Ce court essai réfléchit sur le monde de l'édition universitaire. Comme le développait Schiffrin, les grands groupes ont la mainmise sur beaucoup de revues et de maisons d'édition numérique, ce qui cause énormément de problèmes.
Entre autres on peut se souvenir :
Que le fait de dépendre profondément du chiffre d'affaire impose un certain type d'articles, et l'abandon de pans entiers de la recherche ;
Que ça implique un rythme de production élevé ;
Que les abonnements aux revues scientifiques coûtent de plus en plus cher, ce qui ruine les bibliothèques…
La qualité baisse mécaniquement comme l'accès à ces ressources.
L'auteure avoue sa passion pour les livres papiers, « plus que les humains peut-être » dit-elle, et en tant qu'éditrice elle tient à ce média comme support de la culture et à sa diffusion. Même si ça coûte cher, même s'ils sont un gouffre pour les étudiants, autant financièrement que pour leur espace vital.
Je tiens à noter le titre du premier chapitre « les barbares sont à nos portes » : les barbares étant les financiers qui pullulent (polluent ?) dans le monde de l'édition, et surtout à leur tête. Cette formulation m'a bien plu.
Ce texte est court et percutant, touchant et cultivé.
Il est paru chez Allia en version poche, ce qui le rend très accessible : et ça c'est positif ! Parce que les textes universitaires devraient être bien plus proches de nous… et pas seulement entre nos menottes d'étudiants.
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Une critique d'autant plus intéressante qu'elle vient du coeur même de l'institution universitaire puisque Lindsay Waters est l'un des principaux responsables éditoriaux des Presses de l'Université de Harvard.
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La raison pour laquelle je me tiens là, suppliant devant vous, est mon amour immodéré des livres, que j'aime presque autant que j'aime les humains. S'il y a là du fétichisme, ou de l’idolâtrie, alors je suis coupable. Nous nous trouvons peut-être collectivement, à la veille de quitter l'époque où le livre aura été un élément central du développement humain. Nous nous devons alors à nous-mêmes de découvrir ce qui nous était le plus précieux dans les livres, de manière à le préserver.
Y a-t-il un lien quelconque entre le marasme actuel de l'université et l'essor et la victoire de la révolution gestionnaire des trente dernières années ? Je pense que oui. L'une des questions qui me préoccupe le plus est celle de savoir pourquoi il y a une telle immobilité intellectuelle dans tant de disciplines du monde académique. Pourquoi le triomphe de la révolution gestionnaire nous a-t-il conduits à un moment à ce point réactionnaire au plan de la pensée ?
L'université et le libre usage de l'intelligence ne marchent pas bras dessus bras dessous, elles sont le plus souvent aux prises en une lutte à mort. Il y a quelque chose comme un amour des cloisons dans cette institution.
Il n'est pas évident que la toile soit le medium qui convienne aux mots (...) au cœur de l'édition des livres se trouvent le rassemblement, l'assemblage de matériaux en un objet ou une unité que la personne ou le groupe qui l'ont confectionné se sont préparés à voir jugé (...) son principe même réside dans le fait qu'un individu ou un groupe a fait en sorte qu'il constitue une unité et c'est cette unité que les lecteurs sont appelés à juger.
Il n'est plus question que de forme, jamais de contenu. Voici la racine du problème de ce désastre écologique qui frappe l'université.