Mes frères et soeurs de toutes confessions, voici à nouveau venu le temps de se rassembler autour de ce dieu païen de la littérature qu'est
Stephen King.
L'auteur annonce la couleur dès l'incipit, en dédiant son roman à
Lovecraft, Shelley, Stocker et une dizaine d'autres. Vénération pour ces précurseurs,
Revival comme une renaissance et une manière « à l'ancienne » de raconter des histoires (avec une touche moderne pour pimenter le tout).
Le fil conducteur de ce récit est le pouvoir de l'électricité, plus puissant que tout (même que Dieu ?). La dernière page tournée, je peux affirmer que ce roman m'a électrisé du premier au dernier mot, à coups de décharges de bonheurs et d'horreurs.
Certains esprits chagrins argueront peut-être que le King n'a pas pris énormément de risques avec ce bouquin. Pourtant, j'ose affirmer, que loin d'être statique, il n'y a vraiment que lui qui pouvait écrire une histoire de cette manière, jusqu'à son final incroyable, inattendu, dérangeant. Dérangeant comme l'ensemble de ce récit qui peut se lire à plusieurs niveaux.
Stephen King est un conteur Geiger hors pair, qui développe une intrigue de 100 000 volts. Une intrigue immersive, qui prend le temps de se mettre en place et qui s'apparente longtemps à un vrai roman noir, étalée sur plusieurs décennies.
On y retrouve certaines thématiques chères à l'auteur. Nostalgie des 60's, musique, puissant plaidoyer pour la tolérance et violentes attaques contre la bêtise (et chouettes clins d'oeil à certains de ses autres romans, dont
Joyland qui se rapproche un peu de celui-ci par son ambiance).
Une histoire où l'on s'attache vite et fort aux personnages, « the Kings touch », et une tension qui monte lentement, irrémédiablement. A travers cette histoire qui parle de religion, du milieu des forains (tiens, tiens) et de rock'n'roll, d'addiction et de science, de perte et de folie. Un récit réaliste qui transporte insidieusement le lecteur vers l'horreur et des contrées fantastiques insoupçonnées. Les auteurs cités au début ne sont clairement pas loin.
Toutes ces idées permettent une fois de plus au King de nous toucher en plein coeur et de nous faire réfléchir sur notre monde. Comment ne pas méditer face à sa peinture acerbe du milieu religieux américain, des années 60 à nos jours, et de ses prédicateurs ? Comment ne pas extrapoler par rapport à la montée actuelle des intégrismes ? Mention spéciale au « Sombre sermon » qu'il fait tenir à l'un des personnages principaux durant une dizaine de pages ; un écrit qui est l'un des plus forts, violents, magnifiques, jouissifs passages de toute sa longue bibliographie. Rien que pour ça, ce livre est indispensable !
L'écrivain, lui, n'est pas un bonimenteur. Son histoire est sombre, noire, éprouvante mais également gorgée d'une émotion comme seul sait l'imprimer le King du 21ème siècle. Un tourbillon d'émotions, même !
C'est simple, parfois j'ai eu l'impression que certains passages étaient écrits juste pour moi, comme si l'auteur me parlait directement et me connaissait par coeur. Avec des mots qui allumaient une petite loupiote dans ma tête et m'éclairaient de l'intérieur. Électrisant, je vous l'ai dit… Clairement, le courant passe entre nous actuellement et ce n'est pas de l'alternatif.
Oui le King est un dieu païen de la littérature, capable de nous décrire le pouvoir divin de la musique et de braquer un éclairage puissant sur la manipulation des hommes et des masses. Quand il est aussi inspiré par ses sujets,
Stephen King est comme un poisson (électrique) dans l'eau.
Laissez-vous aller, sans résistance, et plongez (profond) dans cette histoire si humaine (et donc horrible), si crédible et fantastique (fantasque), si touchante et choquante, et si piquante d'intelligence.
Une histoire de destin (ou non), d'une puissance parfois insoutenable. Quand l'ancien King rencontre le nouveau, ça donne un roman juste extraordinaire. Gloire au Maître.
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