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EAN : 9782718605371
167 pages
Galilée (12/01/2000)
3.3/5   10 notes
Résumé :
"Comment se séparer ? Tout le temps où je vivais en Algérie mon pays natal je rêvais d'arriver un jour en Algérie, je poursuivais l'Algérie et elle n'était pas loin, j'habitais d'abord à Oran puis à Alger au Clos-Salambier au bord du Ravin de la Femme Sauvage et elle m'échappait sur sa terre sous mes pieds elle me restait intouchable, je me serrais contre le corps d'Aïcha et elle me laissait serrer son pays en riant pendant un mince instant sans suite autre que les ... >Voir plus
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Mais tout cela n'est que divertissement à mon plus ancien deuil. C'est l'ouvrage de mon père. C'est le coup. C'est la blessure. L'évènement, le mien. L'ouverture à l'oeuvre, ce que mon père m'a fait, une fois, la seule fois, une violence unique dont le père ne mesure pas l'interminable ricochet cruel, comment regretter la douleur ? elle m'est d'une infinie fidélité.
Descendez du récit, à la place du Gouvernement. Suivez-moi sous les arcardes de la rue Bab Azoun en 1946. Vous verrez dans la vitrine la créature adorable qui me frappe d'un désir absolument indifférent à tout commentaire, à tout calcul à toute raison, c'est la créature vitale tout à coup, je la veux, je dois l'obtenir, c'est Elle. C'est comme si c'était hors de moi ma vie même. Une poupée dit mon père pas question. Il est le roi. Il ne voit rien. Tue-moi dis-je. A ton âge dit le roi. Quel âge dis-je? Neuf ans dit-il. J'ai quatre-vingt dix ans. J'ai quatre-vingt-dix millions d'années. Je suis déjà dans l'ambre sacrée de la perpétuité. Je vois mon apocalypse. C'est elle exactement. Le Beau et la Beauté. Je sais tout. Le Voile me dit tout. Je devine tout. Une poupée mauresque maintenant ! Je perds mon père. Nous ne pouvons pas faire autrement. Il ne me voit pas. Il croit que je suis un enfant. Il croit qu'il est un père. Tout cela est écrit dans un autre temps. C'est comme si je commettais un parricide dans la Citroën. Je le sais. Je le commets. Dans l'auto je ne suis pas l'enfant. Il y a substitution . Il y a nécessité. Tue-moi, dis-je. Mon père veut me frapper. Mais il est au volant. Il est entre la colère et la stupéfaction.(...) Une crainte lève son vent dans la vie intérieure du roi. Il y a une folle dans son auto. C'est ce qu'il craint depuis des années. On ne joue pas. Ma mère s'esquive à la fenêtre. C'est trop pour elle. Elle sort de la scène d'un coup d'aile. Elle a raison. Une telle scène ne pourrait avoir lieu elle présente. Cela se passe dans un autre monde. Je vais vers une mort je le sais. Je suis toute à la mauresque. Je suis adultère. J'entre dans la minutie de la passion je veux tout et je veux chaque partie je veux le fin voile du visage, je veux le haïk de lin de soie, je veux l'agrafe d'argent, je veux les anneaux des chevilles je veux le visage caché je veux les chevilles cachées je veux être l'agrafe et les anneaux je veux le saroual bouffant je veux les jambes cachées je veux être le saroual je veux l'Algérie. J'enrage le roi enrage. Nous restons immobiles séparés définitivement. Une pluie de temps recouvre les personnages et les archives dans la posture butée du plus-jamais. Comment te pardonner ?
Tout le reste est déguisement.




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- Tuterapelles dit mon père et moi je dit tuterapelles alors mon frère dit tuterapelles et alors je dis à mon tour tuterapelles et là-dessus mon frère dit tuterapelles, puis je dis tuterapelles, il suffit que l'un de nous dise tuterapelles alors l'autre tuterapelles de bon matin et là-dessus en marchant bien d'un pas rapide et nu sur l'asphalte bouillant nous prenons de l'autre côté du terrain vague (...) Là- dessus on sort du berceau du rêve en noir et blanc et on arrive à la piscine municipale bleue violemment bleue glacée glacialement bleue dans laquelle nous nous laissons tomber comme deux pierres incandescentes. On sort de l'eau réinventés. Tuterapelles les sandwichs pour couronner les deux héros. Ici mon frère ne se tuterapelles pas avec moi.





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Vidéo de Hélène Cixous
S'agissant par exemple du marxisme, de l'existentialisme, du bouddhisme, du nominalisme, de l'immanentisme, du keynésianisme, du personnalisme ou autres, il ne viendrait à l'esprit de personne de se demander si, pour adhérer à ces doctrines, ces conceptions du monde ou ces écoles de pensée, il faut être une femme ou un homme (même si, dans la plupart des cas, elles ont été forgées par des hommes !). Il n'en va pas de même lorsqu'il s'agit du féminisme : une « femme féministe » ressemble à un pléonasme, un « homme féministe » à un oxymore. Pourquoi ? Peut-être parce que le marxisme ne tient pas à ce qu'était Karl Marx ni à qui il était, pas plus que le keynésianisme ne s'explique par ce qu'était John Maynard Keynes, alors que le féminisme, tout en étant une philosophie, une conception du monde, une pratique, une gamme de mouvements sociaux et politiques, est ancré dans le « devenir-femme », élaboré depuis la subordination et les systèmes d'exploitation politique, économique, sociale, sexuel, familial dans lesquels les hommes, façonnés, eux, par le système patriarcal, ont enfermé les femmes. Autrement dit, les femmes sont les sujets du féminisme, les protagonistes qui l'ont initié, formulé, partagé, diffusé et transformé en force des femmes, alors que les hommes sont les objets de l'analyse, les agents et les hérauts de la structure qu'il faut modifier et faire tomber, les représentants et les vecteurs des modalités patriarcales. Certainement, Simone de Beauvoir eût pu écrire l'Être et le néant, mais à Jean-Paul Sartre il aurait été impossible d'écrire le Deuxième sexe, et si, par son ingéniosité, il avait quand même réussi à le faire, l'ouvrage serait resté un « point de vue » sur les femmes, et jamais devenu la matrice et la puissance du féminisme moderne. Est-ce à dire que les hommes, quand ils ne s'accrochent pas au vieux virilisme comme à une bouée, sont condamnés à demeurer des « compagnons de route » du féminisme et qu'ils partagent, collaborent, participent aux luttes des femmes ? Probablement pas. À ceci près que le féminisme exige peut-être cette « écriture féminine » dont parlait Hélène Cixous, qui exalte ce qui a été ignoré et méprisé par le discours des hommes, crée sans cesse des structures syntaxiques et stylistiques nouvelles irréductibles aux codifications fixées par les hommes, et qui s'avère capable de refuser et réfuter la logique de l'« écriture masculine », fondée, elle, sur ces oppositions (homme/femme, père/mère, actif/passif, culture/nature, coeur/raison…) qui ont nourri la pensée occidentale et, par là même, conforté le patriarcat. Dans ce cas, on pourrait dire que l'« homme féministe » est celui qui se révélerait apte à assurer, assumer et faire sienne une telle « écriture féminine ».
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