::: pour l'opération masse critique ::: merci Babelio ::: merci Tristram ::: merci
Thomas André :::
On dirait le sud : pins parasol, cigales, piscine, tennis club.
C'est le dix-septième été de Marius, un garçon énigmatique venu d'on ne sait où passer ses vacances avec on ne sait pas très bien qui (au début).
La tension tranquille qui sous-tend cet excellent premier roman de
Thomas André nourrit sa singularité :
L'Avantage n'a rien (ou pas que) d'un thriller psychologique à la
Patricia Highsmith, ou Joncour (période U.V.), mais rien non plus d'un guide de préparation mentale pour sportifs !
Le narrateur est un jeune joueur de tennis amateur engagé dans un tournoi de plage.
Pas assez « dans le court », il perd au premier tour contre un adulte qui joue trop vite pour lui.
Ça ne l'embête pas plus que ça : il va pouvoir traîner au bord de la piscine de ses amis et les suivre dans leurs virées nocturnes bien arrosées.
Pourtant quand la juge-arbitre lui impose de remplacer un joueur forfait au deuxième tour, il n'ose pas refuser.
La dramaturgie exceptionnelle de
L'Avantage réside d'abord dans la succession des matchs de Marius, dans sa progression dans le tournoi, tranquille, méthodique et concentré, comme détaché. Un point, un jeu, un set, un match, un après l'autre. Six ou sept confrontations... quand on aime, on ne compte pas ; plus, ce serait de la gourmandise !
« On est comme ça, nous les joueurs de tennis, on croit toujours que nos souvenirs de matchs intéressent les gens. »
Je m'aperçois en recopiant cette citation, qu'elle est écrite au présent alors que la narration du roman est presque toute entière à la première personne du passé composé à l'exception des dialogues peu nombreux.
Après l'avoir appréciée pour son réalisme burlesque à la première lecture, je la trouve maintenant intrigante : elle ne sonne pas comme la réflexion que se serait faite un Marius de dix-sept ans...
Il y aurait-il un autre Marius hors texte, adulte, qui se revoit jouer, qui raconte, écrit peut-être ? mais à qui ? et quand ?
Pas à son père à en tout cas ; il sait déjà qu'il lui dira en le retrouvant « qu'il n'y a rien à raconter ».
Un père absent auquel il a peu pensé pendant ce séjour, sauf pour essayer de ne pas oublier de lui envoyer une carte postale, à Lens.
On saura à peine que la famille chez qui il a été invité à passer l'été le connait depuis l'enfance, quand les garçons des deux foyers s'entraînaient ensemble, mais que l'année précédente Marius n'était pas venu... que son père a quitté son travail pour un poste moins exigeant physiquement, sans précision. Rien sur sa mère.
C'est tout.
Son copain Cédric est plus âgé, hâbleur et casse-cou, mais il a une soeur en première année de fac qui ne laisse pas Marius insensible. Quant aux parents-hôtes, ils sont d'un grand laxisme sur les horaires et d'une discrétion tout à fait enviable !
Tout à coup j'ai l'air d'en savoir long sur Marius, contrairement à ce que je disais au début, mais je me vante.
L'auteur n'est vraiment pas prodigue en indices sur l'histoire de son personnage principal avant cet été-là.
C'est ce qui fait le charme étrange de
L'Avantage, ce qui fait naître et excite la curiosité, l'envie de deviner, jusqu'à la dernière balle jouée.
Je sais aussi que si Marius n'a pas trop le sens de l'orientation, il a celui, très développé de l'observation : l'insecte qui se pose sur son banc au changement de côté, les fourmis sur la margelle de la piscine, la lente réapparition de la saucisse de hot-dog dans l'eau bouillante !
Il possède également un sens aigu de l'interprétation des comportements de ses adversaires sur le terrain, un peu moins de ceux des filles, mais il apprend.
Marius est touchant dans sa solitude et sa recherche de lui-même (il n'y a encore que sur le court qu'il se connaisse un peu), ne faisant confiance à personne, se méfiant de ceux qui, même avec tact, cherchent à l'aider : une juge-arbitre bourrue mais maternelle, un spectateur fidèle et discret.
Comme son héros,
Thomas André n'en fait jamais trop. Juste ce qu'il faut, mais à fond.
Cette apparente retenue dans la construction comme dans l'écriture crée une atmosphère singulière très excitante qu'on a envie de retrouver au plus vite dans un second roman.
Lien :
https://tillybayardrichard.t..