Contre nature

Vous donnez raison à ceux qui pensent que nous sommes mauvaises, vous, moi, celle qui va arriver et que vous jurez de démolir. À leurs yeux, plus jamais nous ne serons des femmes convenables, alors autant nous saboter pour de bon, c’est ça ?

J’ai porté dans mon ventre ce que vous appelez des enfants. Vous vous trompez. J’ai porté en moi, par huit fois, une boule de magma résultant de la fusion de deux corps dont on imagine avec dégoût les ébats.

Ce qu'il y a de bien avec le bonheur, c'est que même quand tu n'en as pas, tu peux quand même en donner.

L'enconnardisation décomplexée, alimentée par des heures de téléréalité quotidiennes, n'a aucune limite.

La notion de temps n'existe que par la liberté d'en faire ce que nous voulons, ce que nous devons. En prison, chacune a un temps à faire, étrange expression quand nous ne faisons rien d'autre que de le tuer.

... peut-être que dernière-née de cette lignée de douleur, je suis le gros point d'exclamation qui conclut une phrase où la tristesse donne la main à la résignation.

... amoureuse voulait dire aimer, pas être aimée.

A partir de ce moment-là, on m'a appelée "détenue". Je suis entrée dans un monde qui n'existe pas, dans lequel les codes et la liberté de la société du dehors n'existent plus, où chaque chose anodine du quotidien est soumise à autorisation et où même le nom est remplacé par un numéro. Mais ça n'est rien. Ça n'est rien à côté de l'odeur.

Les jolies filles jouent presque toujours un jeu superficiel dans des décors de carton-pâte, avec lumières artificielles et filtres Instagram. Elles s’aiment elles-mêmes, bouche en cul-de-poule et teint lissé. Elles sont belles comme tant d’autres. Les émouvantes sont en accord avec la nature, elles sont la nature, fondues dedans, herbes sauvages, gracieuses, insaisissables, pour les débusquer il faut y regarder de plus près, et alors on ne peut que s’émouvoir.

Ma mère avait une grande passion, une obsession même : la propreté. Ou plutôt, la propreté poussée à son paroxysme, tel le chasseur qui ne lâche pas la bête tant qu’elle ne gît pas à ses pieds. Elle astiquait sans relâche, c’était son tonneau des Danaïdes. Dans une ferme, avec la paille, la boue, la poussière, elle n’en finissait plus de s’essouffler et de recommencer en râlant sur son sort et sur nous, les pollueurs, incapables de respecter sa besogne.