J'aime de plus en plus découvrir l'oeuvre de
Philippe Besson. J'ai l'impression qu'il écrit comme il parle (de ce que je connais de lui, à la Grande librairie), et avec une grande sensibilité, il me prend par la main et m'emmène tout doucement dans ses histoires. J'ai vraiment la sensation de l'accompagner, entre ses lignes.
Évidemment ça tient aussi au fait qu'il prend appui sur sa vie pour concocter la plupart de ses romans.
"
Un soir d'été" nous plonge dans l'été 1985, où il a 18 ans. Il sort rincé d'une année de prépa, et retrouve avec un immense bonheur "son" Île de Ré - il n'y a pas encore le pont, et l'île n'est pas encore bourgeoise, il y a des familles, des tentes, et pas de résidences secondaires - et ses amis de là-bas, surtout François et ses parents bouchers.
Christophe, aussi, dont le père est pêcheur, puis un nouvel arrivant, Nicolas, difficile à cerner.
Philippe est homosexuel, il l'a enfin avoué à son entourage, et même s'il perçoit une certaine féminité, de la douceur chez Nicolas, il ne pense pas que c'est ce qui les "unira" cet été. 😉
Et puis arrivent des parisiens, Alice et son grand frère Marc, qui vont l'un et l'autre faire des ravages dans les coeurs et dans les corps !
Bref, un petit groupe d'amis pour quelques temps, comme beaucoup d'entre nous en ont connus l'été, à la mer ou à la campagne.
La 4ème de couverture livrant qu'une de ces personnes va disparaître, je m'autorise à en parler. Il faut dire que la tension est quand même permanente entre les jeunes, pour des questions de rivalité entre gars, bien habituelles, ou avec les parents, ou encore avec des gens extérieurs.
Il y aura un mystère autour de cette disparition, et chacun de se demander s'il aurait pu l'éviter...
Mention spéciale à Virginie, 13 ans ! Une telle lucidité, vivacité, intelligence pour une môme de son âge (et je sais de quoi je parle, ayant eu moi-même 13 ans cet été là !) donne quasiment l'impression qu'elle a été inventée pour le roman.
Ceci dit, j'aurais bien aimé avoir
Philippe Besson comme grand frère, quand je vois comme il était compréhensif avec elle. 😀
De façon toute personnelle j'ai aimé que Besson me ramène en 1985, donc l'année de mes 13 ans et l'année de ses 18, du pain béni pour moi qui ai tant aimé les années 80... mais surtout avec le recul de la nostalgie ! 😉 On ne garde que ce qu'on a aimé.
J'aime son style, car tout en narrant des vacances somme toutes banales, entre plage, camping, balades, soirées animées, conversations ou silences et moments calmes, il décrit merveilleusement les liens familiaux et amicaux, remet en question la "fable commode des liens du sang", exprime parfaitement les émois des adolescents, le désir des garçons, pour les filles comme pour leurs semblables, c'est toujours très fin.
Un soir d'été n'est pas un roman spectaculaire, il y a un drame c'est vrai, mais un drame "feutré", sans cris ni tempêtes. C'est un roman de l'intime, de l'intériorité, des sentiments, des corps qui se croisent, et même s'il est très différent du livre "Arrête avec tes mensonges" que j'ai lu et chroniqué ici récemment, il s'y trouve des points communs. Mais c'est pour d'autres raisons, et plus ici pour la sensibilité de l'auteur aux questionnements des hommes, que je mets aussi un coup de coeur.