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Citations de Salman Rushdie (698)


Je me suis toujours souvenu qu’en France, au siècle des Lumières, l’ennemi à combattre au nom de la liberté était moins l’État que l’Église. L’Église catholique avec son arsenal – le délit de blasphème, l’anathème, l’excommunication, mais aussi ses véritables instruments de torture entre les mains de l’Inquisition – s’ingéniait à imposer à la pensée des limites strictes : Jusque-là et pas plus loin. Écrivains et philosophes des Lumières s’employaient à défier cette autorité et à briser ces restrictions. De ce combat naquirent les idées que Thomas Paine apporta en Amérique et qui constituent la base de ses essais, Le sens commun et La crise américaine, qui ont inspiré le mouvement d’indépendance, les Pères fondateurs et le concept moderne des droits de l’homme.
En Inde, à la suite du bain de sang provoqué par les massacres de la Partition qui se sont répandus dans tout le sous-continent au moment où le pays se libérait de la tutelle britannique et où les États de l’Inde et du Pakistan furent créés – des hindous massacrés par les musulmans, des musulmans par des hindous, entre un et deux millions de personnes assassinées –, un autre groupe de pères fondateurs, mené par Mahatma Gandhi et Jawaharlal Nehru, ont décidé que le seul moyen d’assurer la paix en Inde était d’écarter la religion de la sphère publique. La nouvelle Constitution de l’Inde fut donc totalement laïque dans sa formulation comme dans ses intentions et cela a duré jusqu’à présent, jusqu’à ce que le gouvernement actuel cherche à saper ces fondations séculaires, à discréditer ces fondateurs et à créer un État ouvertement confessionnel à majorité hindoue.
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Selon moi, la croyance privée de quelqu’un ne regarde personne d’autre que l’individu concerné. Je n’ai aucun problème avec la religion dès lors qu’elle occupe la sphère privée et ne cherche pas à imposer ses valeurs aux autres. Mais lorsque la religion devient politique, quand elle devient une arme, c’est l’affaire de tous en raison de son pouvoir de nuisance.
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Traiter d’une attaque meurtrière est une chose que je ne sais pas faire. Transformer ceci en cela en fait une chose que je suis capable d’assumer. C’est du moins la théorie. Un livre sur une tentative d’assassinat devient pour le presque-assassiné le moyen de reprendre le contrôle sur l’événement.
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Dans The Faith of a Nationalist, Bertrand Russell dit ceci : “Les gens tendent à aligner leurs croyances avec leurs passions. Les hommes cruels croient en un dieu cruel et prennent prétexte de leurs croyances pour excuser leur cruauté. Tandis que les bonnes personnes croient en un dieu de bonté, et elles auraient été bonnes de toute façon.” Cela paraît convaincant, mais dans votre cas, mon cher A., ce n’est pas tout à fait pertinent. Quel âge aviez-vous quand vous êtes allé voir votre père au Liban ? Dix-neuf ans ? Un garçon solitaire qui avait vécu sans père pendant la plus grande partie de sa vie, un garçon avec un vide en lui, facile à influencer, facile à modeler et à la recherche d’une voie et d’un modèle, mais pas un garçon cruel. Un “brave garçon qui a bon cœur et n’aurait fait de mal à personne”. Et donc la question se pose : un tel enfant, à peine adulte, peut-il se voir enseigner la cruauté ? La cruauté était-elle déjà en lui, dans quelque recoin intime, attendant les mots qui allaient la libérer ? Ou a-t-elle pu être véritablement semée dans le sol vierge de votre caractère pas encore formé, y prendre racine et s’épanouir ? Ceux qui vous connaissaient ont été surpris de votre geste. Le meurtrier en vous n’avait pas encore montré son visage. Ce sol vierge a eu besoin de quatre années d’Imam Yutubi pour devenir ce qu’il est, ce que vous êtes devenu.
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Ma victoire c’était de vivre. Mais le sens que le couteau a donné à ma vie était ma défaite.
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Quand les croyants estiment que leurs croyances doivent être imposées à ceux qui ne les partagent pas, ou quand ils pensent qu’il faudrait empêcher les non-croyants d’exprimer avec vigueur ou avec humour leur incroyance, il y a un problème.
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Je ne sais pas exactement combien de personnes sont accourues prêter main-forte mais depuis ma position sur le sol, j'étais conscient d'une masse de corps qui luttaient pour plaquer mon aspirant assassin même s'il était jeune, vigoureux, qu'il brandissait un couteau ensanglanté et qu'il n'était pas facile à maîtriser. Sans Henry et le public, je ne serais pas assis ici en train d'écrire ces mots.
Je n'ai pas vu leurs visages et je ne connais pas leurs noms mais ils furent les premiers à me sauver la vie.
Ainsi lors de cette matinée à Chautauqua, j'ai connu à la fois le pire et le meilleur de la nature humaine, presque simultanément. C'est ce qui caractérise notre espèce. Nous avons en nous à la fois la possibilité d'assassiner un vieil étranger pratiquement sans raison, la capacité du lago de Shakespeare que Coleridge qualifie de « malignité sans raison », et nous avons aussi l'antidote à cette maladie, le courage, l'altruisme, la volonté de risquer sa vie pour venir au secours de ce vieil étranger gisant au sol.
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Dans la mort, nous sommes tous des gens d'hier, à jamais piégés dans le passé. C'était dans cette cage que le couteau voulait m'enfermer. Non pas le futur. Le retour du passé qui cherche à m'attirer vers lui.
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À dix heures quarante-cinq le 12 août 2022, par un vendredi matin ensoleillé dans le nord de l’État de New York, j’ai été attaqué et j’ai failli être assassiné par un jeune homme armé d’un couteau juste après être monté sur scène dans l’amphithéâtre de Chautauqua pour y parler de l’importance de préserver la sécurité des écrivains.

J’étais accompagné de Henry Reese, cofondateur avec son épouse Diane Samuels du projet de Pittsburgh Ville Refuge, qui donne asile à un certain nombre d’écrivains en danger dans leur propre pays. Henry et moi étions venus à Chautauqua parler de la création en Amérique de lieux sûrs destinés à des écrivains venus d’ailleurs et de mon engagement dès les prémices de ce projet. Cela faisait partie d’un programme d’une semaine de manifestations organisées par l’Institution de Chautauqua intitulé « Plus qu’un refuge. Redéfinir l’accueil américain ».

Nous n’avons jamais eu cette conversation. Et je n’allais pas tarder à découvrir que, ce jour-là, l’amphithéâtre n’était pas pour moi un lieu sûr.

Je revois encore l’instant au ralenti. Mes yeux suivent la course de l’homme qui jaillit du public et vient vers moi. Je distingue chaque pas de sa course effrénée. Je me vois me lever et me tourner vers lui. (Je continue à lui faire face. Je ne lui ai jamais tourné le dos. Je n’ai aucune blessure dans le dos.) Je lève la main gauche dans un geste d’autodéfense. Il y plonge le couteau.
Ensuite je reçois de nombreux coups, au cou, à la poitrine, à l’œil, partout. Je sens que mes jambes me lâchent et je m’écroule.
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Reconnaître les limites de son savoir ne fait qu'accroître la confiance des individus dans ce que l'on affirme.
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En tous les cas, c’étaient des gens qui ne se penchaient pas beaucoup sur leur passé. Ils préféraient, comme les habitants de la forêt d’Aranyani, vivre entièrement dans le présent sans prêter grand intérêt à ce qui s’était passé auparavant et s’il leur fallait penser à un autre jour que le jour présent, ils choisissaient de penser au lendemain. Cela faisait de Bisnaga un endroit dynamique, doté d’une immense énergie tournée vers le futur mais aussi un endroit qui souffrait du problème que connaissent tous les amnésiques : se détourner de l’histoire, c’est rendre possible une répétition cyclique de ses crimes.
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(…) elle allait devoir persuader un grand nombre d’entre eux que le récit cultivé, bienveillant, raffiné qu’elle proposait valait mieux que le récit officiel, étroit, sectaire et, selon elle, barbare, qui avait cours. Il n’était pas du tout certain que les gens allaient choisir le raffinement contre la barbarie. La ligne du parti concernant les adeptes des autres religions – nous sommes les bons et ils sont les méchants – avait une sorte de limpidité contagieuse. Tout comme l’idée que manifester des désaccords revenait à être un mauvais patriote. Si on leur offrait le choix entre penser par eux-mêmes ou suivre aveuglément les chefs, bien des gens choisiraient l’aveuglement contre la lucidité surtout quand l’empire était prospère, qu’ils avaient de quoi manger sur leur table et de l’argent dans les poches. Tout le monde ne souhaitait pas réfléchir, préférant manger et dépenser. Tout le monde ne voulait pas aimer ses voisins. Certains préféraient la haine. Il y aurait des résistances.
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Son programme avait la caractéristique inhabituelle d’aller de l’avant en regardant en arrière, en d’autres termes, il voulait que le futur ressemble à ce qu’avait été le passé et transformait ainsi la nostalgie en une nouvelle sorte d’idée radicale selon laquelle les termes de “en arrière” et “en avant” devenaient synonymes plutôt que contraires et décrivaient le même mouvement dans la même direction.
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(…) Pampa apprit la leçon que tout créateur devrait connaître, y compris Dieu. Une fois que vous avez créé vos personnages, vous êtes lié par leurs choix. Vous ne pouvez plus les refaire en fonction de vos désirs. Ils sont ce qu’ils sont et ils feront ce qu’ils voudront. Cela s’appelle le “libre arbitre”. Elle ne pouvait pas les transformer s’ils ne voulaient pas l’être.
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Disons tout simplement que Grimus possède la clé d’une découverte absolument prodigieuse, reprit Virgil un peu plus tard. Voilà : nous vivons dans une dimension parmi une infinité d’autres. Et accepter la réalité de ces Dimensions implique qu’il nous faut entièrement réviser nos idées sur nous-mêmes et sur la nature de notre univers. Donc, réécrire le Grand Livre des Lois depuis le début. Voici la question qu’on doit se poser : peut-on accuser la Connaissance d’être trop grande ? Si quelqu’un fait une découverte extraordinaire mais dont on ne peut pas contrôler les effets, doit-il essayer de la détruire ou considérer que les intérêts de la science l’emportent sur la société et même sur la conservation de la race ? Vaut-il mieux mourir en ayant eu la connaissance, ou ne rien avoir connu ? Question fort délicate… et grave.
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Salman Rushdie
Nous nous croyions, ma génération, tolérants et progressistes, et nous vous laissons un monde intolérant et rétrograde. Mais le monde est un lieu plein de résilience et sa beauté est toujours époustouflante, son potentiel toujours étonnant ; quant à la pagaille que nous avons provoquée, vous pouvez y remédier et je pense que vous allez le faire. Je soupçonne que vous êtes meilleurs que nous, plus attentifs au sort de la planète, moins sectaires, plus tolérants, et vos idéaux pourraient bien résister mieux que les nôtres.
Ne vous y trompez pas. Vous pouvez changer les choses. Ne croyez pas ceux qui vous disent le contraire. Voici le moyen d’y arriver. Remettez tout en cause. Ne tenez rien pour acquis. Discutez toutes les idées reçues. Ne respectez pas ce qui ne mérite pas le respect. Donnez votre avis. Ne vous censurez pas. Servez-vous de votre imagination. Et proclamez ce qu’elle vous dit de proclamer.
Vous avez reçu ici tous les outils nécessaires grâce à votre éducation sur ce magnifique campus. Servez-vous-en. Ce sont les armes de l’esprit. Pensez par vous-mêmes et ne laissez pas votre esprit suivre des rails posés par quelqu’un d’autre. Nous sommes des animaux parlants. Nous sommes des animaux rêveurs. Rêvez, parlez, réinventez le monde.

(extrait du discours prononcé par Salman Rushdie à l’adresse des étudiants lors de la cérémonie de remise des diplômes à l’Université d’Emory en 2015)
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Il y avait certaines idées sur lesquelles il avait vécu presque sans le savoir. La liberté artistique avait été l'air qu'il respirait et, comme il en disposait en abondance, il n'avait pas été nécessaire de souligner l'importance d'avoir cet air à respirer. Mais des gens avaient entrepris de fermer l'arrivée d'air et il devenait dès l'instant très urgent de dénoncer cet acte.
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Effrayante chose qu'une métamorphose. Les révolutions finissent par tuer plus de gens que les régimes qu'elles ont renversés. Le changement ne vaut pas la tranquillité.
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"J'ai lu un jour dans un livre que, si vous survolez la terre et que vous regardez vers le bas, vous ne voyez pas de frontières. Telle est mon attitude. Je suis un type de l'absence des frontières et favorable aux vols en altitude." Telle est l'éthique secrète de SPI. Des types qui volaient haut et ignoraient les frontières.
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Pour comprendre une seule existence, il nous faut avaler le monde entier.
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