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Danièle Robert (Traducteur)
EAN : 9782330134266
320 pages
Actes Sud (04/03/2020)
3.79/5   7 notes
Résumé :
En l’an 8 de notre ère, Ovide doit s’exiler sur ordre de l’empereur Auguste. Il ne reviendra jamais à Rome : il mourra à Tomes à l’âge de soixante ans. Durant près de dix ans, il écrira aux siens, à l’empereur, et ses lettres sont parmi les œuvres les plus poignantes que la littérature ait produites : d’abord Tristia (Les Tristes) puis Epistulæ ex Ponto (Les Pontiques). Cris de douleur, d’amour, de révolte, ces poèmes épistolaires parlent aujourd’hui à tous les être... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ovide fut condamné par l'Empereur Auguste à la relégation vers l'an 8 après Jésus-Christ pour une double faute. Il avait écrit L'art d'aimer, poésie jugée à l'époque contraire à la politique de restauration morale d'Auguste, oeuvre trop permissive, peut-être même à la limite de la pornographie. L'autre faute fut d'avoir été témoin de quelque chose qu'il n'aurait pas dû voir, mais on ne peut vraiment savoir quels furent ce regard ou cette découverte.
J'ai apprécié les lettres adressées à son épouse Fabia, sous forme élégiaque.
Il y décrit les angoisses et tourments de son exil, rappelle son amour pour Fabia, ses recommandations, les sentiments qui l'animent, il il lui demande même et surtout de verser des larmes pour lui et même de se considérer comme sa veuve. Car c'est par cette douleur et ces larmes partagées, par cette compassion que le poète se sentira moins seul et moins désespéré. Il lui confie ses regrets et ses espoirs, tout cela avec une maîtrise du style remarquable où n'est pas absente une certaine modernité. un sentiment d'immédiateté et d'universalisme.
Ovide injustement condamné, par conformisme ! Ô tempora ! Ô mores !
Notre époque contemporaine, en comparaison, devrait rougir de ses productions littéraires neuf fois sur dix décadentes et inanes !!!
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Cette critique ne porte que sur les Tristes, je n'ai pas lu les Pontiques, un deuxième recueil écrit après par Ovide où il reprend les mêmes thématiques.
Le titre l'indique, le recueil est placé sous le signe de la tristesse. Les poèmes sont écrits sous forme de lettres adressées à sa femme, à ses amis, à Rome elle-même, à son propre livre poétique. Ce sont des élégies, "chants tristes" en grec ancien, où le poète exprime ses sentiments. Ici, Ovide ne parle pas de façon générale, ce n'est pas un "Je" de convention, il ne prête pas non plus ses mots à des héros mythologiques comme il a pu le faire dans les Héroïdes, il parle en son nom, ce sont ses propres sentiments, il pleure sur lui-même, d'après sa propre vie.
En effet, Ovide est exilé, loin de Rome, sur décision de l'Empereur. Ce n'est pas en lisant le recueil que l'on apprend pourquoi, il se contente de quelques allusions à "un secret qu'il n'aurait pas dû voir", un "mystère qu'il n'aurait pas dû révéler". Il est donc inquiet, angoissé même, par le long et périlleux voyage qu'il a dû accomplir, traversant la mer, étant malade, menacé d'être attaqué par des barbares.
Car Ovide est exilé loin de Rome - entendu au sens de l'Empire romain : il est à la frontière la plus éloignée de l'Empire, qui est la frontière de la civilisation pour lui, et donc la frontière du monde connu. C'est d'ailleurs assez intéressant à lire d'un point de vue historique : Ovide décrit des peuples barbares au sens propre, ceux qui ne parlent ni latin ni grec, qui ont des coutumes étranges, qui sont les ennemis de l'Empire. le climat lui-même suggère la fin du monde, un climat de tempêtes, de glace et de neige perpétuelles.
Mais l'élégie renvoie aussi au désespoir amoureux. Il en reste quelques éléments ici, dans la mesure où Ovide pleure ceux qu'il aime : sa femme comparée à Pénélope car tenant le foyer et l'attendant dans l'angoisse, ses amis qui l'ont défendus, mais, peut-être surtout, sa patrie, Rome, qu'il quitte en sachant qu'il ne la reverra jamais.
Un poète reste un poète, et pour exprimer sa souffrance, Ovide passe par l'écrit, pour transformer ses douleurs personnelles en oeuvre universelle.
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Les Tristes et les Pontiques sont des oeuvres d'exil, dans lesquelles Ovide à la fois pleure sa patrie et sa vie perdues, et proclame son regret d'avoir commis la « faute » qui l'a fait envoyer en exil par Auguste. de cette faute, nous ne savons rien. Il l'évoque rarement, de façon allusive : ses yeux auraient vu ce qu'ils ne devaient pas voir.
Les Tristes et les Pontiques nous offrent une vision impitoyable du pouvoir absolu et de l'absolue (et inutile) soumission pour revenir en grâce. Ovide chante les louanges d'Auguste, le compare à Jupiter, le remercie de ne pas l'avoir foudroyé davantage ; il rampe. Dans les Pontiques (plus exactement : Lettres du Pont), il écrit à ses amis pour les conjurer d'intercéder en sa faveur. Certains l'ont abandonné lors de sa disgrâce, d'autres correspondent avec lui mais ne veulent pas que cela se sache. A eux il pardonne, et écrit en laissant anonyme le destinataire d'une de ses lettres :
"Et je ne dirai pas qui tu es à moins que tu ne m'y autorises ;
Je ne contraindrai personne à accepter mes cadeaux.
Quant à toi, s'il te paraît dangereux d'aimer sans risque,
Celui que tu pouvais aimer ouvertement, aime-le en secret."
Il décrit le petit autel qu'il a installé chez lui, avec les statuettes de la famille impériale divinisée, auxquelles il rend un culte. Il prie, il supplie qu'on lui pardonne, ou du moins qu'on l'exile plus près de Rome, plus loin des barbares. Rien n'y fera : ni Auguste ni Tibère n'allégeront sa peine, il mourra en exil et sera enseveli en terre étrangère.
Car Ovide est banni aux confins du monde romain (à six mois de route et de bateau de Rome, tout de même !), dans une région qui n'est pas totalement pacifiée, à Tomes, l'actuelle Constanţa en Roumanie. C'est un arrachement total, culturel, familial, amical. Ovide se voit comme déjà mort : il dit à un de ses amis de « le compter aussi parmi les défunts ». On n'y parle pas latin, ou à peine, on y massacre la langue grecque. Ovide apprend d'ailleurs la langue de l'exil, le Gète, et a parfois du mal à retrouver les mots de sa propre langue quand il écrit. le peuple environnant porte des braies, et non la toge romaine civilisée, se couvre de peaux de bêtes pour se tenir chaud, car la mer Noire et l'Hister (le Danube) gèlent en hiver. On marche sur l'eau, nous dit Ovide. Aux alentours la guerre rôde. Les ennemis lancent des flèches dont la pointe est trempée dans du venin de serpent.
Quant à l'écriture d'Ovide, il est toujours difficile de parler d'une traduction. Mais on repère tout de même le bercement du distique élégiaque, ce groupe de deux vers, l'un plus long que l'autre, semblable au ressac de la plainte, et la chute des différents poèmes touche au coeur. La langue est aussi plus simple et moins savante que dans les Métamorphoses, par exemple, avec des métaphores tirées de la vie quotidienne, ou des références aux mythes (Méduse) qui expriment la douleur d'Ovide : « Moi je suis celui qui en vain voudrait être une pierre ».
Ovide se voit tout de même comme un grand poète, mais il est déchiré entre son orgueil d'écrivain et son regret d'avoir écrit, surtout L'art d'aimer, mis à l'index par Auguste. Il fait parler ses poèmes à la première personne, les envoie à Rome à sa place, ambassadeurs de sa douleur. Il promet l'immortalité de ses vers à sa femme et à tous ceux qu'il chante, tout en sachant qu'à lui, cela n'apportera rien : c'est comme s'il était célèbre dans la constellation des Pléiades, dit-il… Et nous qui le lisons et compatissons, nos savons que cela ne le ressuscitera pas. Mais nous le lisons.

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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
A quoi sert de planter un couteau dans un corps déjà mort ?
Il n'y a plus en moi de place pour une plaie nouvelle

(Derniers vers)
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Vidéo de  Ovide
"Le voyage de Chihiro", sorti en 2001 au Japon, est un film sous le signe de la métamorphose, un voyage chez les morts et dans l'imaginaire fantastique japonais. Miyazaki est-il l'Ovide du cinéma d'animation ? Est-ce de l'errance que naissent les meilleures expériences ?
Dans ce sixième épisode, Adèle van Reeth reçoit Hervé Joubert-Laurencin, professeur en études cinématographiques à l'université de Paris Nanterre.
"Philosopher avec Miyazaki", c'est une série de podcasts en huit épisodes qui revisite huit films du génial Hayao Miyazaki. Vent, enfants, personnages étranges, nature, animaux, machines, guerre... Chacune de ses oeuvres offre de multiples niveaux de lecture et renferme de grandes notions philosophiques.
Pour en savoir plus : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-philosopher-avec-miyazaki
Découvrez aussi notre vidéo sur ce génie de l'animation : https://youtu.be/sFGMoBpO2S4?si=W26ErDQByCq3FU7a
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