Tout commence par un chant, puis des sons de cloches. La cathédrale Saint-Joseph est inaugurée, majestueuse dans Albeyrac. le son des cloches va provoquer la perte de Hermine, servante de sieur Roger, vicomte endeuillé. Hermine va se perdre dans Albeyrac, en pleine tourmente émotionnelle et se retrouver dans un endroit qu'elle ne connaissait pas : le cloître de Sernin, le bâtisseur, démon. Et là, ça part en cacahuète.
De la beauté de l'endroit, du charme de Sernin, on va se retrouver dans l'ombre des pierres, dans le puit, avec d'autres pauvres erres. le côté magique de l'endroit, de la façon de s'y rendre, j'ai trouvé ça incroyable : utiliser la "vanité", les pêchés, les désirs des gens, pour leur faire miroiter leur rêve, et pour mieux s'en nourrir. C'est un piège infernal et horrible et superbement pensé, en un sens, que de faire apparaître, appâter, et enfin, tuer en jouant avec l'esprit.
Sernin, il a un côté badass et charmeur incroyable. Il a l'air beau, grand, pompeux. de ses charmes infernaux, il tire parti pour faire venir, faire croire. Jusqu'à ce qu'il tombe sur deux personnes particulières qui vont le chambouler. Niark niark, tel est pris qui croyait ne rien apprendre hein !
J'ai particulièrement apprécié l'endroit, le cloître, à l'image du bâtisseur, à l'image des prisonniers, changeant, muant sans cesse au travers les esprits qui s'y confrontent, c'est un endroit aux visages multiples, donc une découverte perpétuelle tout au long du livre, ce qui casse la monotonie, étant donné que la grande majorité de l'histoire s'y passe. Ce n'est pas un huis-clo,
Les personnages clés, entre le vicomte Roger, Hermine, Agnès, Perle, Pierre, Foulques et les sieurs de Roujayrou... sont tous profonds. Attachement particulier pour Sernin, l'BG intergalactique et Hermine avec son caractère trouble. Agnès, avec sa façon de vivre, sa pitié, son sacrifice, c'est peut-être vraiment le perso qui m'a autant énervée qu'hypnotisée en fait, parce que, faut quand même être un sacré bout d'nana pour faire ce qu'elle fait ! (en vrai, j'me demande si j'étais pas vénère après juste par rapport à Sernin... miskine)
Hermine a réussi à atteindre mon coeur avec ses combats et envies, son histoire aussi. Et tous, ont leur histoire propre, bien travaillée et sur tout le livre, aucun n'est laissé au hasard. Leur destin, soit tragique, soit magnifique, nous fait avoir tantôt des larmes, tantôt du soulagement. Manon a ici joué avec brio sur la profondeur de ses personnages, dans une histoire tout aussi bien menée.
J'ai vraiment, mais vraiment, aimé leurs histoires, leur passé, leurs envies, leurs espoirs, leur douleur...
La fin, magnifique, m'a fait verser mes larmes, clairement. Je m'y attendais un peu, mais pas comme ça, et pas pour tout le monde bordel de ***** ! Manon, si tu passes par là : t'es trop forte.
En parallèle, on a aussi des cours d'histoire (pas dits sur un ton scolaire, rassurez-vous) au travers le récit et la croisade contre les cathares. (albigeois) (ça fight sa mère)... Une période dramatique que je ne connaissais pas, que j'ai apprise avec tristesse lors de la lecture d'un roman. (J'ignorais même jusqu'au terme de "Parfait"...)
Le bûcher de Montségur est réel (les persos non, hein) Et la "sainte-guerre" également. (pas exploitée pleinement ici, forcément, on est sur un roman très inspiré, mais pas dans un manuel naméhooo) mais nous avons suffisemment de matière pour appronfondir de nous-même avec quelques recherches, que je suis en train de faire de mon côté...)
Le tout servi par une grande inspiration du Languedoc, région de coeur de l'auteure, bien que la ville du roman aie été inventée, elle s'est grandement inspirée du paysage pour dépeindre une ville à l'image de son histoire. Un travail d'exploration incroyable et respectueux.
L'auteure, de sa plume à l'ancienne, a joué avec les descriptions détaillées, poétiques (romantiques même), rappellant par elles l'aspect gothique du roman que j'attendais. Entre les décorations religieuses, les vêtements, les paysages, les persos, encore une fois, tout est maîtrisé jusuq'au bout. (et j'ai appris plein de mots !)
Et enfin, la musique. Car oui, le roman possède une bande originale, à écouter (à l'envi, bien entendu) pendant la lecture. Ben punaise de punaise, quelle expérience immersive incroyable !
Les notes s'accordaient parfaitement aux moments, aux personnages, à tout ! Et on le doit à 3 artistes qui ont collaboré avec Manon (liste en bas). Je ne lis quasiment jamais en musique (sauf quand je vois des titres dans les romans), c'est la première fois que je mettais un casque, avec appréhension au départ : vais-je réussir à me concentrer sur la lecture ? Surtout que les musiques, sublimes, devraient s'écouter seule, dans le noir, pour être pleinement "absorbées" par nous. Bien, je me suis vite laissée transporter, le fond sonore était là, et j'ai parfaitement bien suivi l'histoire.
Je recommande vivement cette expérience à ceux qui se laisseraient tenter par
le cloître des vanités !
Bref, ce premier roman de
Manon Segur est superbe. Vous l'avez compris, m'obligez pas à le dire. L'histoire me faisait envie, et j'ai pas été déçue du tout, en plus de la narration de l'auteure, de son récit, il y a les messages, la beauté ou la cruauté des hommes qu'elle a dépeint, le romantisme aussi qui est bien présent et pas de façon niaiseuse.