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EAN : 9782375211076
452 pages
Mix Editions (12/12/2019)
4.6/5   20 notes
Résumé :
La souffrance des uns ne peut exister en dehors du regard des autres.

Des portes closes, des greniers cadenassés, des coups que l’on étouffe, des cris que l’on muselle, des existences que l’on nie. C’est le destin de ces milliers d’êtres qui souffrent de la violence des hommes sans que personne ne leur tende la main. Parce que les autres ne savent pas, ne voient pas. Ou ne veulent ni voir ni savoir.

Ce destin, c’est celui de Raiden – Ra... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Je remercie la maison d'éditions ainsi que Babelio pour cette lecture.

C'est lors d'une masse critique que j'ai eu la chance de pouvoir découvrir ce titre, qui d'ailleurs était le seul que j'avais noté. le résumé me semblait assez fort pour donner un récit qui devait l'être tout autant. en fait, il est plus que cela, mais vous comprendrez en lisant ma chronique en entier. Déjà le livre en lui-même est un beau pavé, avec une couverture à la fois douce et qui représente très bien la majeure partie du livre. Une couverture douce qui montre ce qu'elle veut, mais en faisant défiler les pages, c'est bien autre chose. Comme la façade d'une maison qui parait belle et on peut imaginer le bonheur à l'intérieur, mais la réalité est bien différente. Lorsque la porte est refermée, personne ne peut vraiment savoir ce qui se passe, à l'intérieur. Il suffit parfois de prendre le temps de regarder les gens pour voir que quelque chose ne va pas, mais le nombril est bien trop important pour la majeure partie des personnes et voir la peur, la tristesse ou la violence n'est pas ce qui les intéressent.

Raiden est lié à la Cage, un lieu qui l'aide à expulser sa RAGE, ce qui est également son surnom. Il en a besoin depuis des années de se battre, de donner des coups, de se venger, de tenter le tout pour le tout pour ne plus ressentir cette colère qui ne le lâche plus depuis des années. Son passé n'est pas reluisant, un père qui ne voulait pas d'enfant et qui n'a cessé de le reprocher à sa mère qui a osé avoir Raiden et Noah son petit frère. Alcool pour les parents, drogue au passage, la violence des coups est aussi forte que celle des mots. Les os brisés, les arcades en sang, les bleus, la privation de nourriture, les mots qui n'ont cessés d'entrer dans la tête des deux frères et tout le reste... Des années à survivre dans une "famille" ou plutôt sous un toit qui n'en porte que le nom, des années pour Noah et Raiden à ne compter que sur eux-même. Et puis tout a basculé : oui il y a eu pire en un sens, menant à un choix, un but, un avenir qui a rendu Raiden encore plus amer et surtout plus solitaire que jamais. Si TJ, celui qui l'a mené à la Cage et Milegraw le procureur bientôt à la retraite n'avait pas mis leur nez dans son histoire, où serait-il réellement ?

Suivre ce personnage, c'est entrer dans sa vie, dans ce qu'il a vécu, dans ce qui est son présent peuplé de cauchemars et d'avenir qu'il ne voit pas. Il n'a plus qu'une chance avant de se retrouver en prison et va devoir accepter un poste dans un asile. Lui qui se sait tout sauf fou, va devoir les côtoyer, mais au final il a connu pire, pas vrai ? Et puis la rencontre, celle qui va bouleverser la vie de nombreux personnages en plus de Raiden. Il n'y a pas que lui qui est dans la partie, même s'il est le personnage principal, tous ceux qui l'entourent et avec qui il a un semblant de relation vont voir leur vie changer. Lorsque je dis semblant de relation, je dois bien avouer que l'auteur a su rester dans la logique et ne pas faire devenir Raiden qui a vécu un enfer devenir un bisounours qui adore tout le monde. Il reste avec ses peurs même s'il avance, il ne connait pas l'amour et ne va pas plonger les deux pieds dans une relation amoureuse passionnelle, vu qu'il ne connait pas, ce n'est pas possible. Les étapes ne sont pas brûlées pour lui comme pour les autres et cela fait du bien de ne pas avoir des événements qui seraient de trop.

Bref, revenons à cette rencontre qui va tout chambouler. Un regard, un seul et le lien se fait. Voir l'enfer dans le regard de l'autre, se reconnaitre dans les cauchemars de l'autre, c'est tel un coup de foudre pour un frère, celui qu'il a perdu ou n'a pas connu. Kian ne parle pas/plus depuis des années. C'est un homme/enfant qui a été retrouvé des jours après que son bourreau est décédé. Je n'en dirais pas plus sur son histoire, elle est dure à lire, avec les poings qui se serrent lorsque nous comprenons ce qu'il a subit depuis tout petit jusqu'à maintenant. La manipulation, la folie humaine qui est mise en avant nous montre des êtres totalement prêts à tout pour pervertir et faire subir tout ce qu'ils désirent. Kian qui ne réagit qu'un minimum avec une seule personne du personnel de cet institut. Kian qui est "intrigué" par Raiden lorsqu'il le voit du haut de sa fenêtre. Perçoit-il la colère qui émane de son corps ? La violence qu'il a reçu également ? Peu importe, le lien se fait sans le vouloir et il devient impossible de ne pas plonger dans son désarroi, son traumatisme afin de vouloir l'en sortir. Oui, mais comment ? C'est la question que se pose Raiden une fois qu'il a compris comment fonctionne Kian d'une certaine façon.

C'est une rencontre qui va bouleverser aussi bien Kian qui va sortir de sa bulle, de son univers à son rythme et comprenez bien que ce n'est pas en une journée qu'il va pouvoir accepter certains gestes, que Raiden qui va retrouver son frère en quelque sorte. Ange gardien ou non, il va être celui qui réussira à ouvrir une voie qui semblait perdue pour tous. Les personnages gravitent autour d'eux : ceux qui veulent changer le quotidien de Kian et ceux qui préfèreraient laisser comme avant par peur de le perdre encore plus. Être capable d'aider un autre c'est voir plus loin que son nombril, c'est chercher à comprendre ce qui peut aider l'autre en s'oubliant. L'auteur nous entraine dans un monde qui ne devrait pas exister et pourtant, pourtant cela arrive malheureusement et nous ne le voyons pas toujours, ou trop tard. Les personnages sont bien construits autant par leur mentalité que par leur physique. J'ai adoré suivre le présent de ces protagonistes avec à leurs côtés Lynn, Andy, Lorena, Phil, Suzanne, Melvin, Noah et Lorena et tous les autres qui ont permis l'évolution de chacun d'entre eux.

C'est un récit poignant qui ne m'a absolument pas laissé indifférente. le passé se mêle au présent sans avoir besoin de prévenir "attention nous revenons en arrière", c'est la logique même de comprendre vite et bien tout ce que ces deux-là ont vécu. Les enfers sont différents, mais ils sont bien présents dans leur corps, dans leur mémoire. Si Raiden a réussi à trouver une solution qui n'est pas idéale, Kian a choisi de ne plus apparaitre dans ce monde qui l'a oublié. Une indifférence qui lui a fait énormément de mal, n'étant qu'un objet que l'on prend et que l'on jette à outrance. Des regards détournés, des non-dits, tout ce qui peut exister pour laisser de côté la souffrance dans la douleur sans chercher à comprendre. Un peu de Nora, de Gardini ou de musique pour échapper à son quotidien, tandis que d'autres n'avaient rien de tout cela. La musique est importante dans le récit, elle apaise les douleurs, ces souffrances qui sont dans la tête des patients. Un son, une mélodie, quelques murmures chantonnés, une main qui gratte une guitare, il suffit de peu pour réveiller ce qui est de bon en chacun. Les mots choisis sont poignants apportant le ton mélancolique, ou au contraire l'espoir dans chacun des gestes des acteurs. Pas besoin de rebondissements impensables dans ce récit qui a déjà tout pour lui.

En conclusion, l'histoire est bouleversante. Je ne m'attendais pas à ça, à cette force de l'un pour l'autre, ce partage des enfers pour essayer d'en ressortir plus fort, plus ouvert sans pour autant oublier. Gagner va devenir un but à atteindre, celui de pouvoir redevenir un être humain d'une certaine manière, de laisser les cauchemars dans une boite loin de soi. Se réapproprier son corps, son esprit... Être comme tout le monde ne sera pas possible, cela reviendrait du miracle, mais réussir à enterrer les bourreaux tout en restant dans le cadre de l'institut et de petits à-côté vis-à-vis de Raiden. Une amitié que rien ne pourra balayer au vu du caractère de notre boxeur et c'est tant mieux. Merci pour cette lecture !

http://chroniqueslivresques.eklablog.com/a-la-croisee-des-destins-barjy-l-a210769326

Lien : http://chroniqueslivresques...
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Quand j'ai commencé ce roman et que j'ai vu qu'il abordait le thème de la psychiatrie, j'ai eu un peu peur. Je me suis demandé comment le sujet allait être traité, si j'allais encore tomber sur de la pure psychophobie...

Heureusement, ça n'a pas été le cas. le roman est écrit du point de vue d'un personnage valide et neurotypique et ça se ressent, ça a parfois son lot d'incompréhensions et de réflexions, mais ça reste très réaliste. En ayant le point de vue d'un personnage si peu éduqué à la question et avec un vécu si particulier de ce côté-là, ça permet de mettre en avant son évolution. de faire comprendre des tas de choses à la fois au lectorat et au personnage et j'ai trouvé cette façon de faire très pédagogique, très ingénieuse.
Au final, la psychiatrie et la maladie mentale sont des sujets qui sont abordés avec bienveillance et, pour une fois, les malades mentaux sont montrés comme des être humains. Des êtres humains avec leur personnalité, leurs envies et leur droit d'être aimés. Ayant souvent lu des livres qui ne montrent pas les personnes malades mentales de cette façon, c'est quelque chose que je n'ai pas pu m'empêcher de noter et d'aimer. Ça m'a fait du bien d'enfin voir un livre qui ne diabolise pas les problèmes mentaux.

Après l'appréhension est venu l'amour. Je suis tombé amoureux du livre petit à petit. Amoureux des personnages, particulièrement. J'ai un faible pour les relations fraternelles et la relation qui naît entre les deux personnages principaux en plus du passif de Raiden m'a comblé. J'ai trouvé ça beau, fort, juste. Comme le reste du livre. Chaque personnage avait une puissance particulière. Ses qualités, ses défauts. Tout ce qui faisait que je les adorais ou que je les détestais. Ils étaient tellement humains que je suis persuadé qu'aucun d'eux ne peut laisser de marbre. Je les trouve complexes, profonds, travaillés... leurs émotions sont extrêmement bien retransmises.

On pourrait croire que c'est parce que les sujets abordés sont difficiles, presque insoutenables, que le livre est si bouleversant. En réalité, c'est surtout la plume si particulière de l'autrice qui joue avec nos sentiments. Elle n'a pas peur des mots, elle n'a pas peur de nous les envoyer à la figure quand il faut, mais elle sait aussi manipuler la poésie, et ce mélange de vérités brutes et de beauté délicate est captivant. Ça nous permet de ressentir autant de choses dans les moments tragiques que dans les moments de douceur. J'ai vécu chaque instant avec Raiden et Kian. Je me suis beaucoup insurgé contre l'humanité, évidemment, mais j'ai aussi beaucoup souri face à la pureté de certains coeurs, de certains liens.

Cette insurrection que j'ai ressenti fait également partie des détails que j'ai préférés dans ce roman. Parce que c'est un roman engagé. Un roman qui nous montre la crasse du monde, la cruauté de l'être infâme que peut devenir l'humain. J'ai beaucoup aimé l'intelligence et les nuances des critiques de l'autrice sur le monde. Aveugle, psychophobe, agiste, violent, ce monde dans lequel nous vivons n'est pas pris en pitié. Il est disséqué et nous oblige à ouvrir les yeux sur ce que la plupart des gens refusent de voir. C'est fait avec beaucoup de justesse, même si j'y ai décelé un cri de colère. Un cri du coeur de la part de l'autrice. Comme si elle tentait de faire entendre à l'univers toutes les voix qu'il n'écoute pas.
Et ça, ça m'a beaucoup ému. Parce que malgré ses blessures déchirantes, ce texte est pour moi une ode à l'espoir et à la solidarité. Comme une lumière au bout du tunnel, un petit "je vous vois", "je vous entends", "je vous écoute" envoyé à toutes les victimes. Un rappel qu'elles ne sont pas seules et que, parfois, il ne suffit que d'une main tendue pour que tout devienne plus supportable. Une main tendue méritée par chacun.e d'entre nous. Peu importe qui on est, peu importe nos failles, peu importe le nombre d'erreurs qu'on a faites. Ce livre est pour moi un message d'acceptation de soi, des autres et une exhortation à aller de l'avant et à pardonner au passé. À l'accepter. C'est beau, c'est touchant, et je suis ressorti de cette lecture en me sentant protégé. Écouté. Peut-être même moins fataliste.

Ce roman ne changera pas le monde, mais je suis convaincu qu'il peut aider les personnes qui en ont vécu les pires cauchemars. Et si chacun.e le lisait et en comprenait les messages, cette planète serait sans aucun doute un peu moins sombre.

Je recommande chaudement, attention cependant aux âmes sensibles et aux jeunes lecteurices.
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Raiden Killingan bouillonne de rage et de colère, il en veut à la terre entière et il tente de se défaire de tout ça dans des combats clandestins d'une violence inouïe, dans la Cage, ou il enchaine les victoires et encaisse les gains en s'en fichant, comme il se fiche de tout. Quand il se retrouve une énième fois face au procureur Milegraw, il est furieux de ce que lui impose le magistrat : un stage rémunéré obligatoire de 6 mois à St Gerry Hall, l'hopital psychiatrique de la ville. Ce stage, c'est pour Milegraw une façon d'offrir une dernière chance à Raiden de surmonter les traumatismes qu'il a vécu durant ses 30 premières années, une dernière chance avant de partir à la retraite. Raiden n'a pas vraiment le choix, il ne sait pas encore que ce qui l'attend derrière les portes de l'institut va bouleverser une nouvelle fois sa vie.

St Gerry Hall, aile est, 3ème étage, chambre 14.

Bien qu'il soit adulte, l'occupant de cette chambre est le tristement célèbre enfant du grenier. Quelques mois plus tôt, il a été découvert dans le grenier d'une maison dont l'occupante venait de mourir. Il était affamé, effrayé, traumatisé, muet, plein de cicatrices. Après un passage traumatisant à l'hôpital, pour les blessures physiques les plus visibles, il a fini dans cet institut, où il passe ses journées à regarder par la fenêtre, sans parler, en pyjama, où le personnel le nourrit et s'occupe de lui avec dévotion et beaucoup de patience. Cet homme a passé les 30 dernières années de sa vie, brutalisé, affamé, enfermé dans un grenier, sans mettre un pied dehors... le personnel l'a nommé Kian, personne ne sait d'où il vient, personne ne sait son nom, son histoire, ce qu'il a vécu.

Et quand Raiden fait un remplacement dans l'aile est de l'institut, qu'il entre dans la chambre 14, c'est un petit miracle qui semble se produire. Les regards des deux hommes se croisent, se percutent, semblent trouver une résonance à la douleur, au traumatisme, à l'horreur. Et cette connexion va permettre non seulement à l'équipe un peu atypique de l'institut de trouver un début d'espoir de thérapie pour Kian, mais finalement aussi pour Raiden. Kian qui va petit à petit dévoiler les horreurs qu'il a vécues et qui l'ont fait s'enfermer dans son monde et Raiden qui va devoir faire face à Noah, son jeune frère, à sa culpabilité, à la promesse qu'il lui a faite.

Le roman permet de suivre le très lent éveil de Raiden et de Kian, mais aussi, avec de nombreux flash-backs, de plonger dans l'horreur de leurs passés respectifs. J'ai le coeur serré en pensant à eux, à Noah, à ces années de souffrance, d'indifférence, de silence.

C'est assez paradoxal en fait d'avouer que j'ai adoré ce roman qui montre ce que l'humanité peut avoir de plus ignoble et de plus abject. Mais en même temps, la relation entre Raiden et Kian est tellement belle, tellement forte, tellement magique, tellement porteuse d'espoir. Ils sont entourés d'une équipe absolument formidable, dévouée, pleine de bon sens, prête à faire passer l'instinct avant les protocoles.

Ce roman n'est pas une romance, avec une fin où par miracle tout se répare et où les deux protagonistes partent main dans la main dans le soleil couchant. Ce roman est une histoire d'amour au sens le plus noble et le plus fort du terme et il m'a littéralement retournée. C'est le premier roman de Barjy L. que je lis et ce n'est certainement pas le dernier.
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Difficile d'écrire une chronique lorsqu'on est encore secoué par une lecture qui vous a tordu les tripes, serré le coeur et remué jusqu'à l'âme ! Quand on se trouve encore au seuil de cette chambre 14 qui aura laissé une trace indélébile dans votre esprit ! J'en ai encore des frissons et les larmes aux yeux…

Mon dieu, mais quelle histoire !! Je pleurais déjà à la première page (ou la deuxième mais ça ne fait guère de différence, me direz-vous !) Il faut avouer que le récit déchirant et bouleversant de ces enfances déchiquetées ne laisse pas indifférent. Et l'auteur a su manier sa plume à la perfection, nous plongeant dans les orbes bleues ou vertes, afin que nous puissions lire au fond d'abysses criant leur douleur ou leur rage. Une douleur qui explose à coups de poings ou à coups de silences. Une rage qui brûle et dévaste tout. Et au milieu de ce tourbillon, une lumière qui en entraîne d'autres, jusqu'à ce que le bleu percute le vert, réunissant deux âmes et deux coeurs. Deux souffrances indicibles qui allument une étincelle d'espoir… Deux âmes soeurs à la force inouïe, unies pour essayer de se reconstruire ou, comme le dit si bien l'auteur dans son résumé, se construire autrement.

Ce roman traite d'un sujet grave et terriblement dur. Un récit qui hurle comme autant de cris de tous ces enfants qui souffrent derrière les murs de silence.
Il y a Raiden, Noah, Kian et les autres… Ces enfants du malheur, nés dans une prison de violence. Ces adultes qui, malgré la mort de leurs bourreaux, restent emmurés derrière les horreurs qu'ils ont vécues. Et je dois dire que Barjy a admirablement construit cette histoire intense, qui oscille entre passé et présent, ombre et lumière, désolation et espoir, dégoût et confiance. Une histoire dans laquelle les personnages secondaires, nombreux, ont une place essentielle et un vrai rôle à jouer. C'est ce qui en fait sa force, je crois. Comme si chacun mettait prudemment sa petite pierre à l'édifice pour essayer d'apaiser ces âmes détruites.

Il y a Raiden, Kian, Noah et les autres… Et il y a un procureur, des infirmiers, des médecins, des techniciens de surface… autant de personnages qui apportent de la lumière là où plus un seul rayon n'arrivait à percer. Et c'est magnifique. Émouvant, dramatique et bouleversant. Un sublime et douloureux hommage à toutes les victimes des monstres. Pas ceux dans le placard, non ! Les vrais. Ceux du quotidien. Un père, une mère et tous ceux qui ont fait semblant de ne rien voir…

Il y a Raiden, Kian, Noah et les autres… Et il y a ce récit qui ébauche pas à pas un avenir meilleur. La démarche n'est pas assurée et parfois les personnages trébuchent ou se trompent de chemin. C'est ce qui en fait un récit réaliste, tout en prudence et délicatesse, à la manière de cette magnifique auteure. Mais c'est aussi ce qui le rend si bouleversant et tragique.

Nous sommes le jour d'après et je ressens encore dans mes tripes cet amour infini et pur, cette amitié hors du temps qui s'est épanouie par delà les coups et les traumatismes, portée par un regard infiniment bleu dans lequel s'envolent des nuées d'oiseaux…

Il y avait Raiden, Kian, Noah et les autres… et grâce cette plume merveilleuse, ils resteront à jamais gravés dans mon coeur.
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❤ Coup au coeur ❤

Raiden, presque 30 ans, a fait une promesse à son frère : il vivrait. Mais vit-il ? Non, il survit et pour ça, il a décidé de le faire selon ses règles.
La Cage lui permet d'évacuer sa colère et les combats clandestins lui offre la possibilité de libérer le venin en lui par la brutalité.

Quand il rentre dans La Cage, il devient Rage.
Quand il rentre dans La Cage, il imagine punir son bourreau.
Quand il rentre dans La Cage, il veut mourir.

Mais ce n'est jamais le cas...
Une énième descente de flics et arrestations puis le voilà de nouveau dans le bureau du procureur. Celui-ci s'est pris d'affection pour lui et espère lui offrir une porte de sortie, s'il n'accepte pas il risque la prison. Sa proposition de la dernière chance est de travailler six mois dans un centre psychiatrique. Cette punition pourrait bien être une sorte de rédemption.
St Gerry Hall est un hôpital psychiatrique pour les personnes qui n'ont plus personne, abandonnés, qui n'intéressent personne, des Oubliés quoi.
S'il y a peu de subventions, ce n'est pas le travail qui manque mais tout est fait avec bienveillance et douceur le tout chapeauté par Lynn, une directrice douce et pleine de compassion.

Un des derniers arrivants est Kian, installé dans la Chambre 14, un jeune homme d'une trentaine d'années qui ne parle pas, vit dans son monde. Un monde qu'il s'est créé pour s'évader et se protéger des douleurs et de la faim. Battu et séquestré par sa mère, il est devenu un fantôme dans le grenier qui lui a servi de prison durant toute sa vie.

Raiden est empli de colère et se noie dans la solitude qu'il a décidé de garder comme couverture de survie.
Kian s'est muré dans le silence et rêve de voler pour goûter à la liberté.
Chacun à sa propre Cage.

Rien ne pouvait les sortir de ce cercle infernal hormis le Destin.
Destins brisés par ceux qui devaient les protéger.
Un seul regard et leur Destin se sont liés.
Et si la vie leur a donné des coups, ce fameux Destin a adouci leur vie...

J'aime la façon qu'a Laurence de donner voix ou pensées à chaque personnage même les secondaires. Dans "Les Invisibles", elle nous offrait la possibilité d'ouvrir les yeux sur les oubliés de l'armée, une fois encore elle a ouvert une fenêtre sur ceux qu'on oublie et qui pourtant mérite qu'on soit là pour eux après ce qu'ils ont subi.

Cette histoire ne serre pas seulement le coeur, elle vous le brise. Elle prend aux tripes, on veut juste ouvrir les bras et dire à ces personnes de venir prendre un peu de douceur pour oublier les traumatismes qu'ils ont vécus. Ce roman n'est pas une romance cependant c'est une histoire d'amitié, une reconnaissance, des âmes liées pas la souffrance qui s'appellent.

Y'a toujours des thèmes forts ou douloureux sous les mots de Laurence, mais y'a toujours la lumière qui traverse les nuages.
C'est prenant, ça nous aspire aussi entre présent et souvenirs, on découvre la vie douloureuse des deux hommes et ça nous amoche. L'auteure a toujours su me prendre les émotions avec ses mots, la gorge se serre et les larmes coulent, y'a des plumes comme ça qui nous font tomber amoureux de chaque histoire et encore une fois celle-ci n'y coupe pas...
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Kian vit la voiture se garer dans l'allée. Raiden en sortit côté passager, un autre homme côté conducteur. Celui-ci fit le tour de la voiture, lui serra longuement la main puis s'éloigna vers une autre voiture parquée à quelques mètres. Raiden lui fit un signe de la main puis quand la voiture disparut, il releva la tête vers l'aile Est.

Raiden ne le voyait pas, mais il savait que Kian était là. Il le sentait. Il rentra. Il avait besoin de dormir, de se reposer. Besoin de réfléchir aussi. Il lui fallait trouver un moyen de communiquer avec Kian autre que les regards et les non-dits. Il voulait briser les murs de sa prison comme Kian avait brisé les siens, même si ceux de sa douleur muette devaient être bien plus épais et hauts. Comment pénétrer dans ce monde construit par un être perdu en son sein depuis trois décennies ? Raiden avait eu beau fouiller sur le net, le cas de Kian restait unique dans les annales. Cela ne l'aidait pas.
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Il aurait voulu lui dire que maintenant tout était fini. Qu'il était libre et qu'il pouvait enfin vivre pour lui. Mais quand il croisa le regard de son ainé avant de sombrer à jamais, il comprit son erreur. Il venait de tuer Raiden. Parce que sa vie, c'était lui et que, sans lui, elle n'avait plus de raison d'être.
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Mais comment lui dire qu'il avait peur ? Que pour lui ce monde d'où il venait n'était fait que de violence et de haine ? Comment lui dire qu'il ne savait pas comment sortir de sa réalité pour se perdre dans la leur ? Dans la sienne. Qu'il ne comprenait pas ce que Raiden lui disait, que les mots qu'il prononçait n'avaient pas de sens pour lui, parce qu'il ne les avait jamais entendu auparavant. Qu'il ne comprenait pas cette chaleur qui naissait au fond de lui, cette envie de pleurer, lui qui ne l'avais plus fait depuis de si longues années, lui qui ne se souvenait même plus de sa dernière larme versée.
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Raiden s'écarta et ferma la porte. Il lui fit face et, d'un geste lent, devenu si commun entre eux, posa sa main sur la joue de Kian.

— Viens, on va se regarder l'automne par la fenêtre.
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Appuyé sur le capot de sa voiture, il fixa le troisième. Raiden savait qu'il était là. C'était devenu un rituel. Un rendez-vous sans horloge... Une respiration entre eux.
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