de belles biographies par un historien spécialiste du pouvoir et de la religion
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Pour tenter de mettre un terme aux dissensions religieuses après l'Edit de Saint-Germain, la reine mère s'emploie à donner du lustre à la monarchie tout en apaisant les tensions qui opposent les deux partis.
Rien ne semblait prédestiner Blanche de Castille à être reine de France, et encore moins à jouer dans son pays d’adoption un rôle de premier plan dans l’Histoire. Elle a été longtemps ignorée ou mise sous le boisseau, tenue résolument à l’écart du pouvoir. Cela n’a fait qu’accroître son ambition et la pousser, dans le secret des intrigues de Cour, aux subtilités de l’art du gouvernement, apprentissage délicat et douloureux mais obligé pour un règne de gloire.
Ce pouvoir qu’elle détient à présent, elle est fermement décidée à le saisir et à le garder autant que faire se pourra. Son fils aîné Louis – le futur Saint Louis − est âgé de douze ans à présent. Elle ne lui conférera la majorité, reconnue d’ordinaire à treize ans, que le plus tard possible. Elle veut d’abord faire ses preuves et parfaire l’éducation politique du nouveau souverain. Et pourquoi ne continuerait-elle pas plus longtemps son œuvre aux côtés du jeune roi comme elle l’a déjà fait auprès de Louis VIII ? Ses rêves vont se réaliser : en vingt-six ans, la reine douairière assumera deux fois la régence du royaume : la première fois pendant huit ans, la seconde durant quatre années. Et, au cours des quatorze années restantes, elle continuera à conseiller avec autorité et compétence Saint Louis, pour le plus grand bien du pays.
En France, les rois détiennent le pouvoir souverain par hérédité, selon les règles de la primogéniture masculine. Le fils aîné d’un monarque devient roi à son tour au décès de son père. S’il n’y a pas de successeur légitime en ligne directe, c’est le plus proche parent du défunt qui hérite de la couronne. Et, quel que soit l’heureux élu, il gouverne au nom du droit divin, par la volonté de Dieu exprimée par le sacre.
Rien de tel pour les reines. Après leur mariage royal, elles ont une mission essentielle : assurer la survie de la dynastie en donnant un dauphin et des garçons à leur époux. Elles ne peuvent devenir régentes que si deux conditions sont réunies : le décès ou l’absence de leur mari, et la minorité de son héritier.
Blanche ne peut se limiter au savoir qu’on lui inculque. Il lui faut bien davantage : désireuse de fonder un centre de création littéraire semblable à ceux du Midi, elle fait venir au palais de l’île de la Cité, avec l’appui de Louis, des poètes réputés, comme le comte Thibaud IV de Champagne. Son but est de s’introduire dans le mouvement de la littérature courtoise dont les thèmes récurrents lui plaisent : l’homme de l’art déclare sa flamme à une dame de haute naissance malgré une alliance impossible, la femme si désirée étant trop pure ou déjà mariée.
5 questions posées à Philippe Tourault, à l'occasion de la parution de son livre Les ducs et les duchesses de Bretagne (Perrin).