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Critiques de Anne Pauly (206)
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Avant que j'oublie

C'est au moment du décès de son père unijambiste, alcoolique mais aussi poète et doux rêveur, qu'Anne la narratrice se met à raconter ce père. Son décès, les formalités à accomplir, la dispute avec son frère Jean-François lors de l'achat du cercueil aux pompes funèbres, la préparation avec le curé de la cérémonie du souvenir, l'enterrement puis le vide à faire dans la maison familiale en vue de la vente, sont évoqués dans son récit de même que la fin de vie de cet homme atteint d'un cancer.

C'est notamment en inventoriant et en tentant d'évacuer les meubles et la multitude d'objets remplissant la demeure où vécut la famille qu'Anne va petit-à-petit être amenée à mieux comprendre qui était cet homme, à éclairer sa personnalité et l'amener à réviser quelque peu son jugement sur celui accusé plus ou moins par ses proches d'avoir pourri la vie familiale avec ses excès alcooliques.

La lettre d'une certaine Juliette sera un des moments les plus émouvants du livre. Elle apporte une clarté et une vérité sur ce que soupçonnait un peu sa fille et la véritable personnalité de ce père.

Après ces quelques lignes, vous vous attendez peut-être à un récit triste et tragique. Il peut l'être parfois, mais c'est raconté avec un tel humour, une telle tendresse, une réelle nostalgie et souvent avec beaucoup de regrets. Mais n'est-ce pas ce que chacun ressent au décès d'un proche, le regret de ne pas s'être tout à fait compris, de ne pas s'être épanché davantage, de ne pas s'être dit tout l'amour que l'on éprouvait ?

De plus Anne Pauly, dans cette autobiographie romancée, n'hésite pas à mettre en avant ces gens simples que la vie n'a pas épargnés et qui sont souvent ignorés.

J'ai aimé suivre le cheminement de cette jeune femme, qui, au fil des jours ayant suivi la mort de son père va arriver en démêlant certains faits de son existence, en comparant les apparences et la réalité, à apaiser sa douleur et parvenir à trouver un sens à sa vie.

Dans son premier roman, Avant que je n'oublie, où chagrins et situations comiques s'entrecroisent, Anne Pauly a su évoquer l'amour filial d'une manière tout à fait remarquable et originale par son style et son écriture. C'est un récit dans lequel l'auteure confie des moments d'intimité qui ont une valeur universelle.

Le Prix du Livre Inter 2020 est une récompense bien méritée !

Je n'ai pu m'empêcher, en lisant cet ouvrage, de penser à deux autres auteurs que sont Annie Ernaux et Edouard Louis.


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Avant que j'oublie

Édité chez Verdier, à Lagrasse, un magnifique bourg de l’Aude, ce roman signé Anne Pauly a obtenu une consécration très recherchée : le Prix du Livre Inter 2020 ! Le jury, composé de lecteurs et présidé, cette année par Philippe Lançon (Le Lambeau), a surpris son monde avec ce choix mais c’est assez habituel pour ce prix littéraire de sortir des sentiers battus.



Dans Avant que j’oublie, Anne Pauly, pour son premier roman, se lance dans une aventure littéraire la plus délicate qui soit : écrire sur son père qui vient de mourir en donnant énormément d’elle-même.

Avec franchise et spontanéité, un souci du détail impressionnant, elle retrace les derniers instants de Jean-Pierre, son père, qui meurt d’un cancer. C’est, pour elle, l’occasion d’aller au-delà des mauvais souvenirs, des moments difficiles, d’années d’une vie gâchée par l’alcool et les médicaments. Petit à petit, la véritable identité de cet homme, violent avec sa femme, ressort. Anne Pauly m’a tout fait partager, des derniers instants à l’hôpital de Poissy jusqu’au cimetière en passant par la préparation des obsèques religieuses.

Tous ces détails, toute cette fausse commisération, ces textes, ces chants formatés me confortent dans ma volonté de me passer de toute cette comédie. Ce n’est pas une cérémonie, la plus réussie soit-elle, qui permet de garder au fond de son cœur le souvenir d’un être cher, disparu. En cela, Anne Pauly le démontre très bien quand elle se retrouve seule dans la maison familiale qu’elle doit ranger, son frère, Jean-François, ne s’en occupant pas. Trier, ranger, jeter, garder, lire, relire, ces moments sont terribles, riches en émotions pour celle ou celui qui tente vraiment d’aller au-delà des apparences afin de conserver le souvenir le plus juste de la personne disparue.

Enfin, il y a surtout cette lettre de Juliette, l’amie d’adolescence de Jean-Pierre. Anne la reçoit alors qu’elle est en train de trier les souvenirs familiaux et j’ai été vraiment touché par tant de clarté, de sincérité avec des mots si justes, une délicatesse admirable.

Malgré un sujet aussi triste et pourtant si proche de la vie des êtres humains de passage que nous sommes, Anne Pauly a trouvé le moyen de conclure par un dernier chapitre court et plein d’optimisme. Cette belle respiration finale était bienvenue.



Certes, ce genre de roman aussi intime ne me passionne pas outre mesure mais j’ai apprécié sa lecture, une réflexion salutaire et utile.




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Avant que j'oublie

Chère Anne, ma très chère Anne,



Permettez-moi que je vous appelle ainsi, parce qu'après ce que j'ai lu de vous, après ce témoignage poignant, je ne peux que vous considérer que comme une amie très chère.

Vous avez vécu ce que d'autres avant vous ont vécu, ce que d'autres vivront et ce que moi je vivrai.

Votre émotion, votre pudeur, vos mots percutants et si justes, si poétiques aussi, m'ont emmenée dans ces vertiges de l'émotion et j'ai pleuré, oui, j'ai pleuré.



Vous commencez par raconter la mort de votre père et votre sidération.

« Je m'étais retrouvée seule avec lui, mon macchabée, ma racaille unijambiste, mon roi misanthrope, mon vieux père carcasse, tandis qu'au-dehors tombait doucement la nuit ».

Et là, je suis tombée dans le chagrin.



Le décès est suivi de toutes les formalités, du choix du cercueil aux chants à l'église, et aux paroles prononcées lors de l'inhumation. Vous avez bien saisi toute l'inhumanité de cela, car la vie continue et est en hiatus avec l'abîme dans lequel vous êtes plongée. Et ce décalage effroyable, vous le racontez avec humour, ce qui permet de ne pas sombrer.



Et puis vient ce temps du deuil où vous pensez sans cesse à votre père, mais aussi à votre enfance. Votre père n'était pas « une idole », comme dit le curé, il était violent avec votre mère, alcoolique. Votre frère et vous en avez souffert. Mais à l'heure de lui dire vraiment adieu, à l'heure de vider la maison, vous opérez un travail d'historienne de l'âme, vous voulez retrouver ce père tout entier, dans toute son ambiguïté, dans toutes ses failles et dans toute sa gloire intime. Les objets dont votre père s'entourait, ses petits objets du quotidien acquièrent pour vous une valeur sans nom. N'oublions surtout pas la lettre pleine d'humanité que vous envoie à cette époque l'amie d'enfance de votre papa. C'est important, l'enfance, même celle de ses parents, surtout celle de ses parents lorsqu'ils sont morts.



Lentement, ce deuil vous enveloppe et vous déchire.

« Ce qui me semblait le plus difficile, c'était de ne plus l'entendre du tout, de ne plus avoir de nouvelles de lui, et au début, machinalement, je regardais mon téléphone pour vérifier qu'il ne m'avait pas appelée, mais non ».



Et doucement, j'avance avec vous. Je lis avec vous ce haïku choisi dans le recueil de votre père et je le murmure avec vous :

« Je pense seulement

À mes parents

Crépuscule d'automne »



Et enfin, j'écoute avec vous Céline Dion, « et puis là, sans prévenir, le refrain m'a sauté à la figure comme un animal enragé :

'Mais avant tout, je voudrais parler à mon père'.

Dans mon coeur, ça a fait comme une déflagration et je me suis mise à sangloter sans pouvoir m'arrêter. Mes toutes dernières larmes sont sorties ce jour-là. J'avais enfin accepté ».



Merci pour votre partage intense. Pour votre douleur. Et enfin pour votre apaisement, votre acceptation. Vos mots intimes sont universels et pour cela, vous m'avez aidée.

Merci.

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Avant que j'oublie

La narratrice vient de perdre son père, décédé d’un cancer. Alors qu’elle range la maison désormais déserte mais encore imprégnée de la présence du vieil homme, elle se remémore sa personnalité atypique et complexe, qui fut si difficile à vivre pour ses proches. Alcoolique et violent, provocateur et insupportable, cet ours unijambiste cachait pourtant pudiquement une tendresse maladroite et une sensibilité artistique empêchée, que sa fille va s’attacher à retracer au travers des mille objets et souvenirs entassés dans sa tanière : une manière pour elle de faire petit à petit son deuil, en se réconciliant avec ce qu’il fut et ce qu’il lui a laissé.





Ce roman aux sonorités autobiographiques est émouvant à plusieurs titres : c’est bien sûr le récit d’un deuil, d’une amputation affective avec laquelle il faut apprendre à vivre, mais c’est aussi la réhabilitation d’un père que l’auteur s’applique à révéler pour ce qu’il était vraiment, un long travail nécessaire à son apaisement, pour qu’enfin la réconciliation ait lieu et l’amour puisse retrouver sa place.





Le langage employé évoque la vie de tous les jours, les mille détails absurdes, drôles ou tragiques, qui, bien au-delà du raccourci des apparences, nous font deviner les secrets parfois touchants d’un homme devenu hérisson, et que seule la fin de vie a rapproché de sa fille. La maladie, l’hôpital, la morgue, les pompes funèbres, l’office religieux et l’enterrement, puis le vide et les souvenirs, sont évoqués sur un ton doux-amer, qui oscille constamment entre le rire et les larmes, narrant avec justesse et sensibilité un cheminement douloureux et nécessaire pour le retour à la vie des survivants.





Chacun pourra trouver une émotion à sa mesure dans ce récit intimiste à la portée pourtant universelle, où l’amour, trop pudique ou masqué par le quotidien, ne trouve à s’épanouir (ou pas) que lorsqu’il est bien (trop) tard.


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Avant que j'oublie

Les morts vont vite. Le chagrin a besoin de lenteur. 



Aux premières pages, l'émotion est déjà là, mais masquée  derrière les fous- rires.



Entrée dans la nef  sur les pas du cercueil de son père,  au bras de son amie, comme une fiancée qu'elle mènerait  à l'autel, à l'heure des manifs anti mariage pour tous, Anne, la narratrice doit  attendre deux heures d'un interminable sermon par un curé qui parle plus de l'épouse exemplaire et maltraitée que de son  brutal et défunt epoux, ( pour un peu elle devrait suivre le convoi qui mène son père à sa dernière demeure  sur l'air des Chariots de feu alors que c'est un cul-de-jatte qu'on enterre!), mais elle se voit confisquer le  dernier mot par un croque-mort-en-chef ivre- mort  - dernier hommage foutraque et cocasse à son père alcoolique...



Un premier  portrait de Jean-Pierre Pauly est déjà brossé, à grands traits hâtifs : mari violent porté sur la bouteille, handicapé et vivant pauvrement dans une solitude farouche,  dont les enfants, Anne et Jean-François ( la mère est morte d'un cancer depuis des années) , ne retiennent pas que de bons souvenirs.



Mais si le fils est plein de colère, la fille, elle , est partagée : exaspérée par l'égoïsme d'un père qui semble n'avoir jamais pensé qu'à lui et débordée de tendresse pour ce grand escogriffe maladroit qui l'aimait.



Leurs fous-rires à tous deux  sont l' acclimatation à une disparition brutale, si rapide qu'elle ressemble à un escamotage. le rire traduit cette inadaptation des rythmes.



Comme chante Lénore, dans le poème d'August Bürger: "Les morts vont vite". 



Les morts vont vite - et le chagrin a besoin de lenteur.



Tout le récit , sincère,  juste,  aussi émouvant dans ses rires incongrus que dans ses larmes irrépressibles, est une danse de deuil pour retrouver le pas, le rythme et mettre enfin  cette mort fugace, sauvage, emballée au pas si lent de l'amour orphelin.



Comme dans un morceau de musique, après la carmagnole cruellement burlesque du début,  surviennent trois moments magiques.



La lettre de Juliette comme un thrène, un chant d'apaisement,  une douce consolation- qui dit à  Anne les mots que personne n'a su dire et redonnent au défunt tendresse, douceur, humanité. 



Les piles jumelles et leur étrange électro-cardiogramme qui scandent le ballet mesuré du  temps, l'attente de la mort. Et provoquent un adagio vibrant  à la patience du défunt, son attention à la modestie des choses. Anne s'avoue vaincue:  " j'ai cru mourir d'amour et de melancolie ".



Et enfin la chanson de Céline Dion qui provoque une pop-catharsis d'un genre inattendu chez cette programmatrice du festival queer,  Loud & Proud, ... qui se découvre soudain un coeur de midinette.



Bouleversée, Anne retrouve l'image vraie et réhabilitée d'un père tendrement chéri:  les larmes peuvent jaillir.



Les morts vont vite. Le chagrin a besoin de lenteur.



D'ailleurs tout est devenu signe : le mort a encore des choses à dire à ses enfants qu'il a quittés trop vite ou trop mal. Il faut que les remords ou la colère s'apaisent. Il suffit parfois d'une R 10 déglinguée  à l'angle d'un carrefour ou d'une pie dans la tempête.



Un livre qui m'a bouleversée et dont j'ai relu plusieurs fois,  dans les rires et dans  les larmes,  bien des passages.



Anne, ma soeur Anne, ton livre fait du bien à tous ceux, toutes celles qui ont mis du temps, parfois,  à retrouver,  comprendre, vider  et dépasser leur chagrin.



Les morts vont vite. Le chagrin a besoin de lenteur. 
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Avant que j'oublie

Avant que j’oublie est le vibrant hommage d’une fille à son père défunt, une déclaration d’amour filial à un homme qui malgré tout a fait preuve d’insuffisances caractérisées sur le plan de la famille. Même si les violences étaient essentiellement dirigées vers son épouse, les enfants ont été les témoins et les victimes collatérales des troubles du comportement liés à une alcoolisation chronique avec des pics délétères.



Mais c’est son père, dont elle découvre des secrets en tentant de faire l’impossible tri, et de ce que cela représente de se débarrasser de tous ces objets qui sont autant de souvenirs, sans avoir l’impression de jeter avec tout ce fatras l’âme de la personne disparue.



C’est un récit très authentique et rédigé d’une écriture percutante, un vrai sens de la formule et des dialogues nature. Et la lecture en est très agréable



Cela reste un ouvrage qui semble s’apparenter à ces écrits à fonction thérapeutique pour l’auteur, le titre en est le témoin, pour ne pas oublier. Ce qui n’est pas utile pour le lecteur qui n’a pas connu le personnage, au risque de se retrouver de position de voyeur d’une intimité qui lui est proposée sans arrière pensée.



L’auteure montre ainsi dans cette première publication un vrai potentiel d’écriture avec une voix singulière que l’on attendra avec plaisir pour une autre oeuvre.






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Avant que j'oublie

Une vraie pépite sur un sujet « casse-gueule » !! C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai reculé à plusieurs reprises devant l'acquisition de ce premier roman, appréhendant un récit larmoyant et mortifère !! Devant la mise en avant perdurant depuis la parution de cette «catharsis intime » à l'automne 2019, je me suis décidée et j'en suis très heureuse !

En réalité, nous, lecteurs, avons droit à un véritable arc-en-ciel d'émotions et de sourires, dû à un style vivant, sensible, tour à tour provocateur ou grave ! Un moment de lecture intense…où à un moment avancé, on ralentit , n'ayant pas envie de quitter Anne, cette fille si complice de son père, tout en étant souvent agacée ; toutefois, il reste « son héros », contrairement à son frère, retenant que les défauts et failles paternelles…apparemment seulement… nous le comprendrons plus tard …!

La narratrice qui n'est autre que la fille aimante

[l'auteure ], est la seule conductrice du récit…Elle , nous emporte dans ses émotions contradictoires, mais aussi dans l'amour fou ressenti pour ce père atypique, défaillant, protecteur, et aimant à la fois !



« J‘'en revenais pas, pas du tout. D'abord qu'elle me dévoile simplement et avec de si jolis mots la vérité de cet attachement adolescent qui avait continué de rougeoyer dans les replis silencieux de leurs existences. Puis qu'elle me dise, l'air de rien, que, depuis toujours, il était fier de nous, de moi, alors même qu'il ne nous l'avait jamais vraiment dit. Enfin, qu'elle me fasse l'ultime cadeau de me confirmer qu'il avait toujours été, avant que la vie, la violence et l'alcool ne viennent s'en mêler, celui que je pensais qu'il était : un juste, un sensible, un contemplatif, un silencieux dans la bulle duquel être admis valait toutes les protections, un ogre timide à qui il était arrivé, autrefois, d'être un adolescent amoureux, de détester l'école et de jouer les Huck Finn devant des feux de camp, le soir, au bord de rivières »



Le ton est donné à ce petit trésor de tendresse, de provocations, de drôlerie, en dépit du sujet douloureux : la mort d'un Père…foutraque et très abîmé par l'existence…Entre gravité, tragi-comédie, pieds-de-nez aux convenances…grande tendresse et cocasserie !



Un sommet d'émotion lorsque Anne reçoit après les obsèques du papa…une lettre d'une amie, attachement datant de l'adolescence paternelle, lien distendu par les circonstances de l'existence, resté comme une petite lumière de part et d'autre… révélant la richesse et la complexité de sa personnalité !

« Oui, sûrement, il avait exagéré et pourtant, c'était bien cette âme-là que j'avais sentie à proximité de la mienne pendant toutes ces années et c'était bien cet homme-là qui, entre deux saouleries, m'avait serrée dans ses grands bras à chaque fois qu'il avait senti que l'angoisse m'agrippait avec ses mains noires. »



Je ne peux m'empêcher de transcrire un dernier extrait, qui exprime avec une sobriété absolue le manque, l'épreuve du deuil, et la manière dont chacun tente de poursuivre sa route !...

"Il reste d'une personne aimée et disparue une matière subtile, immatérielle : une absence que l'on peut ressentir comme une présence dont plus rien désormais ne peut ternir l'éclat. Mais cela n'enlève rien au chagrin qu'il fait affronter pour continuer sa propre route. Il n'y a pas d'âge pour se sentir orphelin.

On n'oublie jamais, on apprivoise le manque avec les moyens propres à chacun... Les mots sont souvent inefficaces. (...) Juliette "



Un magnifique texte d'autant plus bouleversant qu'il évite justement le ton de circonstance classique…Bravo et reconnaissance à l'auteure… pour ce moment fort et authentique de lecture !

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Avant que j'oublie

Au vu du nombre de critiques tout a été dit déjà mais tant pis.



Ce roman autobiographique à l'écriture tendre, bouleversant, vous saisit aux tripes, une émotion à l'état brut pour moi, qui ait vécu ces douloureux moments où l'on regrette de ne pas s'être assez parlé , entretenu avec un père discret aimant mais pudique ô combien, secret , cela vous déchire le coeur mais c'est trop tard....

Des moments terribles ...





Anne Pauly conte son père , unijambiste , alcoolique invétéré, mais poète et doux rêveur : «  un touriste de la vie » elle n'a pas envie de faire l'inventaire de sa mémoire, même si elle regarde ses violences du passé où «  Une bonne baffe calmait efficacement les épouses récalcitrantes » .



Voyez par là que sa mère n'y a pas échappé ...



Son père est mort .

Quand la maladie a diminué ses forces , Anne l'a soutenu , pour se rattraper , sa vraie personnalité enfin débarrassée des «  hardes puantes de l'alcool » il est apparu comme un contemplatif fin mais gauche, gentil mais brutal, généreux mais autocentré , dévoré par l'anxiété et la timidité , «  incroyablement empêché » .



Contre toute attente le monstre était vulnérable, humain et attachant .

Mais une enfant même devenue adulte , que sait - elle de son parent ? .



Anne Pauly nous décrit le choix du cercueil , les chants à l'église, les mille détails tragiques ou absurdes des formalités à accomplir, le fait de vider, trier, quoi jeter après la perte d'un être cher.



Elle découvre petit à petit la personnalité vraie de son père , ce «  colosse » lecteur autodidacte de spiritualité orientale , enfin «  la lettre venue d'outre - tombe » qui dit toute la vérité sur ce père imparfait , aimé , dont elle traque avec émotion, chagrin , délicatesse , amour non - dit , tendresse, les fils incandescents de son passage sur terre.



C'est un livre vrai , tout en ressenti , sans fausse commisération, sans fard, drôle , triste et joyeux à la fois, qui mêle gravité ,humour mordant , tendre dérision , délicatesse , et fantaisie , tragi- comédie, cette maison encombrée devient le lieu d'un réseau infini de signes et de souvenirs ——-cela je l'ai vécu aussi , vider, trier, choisir beaucoup de livres lus ou offerts dont on ne savait rien.——-et bien d'autres choses encore .....un texte à portée personnelle et intime que l'on est pas prêt d'oublier car chacun , un jour ou l'autre vit ou vivra ces moments ...



Un témoignage aux mots intimes et poignants, déchirants et UNIVERSELS .

Merci à Anne-Pauly.

: Oui  «  Avant que j’oublie » .

Merci à Reine pour le prêt .
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Avant que j'oublie

Beaucoup de critiques déjà sur ce livre, et il le mérite. Une amie me l'a offert, je l'en remercie. Un premier roman au ton particulier, humoristique et émouvant à la fois. Cela m'a fait penser un peu aux livres de Jean-Louis Fournier, le lecteur oscillant entre rires et larmes ici aussi.



La narratrice, double de l'auteure, raconte un deuil, celui de son père, et tous les souvenirs, le manque. Un père extravagant, drôle, moins drôle quand il buvait ou se disputait avec sa femme, quand il devenait violent. Un père aux sentiments maladroitement exprimés, sensible sous ses airs de grand escogriffe . Un père aimé.



L'enterrement est un morceau d'anthologie, décrit avec un humour féroce, alors que la fin, et cette envolée d'oiseau, m'ont embué les yeux... Le style original, brut et poétique, haché et ample, m'a beaucoup plu.



Vraiment une auteure à découvrir, attachante et pleine de promesses. Un beau cri d'amour à son père. Puissant, touchant.







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Avant que j'oublie

« J'ai cru mourir d'amour et de mélancolie... »

Je reprends ici une phrase du roman pour dire à quel point ce livre m'a profondément touchée.

Oui, j'ai vraiment senti la présence d'une voix très personnelle, d'une intense émotion et d'une sensibilité à fleur de peau qui m'ont bouleversée.

Et puis, parfois, vous le savez bien, l'amour que l'on a pour un livre naît d'une rencontre : des mots qu'on peinait à trouver et qui soudain sont là, devant vos yeux, comme par magie, et la chose incroyable, c'est qu'ils disent précisément, à la nuance près et avec une très grande justesse, l'émotion qui a été la vôtre ou qui aurait certainement été la vôtre dans un moment semblable…

Et ces mots, ces phrases, on sait tout de suite qu'on va avoir un impérieux besoin, tôt ou tard, de s'y replonger, de les relire, de s'y accrocher désespérément en cas de tempête... 

Le coup de coeur que l'on a pour un roman vient aussi de petits détails, de petites remarques (très tristes ou très drôles) qui nous font aimer l'auteure parce qu'on se sent furieusement sur la même longueur d'onde… Oui, c'est une sensibilité commune, une façon de concevoir la vie, l'amitié, l'amour, les relations aux autres, la mort, une espèce de feeling, un truc qui passe, qui nous happe et nous touche de façon très intime…

Et puis, bien sûr, c'est aussi une écriture, un style, une façon de parler du monde, des êtres et des paysages… En effet, les mots d'Anne Pauly claquent, pulsent, vont dans les coins et les recoins, ne tournent jamais la tête, n'ont peur de rien ni de personne. Ils ont la tenue des gens qui savent rester discrets et l'oralité de ceux qui disent ce qu'ils ont à dire.

Il y a aussi cet humour, cette énergie du désespoir qui est là, toujours, et qui aide à supporter le monde, car « chacun se tient en vie selon ses moyens » et rire du plus triste est peut-être la meilleure façon de tenir la tête haute et de continuer d'avancer.

Et là, on se dit que ce livre ne nous quittera jamais parce qu'on en aura toujours besoin, oui besoin, comme d'un aliment, d'une musique, d'un lac dans lequel se jeter en plein été parce qu'on a trop chaud.

Un indispensable, quoi. Un nécessaire. Un vital.

Bon…

Reprenons.

« Avant que j'oublie » (ah ce titre…) est un roman. C'est écrit au début. Mais dans ce roman, la narratrice s'appelle Anne Pauly et son père Jean-Pierre Pauly. Alors, évidemment, on est fortement tenté d'y voir une autobiographie. Bien sûr, il y a de nombreux éléments qui correspondent sans doute à la vie de l'auteure, mais ils sont, je pense, passés par le filtre de la littérature, de l'écriture, du souvenir aussi…

Ce père qui meurt dans les premières pages est un homme qui n'a pas une bonne réputation : on dit de lui qu'il n'a pas toujours été très agréable avec sa femme (vous noterez l'euphémisme), ni avec ses enfants d'ailleurs (le frère d'Anne semble lui en vouloir beaucoup.) Dans le fond, c'est un personnage que l'on découvre au fur et à mesure des pages, que l'on apprend à connaître, j'allais dire à aimer (j'exagère peut-être), en tout cas un être original que le regard de sa fille finit par rendre presque attachant.

Unijambiste, alcoolique, attiré par les ouvrages de spiritualité orientale, il n'a pas été facile à vivre et après sa mort, le frère d'Anne n'a qu'une hâte : que les obsèques aient lieu, que la maison soit vendue et qu'on n'en parle plus.

Mais pour Anne, c'est plus compliqué. Comme, Bartleby, elle « préférerait ne pas. » On sent que malgré toute sa colère et son agacement, la narratrice aime ce père dont elle se sent proche, dont elle se sent être la fille et surtout dont elle a besoin pour vivre. L'enterrer, lui dire adieu, trier les objets, liquider la maison et continuer à vivre sans lui ne vont pas être simples, il va falloir du temps, beaucoup de temps. Il va falloir aussi prendre sur soi. En triant ses objets et en lisant quelques lettres, elle va découvrir un homme qu'elle ne connaissait pas vraiment mais dont elle sentait qu'il n'était pas seulement ce qu'il laissait paraître.

« Sa vraie personnalité, enfin débarrassée des hardes puantes de l'alcool, était ressortie : un contemplatif fin mais gauche, gentil mais brutal, généreux mais autocentré, dévoré par l'anxiété et la timidité, incroyablement empêché. Un touriste de la vie. Contre toute attente, le monstre était humain, vulnérable, attachant. »

Écrire sur lui, sur ce père qui n'est plus, c'est révéler, dévoiler une forme de vérité, la sienne, celle que les gens n'ont pas vue ou celle qu'il n'a pas voulu montrer.

Écrire sur lui, c'est dire au monde qui il a été. Et le dire avec une tendresse infinie...

Un bel hommage qui permet l'apaisement, la réconciliation et peut-être même, enfin, l'amour. Un amour total.

Un livre sensible, fort, drôle aussi, très drôle même, et d'une très grande beauté.

Il m'a bouleversée.

Et je l'aime.
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Avant que j'oublie

J'ai eu du mal à démarrer cette lecture moderne, mais après...

L'autrice raconte l'histoire d'un deuil, celui de son père, violent et ivrogne, mais pourtant plein de tendresse et d'attentions.

Sa famille dysfonctionnelle est malgré tout heureuse. Le roman est centré sur la vie d'un homme qui n'est pas tout-à-fait celui qu'on pourrait croire, d'où la nécessité de ne pas se fier aux apparences !

D'ailleurs, je vous incite, lectrices et lecteurs, à ne pas vous attarder sur l'affreux bandeau de couverture mais à entre pleinement dans le bouquin.

J'ai eu par moments un peu de mal à comprendre l'amour de cette fille pour ce père difficile mais le travail de deuil (travail dans son sens de douleur) est justement rendu.

Anne Pauly passe par toutes les phases (abattement, colère, désespoir) avant - comme l'indique si bien le titre - d'arriver à oublier un peu cette disparition. L'attention aux petits signes (de l'au-delà ?) l'aidera beaucoup.

J'ai trouvé la fin (contrairement au début) du récit magnifique et émouvante, comme la plus grande partie du roman.
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Avant que j'oublie

Avec la politesse du désespoir

Pour son premier roman Anne Pauly s’est emparée d’un sujet difficile, la mort d’un père. Mais elle a réussi un hommage aussi drôle qu’émouvant, en mettant le doigt sur toutes ces petits détails absurdes et en trouvant pour cela une langue très originale.



Dieu sait que ce père que la narratrice vient de perdre est vraiment loin d’avoir été parfait. Le «gros déglingo» comme elle l’appelait se laissait aller à la violence, n’hésitait pas à téter quelques bouteilles, à rouspéter après le personnel médical ou à se prendre à sa famille qui pourtant l’a accompagné durant ses dernières années, alors que la maladie gagnait du terrain et qu’il ne se déplaçait plus. Une rudesse un peu contrebalancée par une vie plus secrète, dont les objets qui entourent le défunt viennent témoigner, «des mots fléchés force 4, sa petite bible, un recueil de haïkus, son livre sur Gandhi». Une recherche de spiritualité dont on reparlera, car pour l’heure, il s’agit de «mettre de l’ordre» et de préparer les obsèques.

Des obligations qui permettent aussi d’oublier son chagrin et de se concentrer sur des choses plus triviales comme le choix d’un cercueil, la rédaction de l’annonce mortuaire, l’envoi des faire-part et la préparation des obsèques avec le curé.

Si ce roman sensible et émouvant est si réussi, c’est qu’il balance constamment entre le rire et les larmes, démontrant avec grâce que la politesse du désespoir permet de ne pas sombrer, que l’humour est une soupape vitale.

Anne Pauly a aussi trouvé l’écriture qui se marie parfaitement à ce temps de crise, jouant beaucoup sur l’oralité, comme lorsque la narratrice accompagne son frère à l’entreprise de pompes funèbres: «du racket organisé, du délit d’initié, moi monsieur, je ne marche pas dans votre marge de malade et vos combines de merde, avait dit mon frère à monsieur Lecreux fils […] Au fond, j’étais d’accord avec lui sur l’obscénité de ce business de boîtes mais en ce moment difficile, ce n’était pas trop la peine de s’énerver parce qu’en réalité, la mort était déjà passée.»

On peut aussi rapprocher cette manière de parler de la mort de ces haïkus qui plaisaient tant au père disparu. De courtes formules dont l’usage immodéré est aussi un hommage au disparu. Je ne résiste du reste pas au plaisir de vous en livrer quelques-unes ici. À la morgue: «Ses sourcils et ses cheveux brillaient dans la lumière, pleins de laque et de givre parce qu’il sortait d’un putain de congélo.» À la lecture de l’épître aux Corinthiens: «Petite, j’imaginais des types plutôt retors spécialisés dans le négoce de raisins secs.» ou encore lorsque la famille monte en voiture: «En parcourant les cinquante mètres qui séparaient le parking de la chambre funéraire, tous vêtus de noir, j’ai eu un bref instant l’impression qu’on allait braquer un casino.» Je n’oublierai pas non plus Céline Dion, invitée surprise venue à la rescousse et offrant «la catharsis par la pop-check.»

Mais avant ces «toutes dernières larmes», on aura découvert les multiples facettes de la vie de cet homme qui donnent au fil du roman un portrait bien différent des premières pages avec – autre trouvaille de la romancière – une surprise de taille lorsque se manifeste une femme qui a bien connu cet homme. L’occasion d’une ultime pirouette qui prouve que fort souvent on se fait une idée fausse ou pour le moins partielle des gens. Une belle leçon d’humilité qui peut aussi être un manuel à l’usage de ceux qui vivent un deuil.


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Avant que j'oublie

Les prix littéraires ont l'avantage de mettre en lumière des livres, à côté desquels on serait peut-être passé. C'est le cas du magnifique premier roman d'Anne Pauly « Avant que j'oublie » qui a reçu le prix Livre Inter 2020.



Anne la narratrice se retrouve avec son frère Jean-François, leur père vient de mourir d'un arrêt cardiaque. le colosse unijambiste a été foudroyé. Mais avec ce frère taciturne et cassant, elle ne pourra pas partager son chagrin ni les souvenirs. Faut dire que leur enfance a été faite de cris, de drames, un père ivre mort qui court après sa mère un couteau à la main en éructant, des excès d'alcool, de colère et de jalousie.



Avec une écriture simple et pleine de gouaille, elle va nous raconter la vie quotidienne et ordinaire, des moments dérisoires, mais qui aujourd'hui sont essentiels. Elle revient sur les mois qui ont précédé la mort et le difficile deuil qui suit.



Car derrière la violence et l'alcool se cachait un contemplatif, gentil, mais brutal, généreux, mais autocentré, dévoré par l'anxiété et la timidité. Un ogre timide, vulnérable et attachant, un juste, un sensible, un silencieux dans la bulle duquel être admis valait toutes les protections

Anne nous raconte la préparation des obsèques une occasion de réflexions savoureuses sur la religion, depuis toujours elle prend des libertés avec l'église et le camarade Jésus :



« j'avais coché dans le “Pour préparer la célébration” les textes qui me semblaient possibles, des choses qui s'éloignaient un peu des mystères compliqués de la foi et des fables invraisemblables dans lesquelles on multiplie les pains, on touche des lépreux sans rien attraper et où les morts se lèvent et marchent quand on leur ordonne. »



Les rituels de la messe, le cimetière. Et puis trier ses affaires et les souvenirs qui remontent. Garder ou jeter, se séparer de choses qui avaient représenté pour lui des mois d'économies.



« Bien sûr, c'était une autre époque : on recommandait à la population de consommer de la bière les jours de canicule, les gendarmes traquaient les nudistes à Saint-Tropez. Yves Montand roulait à tombeau ouvert, sans ceinture et de nuit pour rejoindre Romy Schneider après s'être enfilé deux trois apéros, et une bonne baffe calmait efficacement les épouses récalcitrantes. »



Et puis, une fois que la cérémonie est terminée, il y a l'absence, un vide immense. Sa vie ressemble à un dimanche d'hiver, tout est laid, gris, ralenti, obscurci, ankylosé, malgré la présence de sa fiancée joyeuse et du cercle de ses amis sincères.



Un récit plein de pudeur et de sensibilité, c'est un véritable cri d'amour que lance Anne Pauly, elle aimerait tellement partager encore un instant avec lui, elle voudrait juste parler à son père.







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Avant que j'oublie

Voici une histoire toute simple comme je les aime, une histoire que l’auteure, Anne Pauly, a puisée dans son vécu : la perte d’un proche.

Elle a su avec sensibilité et sobriété raconter l’annonce d’une mort, celle du père, et avec elle la sidération.



Alors qu’elle doit vider la maison, trier les affaires de son père, elle parle de l’absent et le fait revivre sans pathos, avec une tendresse teintée d’humour. Revoilà le père dans son quotidien banal, dans les plus infimes détails et au travers des personnes qui l’ont côtoyé. Elle découvre ainsi des morceaux de sa vie qui lui avaient échappé.

Ce père, elle n’en fait pas un héros car cet ours misanthrope et alcoolique était violent avec sa mère, ce qui rendait la vie à ses côtés difficile.

Tout le cheminement pour accompagner le malade puis le mort est décrite avec simplicité : des visites à l’hôpital à la visite ultime à la morgue, les pompes funèbres et, enfin, l’inhumation.

C’est en écoutant Céline Dion à la radio que le refrain de sa chanson « Mais avant tout, je voudrais parler à mon père » provoque ses sanglots et le constat qu’enfin, le deuil se réalise avec l’acceptation de l’absence.



Les relations père-fille sont relatées avec une tendresse pudique.

Ce livre intimiste et tendre nous rappelle combien la vie passe vite et nous parle des regrets d’une relation à laquelle la mort a mis fin.

Une lecture émouvante qui peut faire résonance avec son propre vécu.





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Avant que j'oublie

Avec amour et ironie Anne nous raconte son père. Ce père qu’elle a connu alcoolique et violent, repenti et poète quelques années avant sa mort. Anne et son frère se rendent à l’hôpital où leur père a rendu son dernier soupir. Ils doivent contenir leurs sentiments pour régler la note et les détails pratiques. Puis organiser les obsèques. Ce frère qui prend toute la place avec son chagrin et sa colère.



L’enterrement passé, Anne toujours en état de sidération doit s’occuper seule de trier les affaires de son père, de ses parents, de son enfance dans cette maison délabrée. Anne ne peut pas, elle regarde attentive les affaires de son père, les range à leur place, enregistre les bruits de la maison et se souvient. Le frère est reparti dans sa vie et Anne n’aura que très peu de nouvelles. L’amie d’enfance du père a écrit une lettre pour raconter leur jeunesse commune et Anne va découvrir l’être sensible et blessé qu’il était adolescent.



Elle reprend sa vie, endormie, toujours en état de choc jusqu’à ce jour où elle entend la voix de Céline Dion qui voudrait tant parler à son père. Anne s’écroule, elle peut enfin faire son deuil.



Les mots sont choisis, précis. Ils sont tendres, chagrinés, coléreux, gais. J’ai aimé ce récit lumineux malgré la mort. L’auteure manie la tendre ironie avec subtilité et justesse. Je me suis retrouvée dans les souvenirs d’enfance, dans les odeurs et les bruits de cette maison familiale. Je n’oublierai pas cette histoire, Anne n’oubliera pas son père, ni tous ses souvenirs qui font d’elle cette femme sensible et aimante.
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Avant que j'oublie

''Avant que j’oublie'' d’Anne Pauly est un premier roman dans lequel je me suis plongée presqu’en apnée, entre mélancolie, tristesse et sourire.

Dans ce récit, une jeune femme, Anne, se livre sur sa famille et plus exactement sur son père. Elle écrit sur son père, pour son père alors qu’il vient de mourir d’un cancer. Elle nous parle de sa relation qu’elle a entretenu avec lui, de l’homme qu’il était à ses yeux : personnage ambivalent, alcoolique, violent avec sa femme, dur avec ses enfants, solitaire et, en même temps, curieux, aimant la nature, le silence, les lectures sur la spiritualité, les haïkus, capable d’être tendre et inquiet pour sa fille Anne, après la mort de leur mère, alors que la relation avec Anne est devenue plus douce.



C’est un roman, fleurtant avec l’autobiographie, sur les enfants adultes et leur relation avec leurs parents, partagés entre différents sentiments et désirs : à la fois culpabilité à ne pas s’occuper assez de leurs ainés, à ne pas aller assez souvent les voir, alors que ces derniers se font vieux, malades, fragiles ; ces responsabilités parfois difficiles à porter, ne serait-ce qu’à réaliser du fait de l’amertume du passé, et à la fois ce besoin impérieux d’être libres, de s’offrir des moments pour soi-même, loin de la famille, l’esprit paisible, et, la nécessité de se construire, de grandir à peu près droits et pas trop cabossés et de vivre.

C’est un roman intime, sur les souvenirs, ceux qui font grincer les dents, serrer les poings, ceux qui coupent un peu le souffle, qui amènent l’arme à l’œil et le blues à l’âme.

Je l’ai lu presque d’une traite, jusqu’à 3 heures du matin, incapable de le lâcher. J’ai tourné les pages comme au rythme de son écriture. Cela nous raconte le quotidien et les (res)sentiments ; et on peut alors le lire avec une certaine lenteur. Mais, du fait même de sa structure, avec ces paragraphes denses, sans partie bien distincte, nous avançons dans la lecture de manière fluide, sans réelle pause, curieux de tous ces moments introspectifs. C’est comme tourner les pages d’un herbier de souvenirs et d’anecdotes familiaux, avec comme ligne conductrice la mort de son père, ponctués de tous ces petits flashbacks sur ces moments passés avec lui. Par ces longs paragraphes sans chapitres, ce roman ressemble à une longue lettre écrite à son père.

La narratrice se livre presque sans concession, en essayant de ne pas trop se mentir à soi-même, de ne pas trop édulcorer les souvenirs et les traits de caractère de chacun.



C’e roman m’a tellement parlé, tellement fait remonter le fil de mes propres souvenirs, de ma propre famille pas facile, de mes propres cicatrices, m’a tant rappelée ma propre relation avec mes parents que j’ai souvent eu l’impression de le lire comme dans un miroir sur mon passé. Et j’ai mêlé les souvenirs d’Anne avec les miens.



Anne, ma sœur Anne, parfois j’aurais voulu te dire que toutes les familles ont leurs épreuves à surmonter, à supporter, dont il faut s’échapper, au moins un peu, parfois plus longtemps. Et je voulais te rassurer et te dire combien je comprenais toutes tes émotions parfois si contradictoires. Anne, ma sœur, cette confidente, on aurait tellement envie de te prendre dans les bras, pour essayer d’apaiser un peu le chagrin que tu ressens à l’absence de ton père. Anne, en refermant ce roman, je fredonnai la chanson « Mon vieux » en pensant au tien, en pensant au mien, chanson qui me donne toujours des trémolos dans la voix

Parce que, si tu savais comme cela m’a rassuré aussi de lire tes propres interrogations, agacements, douleurs, en me disant que je n’étais pas la seule à vivre cette « famille je t’aime, famille je te hais » ; à avoir essayé de faire table rase sur le passé, parce que ceux sont quand même nos parents, avec leurs propres qualités et défauts, comme tout humain et pas un être qu’on idolâtre au temps de l’innocence des yeux de petit enfant, l’innocence avant que les yeux s’ouvrent.

Avec les années, il peut arriver que des qualités apparaissent chez le parent, après avoir connu cet amas de défauts, qui aurait pu nous faire prendre nos jambes à notre cou de manière définitive, rédhibitoire, salvatrice. Mais on était restés, malgré tout, même après une longue pause pour tenter de se rafistoler un peu. On était restés même entre guillemets, même de loin, même à des centaines de kilomètres de là, pour avoir un peu d’air. On a l’impression d’être comme des funambules sur un fil fragile, un lien ténu et qu’à la moindre anicroche, au moindre léger coup de vent, le fil pourrait se casser, pour toujours, et nous avec.

Mais, avec les années, les décennies, les angles s’émoussent parfois par miracle et s’attendrissent, heureusement et nous rassurent un peu de ne pas avoir coupé le lien définitivement. Parfois il faut se rappeler que chacun fait ce qu’il peut, que leur propre enfance a sûrement été plus compliquée que la nôtre et essayer d’oublier de notre enfance les images les plus violentes. Et il arrive alors qu’il y ait ces petits moments de tendresse, de lumière, de regards un peu complices, et qui valent le coût, malgré le prix parfois si exorbitant et douloureux qu’on a dû payer pour cela.



Par ce regard lucide sur la famille et la vie, par cette clairvoyance sur les défauts de chacun, cet humour un peu piquant et moqueur sur l’attitude des autres et d’elle-même, avec cette sensibilité, ces émotions passant du sombre à la lumière, et parce que cela parle de famille, de l’intime, ce roman se lit avec intenses émotions.

Le regard d’Anne Pauly sur la (sa) famille est intelligent, d'une grande finesse, drôle et émouvant. C’est un beau roman, sur la complexité des sentiments, sur la complexité des relations familiales, de ce sang qui coule dans nos veines, et finalement sur l'amour qu'on porte à nos parents, notre famille. Un roman de qualités qui mérite le prix Livre Inter reçu en 2020.

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Avant que j'oublie

Dans son premier roman émouvant et intense Anne Pauly revient sur les mois qui ont précédé la mort de son père et le deuil qui s’ensuivi.

L’inventaire de la maison familiale est souvent l’occasion de se plonger dans les souvenirs du défunt, c’est ainsi qu’Anne, la narratrice se plonge dans la vie de son père, personnage étrange et fascinant, cabossé par la vie, unijambiste, alcoolique, parfois violent.

Même si son frère refuse de prendre parti, Anne met à nu l’ambivalence de ses sentiments vis-à-vis d’un père aimé et haï.

Alors que des pans entiers de sa vie se dégagent, elle perçoit peu à peu l’humanité qui se cachait sous la cuirasse.

Ses sentiments d’adulte se mâtinent de souvenirs d’enfance et la vie reprend le dessus.



Avant l’oubli, la véritable mort, Anne Pauly sauve et révèle avec tendresse le portrait d’un personnage énigmatique, à la fois alcoolique, brutal, contemplatif et sensible. « Avant que j’oublie » roman dont l’écriture est pleine de surprises, fait entendre les morts partis avec leurs silences.



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Avant que j'oublie

Un roman, vraiment ?

Le personnage principal, la narratrice et l’auteur s’appellent Anne Pauly, un roman oui, mais une autofiction, mélange entre fiction et autobiographie (autre représentante du genre : Annie Ernaux). Comme elle l’explique dans une interview réalisée à l’occasion des Correspondances de Manosque en 2019, elle a voulu parler du côté cocasse de la mort, porter la mémoire de son père, évoquer ses facettes contradictoires. Le père de la narratrice était violent, frappait sa femme, néanmoins, elle le considère néanmoins comme un homme aimant et cultivé.

La mère d’Anne n’apparaît qu’à peine comme en filigrane alors que tout le monde s’accorde à dire qu’elle était extraordinaire. Peu de lignes lui sont pourtant consacrées.

Malgré tout, j’ai aimé l’évocation de la mort alors que la vie continue, malgré tout.


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Avant que j'oublie

Voici un excellent premier roman. Comme souvent, c’est un premier roman autobiographique, chargé d’intimité, où l’émotion affleure. Mais à la différence de beaucoup de premiers romans, Anne Pauly n’a pas voulu « tout donner ». Sa sensibilité sert le récit, et non l’inverse. Le risque était pourtant grand car elle a choisi d’évoquer la disparition de son père. Anne Pauly danse avec sa mort dans une valse à trois temps : le décès, l’enterrement et le deuil. Ses descriptions de l’hôpital, de la morgue, des pompes funèbres, de la messe et de l’enterrement sont justes, parfois aigre douces. Tantôt elle pleure, tantôt elle rit jaune, découvre ses canines et mord. La lassitude du personnel hospitalier, l’hypocrisie des fêtes de famille, l’absurdité de la liturgie catholique, elle n’épargne rien ni personne, sans méchanceté mais avec un aplomb salvateur. On a tous perdu un proche et traversé des épreuves similaires. Anne Pauly nous rejoue ce requiem avec finesse et met des notes sur nos chagrins. Les pages consacrées au deuil sont magnifiques. Notamment quand elle fait l’inventaire des souvenirs ; l’être aimé parti, il se réincarne dans les objets qui lui ont appartenu (p100). Quand elle décide d’enregistrer les bruits de fond de la maison où il a vécu, le décor sonore de sa vie (p97) ; quelle merveilleuse idée ! Quand elle décrit les manies du défunt qui, pour préserver sa santé mentale, répertoriait des tas de trucs comme d’autres font des mots croisés ou du Sudoku, ou se refusait à jeter les choses parce qu’il avait l’impression de s’amputer un peu plus. Et puis, il y a Juliette, l’amie d’enfance. Ses paroles et ses lettres exposent la maladresse du père, son humour, son narcissisme, et cette pudeur mal placée qui l’empêcha de dire ouvertement à ses enfants qu’il les aimait à la folie. Ce serait un beau Goncourt des lycéens.

Bilan : 🌹🌹

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Avant que j'oublie

Voilà un premier roman très prometteur et pourtant le sujet n'est pas des plus faciles. Le deuil. Il y a les démarches administratives nécessaires  mais aussi "sentimentales" suite à la perte j'allais dire d'un être cher mais ici la relation était beaucoup plus complexe, Anne Pauly, la narratrice, a en effet plus de souvenirs violents imbibés d'alcool que doux, complices avec ce père qui vient de décéder. A travers son absence mais aussi les marques de son passage dans la maison familiale, dans la ville où il vécut, les gens présents lors des obsèques, elle va découvrir peu à peu un autre homme dont elle va se rapprocher.



Anne Pauly avec simplicité évoque le décès de son père, unijambiste et alcoolique, aux réactions parfois insolites ou brutales, dont elle pensait être presque la seule avec son frère à suivre le cercueil, tellement il lui apparaissait comme misanthrope, violent, solitaire et pourtant... Elle procède à l'inventaire d'une maison familiale qu'il faut vider mais aussi à l'inventaire des souvenirs qui la lient à cet homme, pensant ainsi se protéger pour finalement le découvrir sous un autre jour et réaliser qu'il l'aimait à sa manière.



Une écriture simple, douce, parfaitement en adéquation avec le thème, l'évolution des sentiments, qui plonge le lecteur dans ce qu'il est amené un jour ou l'autre à connaître, à traverser lorsque les parents disparaissent : les affrontements parfois entre enfants sur les décisions à prendre, ce qu'il faut garder, jeter, tout un bric à brac, miettes d'une vie....



Elle évoque dans certains passages les manies, subterfuges d'un homme pour boire, l'image au père totalement faussée, la difficulté à éprouver des émotions pour un parent dont on ne garde en mémoire que les scènes d'excès, de violence, loin de l'image que l'on voudrait avoir d'un père aimant et attentionné. J'ai trouvé incroyablement juste le cheminement de l'auteure, l'évolution au fur et à mesure des jours et semaines de ses sentiments vis-à-vis de lui, de la découverte d'un "autre" père, de faire la paix avec lui.



Penser que la perte d'un père que l'on a presque haï se fera sans trouble, sans émoi est parfois loin de la réalité. Pour avoir vécu une telle situation, j'ai été à plusieurs reprises troublée par la similitude des ressentis oscillant entre haine, rancœur et incompréhension.



Avec sincérité elle explore les sentiments qui nous habitent quand l'éloignement sera définitif, irrémédiable, que tout n'a pas été dit ou compris, quand ce que l'on croyait facile devient un chemin semé d'obstacles difficiles à franchir, le tout sans tomber dans la facilité d'en faire un récit pathétique ou glauque.



Faire son deuil, quel qu'il soit, comporte des étapes nécessaires mais aussi utiles et c'est ce que propose Anne Pauly avec ce petit roman qui se révèle à la fois lucide et vrai sur des moments où chacun se révèle parce que dans ces moments là, difficile de ne pas se mettre à nu.
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