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Citations de Henri Barbusse (308)


Contre vous et votre grand intérêt général, qui se confond en effet exactement , vous l'avez entrevu, avec la justice, il n'y a pas que les brandisseurs de sabres, les profiteurs et les tripoteurs. Il n'y a pas que les monstrueux intéressés financiers, grands et petits faiseurs d'affaires, cuirassés dans leurs banques ou leurs maisons qui vivent de la guerre, et en vivent en paix pendant la guerre….
Il y a avec eux tous les prêtres, qui cherchent à vous exciter et à vous endormir, pour que rien ne change, avec la morphine de leur paradis.
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Sur le terrain vague, sale et malade, où l'herbe desséchée s'envase dans du cirage, s'alignent des morts. On les transporte là lorsqu'on en a vidé les tranchées ou la plaine, pendant la nuit. Ils attendent — quelques-uns depuis longtemps — d'être nocturnement amenés aux cimetières de l'arrière.
On s'approche d'eux doucement. Ils sont serrés les uns contre les autres ; chacun ébauche avec les bras ou les jambes un geste pétrifié d'agonie différent. Il en est qui montrent des faces demi-moisies, la peau rouillée, jaune avec des points noirs. Plusieurs ont la figure complètement noircie, goudronnée, les lèvres tuméfiées et énormes : des têtes de nègres soufflées en baudruche. Entre deux corps, sortant confusément de l'un ou de l'autre, un poignet coupé et terminé par une boule de filaments.
D'autres sont des larves informes, souillées, d'où pointent de vagues objets d'équipement ou des morceaux d'os. Plus loin, on a transporté un cadavre dans un état tel qu'on a dû, pour ne pas le perdre en chemin, l'entasser dans un grillage de fil de fer qu'on a fixé ensuite aux deux extrémités d'un pieu. Il a été ainsi porté en boule dans ce hamac métallique, et déposé là. On ne distingue ni le haut ni le bas de ce corps ; dans le tas qu'il forme, seule se reconnaît la poche béante d'un pantalon. On voit un insecte qui en sort et y rentre.

Chapitre 12 : Le portique.
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Honte à la gloire militaire, honte aux armées, honte au métier de soldat, qui change les hommes tour à tour en stupides victimes et en ignobles bourreaux.

Chapitre 20 : Le feu.
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— On est toujours, dit Bertrand, l'embusqué de quelqu'un.
— Ça c'est vrai : n'importe comment tu t'appelles, tu trouves toujours, toujours, moins crapule et plus crapule que toi.

Chapitre 9 : La grande colère.
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... Elle est si peinturlurée, qu'on ne sait jamais si c'est elle ou son portrait...
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Ne plus s'aimer, c'est pire que de se haïr
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- Mais les peuples, c'est nous !
Celui qui avait dit cela me regardait, m'interrogeait.
- Oui, lui dis-je, oui, mon vieux frère, c'est vrai ! C'est avec nous seulement qu'on fait les batailles. C'est nous, la matière de la guerre. La guerre n'est composée que de la chair et des âmes des simples soldats. C'est nous qui formons les plaines de morts et les fleuves de sang, nous tous - dont chacun est invisible et silencieux à cause de l'immensité de notre nombre. Les villes vidées, les villages détruits, c'est le désert de nous. Oui, c'est nous tous et c'est nous tout entiers.
-Oui, c'est vrai. C'est les peuples qui sont la guerre ; sans eux, il n'y aurait rien, rien que quelques criailleries, de loin. Mais c'est pas eux qui la décident. C'est les maîtres qui les dirigent.
- Les peuples luttent aujourd'hui pour n'avoir plus de maîtres qui les dirigent. Cette guerre, c'est comme la Révolution française qui continue.
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Ce ne sont pas des soldats : ce sont des hommes. Ce ne sont pas des aventuriers, des guerriers, faits pour la boucherie humaine - bouchers ou bétail. Ce sont des laboureurs et des ouvriers qu'on reconnaît dans leurs uniformes. Ce sont des civils déracinés. Il sont prêts. Ils attendent le signal de la mort et du meurtre ; mais on voit, en contemplant leurs figures entre les rayons verticaux des baïonnettes, que ce sont simplement des hommes.
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On discerne des fragments de lignes formées de ces points humains qui, sorties des raies creuses, bougent sur la plaine à la face de l'horrible ciel déchaîné. On a peine à croire que chacune de ces taches minuscules est un être de chair frissonnante et fragile, infiniment désarmé dans l'espace, et qui est plein d'une pensée profonde, plein de longs souvenirs et plein d'une foule d'images ; on est ébloui par ce poudroiement d'hommes aussi petits que les étoiles du ciel.
Pauvres semblables, pauvres inconnus, c'est à votre tour de donner ! Une autre fois, ce sera le nôtre. A nous demain, peut-être, de sentir les cieux éclater sur nos têtes ou la terre s'ouvrir sous nos pieds, d'être assaillis par l'armée prodigieuse des projectiles, et d'être balayés par des souffles d'ouragan cent mille fois plus fort que l'ouragan.
On nous pousse dans les abris d'arrière. A nos yeux, le champ de la mort s'éteint. A nos oreilles, le tonnerre s'assourdit sur l'enclume formidable des nuages. Le bruit d'universelle destruction fait silence. L'escouade s'enveloppe égoïstement des bruits familiers de la vie, s'enfonce dans la petitesse caressante des abris.
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Nous avons eu de mauvais jours, des nuits tragiques, dans le froid, dans l'eau et la boue. Maintenant, bien que ce soit encore l'hiver, une première belle matinée nous apprend et nous convainc qu'il va y avoir bientôt, encore une fois, le printemps. Déjà le haut de la tranchée s'est ornée d'herbe vert tendre et il y a, dans les frissons nouveau-nés de cette herbe, des fleurs qui s'éveillent. C'en sera fini des jours rapetissés et étroits. Le printemps vient d'en haut et d'en bas. Nous respirons à coeur joie, nous sommes soulevés. Oui, les mauvais jours vont fini. La guerre aussi finira, que diable ! Et elle finira sans doute dans cette belle saison qui vient et qui déjà nous éclaire et commence à nous caresser avec sa brise.
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Tac ! Tac ! Pan ! Les coups de fusil, la canonnade. Au-dessus de nous, partout, ça crépite ou ça roule, par longues rafales ou par coups séparés. Le sombre et flamboyant orage ne cesse jamais, jamais. Depuis plus de quinze mois, depuis cinq cents jours, en ce lieu du monde où nous sommes, la fusillade et le bombardement ne se sont pas arrêtés du matin au soir et du soir au matin. On est enterré au fond d'un éternel champ de bataille ; mais comme le tic-tac des horloges de nos maisons, aux temps d'autrefois, dans le passé quasi légendaire, on n'entend cela que lorsqu'on écoute.
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"Deux armées aux prises, c'est une grande armée qui se suicide"
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Dans la trêve désolée de cette matinée, ces hommes qui
avaient été tenaillés par la fatigue, fouettés par la pluie,
bouleversés par toute une nuit de tonnerre, ces rescapés des
volcans et de l'inondation entrevoyaient à quel point la guerre,
aussi hideuse au moral qu'au physique, non seulement viole le
bon sens, avilit les grandes idées, commande tous les crimes mais ils se rappelaient combien elle avait développé en eux et
autour d'eux tous les mauvais instincts sans en excepter un
seul : la méchanceté jusqu'au sadisme, l'égoïsme jusqu'à la
férocité, le besoin de jouir jusqu'à la folie.
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Cette chambre, on la retrouve à chaque pas. C'est la chambre de tout le monde...Elle est perdue au milieu des chambres semblables, comme de la lumière dans le ciel, comme un jour dans les jours, comme moi partout.
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Nous nous retrouverons là- bas, aux vacances. Les jours où nous nous reverrons avant de mourir, nous pourrions les compter...si nous osions.
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Et moi ? Moi, je suis un homme comme les autres, de même que ce soir est un soir comme les autres.
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La chambre est usée; il semble qu'on y soit déjà infiniment venu....le tapis laisse voir la corde : il a été piétiné, de jour en jour, par une foule.....le marbre de la cheminée s'est adouci aux angles. Au contact des hommes, les choses s'effacent, avec une lenteur désespérante. Elles s'obscurissent aussi. Peu à peu, le plafond s'est assombri comme un ciel d'orage.
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Si ces hommes sont heureux, malgré tout, au sortir de l'enfer, c'est que, justement, ils en sortent. Ils reviennent, ils sont sauvés. Une fois de plus, la mort, qui était là, les a épargnés. Le tour de service fait que chaque compagnie est en avant toutes les six semaines ! Six semaines ! Les soldats de la guerre ont, pour les grandes et les petites choses, une philosophie d'enfant : ils ne regardent jamais loin ni autour d'eux, ni devant eux. Ils pensent à peu près au jour le jour. Aujourd'hui, chacun de ceux-là est sûr de vivre encore un bout de temps.
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Je me soulève à demi comme sur un champ de bataille. Je contemple encore une fois ces créatures qui ont roulé ici l'une sur l'autre parmi les régions et les événements. Je les regarde tous, enfoncés dans le gouffre d'inertie et d'oubli, au bord duquel quelques-uns semblent se cramponner encore, avec leurs préoccupations pitoyables, avec leurs instincts d'enfants et leur ignorance d'esclaves.
L'ivresse du sommeil me gagne. Mais je me rappelle ce qu'ils ont fait et ce qu'ils feront. Et devant cette profonde vision de pauvre nuit humaine qui remplit cette caverne sous son linceul de ténèbres, je rêve à je ne sais quelle grande lumière.
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Je me suis levé, j'erre dans la chambre. Qu'est-ce que je suis, qu'est-ce que je suis? Ah, il faut, il faut que je réponde à cette question parce qu'une autre y est suspendue comme une menace: qu'est-ce qu'il va advenir de moi!
En face du grand miroir qui est debout sur la cheminée, je fixe mon image, je cherche en moi ce que je pourrais répondre à ma petitesse. Si je ne peux pas m'en évader, je suis perdu... Suis-je le peu que je parais être, suis-je immobilisé et étouffé dans cette chambre comme dans un cercueil trop large?
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