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sur 4402 notes
Sur les 212 critiques publiées, qui ont récolté le plus de "likes" ou de "j'apprécie", on trouve quantité de billets d'humeur, bonne ou mauvaise, qui en disent plus sur le "ressenti" (et le niveau culturel) du lecteur, que sur le livre lui-même. Seules quelques critiques surnagent, rares, peu lues, peu "appréciées". Je n'ajouterai pas mon "ressenti" aux deux cents autres "coups de coeur ou de gueule," à la façon d'un vendeur de livres ou d'un journaliste. Ces "coups" sont des clichés répétés par des idiots. J'écrirai juste quelques remarques qui seront peut-être utiles.

D'abord, ce livre est un essai (il a obtenu un prix de l'essai). Malgré la forme adoptée, celle du journal intime, qui le rapproche du genre autobiographique, il y a de vraies réflexions dans l'ouvrage de Tesson, à commencer par une forme de désespoir politique et de méditation sur la décroissance et l'écologie. Malgré ce que certains en ont dit, un essai n'a rien à voir avec une dissertation ou un traité : c'est l'exposé d'une pensée qui émane de la vie personnelle de l'essayiste et de ses expériences, et l'essai ne propose pas de thèses définitives, mais des tentatives, des hypothèses, des pensées " à l'essai". C'est la démarche même de Montaigne, et celle de Tesson s'enracine profondément dans la réalité concrète de l'hiver et du printemps sibériens, et de la vie "en cabane", comme il dit.

Autre remarque, sur la solitude. L'auteur le signale à certains endroits : dès l'origine, les ermites et anachorètes en quête de solitude avec Dieu loin du monde, avaient toutes les peines du monde à rester seuls. On recherchait leur compagnie, leur expérience, leurs conseils, ce qui les contraignait à s'enfoncer toujours plus avant dans le désert, en vain. On ne peut reprocher à Tesson de recevoir des visites ou d'en rendre : c'est la sociabilité des solitaires, aussi inévitable (mais d'une autre nature) que celle des citadins. Comme l'auteur ne s'impose pas les contraintes de l'ascèse chrétienne, et qu'il vit en athée en Russie, l'alcool coule à flots. Pourquoi pas ? Il fait souvent observer le rituel de ces rencontres, qui implique la vodka et le partage de nourriture. On se tromperait en croyant qu'il fait semblant d'être seul. C'est confondre solitude et isolement.

En revanche, une critique m'a paru très pertinente : on a l'impression que privé de dimension spirituelle, Tesson joue à l'ermite, car sa démarche est informée, influencée par trop de livres. Cependant, ces livres sont excellents, en particulier "Le Traité du rebelle, ou le recours aux forêts" de Jünger, manuel de survie en milieu totalitaire. Il est vrai que la gauche condamne Jünger et glorifie le "tous-ensemble" grégaire, quand ce n'est pas le "vivre-ensemble" : ce livre est un manuel de dégrisement des utopies gauchistes parisiennes, ce qui déplaira.

Une dernière observation : les paysages décrits sont splendides, les descriptions le sont aussi quand le langage en est simple. Hélas, il arrive à Tesson de "faire du style" comme d'autres font du genre, et de forcer les métaphores : ce défaut d'écriture n'enlève rien à la force évocatoire de sa vie dans la nature mais affaiblit le livre.
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Quel bonheur de retrouver Sylvain Tesson. J'adore son écriture, sa culture, sa verve , et son ironie sous jacente.
Mais voilà, depuis deux trois livres, je prends ma claque les 50 premières pages , je retrouve ce que j'adore dans cette écriture... Et puis je me lasse . Non pas forcément de l'écriture mais on tourne en rond et on remplit des pages.
Ici , notre trublion décide de s'exiler seul dans une cabane au bord du lac Baïkal. Seul, six mois , début en Février . de quoi bien se ressourcer dans une nature hostile mais sincère.
Il a emporté l'équivalent d'une bibliothèque de village et chaque jour , il lit et nous fait part de ses lectures, de ce que lui inspire le combo lecture , hostilité de la nature.
Il va rencontrer quelques russes et sans doute que le principal intérêt du roman pour moi est ces rencontres où l'on découvre l'âme russe que l'auteur décrit si bien.
On se surprend à sauter un jour , on aura raté le commentaire sur une lecture et quelques grammes de vodka évaporés au fond des panses.
Puis la recherche de la parité ne me suffit plus , je saute des semaines et j'ai l'impression de lire toujours la même chose , même si peu à peu la nature va se métamorphoser avec la magie du printemps.
Le bateau du retour vient d'accoster, j'y monte avec célérité . Un mois m'aurait suffit, certes je n'aurais pas vu la nature changer et les ours débouler, mais je serais rester sur la magie que Sylvain Tesson possède pour assembler les mots.
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Il est plutôt sympathique ce jeune homme qui tente des expériences qui ne servent à rien, sinon se prouver à lui-même qu'il est capable de le faire. Ce qui n'est déjà pas si mal quand il s'agit de vivre six mois dans une petite cabane sur les bords du lac Baïkal. Même si l'aventure n'est pas si aventureuse, ni la solitude totale, égayée seulement par des marches sur la terre glacée et quelques livres savamment choisis. Car il y a le passage de ces Russes avec qui notre héros peut se distraire, faire ce qu'ils affectionnent particulièrement, comme boire jusqu'à plus soif.

L'autre avantage que je vois à cette aventure, en dehors de contenter (ou éprouver) celui qui la vit, c'est qu'elle est relatée avec talent. Je n'irai probablement jamais sur les bords du lac Baïkal (quoique pourquoi pas ?), mais grâce à Sylvain, je sais qu'il y fait froid, très froid et qu'il y a des gros quatre-quatre russes qui sillonnent le désert glacé. De temps en temps dans de magnifiques paysages, on peut même y rencontrer un petit Français, un peu bobo, écolo, intello…
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"Je m'étais promis avant mes quarante ans de vivre en ermite au fond des bois.
Je me suis installé pendant six mois dans une cabane sibérienne sur les rives du lac Baïkal. [...] Un village à cent vingt kilomètres, pas de voisins, pas de routes d'accès, parfois, une visite. L'hiver, des températures de −30° C, l'été, des ours sur les berges. Bref, le paradis.
J'y ai emporté des livres, des cigares et de la vodka. le reste − l'espace, le silence et la solitude − était déjà là."

J'en ai rêvé, Sylvain Tesson l'a fait.
Prise dans le tourbillon du travail, de la maison, des enfants, il m'est souvent arrivé de dire que j'aimerais partir quelque temps seule sur une île déserte avec une bonne provision de livres et de thé.
Ce souhait, qui est resté un voeu pieux pour moi, l'auteur l'a réalisé.
Pour notre plus grand bonheur, puisqu'il en a rapporté ce livre, qui n'est pas un roman mais un journal qu'il appelle son "journal d'ermitage".

Une demi-année, ce n'est tout de même pas rien ! Et c'est une formidable opportunité.
Perdu au milieu de la nature, on ne peut pas tricher.
Seul, on ne peut pas se mentir.
Si l'on se couvre de vêtements chauds pour affronter les températures sibériennes, on se dépouille humainement. Débarrassé du superflu, on est vraiment soi.
Sylvain Tesson s'est comme soustrait du monde pendant six mois. Absenté de la vie ordinaire.
Il s'est enfermé et a tiré la porte.
Cette pause hors de la vie, hors du temps, va être l'occasion d'une introspection poussée : n'avoir que soi comme compagnie humaine doit permettre de se découvrir avec un degré d'intimité jamais atteint ; d'acquérir une conscience aiguë de qui l'on est vraiment.
Vertigineux ! À la fois terriblement séduisant et angoissant.
Après avoir terminé ses préparatifs, à la veille de son premier jour solitaire, notre aventurier est parfaitement conscient de ce qui va se jouer et l'exprime ainsi : "Je vais enfin savoir si j'ai une vie intérieure."
Qui a déjà lu Sylvain Tesson connaît la réponse, et ce journal envoutant nous en donne la confirmation.

Son art de la formule m'a régalée, comme lorsqu'il note à la date du 18 juin : "La nature est tout à sa joie d'avoir obtenu l'usufruit d'un nouvel été." Pour lui, l'appel du 18 juin est celui de la nature.
Six mois passés à l'observer finement et à en noter les changements les plus imperceptibles. le lecteur voit lui aussi à travers la fenêtre de la cabane et se fait observateur à son tour : c'est magique ! C'est la magie du livre qui permet de voyager sans bouger.

J'ai déjà lu et apprécié de nombreux ouvrages de Sylvain Tesson, et celui-ci m'a conquise. J'en ai aimé chaque page, chaque phrase.
J'ai ralenti ma lecture pour faire durer le plaisir de partager cette aventure et de suivre les pensées de l'auteur.
Pour ceux qui ne l'ont pas encore fait, je ne peux que vous recommander chaleureusement de venir à votre tour dans ces forêts de Sibérie. Venez découvrir des paysages magnifiques, des animaux surprenants, mais avant tout, saisissez l'occasion qui vous est donnée de rentrer dans le monde intérieur d'un écrivain à part.

Sylvain Tesson a troqué le thé contre de la vodka, sûrement plus adaptée au lieu... et à ses goûts.
Cette vodka omniprésente dans le récit.
Boisson emblématique de la Russie, elle permet de trinquer lors des rares rencontres.
Mais elle a aussi une fonction thérapeutique (certainement peu recommandée par le corps médical !) : elle permet à l'écrivain d'y noyer son dégoût du monde et de notre société.

Victor Hugo a écrit dans "Choses vues" : "La solitude est bonne aux grands esprits et mauvaise aux petits."
À vous de juger de quel côté se trouve Sylvain Tesson si vous vous aventurez dans ces forêts. Moi, j'ai été totalement éblouie.
Avec Sur les chemins noirs il donne envie de pratiquer la marche. Avec La panthère des neiges, l'affût. Avec Dans les forêts de Sibérie, l'érémitisme.
Je ne sais pas vers quoi il m'entraînera dans ma prochaine lecture, mais j'attends avec confiance et impatience de me faire à nouveau transporter.
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Bobo parisien, l'auteur souhaite rompre avec sa vie actuelle : trop de sollicitations, trop de personnes à voir, trop de superficialité, le pauvre...
Alors pour parvenir à ses fins il va rejoindre une cabane en bois sur les bords du lac Baïkal.

Il va la rejoindre avec tout un aréopage de livres, de réserves, de GPS, téléphone satellite, kayak de toile, patins à glace, vodka et autres accessoires réellement in-dis-pen-sables.

Et là, sans trop lâcher la civilisation, encadré des ors de sa bibliothèque, de la technologie, et de ses réflexions bien conventionnelles, croyant anoblir ses pensées sous le couvert d'une nature sauvage, de la rudesse d'un climat, de l'isolement d'une cabane, il va nous pondre ce bouquin.

Entre quelques descriptions agréables de la nature qui l'entoure, Il a la prétention d'écrire, de jolie manière, voire en joliesse maniérée, des vérités profondes qui n'en sont pas. Je le soupçonne même de prétendre à des aphorismes.

Attiré par la description de l'ouvrage, j'aurais aimé plus d'introspection, de spiritualité même. C'est ce qu'on attend de la vie de l'ermite qu'il prétend être. Une forme d'initiation.
Mais de cheminement il n'y a pas.

En quoi, dans ces conditions, une cabane dans les forêts de Sibérie apporte-t-elle plus d'épaisseur ?

Il admet qu'il connaît aussi bien chaque arbre qui l'entoure que chaque bistrot de son quartier de Paris, c'est tout dire. L'auteur est en Sibérie mais la Sibérie, elle, n'est pas en lui.
Une phrase, à mon sens, révèle l'inanité de cette expérience : « Heureux, j'avais peur de ne plus l'être »

La même expérience eu pu être vécue un peu isolé dans sa chambre parisienne, en hiver, en ouvrant la fenêtre de temps en temps.

Et puis il y a l'alcool toujours présent comme obligatoire, les visites des copains du Baïkal fugacement dérangeantes mais finalement bienvenues, le silence certes, mais le téléphone satellite sous la main. Que faire de profond avec ces entraves ?

Rien…

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Sylvain Tesson génère des avis très contreversés et tranchés, du genre on déteste ou on adore.

Avant de commencer ce livre, j'avais des a priori sur la personne, m'interrogeant sur la manière dont j'allais percevoir cette lecture. Que retenir du personnage Tesson, prompt à escalader des toits lorsqu'il ne court pas le monde ? Mais surtout pourquoi a-t-il décidé de vivre en exilé volontaire près du lac Baïkal, en prenant en compte que l'on est au-dessus des contingences matérielles pour vivre cette expérience. Même si Tesson a de bonnes raisons personnelles pour décider d'aller y passer six mois, n'existe -t-il pas des lieux plus proches en Europe qui permettent de se retrouver seul avec soi-même ? Est-ce que la vie d'ermite signifie obligatoirement partir avec un camion rempli de matériel, de panneaux solaires, de pâtes lyophilisées et de vodka pour survivre ?

Se présentant comme un journal tenu du 9 février au 28 juillet 2010, Dans les Forêts de Sibérie se range définitivement dans la catégorie Essais. Tesson nous fait part de ses réflexions sur le monde tout en décrivant sa vie quotidienne dans une cabane à des heures de marche du prochain voisin. Cette vie d'ermite n'exclut pas de recevoir comme il se doit le visiteur en partageant avec lui nourriture et quantité de vodka.

Tesson nous offre un regard plein de lucidité sur le monde actuel mêlé d'impuissance. J'ai néanmoins eu le sentiment qu'il ‘jouait' à l'ermite dans ce décor de paradis blanc en coupant son bois mais surtout en s'enivrant de littérature. Un jeu qui lui revient en pleine face d'ailleurs lorsque la femme qu'il aime lui signifie son congé via un téléphone satellite.
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Un peu déçue quand même car j'attendais trop de ce livre, de ce rendez-vous d'un homme avec lui-même. Les conditions sont extrêmes, avec le climat très rigoureux et la proximité des ours. C'est ce qui donne son caractère exceptionnel à ce récit, mais l'auteur aurait pu se ressourcer moins loin, dans une île reculée, dans un phare ou même dans une maison de campagne isolée... où il est possible de se passer d'internet, de téléphone portable et de télévision... où l'on peut vivre loin de la civilisation, en rencontrant le minimum de personnes, en coupant son bois pour se chauffer, en péchant pour se nourrir et en prenant soin de faire des réserves de provisions. Bémol aussi ces rendez-vous fréquents avec l'ivresse par l'absorption abusive de vodka. Pour une introspection, les souleries ne sont pas nécessaires.
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Parce que jusqu'à maintenant Sylvain Tesson a toujours cherché à découvrir le plus d'endroits possibles, il a soudain eu envie de se poser, et plutôt que de passer son temps à courir après quelque chose, il a décidé de s'installer en un lieu calme, isolé, sans trop de distraction, pour une durée de six mois et de profiter de la vie telle qu'elle est, tout simplement.
C'est sûr qu'une cabane de 9 m2 en Sibérie, située à plusieurs heures de marche du premier village, c'est un endroit plutôt désert en théorie. Parce qu''en réalité, à la lecture de son journal, on a l'impression qu'il a quand même souvent eu de la visite et que lui-même n'arrête pas d'aller faire coucou à ses voisins même si c'est à 7 heures de marche de sa cabane !
Au final, j'ai trouvé qu'il y avait de magnifiques passages sur le temps qui passe et qu'il apprivoise peu à peu et sur la nature en général mais il y a aussi de longs passages où j'ai eu l'impression qu'il s'écoutait parler (mais étant seul, il n'avait certes rien d'autre à faire !). Certains passages inspirés par la lecture des philosophes m'ont même un peu ennuyé.
J'admire son courage, car il n'est jamais facile de s'extraire de notre quotidien, même si celui-ci nous pèse, et au fond, il ne savait pas trop à quoi s'attendre, mais j'ai trouvé que l'exploit n'en était finalement pas vraiment un car il est quand même parti avec de quoi tenir des mois au niveau de la nourriture, de l'alcool et des livres. Il ne s'est pas non plus retrouvé là, démuni à la merci des seuls éléments.
Et puis, son fameux isolement me parait moins crédible quand il apprend on ne sait comment que tel ami français vient le rejoindre à telle date ou que tel garde forestier va venir le chercher pour une virée à telle heure, tel jour...Au bout d'un moment, j'avais l'impression qu'il ne se passait pas une seule semaine sans qu'il ait des invités : des peintres russes, des gardes forestiers, des amis de longue date, des voisins...avec lesquels il se saoûlait consciencieusement à la vodka.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce récit mais je l'ai davantage lu comme une fiction que comme le récit réel d'un homme désirant se soustraire provisoirement à la société, à la communication, à la consommation etc...d'où les trois étoiles seulement.
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1300 citations pour un récit de 250 pages, tout le livre doit être énoncé, il faudrait juste remettre les citations dans l'ordre pour lire l'intégralité de ce journal à bord d'une cabane de trois mètres sur trois !

Si vous avez besoin d'une liste d'objets à emporter dans cette cabane en Sibérie, Sylvain Tesson vous en propose une.
Si vous avez besoin d'une liste de 60 livres à emporter pour six mois, il vous suggère :

Quai des Enfers, Ingrid Astier / L'Amant de lady Chatterley, D.H. Lawrence / Traité du désespoir, Kierkegaard / Des pas dans la neige, Érik L'Homme / Un théâtre qui marche, Philippe Fenwick / Des nouvelles d'Agafia, Vassili Peskov / Indian Creek, Pete Fromm / Les Hommes ivres de Dieu, Jacques Lacarrière / Vendredi, Michel Tournier / Un taxi mauve, Michel Déon / La Philosophie dans le boudoir, Sade / Gilles, Drieu la Rochelle / Robinson Crusoé, Daniel Defoe / de sang-froid, Truman Capote / Un an de cabane, Olaf Candau /Noces, Camus / La Chute, Camus / Robinson des mers du Sud, Tom Neale / Rêveries du promeneur solitaire, Rousseau / Histoire de ma vie, Casanova / le Chant du monde, Giono / Fouquet, Paul Morand / Carnets, Montherlant / Soixante-dix s'efface, tome 1, Jünger / Approches, drogues et ivresse, Jünger / Jeux africains, Jünger / Les Fleurs du mal, Baudelaire / le facteur sonne toujours deux fois, James M. Cain / le Poète, Michael Connelly /Lune sanglante, James Ellroy / Eva, James Hadley Chase / Les Stoïciens, (Pléïade) / Moisson rouge, Dashiell Hammett / de la nature, Lucrèce / le Mythe de l'éternel retour, Mircea Eliade / le Monde..., Schopenhauer / Typhon, Conrad /
Odes, Segalen / Vie de Rancé, Chateaubriand / Tao-tö-ding, Lao-Tseu / Élégie de Marienbad, Goethe / Nouvelles complètes, Hemingway / Ecce Homo, Nietzsche / Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche /Le Crépuscule des idoles, Nietzsche / Vingt-cinq ans de solitude, John Haines / La Dernière Frontière, Grey Owl / Traité de la cabane solitaire, Antoine Marcel / Au coeur du monde, Cendrars / Feuilles d'herbe, Whitman / Almanach d'un comté des sables, Aldo Leopold / L'Oeuvre au noir, Yourcenar / Les Mille et Une Nuits / le Songe d'une nuit d'été, Shakespeare / Les joyeuses commères de Windsor, Shakespeare / La Nuit des rois, Shakespeare / Roman de la Table ronde, Chrétien de Troyes / American Black Box, Maurice G. Dantec / American Psycho, B.E. Ellis / Walden, Thoreau / L'Insoutenable légèreté de l'être, Kundera / le Pavillon d'Or, Mishima / La Promesse de l'aube, Romain Gary / La Ferme africaine, Karen Blixen / Les Aventuriers, José Giovanni.

J'avais déjà remarqué le caractère “pointu” de ses lectures dans “Une très légère oscillation”, assez différentes des miennes.

“Dans les forêts de Sibérie” pourrait m'accompagner sur une île déserte tant l'auteur sait nous faire partager les choses simples et essentielles : “La journée est ponctuée de mesures dont le battement constitue un solfège. L'arrivée de l'oiseau à 8 heures, le balayage de la toile cirée par un rai de soleil à 9 h 30, le jeu des petits chiens à la tombée du jour, l'apparition des phoques au milieu de l'après-midi, le reflet de la lune dans le seau : la mécanique est parfaite. Ces rendez-vous insignifiants sont les immenses événements de la vie dans les bois.”

C'est une aventure immobile qu'il faut lire de manière paisible, il faut pouvoir laisser sédimenter ce journal, laisser au fond de la batée de l'orpailleur les réflexions culturelles, politiques et ne garder que les quelques pépites au fond du tamis : “J'ai découvert qu'habiter le silence était une jouvence…
La virginité du temps est un trésor…
L'oeil ne se lasse jamais d'un spectacle de splendeur. Plus on connaît les choses, plus elles deviennent belles.”


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Sylvain Tesson se définit comme un ermite, je le vois davantage comme un voyageur-né, un aventurier écrivain, un poète baroudeur, un rêveur philosophe qui aspire à un monde plus simple et plus respectueux de son environnement.
Après plus de cinq cents chroniques sur ce récit de voyage, il est difficile d'être original. Je vais tout de même tenter de coucher mon ressenti, mes émotions de lectrice.

*
Faire un pas de côté.
S'évader, changer de vie.
Choisir la solitude à la compagnie,
l'immensité à la promiscuité,
l'importance de l'instant à la futilité.
Poser un regard différent sur le monde, sur soi.
Faire la paix avec le temps, avec soi.
Vivre un interlude de six mois,
loin des hommes, loin du bruit,
au rythme de la nature,
pour étancher sa soif de liberté,
pour mieux se retrouver.

« Il suffisait de demander à l'immobilité
ce que le voyage ne m'apportait plus : la paix. »

Pour cela, Sylvain Tesson a choisi de quitter le monde des hommes, de s'isoler loin de tout, dans une petite cabane en bois perdue dans l'immensité de la taïga sibérienne, au bord du lac Baïkal.
De février à juillet 2010, l'auteur a tenu un journal de bord dans lequel il relate cette vie d'aventures, d'expériences insolites et extrêmes, de rencontres. Il y partage aussi son goût pour la littérature.

« Quand on se méfie de la pauvreté de sa vie intérieure, il faut emporter de bons livres… »

De cette vie solitaire, naissent de nombreuses réflexions sur la vie, la liberté, la nature humaine, la mondialisation, la modernisation de notre société.

« L'homme est un enfant capricieux qui croit que la Terre est sa chambre, les bêtes ses jouets, les arbres ses hochets. »

Il en découle de beaux passages :

« Pour parvenir au sentiment de liberté intérieure, il faut de l'espace à profusion et de la solitude. Il faut ajouter la maîtrise du temps, le silence total, l'âpreté de la vie et le côtoiement de la splendeur géographique. L'équation de ces conquêtes mène en cabane. »

« Les lynx, les loups, les renards et les visons circulent dans la nuit. La tragédie sauvage se lit dans les empreintes. Certaines sont perlées de sang. Elles sont les paroles de la forêt. »

*
Même si j'ai parfois ressenti le poids de la solitude, des regrets ou du chagrin, je retiens avant tout le calme, le bonheur de vivre simplement, en harmonie avec la nature, avec ses idées.
C'est une lecture que j'ai trouvé très apaisante. J'y ai puisé de la force, retrouvé la sérénité dans la magie des lieux et la plume poétique de Sylvain Tesson. Mon esprit s'est mis au diapason de cet espace lacustre cristallisé par la glace. Il a cheminé dans ce monde tout de blanc vêtu, figé dans l'instantané et le froid. Il s'est reposé, délassé, lové dans ce silence cotonneux et douillet baigné de lumière.

L'endroit que l'auteur a choisi pour sa retraite offre une magnifique scène de spectacle à ciel ouvert.
La nature y est reine, une artiste qui se réinvente sans cesse, qui dévoile sa beauté froide et éthérée. La forêt de cèdres et ses habitants, le lac de glace, le gémissement du vent, les saisons se mélangent dans une sorte de kaléidoscope, défilé de couleurs, de blanc, de lumières, de parfums, de sensations et d'émotions.

*
C'est aussi un récit qui se joue des extrêmes et des contrastes.

Aux empressements, aux agressions et aux bruits de la vie moderne, se substituent l'immobilité de la vie, le calme, le silence, la beauté et la contemplation. L'hostilité du monde ne vient pas de la nature, mais des hommes.

Le monde sauvage renferme autant de puissance que de fragilité. Sa froidure est apaisée par la chaleur du poêle, le renouveau du printemps. Sa beauté voile sa rigueur, sa rudesse.

« Les failles du lac, comme les crevasses des glaciers, donnent des baisers mortels aux hommes trop confiants. »

Le temps a une signification différente, il se tamise, s'attendrit, trouvant un tempo et un rythme plus lent pour s'accorder aux décors et au besoin de repos.

*
Je retiendrai de cette aventure de magnifiques images d'une beauté simple et touchante : les flocons de neige, la coloration du ciel, la démarche placide et puissante des ours, la présence rassurante et réconfortante des chiens.

« Aïka et Bêk enlacés dessinent dans la nuit sibérienne le symbole du yin et du yang. »

Je garderai également en mémoire certains moments doux, amusants, ou cruels qui étreignent le coeur :

- la visite d'une petite mésange à tête noire qui frappe au carreau pour demander quelques graines.

« La visite du petit animal m'enchante. Elle illumine l'après-midi. En quelques jours, j'ai réussi à me contenter d'un spectacle pareil. Prodigieux comme on se déshabitue vite du barnum de la vie urbaine… Et voilà que je reste gâteux devant l'oiseau. La vie de cabane est peut-être une régression. Mais s'il y avait progrès dans cette régression ? »

- le spectacle bouleversant des papillons morts, flottant à la surface du lac.

« Certains trouvent encore la force de se débattre. Je transforme mon kayak en patrouilleur de sauvetage et recueille délicatement les insectes, un à un. Pauvres fleurs du ciel tombées au champ d'honneur. Bientôt, trente papillons décorent d'étoiles molles mon embarcation bleue. Je suis le pilote d'une arche pour hyménoptères. »

- la cane qui pleure ses petits dans la lumière du matin.

« La vie consiste à tenir le coup entre la mort des êtres chers.
Il a suffi des coups de dents machinaux d'une petite carnassière pour qu'une immense clarté de solitude s'abatte sur les Cèdres du Nord. »

- l'image du cheval mourant face au lac

« Les entrailles fument dans le froid, des geais se postent au sommet des pins, les tripes s'écoulent dans un froissement, parfaitement imbriquées, soyeuses. le soir tombe sur ces épanchements. »

*
Pour conclure, ce récit de vie a coïncidé avec mon humeur du moment, mon envie d'une lecture qui calme la frénésie de ma vie.
Une jolie parenthèse.

« Je suis venu ici sans savoir si j'aurais la force de rester, je repars en sachant que je reviendrai. »
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