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EAN : 9782072786358
160 pages
Gallimard (19/04/2018)
3.5/5   3 notes
Résumé :
Le mouvement de mai est un regroupement des textes politiques de Maurice Blanchot écrits pendant les événements de mai 68, présenté par Eric Hoppenot. Membre du Comité d'action Etudiants-Ecrivains constitué lors du troisième jour de l'occupation de la Sorbonne en mai 68, Blanchot participe au combat tout en écrivant ses impressions et ses idées dans des articles pour la revue du comité, dans des comptes rendus de réunions, ou encore dans des tracts politiques... La ... >Voir plus
Que lire après Mai 68, révolution par l'idéeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
C'est le 3 mai, un vendredi soir que tout a commencé, avec l'irruption des CRS dans les locaux de la Sorbonne. On a déjà passé la mi mai quand le 18 les intellectuels pointes leurs neurones. Décisifs ou pas, peu de textes restituent les doutes ou les envolées lyriques de nos intellectuels, brassés aux vents contradictoires des jeunes qui réclament l'impossible.

Les Plumes de jean-François Hamel et de Eric Hoppenot, tentent de détailler les motifs qui les ont conduits à publier des textes de Maurice Blanchot, textes relatifs à la difficile entrée des gens de lettres, dans la grande marée de mai 68. Ils sont publiés ces derniers jours dans la collection folio, avec ce titre, "lorsqu'il se passe dans la rue des choses extraordinaires, c'est la révolution."


Cette préface pourrait s'insérer parmi les chroniques de Babelio, tout y est résumé de façon fort enthousiaste, et insiste sur le ressenti de Maurice Blanchot, comme une nostalgie pour le soulèvement de mai 68, sa fulgurance a marqué son esprit.


Il en conserve une expérience unique de partage d'écrits, sous le vocable exigence communiste, entre plusieurs écrivains, tous ayant publié sous l'anonymat. Avec le recul certains textes méritaient sans doute de lever le voile sur cet anonymat, certains concernant le philosophe Maurice Blanchot.


Quelques impressions me restent de la lecture de ce très court Folio, 95 pages qui succèdent à la préface. Après les écrits, en fin d'ouvrage, les auteurs, ont requalifié les curseurs pour donner au lecteur les circonstances précises de chacun des textes.


L'émergence d'un communisme presque sentimental semble bien à l'origine du premier texte, la déclaration de solidarité avec le mouvement étudiant, signé d'une trentaine d'écrivains dont quatre femmes, (donc quatre femmes seulement). Nous sommes le 10 mai 68 quand le monde publie ce slogan, " les étudiants veulent par tous les moyens échapper un à ordre aliéné."

Jean-Paul Sartre est partagé, confus même parfois, le voila dans l'amphi à 22 heures, il déclare notamment : " la CGT a une position de suivisme. Il lui a fallu accompagner le mouvement pour le coiffer. Elle a voulu éviter surtout cette démocratie sauvage que vous avez créée et qui dérange toujours les institutions. Car la CGT est une institution. "



Ce même 20 mai le comité d'occupation de la Sorbonne transmet le télégramme suivant au bureau politique du parti communiste de l'Union soviétique au Kremlin, «  le pouvoir international de comités ouvriers va bientôt vous balayer. Stop
l'humanité ne sera heureuse que le jour où le dernier bureaucrate aura été pendu avec les tripes du dernier capitaliste. Stop.

Blanchot donne une impression plus farouche proche de cette déclaration au parti communiste du Kremlin, affichant le mot crime page 28. Il résume sa pensée et affirme, "nous appelons tous les citoyens à se rassembler contre le système gaulliste d'oppression policière, et puisque le pouvoir prétend briser le mouvement le plus libre et le plus décidé, celui même où se promet l'une des très rares chances d'avenir, nous déclarons que de ce crime nous tenons d'abord et personnellement pour responsable le chef de l'État."


Il y a aussi chez Blanchot ce zoom sur ce qu'il appelle la rue, » depuis mai, la rue s'est réveillée : elle parle. Elle est redevenue vivante, puissante, souveraine : le lieu de toute liberté possible.
L'éloge se poursuit avec les pages consacrées aux affiches, aux bulletins, aux tracts son analyse est puissante, forte.

Entre l'utopie marxienne, son communisme d'exigence de partage, son désir de balayer toute autorité, et tous les pouvoirs y compris ceux de Charles de Gaulle, on perçoit chez cet écrivain une vrai recherche de communion avec la jeunesse et ses excès.

Le dernier slogan serait pour lui peut être, ce beau Slogan « Nous sommes tous des juifs allemands scandé par les manifestants le 22 mai.

Un document vérité qui recadre bien la difficulté de concilier les intellectuels fussent-ils d'accord pour dénoncer les décrets prononçant la dissolution des mouvements d'opposition.
le bulletin N°2 ne verra pas le jour (lettre à Margurite Duras du 13 octobre 1968).
Merci à l'opération Masse Critique de m'avoir permis de redécouvrir un visage de Mai 68, merci à la maison Gallimard.



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Ce petit livre, que j'ai reçu par l'intermédiaire de Masse critique, regroupe des textes de Maurice Blanchot écrits à la suite des événements de Mai 68.

On notera l'ironie de cette publication, puisque les textes présentés revendiquent l'anonymat comme une stratégie pour déjouer le pouvoir. Blanchot lui-même avait republié certains de ces textes sous son nom. Ce livre se présente comme un ouvrage d'archives dont le contenu est étudié sans intention révolutionnaire.

L'essentiel des premiers textes du recueil est dirigé contre le grand ennemi, De Gaulle, ce cadavre d'un autre temps qui mime la grandeur passée, et Blanchot déclare l'état de guerre, la révolution permanente, violente, sanglante, contre la société bourgeoise, contre la société gaulliste.

Rompre avec toutes les formes de pouvoir, refuser la collaboration avec les institutions du pouvoir gaulliste, réoccuper la rue – devenue un espace public de surveillance policière – par la manifestation : la rue est l'espace du possible, sans lequel un pays est une prison.

La Révolution apparaît comme un instant presqu'intemporel de rupture, de transgression, qui a lieu dans la rue : face à la police déguisée qui investit la rue et cogne, cognez, rendez les coups, nous encourage Blanchot.

Dans d'autres textes, l'auteur s'interroge sur l'engagement de l'écrivain, de l'artiste, et sur son rapport à la culture complice des forces de répression, sur le caractère figeant du livre par rapport au tract qui manifeste le désordre.

Plusieurs autres textes mettent en cause l'institutionnalisation de la révolution, d'où la méfiance de Blanchot à l'égard du Parti communiste, le rejet de l'Union soviétique et une critique modérée de Castro.

Quant au fond des idées, il faut admettre que c'est très vague. le style se veut parfois enthousiaste, lyrique, libérateur, mais il est typiquement post-moderne, c'est-à-dire que l'on aura beaucoup de mots et peu de sens précis. La Révolution pour quoi faire ? La grande force de Blanchot dans ces textes, c'est peut-être de faire sentir sa nostalgie du présent : la Révolution est instantanée, mais au moment même où sa possibilité a lieu, elle semble se perdre, se faner.

Blanchot pressentait la récupération du refus révolutionnaire par la société capitaliste. La Révolution est de nos jours mal en point, voire morte si l'on considère les régimes d'hyper-surveillance qui se développent jusque dans les démocraties. La rue est quadrillée, contrôlée.

Mais les événements récents en France montrent que les idées exprimées par Blanchot sont bien vivantes : révoltes, occupations de locaux, de zones dite libérées, anonymat des revendications, violences contre violences...

D'un côté on est tenté de voir dans ses idées des idées bien datées, inachevées, floues, vouées à dégénérer ; d'un autre côté, ce qu'il y a dans ce livre continue de vivre et de jaillir dans l'actualité de temps à autres. de manière authentique ? ou comme en son temps le cadavre de de Gaulle, c'est-à-dire comme un simulacre ou un mort-vivant ?
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Une masse critique de plus, une petite croix dans une case....
Quelques temps plus tard arrive dans la boîte aux lettres ce petit livre rouge.
Merci à babelio et à Folio.
Maurice Blanchot, ce nom me disait quelque chose, je crois que j'avais à priori confondu avec un autre Blanchot, Yves, maire de Dinan de 1965 à 1983, commis à la bourse de Paris, puis en totale reconversion, il prend la succession de ses beaux-parents bouchers avant de devenir Monsieur le Maire !
Maurice Blanchot est un tout autre individu beaucoup moins consensuel, romancier, critique littéraire et philosophe.
Ses choix politiques des années 1930 ( antisémitisme et son lien avec l'extrême droite ) sont contrebalancés (? Où !) par l'attitude qu'il a eue pendant la guerre et surtout à la Libération, et par son engagement en faveur du communisme et de l'extrême gauche. Il milita activement contre la guerre d'Algérie.
Ce livre est un récapitulatif des théories développées dans le milieu intellectuel de Mai 68, on y retrouve :
Le "communisme d'écriture", le refus de la signature, marqueur important.
La remise en cause de l'existence du livre en tant qu'oeuvre, "qui même ouvert tend à la clôture , forme raffinée de la répression", rien ne semblait pour certains avoir autant de valeur que l'écriture murale avec les tracts, "les affiches qui n'ont pas besoin d'être lues mais qui sont la comme défi à toute loi" et les bulletins qui dérangent, appellent, menacent et questionnent sans attendre de réponses.
La lutte internationale ... Prague, Cuba, la Yougoslavie.
La responsabilité de l'URSS et du Parti communiste français dans la mise à mort du mouvement, de l'esprit de mai 68.
La dissolution de la société : "la grande Loi a été ébranlée".
Des notes sur les textes reviennent sur les grandes idées précédemment développées et placent ces textes dans leurs contextes en éclaircissant leurs conditions de publication.

Ce livre est un document de travail passionnant pour qui cherche à comprendre ce qui s'est passé en ce beau mois de mai.
Et une si belle conclusion (qui correspond si bien à mon humble avis à l'esprit de Mai 68) :
"Révolution, comme il n'y en eut pas d'autre ; nullement assimilable à tel ou tel modèle. Plus philosophique que politique ; plus sociale qu'institutionnelle ; plus exemplaire que réelle ; et détruisant tout sans rien de destructeur, détruisant, plutôt que le passé, le présent même où elle s'accomplissait et ne cherchant pas à se donner un avenir, extrêmement indifférente à l'avenir possible, comme si le temps qu'elle cherchait à ouvrir fût déjà au delà de ces déterminations usuelles."
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Mettre en commun nos forces, nos droits, nos exigences

Dans leur préface, Jean-François Hamel et Eric Hoppenot parlent du Comité d'action étudiants-écrivains, de Maurice Blanchot, de Robert Antelme, de Marguerite Duras et d'autres, du « refus capable, croyons-nous, d'ouvrir un avenir », de la plus grande grève générale qu'ait connue la France, de liberté nouvelle, de l'anonymat pouvant traduire une « parole collective ou plurielle », de l'écriture fragmentaire, d'une « communauté émancipée du culte de l'individu », de critique radicale, de désobéissance civile, « Trainée de feu, effervescence où nous fûmes emportés et où nous ne cessâmes d'être ensemble, mais d'une manière nouvelle »…

Des déclarations collectives et des textes plus individualisés, la puissance de refus pas un « moment seulement négatif », le sens du soulèvement, la dissolution illégale d'organisations et la volonté du pouvoir de briser « le mouvement le plus libre et le plus décidé », une exigence de rupture, la constitution d'une parole collective et plurielle, le nécessairement désaccordé, la mort politique et la manifestation de l'immobilité, la rue, le communisme sans héritage, « le trait d'union d'un désastre, d'un changement d'astre », les tracts, les affiches, les écrits sur, l'exigence internationale, contre le campisme, l'autre coté de la peur, la rupture du temps, la révolution en permanence, les paroles d'outrage, la subversion dans l'idée même de science, la loi destinée à créer le « crime » et à le faire sortir de l'imaginaire, le refus de la complaisance…

Un souffle internationaliste et d'émancipation. Des textes à (re)lire.
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Révolution, comme il n'y en eut pas d'autre ; nullement assimilable à tel ou tel modèle. Plus philosophique que politique ; plus sociale qu'institutionnelle ; plus exemplaire que réelle ; et détruisant tout sans rien de destructeur, détruisant, plutôt que le passé, le présent même où elle s'accomplissait et ne cherchant pas à se donner un avenir, extrêmement indifférente à l'avenir possible, comme si le temps qu'elle cherchait à ouvrir fût déjà au delà de ces déterminations usuelles.
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Ce mouvement d'une parole possible aurait suffi à établir entre le Mai de Prague et le Mai de Paris des rapports d'ardeur et de rigueur. La même parole, infinie, immaitrisable, a parlé depuis par les radios clandestines, s'est inscrite sur les murs, dans les arbres, sur les vitrines des boutiques, dans la poussière des chemins, sur les chars russes, parlant actuellement par le silence qui la laisse filtrer. Q'elle n'ait pu être supportée par l'État sans langage, l'État soviétique, pas plus qu'elle n'a été supportée par l'État qui prétend monopoliser le langage, l'État gaulliste, c'est dans la règle.
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Durant tout ce mois de mai, la révolution a eu lieu comme possible, et elle aurait eu lieu comme réelle (momentanément réelle), si le Parti communiste français (par là, j'indique l'organisation et l'appareil), en se dérobant à sa tâche par peur de faire peur et parce que le mot communisme lui fait peur à lui même, n'avait tout fait pour arrêter le mouvement et contribuer à réinstaller le pouvoir gaulliste qui tombait en ruine et, avec lui, la société qu'il représente.
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N'ayons pas l'esprit de drapeau.
Brandir le drapeau rouge, c'est encore exalter un morceau du drapeau français (déchiré, il est vrai).
Brandir le drapeau noir : un morceau du drapeau allemand.
Agitons le rouge, le noir, soit, mais pour provoquer ou pour terroriser et non pas pour rassembler.
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Trainée de feu, effervescence où nous fûmes emportés et où nous ne cessâmes d’être ensemble, mais d’une manière nouvelle
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