Citations sur Théorie du film : La rédemption de la réalité matérielle (33)
Chez le spectateur de films, le moi, en tant qu'agent principal des pensées et des décisions, renonce à son pouvoir de contrôle. Ce qui le différencie radicalement du spectateur de théâtre, ainsi que n'ont cessé d'y insister les observateurs et critiques européens. "Au théâtre, je reste moi, m'a dit un jour une Française lucide, tandis qu'au cinéma, je me dissous dans les choses et les êtres." Henri Wallon analyse ce processus de dissolution : "Si le cinéma produit son effet, c'est que je m'identifie à ses images, c'est que je m'oublie plus ou moins en faveur de ce qui se déroule sur l'écran. Je ne suis plus dans ma propre vie, je suis dans le film qui est projeté devant moi."
On ne laissera pas de côté les problèmes de technique ; mais on ne les examinera que 's'ils soulèvent des questions qui dépassent les considérations techniques.
Peut-être aujourd'hui faut-il partir du corporel et le traverser pour atteindre le spirituel.
Umberto D., de De Sica, dévoile la conspiration d'évènements et de circonstances minuscules qui se referment peu à peu sur le vieux retraité, etc.
On peut se représenter le véritable artiste cinéaste comme quelqu'un qui entreprend de raconter une histoire mais qui, à mesure qu'il filme, est à ce point pris par le désir inné de rendre toute la réalité matérielle - ainsi que par le sentiment qu'il doit la rendre de façon à raconter l'histoire, quelle qu'elle soit, en termes cinématographiques - qu'il s'aventure toujours plus avant dans la jungle des phénomènes matériels où il risque de se perdre irrémédiablement s'il ne regagne pas, au prix de grands efforts, les larges voies qu'il a quittées.
Il peut se trouver, dans un contexte totalement aliéné, des germes de développements novateurs.
Il y a bien des moyens d'apporter au refoulé l'apaisement de l'évasion. Aussi s'établit-il une interaction entre les rêves des masses et le contenu des films. Tout film qui a du succès rencontre des désirs largement répandus. Mais ce faisant, il les dépouille nécessairement de leur ambiguïté intrinsèque. Chaque film qui se trouve dans ce cas fait évoluer ces désirs dans une certaine direction, les confronte à l'une de leurs multiples significations. De par la formulation définie qu'il en donne, le film définit le contenu non précisé qui l'a inspiré.
La musique met en valeur et légitime le silence plutôt que de le rompre.
René Clair, pour revenir à lui, raconte qu'il connaît des gens peu informés de l'histoire du cinéma qui s'obstinent à croire que certains films muets, dont ils ont par ailleurs un souvenir exact, étaient parlants ; et il en déduit astucieusement que cette erreur de mémoire devrait donner à réfléchir à tous ceux qui rechignent à admettre la suprématie de l'image.
Tout d'abord, que tel ou tel genre cinématographique reçoive un accueil favorable ne dépend pas de son adéquation au médium qu'il utilise. En fait, si de nombreux films relevant de genres spécifiques séduisent le public, c'est qu'ils répondent à des aspirations sociales et culturelles fort répandues. Leur popularité toujours confirmée tient à des raisons qui n'ont rien à voir avec la légitimité esthétique.