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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En commençant ce recueil, je pensais découvrir Proust critique plutôt que Proust romancier. Or Contre Sainte-Beuve contient en germe tous les thèmes de la Recherche, du baiser de maman à la tranche de pain grillé trempée dans une tasse de thé, des jeunes filles en fleurs aux clochers normands, jusqu'aux noms, qui y sont noms de personnes et pas encore de pays.
Autre surprise, c'est beaucoup plus agréable à lire que La Recherche (j'avoue, j'y ai trouvé des longueurs) sous cette forme de courts articles plutôt qu'en volumes successifs, même si, bien sûr, l'unité d'ensemble n'y figure pas.
Trois chapitres néanmoins sont, sous la forme d'une conversation de Marcel Proust avec sa mère, une critique des critiques de Sainte-Beuve sur Nerval, Baudelaire et Balzac ; le principal reproche qui lui est fait étant de ne pas avoir su distinguer de leur vivant ces auteurs, défendus par Proust, qui passeraient à la postérité et d'en avoir encensé d'autres bientôt tombés dans l'oubli.
Même la conclusion, qui est presque un art poétique, annonce l'oeuvre à venir du romancier.
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Ce n'est pas la partie sur - ou plutôt contre - Sainte-Beuve qui m'a le plus intéressée. D'ailleurs, le titre est trompeur, dans la mesure où ce n'est pas Proust lui-même qui l'avait choisi. Si j'ai bien compris, voici une série de différents textes rassemblés et édités après sa mort. On y trouve à la fois des réflexions théoriques sur la littérature, sur la critique, sur les écrivains du XIX ème siècle, mais ce ne sont pas des exposés savants. Non, on sent la voix, l'individualité, la sensibilité de Proust. Certaines idées rejoignent d'ailleurs Sur la lecture que j'avais découvert récemment, comme par exemple l'amour du jeune Proust pour Théophile Gautier et le Capitaine Fracasse. En tant qu'adulte, qu'expert pourrait-on dire, Proust devrait pourvoir capable d'analyser les défauts ou les limites de l'écriture de Gautier. Cependant, une des thèses centrales de Proust dans ce recueil est la primauté des sensations sur l'intelligence. On doit ressentir avant de comprendre et d'analyser. Ainsi, les impressions d'enfance de la lecture du Capitaine Fracasse ont été si fortes que l'adulte n'est pas capable d'analyser, d'intellectualiser sa lecture - et, il ne le veut même pas.
Proust parle donc des auteurs qu'il aime, Balzac, Gautier, Stendhal, Baudelaire... Il accuse ainsi Sainte-Beuve d'avoir méconnu Stendhal - moi qui l'aime tant. Et sur Balzac, il évoque notamment un des romans qui est pour moi un des chef-d'oeuvres de la Comédie Humaine qui n'est sans doute pas assez connu : la Recherche de l'Absolu.
Et on retrouve différents textes qui sont des brouillons de la Recherche ? des passages écartés ? repris ? retravaillés ? Je ne sais pas exactement, ma lecture de la Recherche commence à dater et j'avoue de pas avoir cherché ce qu'en disent les chercheurs. Ce sont les prémices de la Recherche, ces textes conduisent Proust à se tourner vers le roman.
Il est en tout cas sûr qu'on y retrouve des thématiques chères à Proust, de l'amour pour la mère à la fascination pour Venise, du goût pour les mondanités à la fascination pour le nom de Guermantes - le nom plus que ses porteurs, à l'étude de la présence des homosexuels dans la société. C'est le texte "Un rayon de soleil sur le balcon" qui m'a ainsi particulièrement frappée, car une sensation fait ressurgir un souvenir et provoque l'écriture, ce qui est à l'origine même de l'oeuvre romanesque proustienne.
A titre personnel, j'ai bien aimé l'hommage à la Normandie, ma région natale, avec ses plages, ses clochers, ses campagnes... Oui, Proust a raison, il ne faut pas analyser et critiquer une oeuvre, il faut la ressentir...
Je complète pour signaler une récente émission des Chemins de la philosophie de France Culture qui traite justement du Contre Sainte-Beuve, que j'ai écoutée ensuite et qui m'a apporté des éléments de compréhension supplémentaires.
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L'ouvrage connu sous ce titre est une anthologie de textes qui sont, en quelque sorte, des brouillons de la Recherche du Temps Perdu. Les pensées de Proust sur Sainte-Beuve, la création littéraire, l'homosexualité, etc, sont ici écrites à l'état d'essais parfois narrativisés, avant de trouver dans le corps du roman leur forme définitive.
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L'histoire de ce texte est tellement dense qu'elle mériterait un article à elle seule ! Pour faire court, cet essai est composé de multiples petits chapitres/feuillets écrits entre 1908 et 1910 par son auteur qui avait totalement abandonné son idée de texte romanesque (qui sera, plus tard, A La Recherche du Temps Perdu) et qui était revenu de Cabourg en proie à un mal extrême. Il va alors écrire un article pour Le Figaro qui sera une critique, voire une attaque, ciblant Sainte-Beuve, un très célèbre critique littéraire du XIXe siècle. Cet article de base, servant à discréditer avec crédibilité et constructivité, finira entouré de multiples autres feuillets qui chamboulent totalement la construction de ce qui finira par être un recueil sans aucune forme propre. En effet, cet essai n'en est pas vraiment un : on lui en a donné le nom pour mieux savoir l'aborder, caractéristique propre de l'humain. Outre un chapitre entier sur Sainte-Beuve, il y a d'autres chapitres qui sont des ressentis de lectures (qui seront mis en lien avec Sainte-Beuve, et qui se confronteront), il y a des réminiscences d'enfance, ou encore des descriptions de prose poétique… La particularité de ce texte est qu'il précède l'écriture de la Recherche, l'oeuvre de la vie de Proust, mais on en retrouve énormément d'éléments : l'épisode de la biscotte trempée dans le thé (qui deviendra la fameuse madeleine), les jeunes filles en fleurs, les baisers de la maman, les villages et clochers normands, l'obsession de la mère pour Venise, la fascination du narrateur pour les Guermantes, la découverte de la sexualité, de l'amour, et même l'homosexualité – cette « race maudite » (un chapitre qui m'a bouleversé dans le recueil). Enfin bref, que d'éléments à retrouver dans A La Recherche du Temps Perdu, si bien qu'on y retrouve parfois des passages entiers qui sont repris presque mots pour mots (comme ce passage si amusant et si proustien dans lequel le narrateur, en plein du milieu d'une insomnie, commence à s'endormir, mais où son subconscient le réveille pour lui faire comprendre qu'il est temps de trouver le sommeil). J'ai eu l'occasion et la chance de pouvoir lire toute La Recherche il y a de cela quelques années – et n'en ai posté aucun article sur ce blog, j'attends pour cela une relecture – et j'ai été très amusé de trouver autant de similarités entre les deux : on comprends vraiment qu'il s'agit ici d'une sorte d'oeuvre préliminaire.

Mon avis est assez positif dans l'ensemble car j'ai souvent été touché par cette prose de Proust si reconnaissable et si agréable. La Recherche était la quintessence de cette prose poétique et bouffante bien qu'extrêmement douce, mais il y a dans ce recueil un potentiel prosaïque si important qu'il semble bien être le prédécesseur de l'ensemble romanesque : énormément de similarités, mais pas assez assumé, ou complet, comme un prototype. Evidemment, le but n'est pas le même entre les deux texte, car dans celui-ci nous retrouverons toutes les véritables analyses philosophiques et littéraires qui ne furent pas dans le cycle romanesque si connu. Toutes ces analyses très poussés et maitrisées m'ont beaucoup plu également – surtout la partie concernant Honoré de Balzac et toute son oeuvre, où Proust a si bien su décrire cette légère grossièreté de personnage auctorial, mais aussi son génie, ou encore Baudelaire dont Proust vient en aide. J'ai dû lire Sylvie, de Gérard de Nerval, avant le chapitre qui lui était consacré, afin de mieux en saisir les profondeurs, et même si je n'ai pas été un très grand fanatique du texte et de son traitement, j'ai été rassuré de voir que je ne le ciblais pas de façon totalement fausse, car les raisons pour lesquelles je n'avais pas aimé le texte étaient celles qui faisaient de lui un chef-d'oeuvre. Un chapitre m'a frappé de poésie : « Un rayon de soleil sur le balcon », exemple-même de la beauté de la phénoménologie proustienne. Sainte Beuve avait une philosophie particulière qu'il m'a été donné de déprécié par nombre de citations disposées au sein du livre par Marcel Proust ; en effet, un auteur doit, selon Sainte-Beuve, être jugé avec son art selon une pensée commune, comme quoi l'auteur physique est le poète, que les deux entités n'en font qu'une seule, et qu'on doit juger un livre en fonction de la personne qui l'a écrit. J'avoue être assez opposé à cette terminologie de l'auteur, mais c'est un rapport personnel concernant des modèles de transcendance et dissociation que j'apprécie particulièrement.

Enfin, je m'arrête ici ! Cet essai de Marcel Proust est amusant car n'en est pas vraiment un. C'est plutôt un recueil de textes/feuillets/articles/impressions que l'auteur a écrit entre 1908 et 1910. A l'intérieur, on retrouve une critique acerbe mais sincère de la critique de Sainte-Beuve, mais aussi toutes les bases qui serviront à fonder le monument de la (future) Recherche. Un texte fort et assez indispensable ! {17}
Lien : https://clemslibrary.wordpre..
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Avant la Recherche du temps perdu, plus qu'un roman, plus qu'un essai, Proust hésite, invente, élabore, s'obtient à force de tentatives, et ce sont ces pages que le Contre Sainte-Beuve, moins qu'un roman, moins qu'un essai, rassemble, certaines encore faibles, d'autres extraordinaires déjà, comme cette « Préface », sans doute le plus beau résumé de toute son entreprise littéraire.
Lien : https://une-phrase.blogspot...
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