AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4

sur 26 notes
5
3 avis
4
2 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Une rare pépite avec cet ovni où je voudrais y mettre tous les adjectifs positifs.
Une femme mourante raconte sa vie et celle de sa famille à Haïti. La pauvreté, l'exploitation, la promiscuité, les viols, l'inceste, etc. Une seule phrase, pas de point final. La prose est originale et toute en puissance en divers points. La mère est nommée Toi. Son père Makenzy, son frère Orcel. Tiens bizarre ! Prénom et nom de l'auteur qui a voulu se mettre dans un personnage sans être lui. Drôle ! Une écriture, façon slam ou rap. L'impression d'être tombée dans un torrent qui nous ballotte parfois sur des gros rochers qui font mal, puis sur le côté, là où il y a le sable et où c'est chantant, calme, poétique. Plus imposant que 'Les immortels' du même auteur mais toujours unique. J'adore le regard qu'à cet écrivain sur la société. Des passages d'une force incroyable. Mes respects.
Commenter  J’apprécie          420
J'ai lu ce livre, il y a quelques mois. Très surpris par le style et la teneur du propos, je n'en ai pas rédigé la critique immédiatement, ayant besoin de réflexion. Je ne suis jamais allé à Haïti, et peut-être n'irais-je jamais. Ce premier pays libéré du joug de l'esclavage semble être maintenant un des pires enfers sur terre, surtout si on y ajoute les catastrophes naturelles en tout genres.
Ce livre est surprenant. La narratrice est une jeune femme morte, peut-être suicidée, je ne me souviens plus. Mais sa voix d'outre tombe raconte la vie de sa famille, sa mère, son père et son jeune frère. L'action semble se situer non loin de la capitale Port-au-Prince où se terminera le roman. C'est donc elle qui nous fera part de cette vie sans cesse recommencée, de la soumission de Toi, sa mère et de l'incapacité de son père Makenzy à se sortir de cette misère où ils sont tous englués comme une bonne part de la population les environnant. Un statut un peu part est réservé à son frère Orcel, qui, préfère se réfugier au bord de la mer, avec les pêcheurs, donnant libre cours à ses rêveries pour échapper à l'immondice de sa vie. C'est tout simplement l'histoire de cette famille, au jour le jour, qui nous est narrée, avec parfois, quelques intervenants, comme ce prêtre, lors d'une communion, il me semble, ou cette journaliste étrangère venant rendre conte de la situation du pays, nous offrant au passage, à nous lecteurs, quelques moments de lyrisme et nous faire croire que le bonheur est encore possible. L'auteur nous plonge dans la réalité de son pays avec un lyrisme mêlé de réalisme cru, ce qui fait toute la qualité de son roman. C'est de cette manière qu'il rend supportable l'insupportable de la situation de ces gens. le parti pris, également, de prendre un cadavre comme narrateur est très astucieux, puisque cela renforce l'objectivité des faits. Un cadavre n'a plus rien à perdre !
C'est un roman passionnant que je recommande vivement. Finalement, cet auteur formidable, Orcel Makenzy nous laisse penser, que tout n'est peut-être pas perdu pour son pays...
Commenter  J’apprécie          396
Dès le début le lecteur se trouve orienté vers une lecture psychanalytique : parce qu'il y a "Toi", un fragment de l'auteur. Et il y a une voix de femme, qui monte du fond de l'abîme et s'incarne, en récitante héroïque de sa vie de rien, celle d'avant la mort. Dans cette psychanalyse sans concession de la société patriarcale et de l'Être haïtien, l'humour est présent entre les lignes comme l'éclat de rire d'un rescapé. Comme dans son premier roman "les immortelles", on retrouve l'univers haïtien et un récit tenu avec force, puissance et Poesie.
Commenter  J’apprécie          160
Il y a la voix limpide d'une femme qui résonne, il y a ce « je » qui nous interpelle, il y a ce corps gisant : un cadavre. La mort s'est emparée d'elle, mais son esprit vibre de l'au-delà. Pas de repos encore pour cette vieille dame, ses mots coulent et inondent tout, autour. Elle a tant vu, entendu et senti de choses durant son existence. Ce flot de paroles, elle ne peut le retenir. Il faut qu'il sorte. Les vagues de colère, de honte, de douleur, de mépris qui remuaient à l'intérieur de son corps vont enfin s'extirper et aller s'écraser à nos pieds. Cette femme libère enfin la voix qu'elle ne pouvait faire entendre, à travers une longue litanie.
Elle nous parle de son pays, Haïti. de sa misère, ses croyances, de son village reclus, des tempêtes qui emportent tout sur leur passage, de la mer déchaînée, de son enfance volée, violée et violente, de son père le patriarche dur et implacable, de son frère bien-aimé Orcel qui fugue régulièrement pour contempler la grande bleue apaisante, de Toi sa mère, celle qu'elle place au milieu de ce tout, celle qui représente toutes les femmes mais celle à qui elle ne veut surtout pas ressembler, des figures du village comme l'Envoyé de Dieu, personnage pervers englué dans la corruption, de l'inconnue, voyageuse qui semble tout connaître, des loups qui rôdent exploitant les ouvriers, les asservissant, de la capitale Port-au-prince, de son tapage, de sa prostitution, de ses bidonvilles, des vapeurs d'alcools à l'origine de bien des tourments...
Ses mots roulent, se heurtent les uns aux autres, se répondent et arrivent jusqu'à nous. de ses mots âpres et féroces s'élèvent une telle émotion que l'écriture de l'auteur en devient onirique et métaphysique. Sans point ni majuscule, le texte défile comme un torrent. Avec force, il bouscule, il interroge l'humain et le mortel que nous sommes. Et par quelques interstices, la lumière s'infiltre, l'ombre ne vivant qu'à travers elle.
Lien : https://lesmotsdelafin.wordp..
Commenter  J’apprécie          150
Makenzy Orcel étant haïtien, on pense bien sûr qu'il a situé son histoire dans son pays, à Port-au-Prince, dans un de ses bidonvilles, les tristement célèbres tontons macoutes dont il parle permettent de s'assurer du lieu. Ce qui frappe avant tout dans ce roman, c'est la forme : pas de majuscule, sauf au noms propres -eux-même des noms communs utilisés comme des noms de personnes, sauf Makenzy et Orcel-, une longue phrase ponctuée seulement par des virgules -et quelques points de suspension en seconde partie. Cette omniprésence de la virgule donne un rythme très particulier au texte, une rapidité évidente, mais aussi peu de temps morts, de respiration, ce qui parfois provoque des insuffisances respiratoires et des besoins d'arrêter sa lecture. Mais quel souffle ! Makenzy Orcel est comme un slameur ou un rappeur qui viendrait nous scander sa prose dans un rythme fou, et nous spectateurs, nous serions à la fois débordés, en manque de respiration et totalement fascinés. Son exercice est magistral, ainsi que le dit l'éditeur, son écriture itou.

Le contenu est dans la même veine, dur, violent avec peu d'espoir, et finalement très beau. Il y est beaucoup question d'extrême pauvreté, d'alcoolisme, de prostitution, de promiscuité favorisant l'inceste, les viols. Les femmes ne sont pas bien loties qui ont souvent des maris violents et alcooliques, qui dépensent le peu qu'ils gagnent à boire ou avec des prostituées. Elles subissent, comme Toi, du plus jeune âge jusqu'à la fin tout cela sans rien dire sous peine d'être frappées : "Toi pleurait toutes les larmes de son corps, c'était tout ce qu'elle était autorisée à faire, pleurer, se soumettre, sa condition de fille vendue par ses parents à un homme qu'elle n'avait rencontré que le jour même de ce sinistre marché ne lui permettait pas d'autres libertés qui de toutes façons n'existaient pas, enjointe de garder une distance raisonnable, comme si elle n'était qu'impureté et déveine, tout lui était interdit" (p.55). Les hommes ne vont guère mieux, ils cachent leur détresse et souvent leur jeunesse abominable dans ces excès : "il [Makenzy] avait déjà assez vu, assez vécu pour ne pas savoir qu'il était trop tard, qu'il n'y avait plus rien à faire, que l'alcool à appeler à la rescousse, encore un verre, et s'estompaient les horreurs de l'enfance, se cicatrisaient les blessures, les labyrinthes de cette ville, mieux valait être bourré, vraiment bourré, enveloppé d'un univers de coton, le monde était subitement d'une admirable beauté" (p.252)

Faire du beau, du très beau avec du laid du très laid, ce n'est pas donné à n'importe quel écrivain -certains dont je tairais les noms font aisément l'inverse- Makenzy Orcel m'avait déjà enchanté avec Les immortelles, son premier roman, L'ombre animale porte en lui la même puissance, la même poésie bien qu'il adopte un style totalement différent. La marque des grands. Assurément.
Lien : http://lyvres.fr
Commenter  J’apprécie          110
Ce roman commence par faire appel à notre sens olfactif, « l'odeur d'oignon frit de la mort » (titre du premier chapitre), cette odeur tenace et funeste va se répandre à plusieurs reprises dans ce récit.
Une voix féminine d'outre-tombe vient nous conter ce que fût sa difficile existence. Cette conversation post mortem lui permet d'avoir enfin droit à la parole, de régler quelques comptes avec la vie, de chasser quelques démons et de laisser libre cours à quelques rêves inassouvis.
Le lieu se dessine par petites touches, un village, la mer, des conditions de vie précaires, un dictateur, un tonton macoute, le vaudou, pas de doute possible, Haïti se dévoile.
La narratrice nous parle de son entourage, un père égoïste, tyrannique et incestueux, la mère qu'elle nomme sous la forme pronominale « Toi », épouse servile - «Toi la poubelle où il jetait toutes les ordures de sa vie » - dont le mariage n'a été qu'un arrangement monnayé par ses propres parents, un frère effacé et devenu mutique pour avoir vu ce qu'il n'aurait pas dû voir, un « envoyé de dieu » prenant quelques libertés avec la vie sacerdotale, «l'inconnue étrangère , issue d'une grande famille, étudiante en ethnologie » venant recueillir des données sur la vie à la campagne . ..
Ce roman nous révèle également une atmosphère où le mystique est omniprésent. Des rapports de domination régissent cette communauté, le patriarcat, «dans ce foutu village le pouvoir sous toutes ses formes était un bastion masculin » - la suprématie des décideurs, « les loups ». La mort est donnée sans explications et hors de toute justice, « ici personne ne récolte ce qu'il sème, après avoir tué ses parents, les assassins sont allés danser aux bals des fêtes champêtres en toute impunité ».
Et puis le style d'écriture, pas de points ni de majuscules, une seule longue phrase, ce qui donne un rythme particulier à cette lecture, comme un grand Slam.
Commenter  J’apprécie          40
L'existence n'était qu'une lampe allumée quelque part au fond d'une case

Un flot tumultueux de mots, des vagues denses de signification, un débordement, « je suis le rare cadavre ici qui n'ait pas été tué par un coup de magie… ». L'anonymat (l'absence de nom) pour deux femmes, la locutrice et « Toi » la mère, en regard de « Orcel » le frère et de « Makenzy » le père.

Des mots comme des couleurs, des odeurs, des cris de douleur. Des phrases pour dire la violence sexuelle envers les femmes, l'ombre grise de la mort.

L'art d'être et de ne pas être soi-même, les scories, les suffocations…

Le père, les viols, « l'absence terrible d'enfance », l'enfermement à double tour dedans sa tête, la solitude, « il était seul contre sa mémoire, seul à escalader les falaises qui bordaient sa vie »…

Toi, la « condition de fille vendue par ses parents », le corps « ouvre les jambes et ferme ta gueule », les viols conjugaux, « Toi c'état normal d'être une machine à tout faire, parce que c'était une femme »…

Orcel, la mer et les silences…

L'Autre, le silence, « le silence, c'est la mort, si tu te tais, tu meurs et si tu parles tu meurs, alors dis et meurs » ; départ et Solitude ; le Maître d'école, ce monsieur, « je suis venu te dire adieux » ; l'Envoyé de Dieu, le hors de tout espace-temps, « ses penchants pour l'entrecuisse de jeunes paysannes assoiffées du pardon du ciel », les autres prêtres et les attouchements et viols ; les Belles du Seigneur…

Des rêves et de l'amitié, des rêves et des oiseaux, « la nuit ne nous appartient pas, ma fille », amoureuse…

L'Inconnue l'étrangère, les seins ; l'Inconnu le mystérieux, le liseur de destin, le Diable-en-personne, de la plage de Pointe à Port-Salut ; la nuit des loups, la musique des tambours, l'alcool ; le Gamin, se ranger du coté de la mort ; la fabrique de la mort, le Chef des loups…

En seconde partie le « là-bas », l'exil dans « la Famille Lointaine », Toi technicienne de surface, étrangère, « la ville est un autre monde » ; Orcel, se cacher, dormir, rêver, l'Inspecteur, des images, « une mère serpillière », « un père-connard », « une soeur-cadavre » ; le Ténébreux, le bar, l'alcool, « l'éternité c'est l'affaire de quelques secondes, ça ne dure jamais longtemps », l'ascenseur et la femme qui accouche, l'écrivain…

La nuit finale, fuite, le déchargement des armes sur lui « jusqu'aux dernières cartouches ».

La lumière, « à travers chaque grain de poussière », raconter quelque chose…

Haïti.

« S'il est permis à une disparue de regarder autrement le passé »
Lien : https://entreleslignesentrel..
Commenter  J’apprécie          40
Ce roman est intéressant par son écriture, la force de la langue de l'auteur, la puissance de cette dernière, sa violence aussi par moments.
Makenzy Orcel nous dépeint dans une grande partie du roman l'oppression subie par Toi et sa fille et j'ai trouvé cela essentiel.
L'aspect onirique de plusieurs passages m'a en revanche laissé sur le côté, tout comme la seconde partie du roman avec l'Inspecteur.
Commenter  J’apprécie          20
Un livre difficile à appréhender, tout d'abord à cause du style, de longues phrases ponctuées seulement par des virgules, un rythme effréné comme les tambours des cérémonies "vaudou", le lecteur a de la peine à suivre. Ensuite le récit navigue toujours entre rêve et réalité, rempli de métaphores. Ce roman est avant tout un portrait sans concession de la société haïtienne, pauvreté, violence, prostitution, alcool, corruption et surtout de la brutalité faite aux femmes.
Lien : http://notreavis.canalblog.c..
Commenter  J’apprécie          20


Lecteurs (121) Voir plus



Quiz Voir plus

Des Fleurs pour Algernon

1) Qui est Algernon ?

une souris
le personnage principal
le chirurgien

10 questions
760 lecteurs ont répondu
Thème : Des fleurs pour Algernon de Daniel KeyesCréer un quiz sur ce livre

{* *}