Mesure-t-on à sa juste valeur la chance que nous avons de pouvoir accéder si facilement à tous ces trésors littéraires qui se sont accumulés au fil des siècles depuis l'invention de l'écriture ? Rien ne peut nous échapper, et il suffit de le vouloir pour accéder à n'importe quel texte quand bien même celui-ci aurait été écrit il y a plusieurs milliers d'années en grec ancien ou en latin. Grâce aux traductions et au coût modique de l'impression ce miracle qui consiste suivre les pas des plus anciens auteurs et à écouter leur voix nous parler comme s'il était présent est aujourd'hui possible pour tous. Il y a 500 ans, seul un prince, un roi ou un empereur pouvait disposer d'un tel privilège.
Cicéron est né en 106 av. J.-C. à Arpinum en Italie et est assassiné le 7 décembre 43 av. J.-C. à Formies. C'est l'un des plus brillants avocats se son époque, il est aussi philosophe, rhéteur et écrivain. Par chance presque la totalité de son oeuvre a été conservée et il reste l'un des auteurs anciens les plus étudiés aujourd'hui. Il rédige quelques mois avant sa mort, presque dans l'urgence, ce texte sur la vieillesse au moment où l'agitation politique et les tensions autour de la succession de César l'entraînent dans un choix politique qui l'oppose à Antoine qui le fera assassiner. Cette fin tragique nous démontre que la sagesse n'est malheureusement pas contagieuse et que l'humanité a toujours avancé ainsi entre l'ombre et la lumière.
Dans ce petit texte
Cicéron parle à ses amis qui le sollicite pour qu'il les aide à surmonter la peur de vieillir,
Cicéron se veut rassurant « Le véritable sujet de plainte c'est le caractère et non pas l'âge. Un vieillard dont l'humeur est douce, qui n'a ni aigreur ni violence, jouit d'une commode vieillesse, mais un esprit difficile et chagrin ne connaît
le bonheur à aucun âge ». Il structure son argumentation autour des quatre motifs de l'opinion répandue sur l'importunité de la vieillesse :
Le premier, est qu'elle nous interdit l'action, le second, qu'elle enlève nos forces, le troisième, qu'elle nous sèvre de presque tous les plaisirs et enfin le quatrième qu'elle est le prélude à la mort.
Cicéron démontre que ses craintes sont sans conséquences sur
le bonheur que l'on peut ressentir jusqu'au seuil de la mort. Il n'est pas nécessaire d'être plein de vigueur physique et d'être apte à jouir de tous les plaisirs pour être heureux. Chaque âge présente ses avantages et ses inconvénients et l'expérience de la vie procure un équilibre qui fait souvent défaut à la jeunesse. La mort n'est pas non plus à craindre, car ne se présente que deux possibilités, soit nous sombrons dans le néant et donc nous n'éprouverons plus aucune douleur ni physique ni morale, soit notre âme survivra et nous retrouverons tous ceux que nous avons aimé qui ont suivi ce même chemin vers l'éternité.
Cicéron est l'héritier d'une tradition philosophique stoïcienne et platonicienne.
— «
Éloge de la vieillesse »,
Cicéron, 1001 nuits (2021), 75 pages.