa vie plus d’une fois pour informer les Alliés (à Londres et aux Etats Unis) de l’existence des camps de concentration et de la volonté des nazis d’exterminer les Juifs, missionné par le gouvernement polonais en exil à Londres.

Avant de délivrer son message, il s’est rendu 2 fois dans le ghetto de Varsovie où le spectacle de personnes qui avaient déjà perdu leur humanité l’a tant bouleversé qu’il entrera presque en transe quand il le racontera à Claude Lanzmann durant le tournage de Shoah.

Son message n’a pas été entendu : trop horrible pour être cru, incompatible avec la stratégie militaire, etc.

Jan Karski en restera blessé à vif toute sa vie, non pas sur le plan personnel mais par désespérance de l’abandon auquel a été soumis le peuple polonais dans son ensemble.

Professeur de faculté aux Etats-Unis où il vit en exil, ses étudiants découvriront qui il est vraiment et le convaincrons qu’il n’est pas responsable, bien au contraire, mais qu’il est témoin et qu’il a le devoir de faire connaître son témoignage. C’est également le sens de son statut de Juste.

Le récit s’articule en 3 parties : un extrait du témoignage de Jan Karski dans Shoah, des extraits choisis de son livre et une approche fictionnelle du cheminement des pensées de Jan Karski dans les années qui ont suivi la guerre, le silence qu’il a observé jusqu’au quotidien, les nuits sans sommeil, puis la révélation qu’il avait encore un rôle à jouer.

Ces 3 angles de vue sur l’épopée de ce grand homme apportent un plongeon en plusieurs dimensions sur le sujet et m’ont laissée exténuée par la tension que cette lecture procure, nauséeuse par les faits et les enjeux, fascinée par l’implication de Jan Karski qui s’est effacé en tant qu’homme pour essayer d’en sauver des milliers voire des millions, qui de sa propre parole est devenu un catholique juif.

On ne peut que ressentir du respect devant une telle abnégation.

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Bleu Bacon

Disons que je suis assez fan de Yannick Haenel, de sa plume, de son inventivité, de ses propos déjantés parfois. Dans Bleu Bacon, j'ai aimé le suivre dans ses réflexions sur la peinture de Bacon, peinture qui tout compte fait lui va très bien. On ne sait plus trop qui de l'écrivain ou du peintre transcende l'autre. La déambulation de nuit, seul, au milieu des toiles de Bacon est désarçonnante, envoûtante. La peinture qu'il faut voir dans le noir, les détails qui surgissent grâce au contraste du noir et de l'éclat aveuglant de la torche , et ce bleu qui palpite et enivre ! Avec les triptyques en hommage à l'amant perdu, la réflexion de l'auteur gagne en puissance et en précision. Passion, tristesse, amour, vie et mort, en couches, en larmes, explosés pour être réduits en mots. C'est un Yannick Haenel au sommet de son art qui dans sa déambulation s'expose et s'approche au plus près des doutes, de la solitude, des émotions du peintre qu'il rejoint. On est tout près de la re-création des tableaux. Un grand moment de littérature.

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La solitude Caravage

De Yannick Haenel, je n'avais lu que son controversé "Jan Karski". Aujourd'hui, je viens de terminer "La solitude Caravage". Celui-ci me semble constituer un personnage idéal pour un bon roman. Génial, énigmatique, violent, peignant des chefs d'oeuvre avec une rapidité phénoménale, il a laissé une oeuvre immense et originale, qui est aujourd'hui très aisément reconnaissable. Et pourtant il a été presqu'oublié pendant près de trois siècles !

De très nombreux critiques d'art ont étudié ses tableaux. Yannick Haenel, lui aussi, les commente avec intelligence. Mais l'écrivain essaie d'aller plus loin, en entrecroisant le destin du peintre avec sa propre vie. Ainsi, le roman commence dans la grisaille du Prytanée militaire où le jeune Yannick a réellement passé des années très mornes. Broyant du noir dans ce pensionnat, il découvre un détail de l'époustouflant tableau "Judith et Holopherne" de Caravage: en fait, il peut voir seulement la fascinante figure de Judith… dont il tombe amoureux (comme ça peut arriver à un collégien) et dont le souvenir gouvernera sa future vie amoureuse... Cependant, l'auteur ne persiste pas très longtemps dans la perspective de ce brillant début. La suite parait plus convenue, avec l'évocation de ses visites d'expositions, le récit des étapes de la vie du Caravage, ainsi que de brillants commentaires sur ses tableaux. Ceux-ci - évidemment empreints de subjectivité - sont pertinents, mais... ils exigent du lecteur une grande concentration pour saisir la pensée de Yannick Haenel. A ce sujet, j'ai été un peu agacé par l'abus des italiques (tic de professeur ?).

Dans ces conditions, il va de soi qu'une iconographie manque cruellement dans cette édition. Mais ce n'était pas un problème pour moi, puisque je disposais déjà d'une monographie illustrée consacrée à la vie et à l'oeuvre du Caravage - ce qui m'a paru vraiment indispensable. Au final, je dirai que j'ai trouvé ma lecture très intéressante dans l'ensemble.

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Janvier 2015 - Le procès

Six ans après l’horreur, le procès des attentas de janvier 2015 s’est déroulé cet hiver. Le documentaire JANVIER 2015 LE PROCÈS en retrace jours après jours les débats.

Ce début de mois de janvier 2015, je m’en souviens ! Tout le monde en France s’en souvient ! Chacun découvrait sur ses écrans des scènes de guerre en plein Paris. Des fous hurlaient dans la rue en tirant sur tout ce qui bougeait. Et, puis, on apprenait l’horreur : des journalistes et des dessinateurs satiriques assassinés, ici, à Paris. Comment était-ce possible ?

Et, comme si cela ne suffisait pas, il y a eu trois jours d’horreur : le siège de l’Hyper casher de Vincennes et celui de l’Imprimerie de Dammartin-en-Goële. Ces images sont à jamais présentes dans nos souvenirs…Du 2 septembre jusqu’au 13 décembre 2020 s’est tenu le procès d’assises des attentats.

Le documentaire JANVIER 2015 Le PROCÈS retrace les quatre mois, jour après jour, des débats à travers deux types d’écriture, celle de Yannick Haenel, romancier et chroniqueur de Transfuge depuis 2010 et de Charlie Hebdo depuis les attentats et François Bocq, dessinateur de bandes dessinées.

216 pages qui décrivent avec énormément de pudeur l’horreur vécue par chacune des victimes venues témoignées.

Impossible d’en parler comme d’un livre ordinaire !

Impossible de qualifier le talent de Yannick Haenel et les mots qu’il choisit, pour dire simplement la parole de chacun qui dit souffrance et combat pour continuer à vivre. Surtout pour dire et redire, toujours et encore, l’horreur que sont de tels actes. Mais, la force de vie et d’amour qu’il faut pour qu’elle dépasse la mort.

Et puis, tous ces visages croqués par François Boucq que l’on découvre masqués mais jamais muets dans ce prétoire. Leurs silhouettes et leurs attitudes dessinées pour entrer dans nos mémoire ! Quelle force !

Difficile de rester calme devant certaines réponses des accusés ou de leur entourage qui font tout pour ne pas se sentir concernés ! Mais le texte de Yannick Haenel redonne de humanité y compris aux accusés.

Car, c’est ce j’ai pris conscience à la découverte de JANVIER 2015 LE PROCÈS, l’attitude des accusés. Je savais déjà les liens entre délinquance et islamisme radicale. Mais, là, c’est une évidence, avec en plus un mauvais goût qui reste de lâcheté et de mensonge.

Un procès est un espace de neutralité où les faits y sont exposés, décortiques, analysés. Chaque partie y confronte sa vérité espérant que, ici, la cour y adhère. Car ce procès d’assise était sans juré. De plus, l’action publique s’est arrêtée par la mort des trois responsables. Alors pour ce procès, il s’agit de personnes condamnés pour avoir apporté une aide dans la préparation et la réalisation des actes terroristes.

Alors, même si Yannick Haenel et François Boucq n’avaient jamais suivi un procès, leurs émotions sont palpables, fortes et le plus souvent difficilement supportables. Il faut s’arrêter, poser le livre et respirer. Puis de nouveau le reprendre …

Pour moi, JANVIER 2015 LE PROCÈS est appelé à rester dans ma bibliothèque pour être relu et redécouvert au fil du souvenir et au fil des nécessités… Indispensable !

https://vagabondageautourdesoi.com/2021/03/02/janvier-2015-le-proces-yannick-haenel-francois-boucq/


Lien : https://vagabondageautourdes..
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Cercle

Cercle... Ou la rocambolesque vie de Jean Deichel (oui, encore, cela ne change guère...). Dans les romans où il se fait narrateur, toujours il est question de renaissance. Mais nous assistons cette fois-ci à l'odyssée originelle du double de Yannick Haenel ; ou comment, un jour, tout comme l'écrivain (dixit le Sens du Calme, à lire absolument dans sa vie), il ne prend pas le train, ne se rend pas à son travail, démissionne et balance toute sa paperasse dans la Seine. Pourquoi ? À cause d'une phrase. "C'est maintenant qu'il faut reprendre vie". Et de ce fait, il va effectivement reprendre vie... Quant aux phrases, il n'a pas fini d'en entendre.



Jean est un narrateur saugrenu particulièrement insupportable, attachant et génial . Enfin attachant... J'aurais tendance à dire que soit on l'adore, soit on le déteste. Quant au côté génial, on peut aussi le considérer comme irresponsable voir carrément fou (mais sans folie, vit-on réellement, ou faisons-nous semblant... ?). En tout cas, il nous offre ici une singulière façon de vivre qui donne beaucoup à réfléchir sur la nôtre... Et personnellement, j'aurais volontier passé le reste de ma vie de lectrice avec lui. J'ai rarement été aussi transportée par un livre, et jamais de cette façon... Malgré les quelques autres ouvrages de Yannick déjà parcourus et adulés. C'est avec beaucoup de regrets que je l'ai reposé sur mon étagère, et il risque de ne pas y rester bien longtemps... Ce chef d'oeuvre est un trésor de réflexion sur l'Humanité, notre société, la parole, notre vie, et pose finalement la question de l'essentiel. En cela, c'est une révélation, semblable à un grand coup de pied au derrière. Que sommes-nous en train de faire de nos vies ? Mais réveillons-nous !



Cercle fut un merveilleux compagnon de voyage, et ce qu'il renferme m'est extrêmement précieux. Cela faisait bien longtemps que la vie n'avait affluée avec tant de force dans mes veines. Certains vous diront sûrement de vous en éloigner, surtout si vous vivez un moment difficile ; mais je pense au contraire que c'est la lecture à faire en cas de coup dur. Il permet de voir les choses sous un autre angle, et surtout il redonne espoir. Tout est possible, à partir du moment où l'on est capable de s'affranchir des normes et des convenances. De plus, c'est d'une poésie indicible... Durant toute ma lecture, je n'ai cessé de relire des pans entiers du livre, déjà parcourus... Car Cercle fait partie de ces livres magiques, porteur à chaque lecture d'un souffle nouveau, mais incontestablement efficace... D'une puissance ahurissante. Peut-être est-ce l'oeuvre la plus forte de Yannick Haenel ; à vrai dire je n'en sais rien. Mais elle est unique, inédite et semble regrouper tous les thèmes explorés par Yannick... le tout abordé avec une poésie omniprésente.



Cercle n'est pas un livre. C'est une aventure. Et quelle aventure... La palette d'émotions nous traversant à sa lecture est infinie. Jamais personne n'a écrit comme ça ; c'est inimitable. Lire Cercle revient à redécouvrir l'essence des choses, et cette modeste critique est loin de lui rendre justice.
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Tiens ferme ta couronne

Tiens ferme ta couronne met en scène un écrivain autofictionnel d'une cinquantaine d'années, éternel adulescent irresponsable, assez asocial, vaguement pathétique sans parvenir à être sympatique, qui passe le plus clair de son temps enfermé chez lui à mater des films, et surtout Apocalypse Now en boucle, en rêvassant que le scénario génial qu'il a écrit sur Melville (dont on entendra beaucoup parler mais dont le contenu sensationnel ne sera pas dévoilé...) soit porté à l'écran par Michael Cimino.

La grandiloquence et les ego trips auto-complaisants ne lui font jamais peur : "Mais au fond, un échec, ça veut dire quoi ? Je ne croyais pas en l'échec. Celui de Melville était proportionnel à l'exigence qui l'animait : il indiquait une gloire secrète. La société qualifie d'échec ce qui ne répond pas à sa demande ; elle exclut de la réussite ce qui déborde ses critères. Je n'étais pas réellement impressionné par l'idée que la société se fait de la littérature : qu'est-ce qu'elle y connait ? Rien. Tout le monde croit savoir ce qu'est la littérature, mais personne n'y connait rien. Et moi, ce matin-là, avec mes vingt euros, mon vertige, ma gentille cuite et mon envie irrépressible de voir Apocalypse Now, ce matin-là et tous les matins de ma bienheureuse et approximative existence, tous les soirs et toutes les nuits, non seulement il me semblait que je savais ce qu'était la littérature, mais qu'en un sens la littérature, c'était moi. Oui, j'étais ce héros saugrenu qui, doutant de tout, croyait en son étoile. J'étais ce bras d'honneur souriant. J'étais cette lumière qui scintille entre une hirondelle, une rangée de papyrus et un lit célibataire. J'étais cette nuit blanche où viennent s'inscrire, aussi obscures que comiques, ce qu'il faut bien appeler des révélations." (pp. 85-86)

Certain de la distinction de son bon goût, notre écrivain couronné n'hésite jamais à faire du name dropping de personnalités (ainsi du dîner mondain chez Bofinger avec Isabelle Huppert, ainsi de la rencontre avec Cimino à New York, racontée deux fois dans le roman : une fois dans la partie intégralement consacrée à la rencontre avec Cimino, une seconde dans la partie intégralement consacrée au dîner mondain chez Bofinger avec Isabelle Huppert) ou d'auteurs fétiches choisis avec une audace folle quant à leur originalité, littéralement récités comme des mantras ("Je pouvais bien réciter à voix haute mes éternels mantras : Melville-Proust-Joyce ou Dante-Flaubert-Beckett ou Shakespeare-Rimbaud-Faulkner"), quand il n'est pas occupé à ressasser obsessionnellement ses scènes préférées de ses films préférés de Cimino ou Coppola.

Tout n'est pas absolument à jeter (par exemple, en dépit de l'exaspération que m'a provoquée la suffisance du passage suscité, j'y repêche quand même volontiers la phrase sur la relativité sociale de l'échec et de la réussite, mais en m'empressant d'oublier tout ce qui l'entoure et m'horripile), même si toute scène finit par décevoir. J'ai pu trouver de l'amusement dans la description de l'arrivée au restaurant, où il ne parvient pas à passer la porte, barrée par le maître d'hôtel... mais le récit malheureusement s'étire et s'étire encore, arrive Isabelle Huppert, la fierté étalée de ce dîner avec une célébrité et l'appétit lubrique de la rencontre avec Léna, qui va devenir son amante (les scènes de sexe où notre non-héros se complait dans la description de la puissance de ses érections et de ses jouissances sont particulièrement superfétatoires, vulgaires, et éprouvantes pour le lecteur). J'ai pu trouver saisissante l'oraison funèbre de Léna à sa sœur... mais, malheureusement, toute la scène qui l'entoure est tellement outrancière qu'elle fait basculer l'oraison dans le ridicule de l'emphase avec elle.

Parfois, l'affectation est si outrée que je ne peux croire qu'elle ne soit à prendre au second (ou soixante-quatorzième...) degré et ne soit volontairement conçue pour prêter à rire (ainsi de l'extase de la dégustation du plateau de fruits de mer, dans la partie intégralement consacrée au dîner à rallonge : "En croquant dans la chair d'une huître, je me sentis défaillir. J'avais bu abondamment, mais ce n'était pas le vin qui me retournait le cerveau. Trouver la vie qui mène à l'espace absolu, je m'enivre pour ça : mais toujours je reste au bord du mystère. Non, ce soir, je défaillais de plaisir parce que la chair de l'huître est un délice qui procure des frissons : on dirait que des trésors de nacre vous scintillent sur la langue ; et cette huitre-là, que la serveuse m'avait désignée comme un "Grand Cru" de Normandie, fondait dans la bouche comme un bijou marin. Manger des huîtres est un acte sacramentel, dis-je à Pointel, qui ronchonna : lui ne jurait que par le homard." (p.155) ... et s'il n'y avait aucune autodérision volontaire, ma foi, tant pis, j'aurais pour ma part ri de tant de cuistrerie et au moins trouvé ce passage involontairement drôle).

Je ne sais pas si l'intérieur de la tête de Yannick Haenel est "mystiquement alvéolé" (expression si chère à l'auteur qu'il n'hésite pas à la répéter en plusieurs dizaines d'occurrences...) et que, la mienne, dépourvue de ce revêtement particulier, a mécompris le génie de ce flux de conscience en le trouvant décousu, volontiers pédant, et désespérément nombriliste. Je ne saurais toutefois que le déconseiller à quiconque lèverait un sourcil à l'idée d'entrer dans l'intérieur d'une tête mystiquement alvéolée...
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Tiens ferme ta couronne

Enfin un roman original et pertinent dans cette rentrée littéraire qui se contente - pour beaucoup - de coller à l'Histoire et de raconter ce qui a déjà été dit, redit, peint, dépeint, pour le meilleur et pour le pire.

Ici, nous sommes dans un monde fou qui ne craint pas d'ébouriffer nos consciences et qui se permet des audaces aussi bien dans le style que dans le récit. Déjanté et souvent drôle, le texte aborde différents thèmes, cinéma, littérature, mais également passion et volonté de poursuivre son rêve, quoi qu'il arrive. Mais dans toute passion, il y a le risque de l'échec et c'est bien ce qui met un peu de relief dans nos vies ternes ! Un roman hors normes qui mérite le détour.
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Tiens ferme ta couronne

Merci à Babelio et Gallimard pour l'envoi de ce titre dont la quatrième de couverture me laissait entrevoir de bons moments de lectures.

Cependant, je suis allée jusqu'à la page 164 pour lui donner une chance...

Une chose est certaine, l'écriture est habile puisqu'on s'ennuie autant que le personnage ! Parfois, un regain d'intérêt avec une scène un peu cocace mais on retombe dans l'ennui rapidement.

Sauf qu'il y a plein d'autres livres qui attendent d'être lus.

Pourtant, j'aime donner une chance et aller au bout de mes lectures, mais là je passe mon chemin !

Je ne saurai jamais si Cimino accepte de faire le film où pas...
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Je cherche l'Italie

Je viens de relire ce livre. Le premier que je lis de cet auteur. En prenant mon temps, cette fois, relisant la même phrase plusieurs fois. Pour mieux m'imprégner de ses réflexions et de sa poésie.

Ce n'est pas seulement un livre sur Florence et l'Italie. L'Italie n'est que le vecteur de ses émotions. Ce n'est pas non plus uniquement une réflexion sur l'étouffement de l'individu par le capitalisme et le libéralisme économique.

Ce que l'auteur nous transmet, ce sont essentiellement ses émotions sur la vie, l'art, le temps, la poésie, la mort. C'est la recherche de la plénitude. Etre en adéquation parfaite avec le lieu et l'instant. Se sentir partout au milieu du monde à partir d'un point unique. D'où cette petite escapade à fukuoka, qui nous convie avec Bouddha à la notion de satori. Les références à Bataille sont la prolongation logique de cette recherche. L'Art y occupe bien sûr une grande place. L'avant dernier chapitre consacré à l'attente de la lumière qui fera de Marie la mère de Dieu est un morceau d'extase pure.

A méditer.

Un livre essentiel.
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Jan Karski

Trois entrée dans ce récit : la première retranscrit le témoignage de Karski devant les caméras de Lanzmann pour le film Shoah. La seconde résume l'ouvrage que Karski publie dès 1944, Story of a secret state.La troisième traduit, par une fiction cette fois, la mission de messager que Karski mena pour révéler l'extermination juive auprès des pays alliés (il alla jusqu'à rencontrer Roosevelt).

Trois point de vue complémentaires, jamais redondants, qui permettent de mesurer l'extraordinaire mission de cet homme élevé au rang des Justes
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Bleu Bacon

Un nouveau texte dans la collection "une nuit dans un musée" : cette fois, nous allons passer une nuit avec Yannick Haenel au Centre Pompidou, lors de l'exposition Bacon en 2019.

Une exposition d'hommage à ce peintre avec des tableaux du Centre et des prêts d'autres musées et de propriétaires privés (d'ailleurs, il y en a un qui appartient à un acteur américain, mais ne veut pas divulgacher mais une drôle de surprise, tout de même).

Quand je pense Bacon, je n'aurai pas de prime abord penser à la couleur bleu, comme ce titre l'indique. Le tableau de la couverture est d'ailleurs, à mes yeux, pas un tableau emblématique de cet artiste mais Haenel nous en parle magnifiquement.

J'ai apprécié passer la nuit avec Yannick Haenel, qui nous raconte ses sensations (il est d'ailleurs pris d'une migraine dès qu'il se retrouve seul dans les salles), son rapport ancien avec cet artiste et ses œuvres (sera t il capable d'affronter certains triptyques ?, lors d'une exposition au Musée Picasso, il s'était carrément enfui). Il y a de belles pages face à des tableaux comme Œdipe et le sphinx ou le triptyque consacré à la mort de George Dyer (l’amant de Bacon) ou des envolées quand il court dans les salles et alors nous avons l'impression d'être englouti par les couleurs et les matières des tableaux. Il sait aussi nous parler de la vie et d'épisodes de la vie de Bacon.

Et j'ai aimé cette phrase de Bacon, lors des entretiens accordés à David Sylvester : "peindre, c'est dresser un piège pour attaquer le vivant".

Ce texte m'a fait ressortir mes monographies de cet artiste et vais continuer à découvrir sa vie et ses œuvres. Car il a fait l'objet de catalogues, de biographies mais aussi d'œuvres de fiction.

Mais aussi lire les textes de Haenel car j'ai apprécié son écriture.

#BleuBacon #NetGalleyFrance
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La solitude Caravage

Yannick Haenel est un auteur que j'adore. le livre "La solitude Caravage", qu'il a fait paraître en 2019, est un petit bijou. Il y décrit sa passion dévorante pour l'oeuvre du grand peintre italien. Cette passion naît à l'adolescence, période pendant laquelle le jeune Yannick se morfond dans un pensionnat sinistre. Il se réfugie dans les livres et découvre un jour la beauté vénéneuse d'une femme peinte au XVIè siècle par le Caravage. Il s'agit d'une figure biblique, celle de Judith. Cette image l'ensorcelle, lui fait connaître ses premiers émois érotiques. Dans de courts et passionnants chapitres, l'auteur tente de percer les secrets du génie. Yannick Haenel sait merveilleusement partager l'amour qu'il porte à ce peintre en quête d'absolu. La vie incroyablement romanesque du Caravage (plusieurs fois emprisonné, courtisé par les plus grands princes de son époque...) est passionnante mais c'est surtout la force de son art qui est mise en avant. L'auteur nous offre une réflexion passionnante l'acte de création.
Lien : http://inthemoodfor.home.blog
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Tiens ferme ta couronne

Tiens ferme ta couronne mais pas seulement; il faut aussi tenir bon et s'accrocher au récit confus, foisonnant et délirant du narrateur, écrivain fou des films cultes, en particulier Apocalypse Now qu'il regarde en boucle, enfermé dans son appartement parisien, vivant une « solitude que je croyais glorieuse mais qui n'était qu'un isolement sordide ». Sur le point d'être mis à la porte par le propriétaire, notre homme se verra confier la garde d'un dalmatien par un voisin inquiétant, rencontrera le cinéaste déchu Michael Cimino dans un saut éclair à New York et parviendra à transcender son scénario sur le grand Herman Melville. Est-ce un art mineur que l'écriture d'un scénario de film ou plutôt un tremplin vers autre chose? Yannick Haenel semble s'être mis en scène lui-même dans cette histoire, à la recherche, tout somme son narrateur, de la vérité absolue dans le quotidien, « (...) une phrase de Melville qui disait qu'en ce monde de mensonges, la vérité était forcée de fuir dans les bois comme un daim blanc effarouché. » À la fois récit autobiographique, onirique et initiatique, Tiens ferme ta couronne possède le souffle et l'originalité pour accéder à des prix littéraires et permet d'appréhender une autre facette du talent de Haenel.
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Tiens ferme ta couronne

Arrivée à la page 83 j'avais des doutes quant à l'intérêt de continuer (au lieu d'aller me promener ou de dormir) : c'était brillant, parfois amusant, assez déjanté mais ça sonnait faux, faux looser, faux alcoolique, faux geek, faux pauvre...alors j'ai lu vos critiques chers amis et j'en ai conclu qu'il valait mieux passer mon chemin.

Encore un livre que je suis contente de ne pas avoir acheté, merci les bibliothèques de prêt !
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Tiens ferme ta couronne

Je garde un souvenir éblouissant de ce livre. Depuis longtemps, trop longtemps, je n'avais pas lu d'ouvrage traitant du feu. Le feu, cette passion à dimension sacrée, mélange d'instinct et de volonté. Source de bonheur... Un truc magique, sur lequel j'adore lire des lignes justes (et ce n'est pas une mince affaire parmi la littérature actuelle...). Je ne sais comment vous exprimer clairement ce que cela signifie; il me semble que ça ne s'explique pas. Ça se ressent.



C'est la première fois que j'ouvre un livre de Yannick Haenel, je ne connaissais strictement rien à son univers, ou même à lui-même, et je dois dire que, sans avoir été influencée par qui que ce soit, j'ai découvert un immense écrivain (à mon sens du moins). Que dire ? Ce livre est une ode à la vie. Ode à la littérature. Ode à ce qu'André Gide appelle "la ferveur" et à ce que Yannick Haenel appelle "le feu". L'ambiance me paraît très "américaine", le type d'atmosphère que l'on retrouve chez Auster, ou bien chez Kerouac, et je suppose chez bien d'autres... Des écrivains très différents quoique très talentueux, mais avec cette même folie un peu décalée, grisante.



Alors oui, c'est un peu déroutant au début ; oui, c'est complètement barré, avouons-le, et donc effectivement, ça ne peut plaire à tout le monde. Soit vous entrez dans cet univers si spécial, décalé, auquel cas c'est incroyable, soit ça ne prend pas et vous vous ennuyez durant l'intégralité du livre. Heureusement, je fais partie de la première catégorie de personnes.



Si l'on parle uniquement de la forme, ce n'est pas difficile à lire; c'est même très agréable. Le rythme des phrases est plaisant, le vocabulaire n'est pas complexe, et il y a cette sorte de poésie dans les mots, si chère à mon coeur. Le livre dispense quelques vérités sur l'écrivain, la littérature et la vie d'une très belle façon. Je me suis retrouvée à réfléchir à tout ça, et ça m'a fait du bien. C'est le mot; ce livre fait du bien. Il vous fait sourire et vous rappelle avec sa particularité et sa singularité ce qu'est la vie. Il vous met du baume au coeur et vous ouvre l'esprit. Mais n'ayez pas l'impression d'un ouvrage lourd; il sait rester suffisamment léger et se montre même drôle par quelques traits d'humour fort bien exécutés.



Le livre peut sembler ne pas avoir réellement d'histoire, de trame élaborée; en effet je pense que le plus important, ce sont les réflexions de notre narrateur. Les éléments extérieurs sont, à mon sens, un genre de "prétexte" à de nouvelles pensées; et ça aurait pu m'endormir, cette distance avec l'action. Mais il n'en fut rien; et à vrai dire je n'ai pas trouvé la moindre once d'artificel dans ce livre. Tout m'a l'air de déborder de sincérité. Et c'est séduisant, quand on sent que l'auteur ne triche pas.



Enfin, j'ai véritablement eu l'impression d'originalité. Le narrateur et protagoniste principal est tout simplement un ovni , Yannick Haenel a un véritable style qui lui est propre, sa façon de raconter l'histoire, comme si les événements étaient détachés les uns des autres, mais reliés par les pensées du narrateur... Et les thèmes abordés, s'ils sont la base d'énormement de très bons livres (et donc ont été explorés de nombreuses fois), sont éclairés sous un angle différent; je n'ai pas l'impression de redite mais plutôt d'une nouvelle vision des choses.



Je vous le conseille vivement.
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Cercle

J'ai lu une quarantaine de pages. L'écriture est superbe, mais l'histoire trop contemplative à mon goût pour que je m'y plonge plus longuement (c'est un pavé de presque 600 pages, et pour avoir lu d'autres critiques, il semblerait que cette proposition s'étende à tout le livre !). Un livre donc à lire par petits bouts peut-être, pour le plaisir des mots et son contenu philosophique, mais certainement pas tout d'une traite ! Je mets 4 étoiles pour ce qui a été lu, qui m'a quand même beaucoup plus.
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Les Renards pâles

Je l'ai lu sur recommandation d'une amie libraire.

J'ai vraiment essayé. J'ai tenu 50 pages avant de le ranger et de l'abandonner en disant : "C'est vraiment trop chiant". Je n'ai pas aimé l'écriture, j'ai buté dessus, je n'y suis jamais entrée. Je ne sais toujours pas qui sont les renards pâles, je n'ai jamais pu les rencontrer. Il y a quelques belles phrases qui font naître de belles images. Mais ce n'est pas suffisant. Dommage.

(Attention, cet avis n'engage que moi. Mon jugement est tout ce qu'il y a de subjectif. Mon amie l'a aimé, ce roman.)
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La solitude Caravage

A quinze ans, Yannick Haenel étudie au Prytanée de La Flèche et découvre une partie d'un tableau du Caravage : Judith décapitant Holopherne. Ignorant qu'il s'agit d'une mise à mort, il ne voit que le beau visage d'une jeune femme. Celle-ci va être la porte qui va lui permettre, au fil des années, d'entrer dans l'univers du peintre.

Ici, la biographie de Caravage est brièvement évoquée car le propos de l'auteur est autre. C'est une méditation sur l'œuvre du peintre. Des premiers tableaux (Le Petit Bacchus malade, Garçon à la corbeille de fruits, Bacchus) au Martyre de Sainte Ursule qui est l'œuvre ultime, le cheminement de l'artiste est clair. Yannick Haenel écrit : "par son art, le peintre s'efforce de se rendre présent aux temps sacrés, il éclaire le monde depuis l'invisible auquel l'ouvre la peinture." La vie tumultueuse du peintre et son œuvre ne se contredisent pas. "C'est à ce pays spirituel aussi sombre qu'efficace que la peinture du Caravage nous invite; et si le crime y est prégnant, c'est parce qu'il ne saurait exister de grâce sans qu'en même temps le malfaisant ne se jette sur vous."

De Milan à Porto Ercole, une vie se dessine, une œuvre aussi. On y voit un artiste brillant être tour à tour protégé et rejeté par les Grands de ce monde. Souvent, il fuit. Traqué, il ne cesse jamais de peindre l'Histoire sainte en donnant la part belle à la figure du bourreau et en se représentant lui-même, épouvanté certes, mais de plus en plus proche du Christ.

L'intensité et la grandeur de la peinture du Caravage nous sont rendues avec magnificence par la plume de Yannick Haenel qui égrène pour nous de profondes méditations sur l'œuvre de génie du célèbre artiste.

Une belle lecture.

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