Le rire est le produit d'une incongruité, d'une discordance entre deux ordres d'idées, de phénomènes ou de situations. Et cela nous fait rire... Ou pas !
Si nous ne comprenons pas l'incongruité à cause de notre culture, de nos systèmes de valeur, de notre grammaire sociale différents, alors cela ne déclenche pas en nous le rire.
Le rire doit émaner d'un sentiment d'innocuité, de sécurité. Si l'on se sent attaqué, blessé ou humilié, on ne peut pas se laisser aller à rire.
Olivia Gazalé fait ici une étude largement historique du rire, depuis ses origines jusqu'à nos jours, en passant en particulier par le Moyen Âge où l'on parle du rire burlesque et grossier ; et la Renaissance où il devient plus raffiné, empreint de morale et d'interdits.
Nous pouvons comprendre les différentes fonctions du rire : au niveau individuel, il conjure la peur de la mort, sauve du désespoir, agit sur notre santé physique, redonne joie et vie, permet de survivre aux tragédies.
Il a également un rôle politique avec les bouffons du roi, d'hier comme d'aujourd'hui.
Le rire peut être un puissant moyen de manipulation, d'exclusion, de domination et de subversion.
J'ai été particulièrement intéressée par le chapitre sur le rire xénophobe et sexiste mais il ne tient qu'une petite place dans ce livre, même si plus loin, il est question du rire d'émancipation, notamment avec l'évolution des comiques féminines et du rire antiraciste.
Il est ensuite question du rire dans le monde chrétien, où le rire a souffert d'interdiction et était considéré comme un péché.
L'humour juif, à ne pas confondre avec le sarcasme antisémite.
Enfin, la grande question est posée : peut-on rire de tout ?
Oui, dit l'auteur, à condition qu'il y ait un pacte humoristique qui définit le contexte, l'état d'esprit, que lon sache qui s'exprime et à qui lon s'adresse.
Tout cela constitue l'art de l'humour.
Olivia Gazalé nous invite à une réflexion très intéressante sur le rire et l'humour, qui a le mérite de faire un point lucide et éclairant sur le sujet. J'ai regretté la drôle de logique dans le déroulement des chapitres, on a parfois l'impression d'être dans un grand fourre-tout. Mais le sujet est vaste... L'étude historique m'a parue très longue et un peu ennuyeuse.
Cependant, ce livre devrait être mis entre toutes les mains.
Merci à Babelio masse critique et aux éditions Seghers pour l'envoi de ce livre !