TOUL
La lumière à Toul est un tremblement. Elle s'amasse tout à coup. Elle entoure ce qui n'est jamais dit. Elle gronde dans l'espace, saute avec les chats, écorche et détale. Elle roule au milieu des pommes, elle recouvre le moindre bruit. Elle s'arrête devant les écluses.
Elle est une et il y en a tant. Un froissement quand elle s'éloigne. Il y a un trou dans la lumière. Et c'est toujours quand je te demande comment tu t'appelles.
TOUL
Toul est courbe comme le monde !
Une craillée d’oiseaux semblait attraper la ville par un pan et l’emporter au-dessus de la Moselle. Puis tout s’éparpille. Et je n’avais pas eu le temps de fermer les yeux.
En 1946, nous courions dans les ruines. On y riait. On se cachait. On s’appelait d’un bloc de pierre à l’autre. Quand trop d’été explose dans une cour, quand je vais plus vite que les rues, que les arbres autour de la place de la République, plus vite qu’un rosier et rien n’échappe, pas même le silence, je suis à Toul. Je n’ai jamais le temps de fermer les yeux, c’est comme si la lumière venait de m’érafler.
J'entends l'oubli. J'entends la craillée d'oiseaux emporter la ville
Qui ai-je fui jusqu'à ce que je touche ton nom, jusqu'à ce que rien ne se répète ?
Lorsque je n'ai pas peur, lorsque je pourrai courir et comme ouvrir les bras derrière les mots, je suis à Toul.
Hommage à Bernard Vargaftig