Le deuxième tome de la trilogie des
Cités à la dérives n'est pas inférieur au premier: toujours aussi remarquable. Peut-être le style est-il un peu moins expérimental, ce qui accroît la lisibilité.
Cette fois, nous sommes au Caire. Manos a trouvé refuge dans la communauté grecque, au centre de la ville. Il est logé chez Ariane, ou Ariagné comme il dit, une mère de famille mariée à un garçon de café qui s'adonne au jeu, et qui a élevé cinq enfants. En face, c'est l'appartement de la jolie juive Allégra, la bien nommée, experte aux jeux de l'amour. Une bande de jeunes garçons arabes, pauvres, gravite autour de la maison d'Ariane, qui les traite avec bienveillance.
Bien entendu, Manos est toujours engagé dans la militance communiste et la défense de la patrie. Mais il n'a pas pu rejoindre la 1ère Brigade grecque, qui s'est battue à El Alamein. Heureusement les Allemands reculent.
Les intrigues politiques sont intenses, et pas toujours dirigées vers la victoire. le but est souvent de savoir qui aura le pouvoir. La politique quoi. de quoi dégoûter tous les acteurs un peu sincères. Surtout que le sexe joue un rôle déterminant.
Quel est le jeu des Anglais vis-à-vis des Grecs et des Égyptiens? Ces derniers ne sont que des pions dans la géostratégie. Et les conséquences pour les individus sont désastreuses.
Manos tente de tracer son chemin dans ce chaos, mais il est plus souvent le jouet des événements. Faut-il accepter ce qui arrive sans y poser sa marque? Difficile pour lui.
L'auteur excelle à évoquer les lieux, les rues, les intérieurs, les caractères. Les rapports entre les communautés sont effleurés. La domination anglaise est bien soulignée. On sent chez lui cet attachement et cette nostalgie vis-à-vis des Grecs installés au Caire et de la Grèce en général. Bien des tragédies sont encore à venir.