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EAN : 9782072992940
64 pages
Gallimard (24/03/2022)
4.18/5   28 notes
Résumé :
"Allons-nous enfin, dans un cadre républicain, affronter ensemble le bilan scientifique, éthique et politique de deux ans de crise sanitaire ?" Barbara Stiegler et François AllaLe 17 mars 2020, le confinement était décrété sur tout le territoire national, ouvrant une longue période de suspension de la vie démocratique au nom du risque pandémique. Pour les deux auteurs de cet essai, philosophe et praticien de santé publique, cette opposition entre santé et liberté, i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Une chercheuse-actrice en santé publique et un philosophe esquissent un bilan scientifique, éthique et politique de deux ans de crise sanitaire là où la guerre en Ukraine a éclipsé la moindre velléité de tirer les leçons d'un choc sociétal.
La grande faiblesse de l'approche pluridisciplinaire (groupe de travail constitué de connaisseurs des sciences sociales et de praticiens hospitaliers et de soignants) réside dans le refus de dessiner "le monde d'après", laissant à la conscience de chacun le soin de reprendre sa place dans le cours du temps.
Hormis ce bémol, le contre-récit de Barbara Stiegler & François Alla observe l'avènement d'un nouveau libéralisme autoritaire, fossoyeur de la démocratie sanitaire. La France a basculé dans un régime d'exception, - confinement généralisé, pass sanitaire, isolement des personnages âgées, stigmatisation des réfractaires à la vaccination, appel à la dénonciation sur la radio jeune Skyrock -, au nom de l'intérêt général, en faisant l'impasse sur une application ciblée des mesures sanitaires.
Du coup, les autorités ont fracturé la population, cultivé un discours manichéen binaire : pour et contre, ami/ennemi, antivax = provirus, multipliant les contre-vérités notamment sur l'efficacité vaccinale. Exit la rationalité scientifique et le raisonnement médical, place au jugement moral. Les non vaccinés minent la réussite du plan global, ce sont des emmerdeurs.
Les associations, les médecins, les groupements citoyens ont été mis sur la touche; les droits des patients, entre autres celui à une information lui permettant un consentement libre et éclairé, deviennent devoirs sous l'emprise d'une fabrique du consentement forcé. de toute façon, la population est inapte à décider par elle-même, n'est-il pas...
La critique porte, étayée de nombreuses références, réquisitoire implacable d'une politique du tout ou rien, solution simpliste et réductrice au lieu de penser la santé publique en termes relationnels, ciblés et proportionnés.
Nos gouvernants ont oublié que la santé est d'abord un fait social.

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C'est le deuxième « Tract Gallimard » de Barbara Stiegler sur le Covid. Je n'ai pas lu le premier. Celui-ci, écrit en collaboration avec François Alla, revient sur la manière dont cette pandémie a été gérée en la comparant aux avancées qui avaient été accomplies en matière de santé publique depuis un demi-siècle.

Rappelant les termes de la conférence d'Otawa de 1986 qui, par la chartre qui en a découlé, affirmait le caractère central des libertés pour la santé elle-même, l'autonomie des population et leur capacité d'action, les collectifs et les associations (de patients entre autres) étant reconnus comme un levier fondamental de la la santé publique, ce texte est une mise en perspective du dramatique recul et de la régression opérée pendant la pandémie Covid.

L'exemple concret de la pandémie du SIDA, traitée à l'époque de son pic épidémique d'une manière judicieuse par les autorités sanitaires (national et international), illustre cette régression. Pour le SIDA, ce sont les groupes d'acteurs et les communautés de patients qui, de concert avec le corps médical, ont permis de faire rimer santé et liberté, et d'obtenir des résultats spectaculaires en matière de prévention. S'est opéré à cette occasion un partage du savoir et du pouvoir entre une jeune génération de médecins, les malades et les associations luttant contre l'épidémie.

Décrivant ensuite avec précision la montée en puissance de l'autoritarisme et de l'infantilisation de la population, des décisions autocratiques délétères (confinement, couvre-feu, pass sanitaire puis vaccinal) qui ont eu des conséquences dramatiques pour la santé mentale et morale de tant de personnes, et ont fini par diviser la population entre les bons sujets et les déviants, les deux auteurs dressent un tableau sombre, hélas exact, de cet enterrement de la chartre d'Ottawa et de la loi Kouchner de 2002.

En particulier, les auteurs reviennent sur la distinction absolument fondamentale faite par Richard Horton dans le Lancet entre pandémie et syndémie. Prendre en otage la population dans son ensemble alors que le virus tuait seulement certaines catégories de personnes (vite bien identifiées et minoritaires, mais qui ne seront pas prises pour autant plus en considération) restera l'erreur majeure du traitement de cette épidémie, dont les chercheurs commencent tout juste à dévoiler les errements qui ont fait tant de mal à notre démocratie.
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Les auteurs sont respectivement philosophe et médecin, même si clairement, la philosophie prend le pas sur la médecine. Les auteurs font une démonstration intéressante sur l'opposition entre liberté et santé et démontrent au contraire, avec l'exemple de l'épidémie de SIDA, que la santé n'a pu se faire qu'au prix de la liberté d'actions des groupes. Leur thèse autour de la « défaite de la santé publique » par égalitarisme républicain est assez convaincante et les 50 premières pages de l'opuscule, en partant notamment de la charte d'Ottawa et de l'histoire de la santé publique est intéressante. Malheureusement, par la suite, les auteurs à force de vouloir trop démontrer partent un peu dans l'invective. Car ils oublient que l'épidémie de SIDA était pilotée d'abord par une communauté, pas celle du COVID. Ils oublient aussi que la santé publique a toujours été sinistrée en France (confer l'état de la médecine scolaire et du travail en France) et que l'épidémie de COVID n'a fait que révéler des éléments de notre système. Notre culture française est avant tout institutionnelle, sanitaire, hospitalière, autrement dit, étriquée (la santé c'est le soin pas le sport par exemple), curative (la santé c'est être malade avant tout) et étatique (l'hôpital pilote du curatif). Dommage qu'ils n'aient pas pris le temps de prendre un peu de recul pour le démontrer aussi. Mais un ouvrage vivifiant qui va me servir de base au futur devoir que je vais donner à mes étudiants en Master 2 de santé…
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" NON, tu n'es pas antivax, tu es provirus"
Whaou, dire que je suis passée passé à côté de tout cela ...
Une lecture vivifiante qui montre les dessous propagandistes et ultra libéraux, des politiques qui ont géré la "syndémie" de la COVID 19.

Aux heures critiques qui nous attendent face au chaos climatiques, ce tract est une mise en gare de comment nos gouvernants peuvent diviser des familles et des communautés, faisant des autres les ennemis intérieurs.
Pour les plus grands bénéfices "sonnante et trébuchants" de quelques uns.
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critiques presse (1)
LesInrocks
24 mars 2022
La philosophe Barbara Stiegler et le professeur en santé publique François Alla esquissent le bilan de deux années de crise sanitaire, lesquelles “ont transformé le terrain de la santé publique en un champ de ruines”.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
À partir de l'allocution présidentielle du 12 juillet 2021, annonçant la mise en place d'un «pass» qui conditionnait, pour toute la population de plus de douze ans, la poursuite de la vie sociale à son statut sanitaire, nous basculions dans un nouveau type de société. La partition manichéenne sur les choses, qui s'était déclinée en une série de totems et de tabous («je suis pour le vaccin », « pour le masque », «pour les mesures sanitaires »), mutait en un affrontement entre les personnes, qui allait miner l'ensemble de la société allant jusqu'à séparer les amis, diviser les couples et les familles et fracturer les collectifs de travail, les associations et les partis. Appliquant à la lettre les leçons du juriste allemand Carl Schmitt, pour qui l'opposition entre amis et ennemis était au fondement de la communauté politique, le dispositif du «pass» allait contraindre l'ensemble de la société à se recomposer autour de deux camps : celui hégémonique du chef et de ses partisans et celui des ennemis de l'intérieur, condamnés au silence et à la dissidence jusqu'à ce que le pouvoir parvienne à les « réduire » : « C'est une toute petite minorité qui est réfractaire. Celle-là, comment on la réduit? [...] [Puisque] je ne vais pas les mettre en prison, [ni les] vacciner de force, [...] on la réduit, pardon de le dire, comme ça, en l'emmerdant encore davantage». Au lieu d'une bataille présidentielle opposant le gouvernement à ses oppositions, qui aurait été aussi l'heure du bilan et le moment de contempler ensemble le champ de ruines de la crise hospitalière et de tout le secteur de la santé publique, la guerre organisée par le Président dessinait deux camps : ceux qui acceptaient de se soumettre au «pass» et à son monde et ceux qui s'y refusaient. Il n'était pas certain que ce plan avait été clairement théorisé par les cabinets de consulting qui, avec McKinsey et la Nudge unit de BVA, gangrenaient les ministères et l'Élysée. Mais le résultat était là. Le schème ami/ennemi sans cesse réactivé par le dispositif du pass, et implémenté sur un mode automatisé dans toutes nos relations sociales tracées par le QR. code, était en train de liquider les principes fondamentaux de notre République.
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(finalement, le vaccin n'empêchait pas les contaminations, il ne permettait pas d'atteindre l'immunité de groupe, il ne pourrait ni éradiquer le virus ni bloquer la survenue de mutations et à ce titre, il ne protégeait pas les autres), et au moment où son efficacité individuelle contre l'infection semblait diminuer face aux nouveaux variants, certains experts commençaient à reconnaître que le dispositif du "pass" avait créé un faux sentiment de sécurité pouvant encourager la reprise des contaminations. Et d'autres se demandaient tout haut si ces nouveaux vaccins n'étaient pas plutôt des "médicaments", dont les injections répétées risquaient peut-être, on ne savait pas, de déclencher de graves réactions immunitaires dans l'organisme.
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Présenter "le vaccin" comme une valeur absolue et l'élire comme "l'unique moyen de sortir de la crise" était une erreur massive d'appréciation, substituant au raisonnement scientifique et médical une approche morale et militante, aussi peu rigoureuse que celle qui présentait le vaccin comme le mal absolu.
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En s'enfermant dans l'hyper-spécialisation de l'expertise, les scientifiques fournissaient malgré eux des fragments de savoir au service du pouvoir. Si le gouvernement souhaitait reconfiner le pays, il faisait appel aux infectiologues et aux épidémiologistes. S'il souhaitait lever les mesures, il convoquait les pédiatres ou les psychiatres.
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Le "pass" était l'expression d'un monde et l'emblème d'une politique : celle dans laquelle les autorités pouvaient directement modifier, par des applications numériques, la définition des droits et des devoirs de chaque citoyen.
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Vidéo de Barbara Stiegler
Spécialiste du rapport entre la politique et la biologie, Barbara Stiegler s'est intéressée aux origines du néolibéralisme, portées notamment par une injonction à l'adaptation, issue du lexique biologique de l'évolution. Dans cet entretien par Olivier Berruyer pour Élucid, elle revient sur ce qui caractérise notre régime politique, et en tire les conséquences pour la « démocratie » : dans un monde néolibéral, le pouvoir (la souveraineté) ne peut pas appartenir au peuple. En ce sens, l'ère d'Emmanuel Macron se présente comme une forme archétypale de ce régime à bout de souffle et fortement contesté.
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