Sorj CHALANDON. l'enragé.
COUP DE COEUR.
Décidément je me complais dans la misère qui plane ou à planer sur nos têtes. A peine ai-je refermé le livre de
Anne PLANTAGENET « La
disparition inquiétante d'une femme de 56 ans » que je m'empare du livre de Sorj « l'enragé » et à nouveau la colère se réveille et les larmes coulent… Trop de sensiblerie, non seulement de l'empathie, de la compassion, de l'émotion.... de façon magistrale, l'auteur, à partir d'un faits divers nous dresse un état des lieux de ces « maisons de détention et de déportation », construites sous
Napoléon III. Ces bâtiments étaient destinés, à l'origine à accueillir les Insurgés de la commune de Paris. Ils ont ensuite reçus des enfants, abandonnés, orphelins, délinquants, tous mineurs dès l'âge de six ans et jusqu'à leur majorité vingt et un ans à l'époque. Ces maisons sont devenues des « institutions d'éducation surveillée « et doivent délivrer à leurs pensionnaires une autonomie leur permettant, à leur levée d'écrou, oui c'est bien le terme à utiliser vu les conditions sordides de leur enfermement, de s'insérer dans la vie sociale, nanti de bases pour accéder à un emploi. Ils servent d'ouvriers agricoles dans les fermes environnantes... Mais les conditions à l'éducation ou la rééducation de ces malheureux enfants, déjà privés d'un foyer aimant, ne peuvent que devenir « enragés ». Les conditions de détention sont extrêmes et ne peuvent que révéler de la violence : malnutrition, maltraitance, viols, insalubrité des locaux et discipline militaire…. Et ces établissements n'ont fermés leurs portes qu'au cours des années 1970... Quelle honte !
Sur l'île de Belle-île-en-mer, au large de Quiberon, la colonie pénitentiaire de Haute-Boulogne, riche de 56 enfants, est soumise à une mutinerie émanant de ses pensionnaires, le 27 août 1934. Aussitôt une chasse à l'enfant est décrétée : 20 francs offert par tête. La majorité des habitants se lancent à la poursuite des fuyards, alléchée par la prime, y compris les estivants.. Sorj nous décrit ces battues organisées pour retrouver les chenapans, les vauriens, les exclus de la société. Un seul enfant, notre héros, Jules Bonneau parvient à réussir son évasion. Il sera recueilli par un pêcheur, Ronan Kadarn. Ce dernier va le prendre parmi ses marins, pêcheurs.
Sur la Sainte-Sophie, il sera mousse.
Alain le Goff, Pantxo un basque, Perig le novice, le patron Ronan, Jules voici l'équipage de la chaloupe. Jules va-t-il réussir à s'intégrer aux matelots ? Lui qui a perdu toute notion de sociabilisation pourra-t-il enfin gagner la confiance de ceux qui l'entoure, l'encadre et lui offre la liberté. L'île est petite et le danger s'infiltre. Chacun doit défendre son territoire. Ronan, un homme au grand coeur, fait toute confiance à cet oiseau tombé du nid. Il lui offre du travail le couvert et le gîte. Jules sera même hébergé chez son patron, reçu par l'épouse de ce dernier, qu'il connaît bien. Au sein de ce foyer hors du commun, un patron communiste, une infirmière faiseuse d'ange, Jules trouvera-t-il son équilibre, sa joie de vivre, de revivre, lui l'enfant abandonné par ses père, mère, et même grands-parents qui l'ont confié à l'assistance publique ? Non, je ne vous en dirais pas plus. Je vous invite à suivre le parcours de « l'enragé ».
Merci Mr Sorj CHALANDON pour votre récit, cruel, brutal mais empreint de tant de réalités, de vérités, de non-dits. Vous affichez aux yeux de tous la tristesse de ces soi-disant refuges pour âmes à la dérive. J'ai appris, au cours de ma lecture que
Jacques PRÉVERT a dédié un poème a ces malheureux mutins; il était en villégiature à Belle-île-en-mer , lors de cet épisode tragique. (Le livre de
Sorj CHALANDON me rappelle «
Le gosse » de
Véronique OLMI. de l'orphelinat, à la prison de la petite Roquette
le gosse sera placé à la colonie pénitentiaire de Mettray…Je vous recommande également cette lecture qui dénonce des abus sociétaux). Je vous souhaite une bonne journée et de très belles lectures.
(26/03/2024).
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