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EAN : 9782080270474
336 pages
Autrement (05/01/2022)
4.17/5   21 notes
Résumé :
De retour d'un terrain, Laurine repousse les mains de son directeur de recherche, un géologue influent qui n'apprécie pas qu'on lui tienne tête et fera tout pour détruire sa carrière. Dans son laboratoire de biochimie, Baptiste se fait exploiter et insulter par son encadrant de thèse, un homme sanguin, homophobe et raciste. À l'autre bout de la France, Sarah, doctorante en anthropologie non rémunérée, essaie de survivre malgré le caractère imprévisible de sa directr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Billet peut-être plus personnel que d'habitude pour ce livre reçu grâce à la Masse critique non-fiction, merci à l'éditeur et à l'équipe de Babelio. Personnel car je suis passée par la case thèse en tant que doctorante il y a quelques années – et je m'apprête d'ailleurs à y repasser pour la première fois en tant que directrice. Autant dire que ce livre tombait à pic. Cela dit, il ne s'adresse pas spécialement aux membres de la profession, mais à celles et ceux qui s'intéressent aux conditions de formation des chercheurs en France. Fluide et vivant, il s'organise autour de témoignages qui incarnent le propos et le rendent facile d'accès.

Docteure en neurobiologie, Adèle B. Combes pose une excellente question : d'où vient le blues que les doctorants sont nombreux à afficher même si beaucoup le font sur le mode de l'humour ? Après tout, une thèse, c'est l'initiation au beau métier de chercheur et cela devrait permettre de se consacrer aux questions qui nous passionnent ! Pourquoi devrait-on souffrir pendant sa thèse ? Sur la base d'une enquête par questionnaire et de multiples entretiens, l'autrice avance qu'il ne s'agit pas de dérives isolées, mais de dysfonctionnements structurels permettant à de nombreux individus d'abuser de la passion et de la dépendance de jeunes chercheurs.

On savait déjà que très motivés, ils sont nombreux à ne pas compter leurs heures pour pouvoir s'investir sur tous les fronts – recherche individuelle et projets collaboratifs, enseignement et responsabilités collectives – pour un salaire largement inférieur aux niveaux moyens à la sortie du Master. Presque tous doivent prendre en charge des frais liés à leur activité professionnelle, à commencer par les frais d'inscription à l'école doctorale. Pour ma part, pourtant inscrite dans une institution comparativement bien dotée, j'avais dû acheter mon ordinateur et mes logiciels, régler la majeure partie des frais d'inscription à des formations indispensables, partager des chambres avec des collègues pour pouvoir assister à des conférences ou payer les frais d'impression de ma thèse.

Mais il est question d'autre chose dans le livre. de situations terribles, à mille lieux des grands idéaux scientifiques qu'on pourrait avoir. Des doctorants et doctorantes réduits à de petites mains corvéables à merci, poussés à travailler envers et contre toutes les règles de sécurité et le droit du travail, dénigrés, harcelés de la plus effroyable manière.

Évidemment, il est difficile de prendre la mesure du phénomène. Les chiffres du questionnaire sont très alarmants, même s'ils doivent être interprétés avec précaution vu les biais liés au mode de passation (basée sur le volontariat). Il n'empêche qu'à la lecture, il m'a bien fallu admettre que beaucoup d'entre elles – flou des frontières entre vie professionnelle et privée, doctorants complètement livrés à eux-mêmes, appropriation d'idées de jeunes chercheurs ou disqualification de résultats désavantageux, harcèlement sexuel – m'ont semblé familières, même si heureusement minoritaires autour de moi. Il faut croire que ces situations sont moins anecdotiques que je le pensais. En tout cas, les témoignages montrent à quel point les doctorants sont démunis face à toute forme d'abus, car totalement dépendants du jugement et du soutien de leur directeur – qui, lui, n'est généralement ni formé, ni encadré.

Les propositions formulées par Adèle B. Combes pour garantir des conditions de travail saines et améliorer le suivi des doctorants, de façon à pouvoir détecter les difficultés et dérives, semblent donc salutaires. À nous de les faire progresser dans nos labos et de contribuer à les porter auprès des instances.

J'espère que ces éléments seront systématisés dans le futur sur la base d'une analyse comparative. Je ferais l'hypothèse que les dérives décrites ne sont pas propres au doctorat en France, mais découlent des relations de pouvoir/dépendance. La situation des doctorants est probablement particulière du fait de coûts d'opportunité énormes : la thèse requiert une telle somme de travail qu'il arrive un moment où elle ne peut plus être mise en jeu. Mais il serait intéressant, par exemple de comparer les institutions / disciplines différant dans leurs pratiques, y compris à travers plusieurs pays. Il y a des différences énormes dans le niveau de rémunération, les attendus et les conditions de validation de la thèse, le degré de collégialité autour du directeur, les modalités de représentation des jeunes chercheurs. Une enquête comparative pourrait permettre d'identifier les conditions permettant aux doctorants de s'initier sereinement au métier.
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Adèle B. Combes livre trois témoignages glaçants de doctorants ayant vécu de graves problèmes de harcèlement et de précarité durant leur thèse, dans un contexte d'omerta créé par la perpétuation de pratiques de harcèlement et de loi du silence. Ayant moi-même connu certains des contextes évoqués dans ce livre durant ma thèse, et étant aujourd'hui dans le milieu universitaire, j'ai reconnu de nombreuses situations et ces témoignages sont loin d'être exagérés.
Ce qui est assez formidable dans ce livre, c'est qu'il est si bien rédigé et si bien construit qu'on le lit comme un roman, et on a vraiment mal au coeur pour ces jeunes qui jouent leur avenir et se retrouvent coincés dans des situations intenables. Je l'ai dévoré en une journée, et je le fais circuler dans mon laboratoire, en espérant qu'il fasse écho auprès de mes collègues.
Ce livre est à mettre entre toutes les mains de titulaires qui encadrent des étudiants, et dans toutes les mains des doctorants pour leur donner le courage de dénoncer des situations inadmissibles qui compromettent leur avenir. Les non-initiés y trouveront également leur compte, puisqu'ils découvriront les conditions dans lesquelles sont formés les futurs chercheurs dans notre pays.
Un grand merci à Babelio et les éditions Autrement de m'avoir fait découvrir ce livre dans le cadre d'une Masse Critique.
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C'est un mal qui ronge la filière d'excellence du système universitaire français : la précarité, le harcèlement et la culture du silence. Chaque année, plus de 15000 doctorants se lancent avec passion dans une thèse, mais à l'université, les dysfonctionnements engendrent les déviances. Cette enquête richement documentée perce le silence et appelle à un changement urgent, dont les premières étapes pourraient être déployées rapidement et sont proposées par l'auteure.

Trois histoires terriblement touchantes que nous dévoilent l'autrice, ou ces trois jeunes chercheurs vont aller au bout d'eux-mêmes pour obtenir le sésame tant convoité : le doctorat.

J'ai été vraiment émue par cette lecture, car je pense que les chercheurs sont tellement utiles pour notre pays, il y a vraiment de quoi les décourager.

J'ai également beaucoup apprécié la construction de ce livre ou l'auteure entre chaque récit nous parler d'exemples en rapport avec ce qu'on venait de lire.

La conclusion est aussi très intéressante, ou elle émet ce qu'elle pense ce que selon elle devrait être normalement proposée aux étudiants pour leur faciliter la tâche.

Pour quelqu'un de novice, comme moi, qui ne connait absolument rien à ce milieu, on en ressort complétement scotcher de tous ce qu'ils devront subir.

C'est ce que j'appelle un livre utile, qu'on devrait envoyer à chaque candidat qui se présente aux élections pour vraiment leur faire comprendre qu'il faut changer le système.

Il faut leur donner une véritable chance de pouvoir étudier avec des avantages pour qui ne soit pas dans la précarité et qui puisse aller au bout de leur diplôme et pour qu'ils ai envie de travailler en France.

Lien : https://www.nathlivres.fr/l/..
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Les témoignages recueillis sont bouleversants et donnent la nausée... encore plus quand on comprend les mécanismes de protection de l'entre-soi des "loups" générant ces souffrances pour les doctorants. Merci pour cette enquête et ce travail de documentation essentiel, et les pistes de changement proposées. Plein d'éléments qui aideront les jeunes et moins jeunes chercheurs à redoubler de vigilance auprès de leurs collègues pour détecter les situations de harcèlement et aider les personnes qui en sont victimes.
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Agnès B. Combes, docteure en neurobiologie nous livre une enquête des plus utiles pour briser la loi du silence et pour dénoncer les situations sordides auxquelles doit faire face un trop grand nombre de doctorant·es. Mais au travers de ces récits, aussi tristes et écoeurants soient-ils, l'autrice ne manque pas de nous rappeler que les doctorant·es ont des droits et qu'ils peuvent (doivent !) être respectés. Dénoncer et informer en même temps, pour que les choses avancent et pour ne plus se sentir démuni.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Rien ni personne ne peut gâcher mon moment. Je suis docteure. Je suis libre.
Peu après ma soutenance, Michel a tenté d’interdire la publication de ma thèse en ligne en m’accusant de plagiat. Une enquête interne de l’université a donc été lancée contre moi mais j’ai fini par avoir gain de cause. Il m’aurait semblé plus pertinent de lancer une enquête à la suite de mes accusations de harcèlement sexuel et moral, mais l’administration n’avait visiblement pas les mêmes priorités.
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Parfois la restauration rapide est moins précaire qu’un contrat doctoral.
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Video de Adèle B. Combes (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Adèle B. Combes
Harcèlement et précarité : les conditions de travail des jeunes chercheurs et chercheuses en France sont peu (re)connues. Adèle B. Combes, docteure en neurobiologie, dénonce ce phénomène dans "Comment l'Université broie les jeunes chercheurs : Précarité, harcèlement, loi du silence" (Autrement, 2022).
Elle publie cette enquête en partant de sa propre expérience et de témoignages recueillis grâce à son projet "Vies de thèse : Doctorat et qualité de vie". Entre culte du secret, copinages ou malhonnêteté intellectuelle, elle aborde ainsi "toute forme d'abus de pouvoir dans la recherche" : agressions psychologiques voire sexuelles, discriminations, harcèlement au travail, difficultés à trouver un financement ou encore précarité du contrat doctoral.
L'enjeu touche à la santé publique autant qu'il est national, puisque la recherche en France s'en trouve menacée, entre rêves avortés, fuite des cerveaux à l'étranger et choix du privé. Il s'agit ainsi d'entraîner une réelle prise de conscience sur les conditions de travail imposées à nombre de doctorants et doctorantes. Pour autant, le livre ne vise pas à dissuader de faire une thèse. Dans de bonnes conditions, nous rappelle l'auteure, ces années-là peuvent être un moment de vie extraordinaire.
Olivia Gesbert invite à sa table Adèle B. Combes, docteure en neurobiologie, pour nous parler de cette détresse des jeunes chercheurs et chercheuses en France.
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