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EAN : 9782863641385
182 pages
Parenthèses (02/10/2005)
4/5   3 notes
Résumé :
Au printemps 1889, le chef d'une puissante tribu kurde, Moussa bek, lançait ses hommes à l'assaut du village de Khartz, dans la plaine de Mouch, au coeur de l'Arménie historique. Une adolescente, Gulizar, est enlevée, séquestrée dans un harem et convertie à l'Islam.

Cet épisode banal dans une province orientale de l'Empire ottoman deviendra une « affaire » jusque dans les rapports diplomatiques occidentaux lorsque Gulizar, surmontant ses peurs et sa h... >Voir plus
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Elles sont noires ses noces parce qu'elles lui ont été imposées. Elles sont sombres et tristes parce qu'elle ne voulait pas se marier avec celui qui l'a capturée. Elle, c'est Gulizar, une adolescente arménienne qui habite un village près de Muş (Mouch en arménien). Lui est chef d'une puissante tribu kurde qui agit sans foi, ni loi; un brigand qui n'hésite pas à tuer celles et ceux qui ne servent pas ses intérêts: parmi eux, les arméniens qu'il est à l'époque bon d'assassiner ou de convertir par voie forcée. Par un malheureux soir de printemps en 1889, l'homme capture celle qu'il avait remarqué et qui lui avait été refusée. Il réussit à avoir Gulizar, cette jeune adolescente qu'il viole et marie ensuite à son jeune frère. Gulizar est forcée à la conversion, elle doit devenir kurde, donc musulmane mais la jeune fille, au sens de l'honneur aiguisé, refuse. Elle veut rester arménienne, donc chrétienne. Rusée et de grande volonté, elle réussit à échapper à ce sort qui lui a été imposé. Il faut voir comment et avec quel talent.

Ce livre n'est pas un roman. Il est un témoignage vivant; un témoignage porté par Arménouhie Kévonian, la fille de Gulizar; un témoignage bienvenu qu'il faut lire pour savoir la vie des arméniens au temps de l'empire ottoman. Ceux de Muş ont souffert. Ils ont subis ces chefs de tribus kurdes qui éprouvaient une haine pour les arméniens, n'ayant pas de mal à les piller, les violenter, les capturer, les assassiner; le tout dans l'impunité, soit que les autorités ne parvenaient pas à les arrêter, soit qu'elles leur accordaient une immunité. Et on voit là se dessiner la mécanique de la violence qui sera plus tard versée sur les Arméniens victimes de génocide. Heureusement, on voit autres choses dans ce récit: des élans de solidarité et de fraternité entre les Kurdes et Arméniens qui souffraient ensemble de la violence de certains chefs de tribus. On voit des gens qui n'avaient pas de mal à parler la langue de l'Autre - les Kurdes pouvant maîtriser l'arménien et les Arméniens le kurde. On découvre un peu de cette vie enfermée dans le passé: une hiérarchie sociale, un vivre-ensemble, une cohabitation parfois heureuse, parfois malheureuse entre gens de confessions différentes. Par son témoignage, Gulizar nous laisse ainsi les traces de ce qui n'est plus, de ce qui a été détruit, abîmé, pratiquement oublié. Elle nous laisse imaginer la vie sous l'Empire ottoman, nous invite à penser la complexité de la question arménienne, les Arméniens ayant été accusés de traîtrise par les autorités parce que faisant, entre autres, l'objet d'une attention et d'un soutien tout sauf désintéressé de la part des puissances étrangères qui n'avaient pour véritable intention que le démantèlement de l'Empire ottoman. Le sort des Arméniens n'était en effet, pour eux, qu'un prétexte pour réaliser leurs ambitions politiques, l'Histoire ayant apporté les preuves de leur manque de sincérité et d'intérêt pour le peuple arménien. Celui-là était pris en tenaille: vivre soumis et dans le silence pour se faire oublier des autorités dont ils craignaient la colère et l'injustice ou payer le prix de leur révolte. Dans les deux cas, malheureusement, c'est le même sort qui leur a été infligé.

Ce livre est à conseiller pour ce qu'il est: un retour émouvant dans ce passé qu'il ne faut surtout pas oublier. Dommage, toutefois, qu'il soit court. Je l'aurais aimé plus long et détaillé.

Lien : http://mezelamin.blogspot.fr..
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De la quatrième de couverture :
"Au printemps 1889, le chef d'une puissante tribu kurde, Moussa bek, lançait ses hommes à l'assaut du village de Khartz, dans la plaine de Mouch, au coeur de l'Arménie historique. Une adolescente, Gulizar, est enlevée, séquestrée dans un harem et convertie à l'islam.
Cet épisode banal dans une province orientale de l'Empire ottoman deviendra une "affaire" jusque dans les rapports diplomatiques occidentaux lorsque Gulizar, surmontant ses peurs et sa honte, viendra à Constantinople accuser Moussa bek et affirmer devant les tribunaux ottomans son identité arménienne. A terme ce procès servira de détonateur pour les mouvements d'émancipation des minorités chrétiennes de l'Empire. [...]"

Attiré par cette histoire de rapt parce que j'en connais une analogue, perpétrée presque exactement cent ans plus tard, dans une région voisine, toujours par un agha kurde au détriment d'une adolescente chrétienne - ce qui porterait à croire que les relations entre ces deux minorités en territoire ottoman-turc n'ont pas beaucoup changé malgré cent ans d'une histoire très mouvementée - j'ai appris surtout quelques nouvelles facettes de la "question arménienne" qui culminerait dans le génocide.

- L'internationalisation qu'elle prit à cause d'une série de coïncidences liées à la guerre de Crimée, allant bien au-delà de l'équilibre des puissances recherché par les chancelleries russe, ottomane et britannique ;
- La réelle incapacité de l'administration ottomane de faire face au banditisme (pillages, mises à sac, exactions diverses pas spécialement dirigées contre la paysannerie chrétienne) des clans kurdes, qui provoqua peut-être en partie la décision néfaste de s'appuyer finalement sur ces derniers contre les Arméniens - notamment par les régiments des Hamidiyés ;
- L'organisation politique armée de groupes indépendantistes arméniens, souvent fomentés par le Caucase, dès les années 1860, qui constituèrent une menace de plus en plus forte à l'intégrité territoriale de l'Empire ;
- La désolidarisation de la bourgeoisie arménienne de Constantinople vis-à-vis des Arméniens des provinces orientales, principalement agriculteurs et parfois petits artisans, qui versaient dans un état épouvantable d'arriération matérielle et culturelle ;
- La prégnance des aspects inter-"nationaux", aujourd'hui nous dirions inter-communautaires qu'eurent les réformes des Tanzimat et les précoces expériences constitutionnelles impériales.
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