À la Combe-Noire, sur la pente exposée au soleil, se trouve, perchée entre ciel et terre, une pauvre masure. On ne comprend pas qu’elle soit encore debout et que, depuis longtemps, elle n’ait pas roulé au fond du ravin. Elle ressemble en effet à un homme qui descend au pas de course une montagne et qui tout à coup s’arrête : il essaye de se tenir droit, mais cela lui est impossible. Quand on en regarde le toit, il semble qu’on entend le
vent siffler et vous secouer. On dirait un sac de mendiant qui aurait besoin de raccommoder, mais qui, une fois raccommodé, aurait toujours l’air d’un sac de mendiant. Les portes de l’écurie et de la grange sont petites, tordues et d’un style architectural à part. Derrière la maisonnette se trouve un tas de fumier qui est à peu près aussi gros qu’un pain de sucre, et qui ne doit pas servir à grand’chose. Devant, il y a un jardinet : onze bettes y exposent
au soleil la vulgarité de leurs formes, sept plantes de haricots grimpent le long de perches chancelantes entre lesquelles deux rosiers en fleurs mettent la note joyeuse de leurs couleurs. Tout autour se dressent paisiblement les pieux d’une vieille clôture attendant la main laborieuse qui la réparera.
– Je ne veux rien avoir à démêler avec les femmes de la ville, disait-il, elles n’ont aucune idée de la valeur d’une corbeille. Elles se figurent que la chose essentielle dans le commerce, c’est de marchander jusqu’à suer sang et eau. Montrez leur une corbeille de quatorze sous, elles vous en offrent dix. Présentez-leur, une autre fois, la même corbeille pour quatre sous, elles sont capables de vous en donner deux. Voilà la portée de leur intelligence !
– Il est bien suffisant pour moi, disait-il. Pourvu qu’il dure
autant que son propriétaire, ça me suffit.
Mes après-venants feront à leur guise.
Les temps sont bien difficiles et l’argent est si rare qu’il faut se mettre voleur pour en avoir.