AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Manosque des Plateaux - Poème de l'olive (17)

A propos de l'olive...

On a des moulins à l'électricité. ce qui me fait plaisir c'est qu'une fois ça marche, l'autre fois ça ne marche pas; l'huile a le goût du pétrole, sans compter que toutes ces inventions, ça finit par jeter le sort sur les meilleures choses.
Avant, du temps des beaux moulins, du temps de la cueillette, c'état de l'huile, croyez moi.
Et, mars venu, avec sa pluie folle et ses vents fous qui vous retroussent et vous gèlent le dessous des robes, quand la ménagère se sentait une bonne envie de colline et qu'elle ne pouvait pas sortir, elle allait au placard, elle trempait son petit doigt dans la burette, elle se mettait, comme ça, une goutte d'huile sur la langue, et voilà qu'elle était tout soudain si lourde d'arbres, de genévriers et d'odeur de terre que ça l'obligeait à s'asseoir.
"ah, soupirait-elle, pour que ça réjouisse tant le cœur il a bien fallu que ce soit fait avec le cœur."
Commenter  J’apprécie          91
Ce beau sein rond est une colline ; sa vieille terre ne porte que des vergers sombres. Au printemps, un amandier solitaire s’éclaire soudain d’un feu blanc, puis s’éteint. Du haut du ciel, le vent plonge ; la flèche des ses mains jointes fend les nuages. D’un seul coup de talon, il écrase les arbres et il remonte. Parfois un aigle roux descend des Alpes, mais l’air des plaines proches ne le porte plus ; il nage à grands coups d’ailes et il crie comme un oiseau naufragé.
Commenter  J’apprécie          80
Là se prend le grand lavage qui fait désormais partie de ma vie. Du thym, des lavandettes, de la sauge, de l'herbe dure, de courts genets, une autre herbe plus charnue et le vent. N'est-ce pas, durant l'hiver, on s'est imbibé d'air saumâtre, on a mis le nez sous les couvertures, on a tisonné l'âtre, bu de la pluie par les narines et lu des petits livres. Il faut bien un jour et une nuit à nager dans les herbes. Puis au matin du deuxième jour, on ouvre l'oeil : on est propre.
Commenter  J’apprécie          80
Vous êtes fait de meurtre quotidien, vous êtes comme des roches aux angles en épines ; vous avez déchiré la peau des bêtes, abattu les arbres, écrasé les herbes, mais tout ça est dans vous et vous ne pourrez plus vous reposer de votre inquiétude parce que vous n’avez jamais donné d’amour. Respirez-le votre or ; a-t-il le parfum du thym matinal ? Entassez-le votre or, vous êtes comme des enfants qui comptent des rondelles de soleil dans l’ombre des platanes et puis, un coup de vent efface leur richesse ; entassez-le et, soudain, vous laisserez tomber vos bras fatigués et vous rêverez à ces grands plateaux couleur de violettes où l’autre Manosque est bâti et où vous n’irez jamais.
Commenter  J’apprécie          70
Au printemps, un amandier solitaire s'éclaire soudain d'un feu blanc, puis s'éteint. Du haut du ciel, le vent plonge; la flèche de ses mains jointes, fend les nuages. D'un coup de talon, il écrase les arbres et il remonte. Parfois, un aigle roux descend des Alpes, mais l'air des plaines proches ne le porte plus; il nage à grands coups d'aile et il crie comme un oiseau naufragé.
Commenter  J’apprécie          70
La patate, il y avait tous les goûts de la terre dedans, des goûts du fond du diable, comme on dit ; ça fondait au chaud de la langue comme un beurre. C’est bête ce que je vais te dire, mais ça avait un goût d’ombre, de terre fraiche et d’air.
Commenter  J’apprécie          60
L'odeur du thym fume jusqu'à la lune. un beau nuage s'est envasé dans un bras mort du vent; il ne peut plus arracher sa proue de l'azur immobile et à bout de forces, il ondule lentement de la poupe.
Commenter  J’apprécie          60
Manosque des plateaux

Ce beau sein rond est une colline; sa vieille terre ne porte que des vergers sombres. Au printemps, un amandier solitaire s'éclaire soudain d'un feu blanc, puis s'éteint. Du haut du ciel, le vent plonge; la flèche de ses mains jointes fend les nuages. D'un coup de talon, il écrase les arbres et il remonte. Parfois, un aigle roux descend des Alpes, mais l'air des plaines proches ne le porte plus; il nage à grands coups d'aile et il crie comme un oiseau naufragé.
Si on quitte le chemin, il y a des olivaies envahies par les roses. C'est comme une peau de bélier qu'on a jetée sur les arbres. C'est épais et ça saigne. On a chaud là-dessous d'une lourde chaleur de laine; l'herbe sue. Pour sortir de cette ombre, il faut s'écorcher les mains. Un mois après, on trouve une rose séchée dans sa poche.
De grands talus se chauffent au midi, fleuris de serpents immobiles. Les lézards sont épais comme le bras. Ils dorment au soleil puis sautent, happent, et mâchent longuement des abeilles à goût de miel. Ils en pleurent des larmes d'or qui grésillent sur la pierre brûlante. La lagremuse est toute grise, avec des pattes comme un fil, une queue qui semble une ombre; mais elle a un coeur énorme, un coeur déchaîné dans elle comme un orage et elle en est là, palpitante. Un mariage de gros frelons assomme les scabieuses de son vol aveugle. Les sauterelles se déclenchent et passent tout éperdues dans un saut puis elles ouvrent leurs ailes rouges. Une caravane de fourmis, large comme une route d'homme, coule sous les feuilles. Une procession de chenilles adore lentement un pin dans ses spirales. Une maison aux murs en coque de noix, bombés et ocre, craque doucement, écrasée sous sa charge de tuiles, de poutres et de soleil. L'ombre transparente des oliviers tient dans sa toile d'araignée la sieste d'une toute petite fille. Elle dort dans l'herbe chaude. Elle a remonté toutes ses robettes et, sans ouvrir les yeux, elle gratte à pleine griffe son ventre sucé par les mouches. Un chevreau lutte avec une guêpe. L'odeur du thym fume jusqu'à la lune. Un beau nuage s'est envasé dans un bras mort du vent; il ne peut plus arracher sa proue de l'azur immobile et, à bout de forces, il ondule lentement de la poupe.
Commenter  J’apprécie          60
CE BEAU SEIN ROND
EST UNE COLLINE

Je ne pourrai jamais retrouver le vrai visage de ma terre : cet oeil pur des enfants, je ne l'ai plus.
Quand j'étais petit, je jouais, puis j'avais faim. Ma mère taillait alors une plate tartine de pain, elle la saupoudrait de sel, elle l'arrosait d'huile par un large 8 de la burette penchée ; elle me disait : "mange." Ce sel, il me suffisait de humer le vent odysséen ; il était là avec l'odeur de la mer ; ce pain, cette huile, les voilà tout autour dans ces champs de blé vert dessous les oliviers. Ainsi, s'est aiguisée de longue habitude l'ardente faim de mon coeur.
Jamais assez de ce pain...
Jamais assez de ce sel, de cette huile, ma mère.
Avec mes joies, avec mes peines, j'ai mâché des quignons de ma terre ; et maintenant, la ligne où se fait le juste départ, la ligne au-delà de laquelle je cesse d'être moi pour devenir houle ondulée des collines, la ligne est cachée sous les frondaisons de mes veines et de mes artères, dans les branchages de mes muscles, dans l'herbe de mon sang, dans ce grand sang vert qui bout sous la toison des olivaies et sous le poil de ma poitrine.
Ce beau sein rond est une colline ; sa vieille terre ne porte que des vergers sombres.
Commenter  J’apprécie          60
Et c’est là qu’on rencontre au milieu des avoines une fleur à forme d’abeille qui bat des ailes éperdument dans le vent. C’est là que sont les lacs de narcisses qui collent leurs flots visqueux et immobiles à toutes les ondulations de la plaine, puis doucement s’émeuvent de vagues lourdes et viennent clapoter contre les bergeries désertes ? Là, dans les crépuscules, les arbres redressent l’échine et parlent.
Commenter  J’apprécie          40






    Lecteurs (113) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Jean Giono

    Né à Manosque en ...

    1875
    1885
    1895
    1905

    12 questions
    410 lecteurs ont répondu
    Thème : Jean GionoCréer un quiz sur ce livre

    {* *}