En lisant la quatrième de couverture, je m'attendais à un roman pêchu, un peu nerveux, ou en tout cas orienté sur l'action. Pourtant, si le concept de tueur de temps apparaît bien dans le récit, ce n'est pas pour moi l'élément central du récit.
Je ne me suis pourtant pas laissé détourner de ce livre, parce que je sais à quel point la rédaction d'une quatrième de couverture peut s'avérer compliquée. En réalité, c'est plutôt les paroles de l'éditeur qui m'ont convaincue de tenter l'aventure avec
Yann Bécu. Il m'a parlé de cet ouvrage avec des étoiles dans les yeux, un véritable feu d'artifice dans la voix accompagné de gestes des mains enthousiastes. En général, j'aime ce que publie l'Homme sans Nom (j'ai adoré le chrysanthème noir de
Feldrik Rivat et Rêves d'Utica de Roznahro, ainsi que les romans d'
Oren Miller), je ne prenais donc pas un grand risque avec ce titre.
Je l'ai lu assez rapidement après l'avoir acquis - enfin, "dévoré" serait plutôt le terme.
Les bras de Morphée, c'est un récit drôle, cynique, ironique, inattendu.
Yann Bécu a une belle plume, riche, avec un beau vocabulaire qui a ravi la linguiste en moi. Mais il est ardu, bourré de références, un peu intello et pas aussi dynamique que le laissait entendre le résumé...
Frimousse est en effet un troll professionnel, mais ce qui m'a intéressée dans son récit, c'est de voir la toile du monde qu'il nous présente. le récit peu sembler un peu décousu à cause des ellipses temporelles, puisqu'en fait le fil rouge est la pensée de Frimousse. Il parle également de sa relation avec sa compagne, de l'importance de ces quelques heures où elle est éveillée, du besoin de s'exprimer de façon courte et concise (un peu comme si on tweetait en permanence. Limite de mots, limite de temps, pas une seconde à perdre). Même si la relation amoureuse du personnage n'est pas du tout mise en avant dans le récit, une nouvelle fois elle sert à mettre en scène les ajustements sociaux et dans les rapports humains qu'implique ce changement de paradigme.
Il digresse souvent, nous parle de choses en apparence sans conséquence, mais qui participent à rendre l'univers crédible, palpable, malgré le propos un peu absurde, un peu fou. Plus que ses aventures de troll, il va nous raconter comment - et pour qui - il s'est mis à traquer celui qui aurait, selon les rumeurs, découvert un remède au sommeil. Frimousse n'a pourtant de véritablement exceptionnel que ces douze heures, douze longues heures de veille que tant de gens lui envient. C'est cela, surtout, qui lui permettra de mener son ENquête, ainsi que son côté un peu obstiné, sa curiosité.
J'ai retrouvé dans les mots de
Yann Bécu un côté littérature du 19ème siècle. Peinture sociale. Critique de l'humain. Ce n'est certes pas un roman moderne, contrairement à ce que pourrait nous faire croire le résumé, mais il possède une véritable qualité littéraire qui m'a plus qu'impressionnée, surtout pour un premier roman. Il me paraît évident que ce livre doit être relu pour être compris, et ceci, pour moi, est une véritable qualité.
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